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23/03/2011 | FRANCE | N°09/00846

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15ème chambre, 23 mars 2011, 09/00846


Code nac : 80A 15ème chambre

ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 23 MARS 2011
R. G. No 09/ 00846
AFFAIRE :
Francis X...

C/ S. A CANAL +

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 30 Décembre 2008 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT Section : Activités diverses No RG : 08/ 00318

Copies exécutoires délivrées à :

Me Gilles ALBOUY Me Eric MANCA

Copies certifiées conformes délivrées à :

Francis X...
S. A CANAL +
LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel

de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Francis X... ... 92600 ASNIERES SUR SEINE représenté...

Code nac : 80A 15ème chambre

ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 23 MARS 2011
R. G. No 09/ 00846
AFFAIRE :
Francis X...

C/ S. A CANAL +

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 30 Décembre 2008 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT Section : Activités diverses No RG : 08/ 00318

Copies exécutoires délivrées à :

Me Gilles ALBOUY Me Eric MANCA

Copies certifiées conformes délivrées à :

Francis X...
S. A CANAL +
LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Francis X... ... 92600 ASNIERES SUR SEINE représenté par Me Jean-Michel DUDEFFANT, avocat au barreau de PARIS

APPELANT
**************** S. A CANAL + 1, PLACE DU SPECTACLE 92863 ISSY LES MOULINEAUX CEDEX 09 représentée par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS

INTIMMEE ****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller chargé (e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller, Madame Nicole BURKEL, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,

Par jugement contradictoirement prononcé le 30 décembre 2008, dans un litige opposant monsieur X... à la société CANAL +, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt, section activités diverses, a :

- dit que le salaire de monsieur X... est de 1. 918, 65 euros,- requalifié les contrats à durée déterminée conclus entre monsieur X... et la société CANAL +, du 17 octobre 2005 au 2 juin 2007 en un contrat à durée indéterminée, En conséquence,- condamné la société CANAL + à verser à monsieur X... les sommes suivantes : * 1. 918, 65 euros à titre d'indemnité de requalification sur le fondement de l'article 1245-2 du code du travail, * 1. 918, 65 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, * 191, 86 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, * 450, 17 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, * 4. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail, * 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné la société CANAL + à remettre à monsieur X... sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document dans les 15 jours suivant la notification de la décision limitée à 30 jours, un certificat de travail, une attestation ASSEDIC, les bulletins de paie conformes au présent jugement,- débouté monsieur X... du surplus de ses demandes,- débouté la société CANAL + de sa demande reconventionnelle,- condamné la société CANAL + aux éventuels dépens d'instance

La cour est régulièrement saisie d'un appel formé par monsieur X... contre cette décision, le 26 février 2009, l'appel portant sur la totalité de la décision.
Initialement appelée à l'audience du 2 décembre 2009, l'affaire a été renvoyée à celle du 2 juin 2010, puis à celle du 29 novembre 2010.
*** Monsieur Francis X..., né le 20 octobre 1964, a conclu avec la société CANAL + plusieurs contrats à durée déterminée d'usage à compter du 17 octobre 2005, en qualité d'électricien/ éclairagiste au salaire moyen de 1. 918, 65 € pour la saison 2005/ 2006 et la saison 2006/ 2007. Il était affecté au titre de l'émission : " Exploitation " ou " Production ".

La société CANAL + a considéré que le dernier engagement de monsieur X... avait pris fin le 2 juin 2007 au soir.
L'entreprise emploie au moins onze salariés.
Le salaire mensuel brut moyen était de 1. 639, 16 euros.
Monsieur X..., âgé de 42 ans lors de la rupture, n'a pas retrouvé d'emploi à durée indéterminée équivalent à celui qu'il avait selon ses sires, avec la société CANAL +. *** Monsieur X..., appelant, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demande à la cour de :

- dire monsieur X... recevable et bien fondé en son appel, Y faisant droit et infirmant partiellement le jugement entrepris :- requalifier la relation de travail ayant lié monsieur X... à la société CANAL + en un contrat à durée indéterminée à compter du 17 octobre 2005,- condamner en conséquence la société CANAL + à payer à monsieur X... : * 5. 755, 95 à titre d'indemnité de requalification (article L. 1245-2 du code du travail), * 3. 837, 30 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 383, 73 euros d'incidence congés payés, * 1. 918, 65 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, * 34. 535, 70 à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,- ordonner la remise d'une attestation ASSEDIC et d'un certificat de travail rectifié ainsi que du bulletin de paie correspondant aux condamnations prononcées sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document,- condamner également la société CANAL + à payer la somme supplémentaire de 1. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre la somme de 850 euros déjà allouée en première instance de ce chef

Le salarié reproche aux premiers juges de l'avoir débouté d'une partie de ses demandes, soutient que les contrats conclus sont manifestement irréguliers, que les contrats signés ont été régularisés postérieurement à l'exécution même du travail et ne comportent au surplus aucun motif précis, alors qu'il s'agit d'une mention obligatoire au terme de l'article V 4. 1 de l'accord collectif national produit par la société Canal +, qu'il s'agit de contrats-types, que l'absence de tout contrat écrit pendant la période de mai (9 jours) et le 2 juin 2007 lui ont entraîné le droit à la requalification de la relation de travail en CDI avec toutes les conséquences de droit en résultant, que le licenciement doit être qualifié d'abusif ouvrant droit aux indemnités afférentes.

La société CANAL +, intimée, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demande à la cour de :

- A titre principal, Infirmer le jugement et débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes-A titre subsidiaire, Confirmer le jugement en toutes ses dispositions

L'employeur réplique que la programmation est évolutive d'une année à l'autre, que la législation permet une dérogation aux entreprises du secteur de l'audiovisuel en leur permettant de conclure des contrats à durée déterminée dits d'usage, que chaque engagement était remis à M. X... au premier jour de sa collaboration, comme en témoigne chacune des lettres d'engagement dûment signée par ledit salarié, que Canal + n'était pas et n'a jamais été l'employeur principal de M. X..., que celui-ci ne démontre pas qu'il restait à sa disposition permanente, que la société, par courrier du 12 octobre 2005, n'a pas donné suite à sa candidature à un poste de Technicien supérieur d'exploitation Lumière, poste permanent par nature, que selon la cour de cassation, le recours au CDD d'usage dans le secteur de l'audiovisuel, validé au niveau national par les partenaires sociaux, est possible si les deux conditions suivantes sont réunies : que le contrat soit conclu dans le secteur de l'audiovisuel (art. D 1242-1 du code du travail), qu'il existe un usage constant de recourir à l'emploi à durée déterminée dans ce secteur d'activité, qu'en l'espèce, il est constant pour l'emploi d'électricien/ éclairagiste, secteur de l'audio-visuel, de recourir au CDD d'usage (accords collectifs du 12 octobre 1998 étendus le 15 janvier 1999 à l'ensemble du secteur de l'audiovisuel, avenant d'intermittent à la convention collective d'entreprise Canal + le 3 mai 1999, accord collectif du 12 avril 2000 dit " intermittents techniques ", accord collectif national le 22 décembre 2006), que du fait des conditions d'intervention de M. X..., celui-ci ne pouvait confondre sa qualité d'intermittent technique, par nature précaire, avec l'exercice d'une relation pérenne de travail, qu'il s'est toujours vu remettre pour chaque intervention, des lettres d'engagement le fixant expressément sur son statut d'intermittent, que le salarié ne peut exciper abusivement d'une absence de signature sur ses trois derniers engagements.

MOTIFS DE LA DECISION

-Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée
Considérant que s'il résulte de la combinaison des articles L. 122-1, L. 122-1-1, L. 122-3-10, alinéa 2, et D. 121-2 devenus L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1244-1 et D. 1242-1 du code du travail que dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ;
Considérant en l'espèce, que M. X... a été engagé par la société Canal + en qualité, d'électricien/ éclairagiste dans le cadre de la grille de programmes annuels (saison 2005-2002 et saison 2006-2007), en vertu de contrats à durée déterminée successifs conclus entre le 17 octobre 2005 et le mois d'avril 2007, à l'exception des mois de décembre 2005 et janvier 2006, affecté au titre de l'émission : " Exploitation " ou " Production ", produite par la société Canal +, et effectuant entre 3 et 13 jours de travail par mois ;
Qu'il convient de rechercher si l'utilisation pendant cette période, de contrats à durée déterminée successifs, était justifiée par l'existence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi d''électricien/ éclairagiste occupé par M. X... ;
Que si l'audiovisuel figure parmi les secteurs visés à l'article D 121-2 du code du travail, cette mention ne supprime pas cependant l'exigence figurant à l'article L 122-1-1 du code qui prévoit que cet usage constant résulte de la nature de l'activité et du caractère temporaire de l'emploi ;
Considérant que le descriptif du poste de Technicien supérieur d'exploitation Lumière précise que sa mission est de préparer l'ensemble du matériel d'éclairage plateau et coordonner l'activité de l'électricien-éclairagiste intermittent ;
Qu'ainsi, pour la journée du 28 mai 2007, la société Canal + a confié pour ses différentes émissions, l'activité d'électricien-éclairagiste à 11 salariés, dont M. X... pour la tranche horaire 5. 30/ 14. 30 " actu Itélé " ;
Que l'intervention de M. X... auprès de la société intimée a été ininterrompue du 17 octobre 2005 au 2 juin 2007, sauf au mois de décembre 2005 et de janvier 2006 ;
Qu'il y a eu absence de tout contrat écrit pendant la période de mai (9 jours) et le 2 juin 2007 ;
Que la répétition systématique de l'engagement, aux mêmes fonctions techniques et selon les mêmes conditions contractuelles (forfait jour 8h ou 10h) au vu de l'ensemble des engagements produits, autre que pour la période susrappelée, démontre que l'emploi du salarié en qualité d'électricien/ éclairagiste n'était pas par nature temporaire, ni occasionnel
Considérant que l'engagement de M. X... en qualité d'électricien-éclairagiste, à caractère technique, a eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise au vu de la classification des emplois des fonctions de l'activité production énoncée dans l'accord national professionnel interbranche du 12 octobre 1998 relatif au recours au contrat à durée déterminée d'usage dans le spectacle, étendu par arrêté du 15 janvier 1999 et alors que la société intimée ne démontre pas que le recours à un contrat CDD est justifié en l'espèce au sens de l'article I. 2 de l'accord collectif national branche de la télédiffusion, c'est-à-dire que pèse sur cette activité des incertitudes quant à sa pérennité ou qu'elle a un caractère exceptionnel ou événementiel ou qu'elle requiert des compétences techniques ou artistiques spécifiques, étant ajouté que le caractère temporaire de la programmation est inopérant ;
Que l'ensemble de ces éléments fait ressortir l'absence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi d'électricien/ éclairagiste occupé par M. X... ;
Que la rupture de la collaboration imputable à l'employeur s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse comme le soutient le salarié ;
Que c'est donc à juste titre que le jugement déféré a requalifié en contrat à durée indéterminée la relation de travail intervenue entre M. X... et la société Canal +, que la rupture, intervenue pour un motif illégitime, à l'initiative de l'employeur, est nécessairement abusive ;
- Sur les demandes indemnitaires de M. X...
* indemnité de requalification prévue à l'article L 1245-2 du code du travail prévoyant une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois (anciennement, article L 122-3-13)
Considérant que le jugement déféré sera confirmé sur le quantum alloué, soit la somme de 1. 918, 65 €, le salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté ;
* indemnité compensatrice de préavis, de congés payés y afférents
Considérant que le jugement déféré sera confirmé sur le quantum alloué ;
* indemnité conventionnelle de licenciement
Considérant que le jugement déféré sera infirmé sur le quantum et il sera alloué la somme de 1. 918, 65 € ;
*indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (article L 1235-5 du code du travail)
Considérant que le salarié totalisait 19 mois de collaboration et était âgé de 42 ans au jour de son dernier engagement ; que celui-ci sollicite l'équivalent de 18 mois de salaire en faisant valoir un préjudice de carrière et moral ainsi qu'un préjudice financier, étant en fin de droit et ayant en outre la qualité de travailleur handicapé ;
Que les premiers juges ont accordé la somme de 4. 000 €, précisant que le salarié travaillait aussi pour d'autres employeurs, la société Canal + n'ayant pas été le principal employeur du salarié ;
Qu'il sera alloué à M. X... au vu des pièces produites, la somme de 7. 800 € de ce chef et le jugement sera infirmé du chef du quantum alloué ;
- Sur la remise des documents sociaux
Considérant que le jugement sera confirmé de ce chef, sans qu'il soit nécessaire de prévoir une astreinte ;
- Sur l'article 700 du CPC
Considérant qu'il sera alloué à M. X... une indemnité de procédure en sus de celle allouée par les premiers juges ;

PAR CES MOTIFS La cour, statuant publiquement et par décision contradictoire,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf au titre du quantum alloué au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse Statuant à nouveau des chefs infirmés,

CONDAMNE la société Canal + à payer à les sommes suivantes :-1. 918, 65 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement-7. 800 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Y ajoutant,
CONDAMNE la société Canal + à payer à M. X... la somme de 900 € au titre de l'article 700 du CPC REJETTE toute autre demande, CONDAMNE la société Canal + aux entiers dépens.

Arrêt-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/00846
Date de la décision : 23/03/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-03-23;09.00846 ?
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