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09/02/2011 | FRANCE | N°10/02487

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15ème chambre, 09 février 2011, 10/02487


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 09 FEVRIER 2011

R. G. No 10/ 02487

AFFAIRE :

Antony X...

C/
S. A. DTP TERRASSEMENT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 29 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de VERSAILLES
Section : Activités diverses
No RG : 09/ 00121

Copies exécutoires délivrées à :

Me Samuel GAILLARD
Me Pascal BATHMANABANE

Copies certifiées conformes délivrées à :



Antony X...

S. A. DTP TERRASSEMENT

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAIL...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 09 FEVRIER 2011

R. G. No 10/ 02487

AFFAIRE :

Antony X...

C/
S. A. DTP TERRASSEMENT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 29 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de VERSAILLES
Section : Activités diverses
No RG : 09/ 00121

Copies exécutoires délivrées à :

Me Samuel GAILLARD
Me Pascal BATHMANABANE

Copies certifiées conformes délivrées à :

Antony X...

S. A. DTP TERRASSEMENT

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Antony X...
...
...
HONG KONG-CHINE

représenté par Me Samuel GAILLARD, avocat au barreau de PARIS

APPELANT
****************

S. A. DTP TERRASSEMENT
1 avenue Eugène Freyssinet
" Challenger "
78065 SAINT QUENTIN EN YVELINES

Monsieur Jean Christophe Y... muni d'un pouvoir représente la société

représentée par Me Pascal BATHMANABANE, avocat au barreau de PARIS

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 13 Décembre 2010, en audience publique, devant la cour composé (e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Nicole BURKEL, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANEEXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Monsieur Antony X... a été engagé par le GIE BOUYGUES CONSTRUCTION ACHAT par contrat à durée indéterminée, à effet du 21 janvier 2002 en qualité d'acheteur junior, statut cadre, position A.

Monsieur X... a conclu un contrat de travail avec la société DTP TERRASSEMENT, filiale du groupe BOUYGUES, le 24 janvier 2007 à effet du 1er mars 2007, avec reprise d'ancienneté, en qualité de " chef de service adjoints achat ", position B4.

Il était affecté à Hong Kong, ses conditions d'expatriation étant définies par des annexes à son contrat de travail en date du 24 janvier 2007 pour l'année 2007 et 1er février 2008 pour l'année 2008.

Par courrier du 7 novembre 2008, suite à un entretien tenu la veille, le directeur des ressources humaines de la société DTP TERRASSEMENT a demandé à Monsieur X... " de prendre les dispositions pratiques pour organiser (son) retour en France, à une date à convenir ensemble aux alentours du 31 décembre 2008 ".

Monsieur X... refusait sa nouvelle affectation au 1er janvier 2009, par courrier du 27 novembre 2008, invoquant notamment la brièveté du délai de prévenance, le manque de précision sur le poste proposé et le fait que sa compagne actuelle travaille à HONG-KONG ; Monsieur X... s'entretenait avec le directeur des ressources humaines le 6 janvier 2008 ; par courrier du 10 décembre 2008, Monsieur X... maintenait sa décision de refus, indiquant que les conditions dans lesquelles sa pré-affectation sur le bureau de PARIS étaient exclusives d'une exécution loyale et de bonne foi du contrat de travail, et qu'il s'agissait d'un licenciement économique programmé sous couvert d'un motif personnel ; par courrier du 8 janvier 2009, la société DTP TERRASSEMENT mettait en demeure Monsieur X... de prendre son poste de travail (au siège de " Challenger ", selon la société).

Par courrier du 23 janvier 2009, il prenait acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société DTP TERRASSEMENT.

L'entreprise employait au moment des faits au moins onze salariés ; la convention collective applicable est celle des travaux publics.

Le salaire mensuel brut moyen de Monsieur X... était en dernier lieu de 6. 110 €.

Par jugement contradictoirement rendu le 29 mars 2010, dans le litige opposant Monsieur X... à la société DTP TERRASSEMENT, le conseil de prud'hommes de VERSAILLES a :

- dit que la prise d'acte par Monsieur X... de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société DTP TERRASSEMENT doit s'analyser en une démission,

- débouté, en conséquence, Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- reçu la société DTP TERRASSEMENT en sa demande reconventionnelle,

- condamné Monsieur X... à lui régler la somme de 12. 117 € à titre d'indemnité pour non respect du préavis,

- débouté Monsieur X... et la société DTP TERRASSEMENT de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- laissé les dépens à la charge de Monsieur X....

La Cour est régulièrement saisie d'un appel formé par Monsieur X... contre cette décision.

Monsieur X..., par écritures visées par le greffier et soutenues oralement a formulé les demandes suivantes :

- infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes le 29 mars 2010,

Statuant à nouveau,

- condamner la société DTP TERRASSEMENT à lui verser les sommes suivantes :

-4. 560, 86 € au titre du solde de salaire pour janvier 2009,

-456, 08 € au titre des congés payés sur solde de salaire,

-18. 441, 17 € au titre du préavis,

-1. 844, 17 € au titre des congés payés sur préavis,

-9. 400 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-73. 767, 12 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- subsidiairement, condamner la société DTP TERRASSEMENT à lui verser la somme de 108, 470, 01 € pour exécution déloyale du contrat de travail et légèreté blâmable,

- ordonner l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du Code de procédure civile,

- condamner la société DTP TERRASSEMENT à lui verser la somme de 4. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société DTP TERRASSEMENT aux entiers dépens.

La société DTP TERRASSEMENT par écritures visées par le Greffier et soutenues oralement a demandé à la Cour de :

- dire que les moyens invoqués par Monsieur X... à l'appui de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail ne sont fondés ni en fait ni en droit,

- dire que la rupture du contrat de travail par Monsieur X... produit donc les effets d'une démission,

- débouter, en conséquence, Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Monsieur X... au paiement d'une indemnité pour non exécution du préavis à hauteur de 12. 117 € correspondant à trois mois de rémunération,

- confirmer, en conséquence, le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- condamner Monsieur X... aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que " lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits
qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission " ;

Qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve de la réalité des griefs qu'il invoque à l'encontre de son employeur pour justifier la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de celui-ci ;

Considérant que la lettre de prise d'acte de rupture est rédigée dans les termes suivants :

" Je fais suite à votre dernier courrier du 8 janvier dernier, envoyé à l'adresse de mon père au.... Vous avez indiqué dans votre courrier qu'une copie était adressée à mon adresse actuelle, mais je n'ai toujours rien reçu à ce jour...

Ce n'est donc qu'hier, 22 janvier, que j'ai pris connaissance de cette lettre par laquelle vous me mettez en demeure de " bien vouloir prendre mon poste de travail ".

Malgré mon dernier courrier du 10 décembre 2008, vous n'avez même pas cru bon de prendre contact avec moi. Votre courrier du 8 janvier ne contient pas la moindre réponse aux éléments que j'invoquais dans ce courrier...

Je prends donc acte de la rupture de mon contrat de travail à vos torts exclusifs, pour les raisons invoquées dans mon précédent courrier.

J'ai donné instruction à mon conseil de saisir le Conseil de Prud'hommes de SAINT QUENTIN EN YVELINES.

Croyez que je regrette que nos relations se terminent de cette manière. "

Que la lettre du 10 décembre 2008 qui mentionne en fait les griefs du salarié est ainsi libellée :

" Je fais suite à votre denier courrier du 6 décembre dernier.

Je ne peux que regretter la tournure des événements, puisque vous ne souhaitiez manifestement prendre aucun compte de mon précédent courrier du 27 novembre 2008 et des préoccupations que je vous avais exprimées, et que mon licenciement semble donc d'ores et déjà programmé.

N'ayant pas d'autre choix que de me porter ainsi sur le terrain juridique, je conteste en conséquence votre décision de me réaffecter sur PARIS le 5 janvier prochain.

En effet, la clause de mobilité prévue au sein de mon contrat de travail n'est pas précisément définie puisqu'elle porte notamment " dans tout autre pays où la société exerce et exercera ses activités ". Elle est donc incontestablement entachée de nullité au regard de la jurisprudence récente de la Cour de Cassation, et notamment au regard des arrêts des 7 juin 2006 (P. No04-45846) et 19 mai 2004 (P. No 02-43252). En l'absence de clause de mobilité valable, mon changement d'affectation constitue en conséquence une modification de mon contrat de travail, que je suis en droit de refuser.

Par ailleurs, suite à une recherche dans les correspondances d'emails, j'ai maintenant la preuve que la décision de fermer le bureau de Hong-Kong a été prise, au plus tard, dans le courant du mois d'août dernier. J'ai été tenu à l'écart d'une telle décision et plus étonnant, il m'a été demandé de recruter un collaborateur en juillet 2008. Ce n'est que début novembre qu'il m'a été imposé de retourner travailler en France, soit avec un délai de préavis de moins de deux mois, alors que la direction de l'entreprise sait parfaitement que je vis actuellement en concubinage avec une jeune femme Hong kongaise. Les conditions dans lesquelles ma " réaffectation " sur le bureau de PARIS est intervenue est donc exclusive d'une exécution loyale et de bonne foi de mon contrat de travail par BOUYGUES CONSTRUCTION.

Dans un contexte de réduction de l'activité économique liée à la crise actuelle, et au regard de la manière dont se déroulent les choses, j'ai la désagréable impression de faire l'objet d'un licenciement économique programmé sous couvert d'un motif personnel.

Je n'entends donc pas rester sans réagir, et compte bien faire valoir mes droits.

J'espère que vous comprendrez ma position, et reste bien évidemment ouvert à toute discussion sur le sujet. "

Considérant que l'affectation à Hong-Kong de Monsieur X... résulte de la conclusion d'un avenant d'expatriation annexé à son contrat de travail conclu le 24 janvier 2007 à effet au 1er mars 2007 pour une durée déterminée expirant au 31 décembre 2007 laquelle devait être renouvelée par un second avenant jusqu'au 31 décembre 2008 ;

Considérant que si Monsieur X... invoque la nullité de la clause de mobilité prévu au contrat de travail selon lui imprécise, il n'en résulte pas moins de l'article 6. 2. 4. de la Convention Collective des travaux publics que tous les déplacements supérieurs à trois mois doivent donner lieu à la conclusion d'un avenant au contrat de travail, lequel se substitue au contrat de travail initial qui s'applique à nouveau de plein droit dès le retour en France, et que le contenu de celui-ci est déterminé par les dispositions conventionnelles imposant notamment la mention de la durée prévue du déplacement ;

Considérant que l'expatriation de Monsieur X... à Hong-Kong a été conclu en parfaite conformité avec les dispositions de la Convention Collective ;

Que Monsieur X... ne peut donc soutenir que son expatriation n'avait pas une durée limitée puisque le premier avenant portait sur la période du 1ers mars 2007 au 31 décembre 2007 et le second avenant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008.

Qu'il s'ensuit que Monsieur X... ne pouvait ignorer que son expatriation prendrait inéluctablement fin le 31 janvier 2008 ;

Que dès lors Monsieur X... n'est pas parti à Hong-Kong en vertu d'une clause de mobilité, mais d'un avenant d'expatriation qu'il a expressément signé puisque conforme à la volonté des parties ; qu'il savait donc parfaitement dès l'origine que son expatriation était temporaire ;

Considérant qu'il est établi qu'à l'issue de trois années de fonctionnement la cellule " achat dans les marchés en développement " (AMD) créé en 2006 à Hong-Kong n'obtenait pas les résultats escomptés, que c'est dans ces conditions que les trois salariés locaux de cette cellule ont été licenciés et que Monsieur X... a été informé le 6 novembre 2008 de son rapatriement en France au terme de sa mission ; que dès lors la fin de l'expatriation en conformité avec les dispositions conventionnelles et les avenants contractuels imposait le retour de Monsieur X... en France et la recherche d'une nouvelle affectation en France ou à l'étranger ;

Qu'il est constant que ce dernier a toujours travaillé pour le GIE ACHATS, que c'est naturellement au sein de la structure BOUYGUES BÂTIMENT ILE de FRANCE que Monsieur X... devait prendre ses fonctions en qualité de responsable des achats sur la structure OPB qui n'était qu'un retour à son entité d'origine ;

Que dès lors toute l'argumentation développée par celui-ci sur un prétendu changement d'employeur qui lui aurait été imposé à son retour en France n'est pas fondé ;

Qu'aucun des éléments produits aux débats n'a établi ni l'existence d'un licenciement programmé pour motif économique, ni une quelconque déloyauté dans l'exécution du contrat de travail ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que Monsieur X... ne peut fonder la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail sur un quelconque manquement de son employeur à ses obligations contractuelles ;

Que dès lors le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'obligation de respecter le délai congé s'impose aux parties au contrat, qu'il s'en déduit que lorsqu'il n'en a pas été dispensé, le salarié qui n'a pas exécuté son préavis doit à l'employeur une indemnité compensatrice ;

Que la prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié peut être condamné à indemniser l'employeur pour non respect du préavis sans que ce dernier doive justifier d'un préjudice particulier ;

Que dès lors le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant qu'il n'est pas contraire à l'équité de laisser à la charge des parties les frais exposés en appel ;

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Reçoit l'appel de Monsieur Antony X... ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Antony X... aux dépens éventuels ;

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/02487
Date de la décision : 09/02/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-02-09;10.02487 ?
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