La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2011 | FRANCE | N°09/04475

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15ème chambre, 26 janvier 2011, 09/04475


COUR D'APPEL DE VERSAILLES

N. B.

Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 26 JANVIER 2011
R. G. No 09/ 04475
AFFAIRE :
S. C. P. Z...- A...-Z... C/ Ghislaine X... épouse Y...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 19 Octobre 2009 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de VERSAILLES Section : Activités diverses No RG : 08/ 00953

Copies exécutoires délivrées à :

Me Véronique TUFFAL-NERSON la SCP ROUMIER et BERNARD

Copies certifiées conformes délivrées à :

S. C

. P. Z...- A...-Z...
Ghislaine X... épouse Y...
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX JANVIER DE...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

N. B.

Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 26 JANVIER 2011
R. G. No 09/ 04475
AFFAIRE :
S. C. P. Z...- A...-Z... C/ Ghislaine X... épouse Y...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 19 Octobre 2009 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de VERSAILLES Section : Activités diverses No RG : 08/ 00953

Copies exécutoires délivrées à :

Me Véronique TUFFAL-NERSON la SCP ROUMIER et BERNARD

Copies certifiées conformes délivrées à :

S. C. P. Z...- A...-Z...
Ghislaine X... épouse Y...
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S. C. P. Z...- A...-Z......... 78288 GUYANCOURT CEDEX

représentée par Me Véronique TUFFAL-NERSON, avocat au barreau de PARIS

APPELANT **************** Madame Ghislaine X... épouse Y...... 78180 MONTIGNY LE BRETONNEUX

représentée par la SCP ROUMIER et BERNARD, avocats au barreau de VAL DOISE
INTIMEE ****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 29 Novembre 2010, en audience publique, devant la cour composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller, Madame Nicole BURKEL, Conseiller,

qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE
FAITS ET PROCEDURE

Attendu que le conseil de prud'hommes de Versailles, section activités diverses, par jugement contradictoire du 19 octobre 2009, a :- requalifié le licenciement de madame X...- Y... en licenciement abusif-condamné la société Z...- A...-Z... à verser à madame X...- Y... les sommes suivantes : * 5. 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif * 1. 387, 99 euros au titre des salaires pendant la période de mise à pied outre 138, 79 euros au titre des congés payés afférents * 5. 039, 02 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 503, 90 euros au titre des congés payés afférents, * 8. 188, 39 euros au titre de l'indemnité de licenciement * 629, 87 euros correspondant au prorata du 13ème mois sur la mise à pied * 419, 91 euros correspondant au prorata du 13ème mois sur le préavis * 1. 364, 73 euros au titre du 13ème mois pour la période du 1er janvier 2008 au 21 juillet 2008 * 8. 000 euros de dommages et intérêts pour non-respect de la vie privée * 1. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile-débouté les parties du surplus de leurs demandes-rappelé que l'exécution provisoire est de droit au titre de l'article R1454-28 du code du travail-dit que les sommes dues produiront intérêts légaux conformément aux articles 1153-1 et suivants du code civil-mis les éventuels dépens à la charge de la société Z...- A...-Z... ;

Attendu que la cour est régulièrement saisie d'un appel formé par la société Z...- A...-Z... contre cette décision ;
Attendu qu'initialement appelée à l'audience du 8 septembre 2010, l'affaire a été renvoyée à l'audience conseiller rapporteur du 29 novembre 2010, suite à une demande de formation collégiale par madame Y... ;
Attendu que madame Y... a été engagée par la société Z...- A...-Z..., cabinet d'avocats, par contrat verbal le 17 juillet 2000 en qualité de premier clerc ; Que son revenu moyen mensuel brut s'est élevé à 2729, 46 euros ;

Attendu que madame Y... a été convoquée à un entretien préalable à licenciement par lettre du 21 juillet 2008 fixé au 5 août 2008, mise à pied à titre conservatoire et a été licenciée par lettre du 8 août 2008 pour faute grave ;
Attendu que la SCP Z...- A...-Z... emploie moins de onze salariés ; Que la convention collective applicable est celle des cabinets d'avocats ;

Attendu que la SCP Z...- A...-Z... demande à la cour par conclusions écrites, déposées, visées par le greffier et soutenues oralement, de :- infirmer le jugement dont appel-débouter madame Y... de l'ensemble de ses demandes-condamner madame Y... à lui rembourser la somme de 15346, 18 euros versée au titre de l'exécution provisoire-condamner madame Y... à lui payer 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens s'il en existe ;

Attendu que madame Y... demande à la cour par conclusions écrites, déposées, visées par le greffier et soutenues oralement, de :- confirmer le jugement et dire et juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse-en conséquence, condamner la SCP Z...- A...-Z... à lui verser : * 1. 387, 99 euros au titre des salaires pendant la période de mise à pied outre 138, 79 euros au titre des congés payés afférents * 5. 039, 02 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 503, 90 euros au titre des congés payés afférents, * 8. 188, 39 euros au titre de l'indemnité de licenciement * 629, 87 euros correspondant au prorata du 13ème mois sur la mise à pied * 419, 91 euros correspondant au prorata du 13ème mois sur le préavis-infirmer le jugement et condamner la SCP Z...- A...-Z... à lui verser 21. 835 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L1235-5 du code du travail-confirmer le jugement et condamner la SCP Z...- A...-Z... à lui verser 1. 364, 73 euros au titre du 13ème mois pour la période du 1er janvier 2008 au 21 juillet 2008- confirmer le jugement et condamner la SCP Z...- A...-Z... à lui verser 8000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée et exécution déloyale du contrat de travail sur le fondement des articles 9 du code civil, L 1222-1 du code du travail et 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales-condamner la SCP Z...- A...-Z... à lui verser 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile-condamner la société au paiement des intérêts légaux avec anatocisme-condamner la société aux entiers dépens ;

Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement ;
MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée et l'exécution déloyale du contrat de travail Attendu que sur papier à entête de la SCP Z...- A...-Z..., avocats associés au Barreau de Versailles, Gérard Z... a signé une lettre le 26 octobre 2007 adressée au maire de Juvisy sur Orge, aux fins d'obtenir « copie intégrale de l'acte de naissance de madame X... épouse Y... née en votre commune le 28 août 1953 » revendiquant la « qualité de mandataire au sens de l'article 194-5 de l'instruction générale relative à l'état civil du 11 mai 1999, publié au Journal Officiel du 28 juillet 1999 », précisant être « dans l'impossibilité de connaître par un autre moyen la filiation de l'intéressée » et devoir « réunir ces éléments dans le cadre de l'accomplissement de ma mission » ; Que cette lettre est produite aux débats suite à l'avis favorable de la CADA du 11 septembre 2008 ; Que madame Y..., affirmant en avoir été informée de la demande par une de ses collègues de travail, par lettre du 16 octobre 2007, a fait opposition à la mairie de toute délivrance à un tiers de la copie intégrale de son acte de naissance et a, par lettre du 23 octobre 2007, interrogé monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats sur la licéité d'une telle demande, sans citer le nom de l'employeur, souhaitant pouvoir conserver son emploi ;

Attendu que la SCP intimée conteste que monsieur Z..., non passionné par l'astrologie et incapable de réaliser un thème astral, ait délibérément entrepris une telle démarche, signant en toute confiance les lettres préparées par son clerc parmi lesquelles a pu figurer cette demande faite suivant un modèle utilisé au sein du cabinet et déduit de l'antériorité de la lettre d'opposition à délivrance par rapport à la demande « un procès d'intention … de nature à porter atteinte à monsieur Gérard Z... » ;
Attendu que d'une part, concernant la manipulation susceptible d'avoir été mise en place par madame Y... ou tout autre salarié pour piéger son employeur, aucun élément ne vient en corroborer l'existence ; Que le fait que la lettre d'opposition à mairie à délivrance d'un acte soit antérieure à la demande de délivrance de l'acte ne permet nullement d'en déduire la réalité d'un stratagème, les explications données par la salariée et les démarches entreprises par cette dernière auprès de monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau de Versailles démontrant le contraire ; Que par ailleurs, madame Y... est présentée comme une collaboratrice consciencieuse, dévouée à ses employeurs ;

Attendu que d'autre part, madame Y... verse aux débats deux attestations d'anciennes collaboratrices du cabinet, avocats, lesquelles sont explicites et confirment les « pratiques peu orthodoxes » de monsieur Z... de commander des extraits d'acte de naissance de ses collaborateurs, à leur insu, pour établissement de leur thème astral ; Que madame Z..., interrogée par les premiers juges, a d'ailleurs reconnu l'intérêt manifesté par son époux pour l'astrologie ;

Attendu que maître Z..., en sa qualité d'avocat, ne pouvait méconnaître les droits et obligations attachées à sa fonction ; Qu'en demandant une copie intégrale d'un acte de naissance d'une de ses salariés, sans avoir reçu mandat exprès de cette dernière, monsieur Z... a abusé de la qualité vraie d'avocat et a commis une tentative de délit d'obtention indue de document administratif prévu et réprimé à l'article 441-6 et 441-9 du code pénal ;

Attendu que le fait pour un employeur de vouloir obtenir la délivrance d'une copie intégrale de l'acte de naissance d'une de ses salariés, sur lequel est susceptible de figurer toutes les mentions marginales relatives à sa filiation, à sa situation matrimoniale, éléments d'informations auquel il ne pouvait avoir accès et nullement nécessaires à l'exercice de son pouvoir de direction, quel que puisse être l'usage ultérieurement fait, constitue une immixtion grave dans la vie privée de cette dernière ; Que cette atteinte à la vie privée a causé nécessairement un préjudice à madame Y... ; Que la cour dispose d'éléments suffisants pour allouer à cette dernière à titre d'indemnisation la somme de 5000 euros ;

Attendu que le jugement entrepris doit être infirmé en ses seules dispositions relatives au montant des dommages et intérêts alloués ;
Sur la rupture des relations contractuelles Attendu que madame Y... a été licenciée pour faute grave par la SCP Z...- A...-Z... par lettre du 8 août 2008 ;

Attendu que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation délibérée des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; Attendu que le licenciement ayant été prononcé pour faute grave présente un caractère disciplinaire ; Qu'il incombe à l'employeur d'établir la preuve de la réalité des motifs énoncés dans la lettre de licenciement qui fixent les limites du litige ;

Attendu que les griefs visés dans la lettre de licenciement s'analysent exclusivement en des griefs d'insuffisance professionnelle, dont il n'est point démontré qu'ils procèdent d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée de la salariée ; Qu'en l'absence de caractérisation d'une quelconque faute, le licenciement prononcé est sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef ;
Sur les conséquences financières de la rupture des relations contractuelles Attendu que la juridiction prud'homale a fait une exacte appréciation des éléments de la cause et des règles juridiques applicables ; Qu'elle a de façon pertinente alloué à madame Y... des rappels de salaires sur mise à pied conservatoire, sur 13ème mois, outre les congés payés y afférents, une indemnité compensatrice de préavis de 2 mois, outre les congés payés y afférents, une indemnité de licenciement, sommes qui ne sont pas contestées en leur montant ;

Attendu qu'au moment de son licenciement, si madame Y... avait plus de deux ans d'ancienneté, l'entreprise employait habituellement moins de onze salariés ; Qu'en application de l'article L. 1235-5 du code du travail, elle peut prétendre à une indemnité en fonction du préjudice subi ;

Attendu que la cour dispose d'éléments suffisants, eu égard à l'âge de la salariée, aux circonstances particulières ayant entouré la rupture des relations contractuelles et aux difficultés de réinsertion professionnelle rencontrées pour obtenir un emploi dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, pour allouer à madame Y... une indemnité définitive devant lui revenir personnellement, pouvant être justement évaluée à la somme de 10. 000 euros ; Que le jugement entrepris sera infirmé de ce seul chef ;

Sur la demande au titre du 13ème mois Attendu que madame Y... est fondé en sa demande en paiement d'un treizième mois au prorata temporis en application de l'article 12 de la convention collective, le licenciement pour faute grave n'étant pas causé ; Que le jugement entrepris est confirmé de ce chef ;

Attendu que les créances de nature salariale seront productrices d'intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande à l'employeur, en application de l'article 1153 du code civil ; Que les autres créances de nature indemnitaire le seront à compter du prononcé du présent arrêt ; Qu'il n'est pas démontré de préjudice spécifique justifiant que le point de départ soit fixé à une date antérieure ;

Attendu qu'en application de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu'elle est régulièrement demandée ; Qu'elle ne peut être ordonnée qu'à compter de la demande qui en est faite et ne peut rétroagir avant cette demande ; Qu'elle peut être demandée pour les intérêts à venir dès lors qu'une année entière sera écoulée ; Qu'il doit être fait droit à cette demande ;

Attendu que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions à l'exception des deux seuls montants de dommages et intérêts alloués pour atteinte à la vie privée et pour rupture abusive du contrat de travail ;
Attendu que les dépens d'appel resteront à la seule charge de la SCP Z...- A...-Z... qui succombe en toutes ses demandes et sera déboutée de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile à son profit ;
Attendu que les considérations d'équité justifient que soit allouée à madame Y... une indemnité de 2500 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt contradictoire Reçoit l'appel

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions à l'exception des deux seuls montants de dommages et intérêts alloués pour atteinte à la vie privée et pour rupture abusive du contrat de travail
L'INFIRME de ces deux chefs
STATUANT A NOUVEAU CONDAMNE la SCP Z...- A...-Z... à payer à madame Y... les sommes suivantes :-5. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée-10. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive

Y AJOUTANT,
DIT que les créances de nature salariale sont productrices d'intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande à l'employeur, en application de l'article 1153 du code civil et les autres créances de nature indemnitaire compter du prononcé du présent arrêt ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil

CONDAMNE la SCP Z...- A...-Z... à payer à madame Y... 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/04475
Date de la décision : 26/01/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-01-26;09.04475 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award