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26/01/2011 | FRANCE | N°09/02826

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15ème chambre, 26 janvier 2011, 09/02826


COUR D'APPEL DE VERSAILLES
N. B.

Code nac : 80A 15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 26 JANVIER 2011
R. G. No 09/ 02826
AFFAIRE :
Nicole X... épouse Y... C/ S. A. R. L. JORCEL SERVICES
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 25 Mai 2009 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de MONTMORENCY
No RG : 08/ 00749

Copies exécutoires délivrées à :
Me Jean-Claude GRIMBERG Me Didier VASSAL

Copies certifiées conformes délivrées à :
Nicole X... épouse Y...
S. A. R. L. JORCEL SERVICES

l

e : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES
N. B.

Code nac : 80A 15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 26 JANVIER 2011
R. G. No 09/ 02826
AFFAIRE :
Nicole X... épouse Y... C/ S. A. R. L. JORCEL SERVICES
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 25 Mai 2009 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de MONTMORENCY
No RG : 08/ 00749

Copies exécutoires délivrées à :
Me Jean-Claude GRIMBERG Me Didier VASSAL

Copies certifiées conformes délivrées à :
Nicole X... épouse Y...
S. A. R. L. JORCEL SERVICES

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame Nicole X... épouse Y... ... 95460 EZANVILLE
comparant en personne, assistée de Me Jean-Claude GRIMBERG, avocat au barreau de VAL D'OISE
APPELANTE
**************** S. A. R. L. JORCEL SERVICES 28/ 30 avenue de Paris 95230 SOISY SOUS MONTMORENCY
représentée par Me Didier VASSAL, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************

Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Décembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant chargé (e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller, Madame Nicole BURKEL, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,
FAITS ET PROCEDURE Attendu que le conseil de prud'hommes de Montmorency, section commerce, par jugement contradictoire du 25 mai 2009, a :- dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail liant madame Y... à la Sarl Jorcel Services-en conséquence, débouté madame Y... de l'ensemble de ses demandes-débouté la sarl Jorcel Services de sa demande reconventionnelle-laissé les éventuels dépens à la charge des parties, chacune pour ce qui la concerne ;
Attendu que la cour est régulièrement saisie par un appel formé par madame Y... ;
Attendu que l'affaire a été appelée aux audiences des 10 mars et 5 octobre 2010 et a reçu nouvelle fixation à l'audience du 1er décembre 2010, les conseils des paries étant indisponibles ;
Attendu que madame Y... a été engagée par la société Jorcel Services le 1er février 1999 par contrat à durée indéterminée en qualité de vendeuse responsable, avec reprise d'ancienneté au 24 novembre 1990 ; Que son revenu mensuel moyen brut s'est élevé à 1770 euros ;
Attendu que madame Y... a été en arrêt de travail suite à un accident du travail du 7 juin 2007 au 30 juin 2008 ; Que le médecin du travail a déclaré madame Y... « apte à la reprise avec une aide en permanence », par avis du 2 juillet 2008 ; Que par avis du 16 octobre 2008, le médecin du travail a déclaré madame Y... « apte au poste, aide pour manutention lourde et répétée et monté des échelles limitée » ;
Attendu que madame Y... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résolution judiciaire de son contrat de travail le 29 août 2008 ; Qu'elle est toujours en poste dans l'entreprise ;
Attendu que l'entreprise emploie plus de 11 salariés et est dotée d'institutions représentatives du personnel ; Que la convention collective applicable est celle des entreprises à succursales de commerce de détail de la chaussure ;
Attendu que madame Y... demande à la cour par conclusions écrites, déposées, visées par le greffier et soutenues oralement, au visa de la convention collective et de l'article L241-10-1 du code du travail, de :- constater la résiliation judiciaire du contrat de travail-débouter la Sarl Jorcel Services de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions-voir la société Jorcel Services à lui payer les sommes suivantes : * 40. 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse * 1143, 37 euros à titre d'indemnité de préavis * 1429, 21 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement * 6860, 22 euros au titre des congés payés * 5000 euros à titre de dommages et intérêts * 2000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile-se voir remettre une attestation Assedic, un certificat de travail, un solde de tout compte sous astreinte de 50 euros par jour de retard-condamner la Sarl Jorcel Services aux dépens ;
Attendu que la Sarl Lorcel Services demande à la cour par conclusions écrites, déposées, visées par le greffier et soutenues oralement, de :- dire et juger qu'il n'y a pas lieu à résolution judiciaire du contrat de travail de madame Y...- confirmer le jugement en toutes ses dispositions-condamner madame Y... à lui verser 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement ;
MOTIFS DE LA DECISION : Attendu que madame Y..., salariée âgée de 60 ans, poursuit son employeur en résiliation judiciaire de son contrat de travail ; Qu'elle soutient que l'employeur ne s'est en rien conformé aux préconisations du médecin du travail ;
Attendu qu'en application de l'article L4624-1 du code du travail, le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs ; Que l'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite ; Qu'en cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail ;
Attendu que d'une part, si madame Y... affirme, suite à l'accident du travail dont elle a été victime le 7 juin 2007, avoir repris son travail le 14 novembre 2007 pour s'arrêter en décembre 2007, l'employeur n'ayant pas respecté les préconisations du médecin du travail, aucun élément n'est versé aux débats concernant les préconisations du médecin du travail durant cette période d'exécution du contrat de travail ;
Attendu que d'autre part, il est établi que le médecin du travail, lors de la visite de reprise du 2 juillet 2008, a déclaré madame Y... « apte à la reprise avec une aide en permanence », la prochaine visite devant avoir lieu dans un délai de 2 mois et lors de la seconde visite du 16 octobre 2008, l'a déclarée « « apte au poste, aide pour manutention lourde et répétée et monté des échelles limitée », la prochaine visite devant avoir lieu dans un délai de 3 mois ; Qu'il n'est justifié d'aucun avis postérieur au 16 octobre 2008 donné par le médecin du travail ; Que le médecin du travail, par lettre du 18 novembre 2008, a explicité à l'employeur les réserves figurant sur son avis du 16 octobre 2008, soulignant leur impérieux respect, mais n'a aucunement modifié ses préconisations ;
Attendu que le médecin du travail dans une attestation du 23 septembre 2008 précise avoir constaté à deux reprises que madame Y... travaillait sans aide dans le magasin, contrairement à ses préconisations du 2 juillet 2008, toujours en vigueur jusqu'au 16 octobre 2008 ; Que trois clientes et une ancienne collègue de travail attestent avoir constaté qu'à la reprise du travail par madame Y..., celle-ci était seule et ne bénéficiait pas d'assistance ; Que l'employeur reconnaît d'ailleurs la réalité de deux journées les 13 et 20 août 2008 où madame Y... a été seule en magasin ; Qu'il résulte de ces documents concordants que du 2 juillet au 16 octobre 2008, l'employeur a omis de respecter les préconisations de la médecine du travail ; Qu'il ne saurait transférer à la salariée, en tant que vendeuse responsable de magasin, la responsabilité de cette absence de programmation sur les plannings de travail d'une aide, alors même qu'il n'est pas établi qu'elle ait pu disposer d'un personnel suffisant pour couvrir les heures d'ouverture du magasin ;
Attendu que concernant la période postérieure au 16 octobre 2008, madame Y... verse aux débats un planning hebdomadaire en vigueur dans le magasin, duquel il résulte que ne travaillent dans cette unité que madame A... Lucinda (à hauteur de 30 heures par semaine) et elle-même (à hauteur de 41 heures par semaine), impliquant pour chaque salariée de longs temps de présence seule en magasin ; Que si l'employeur conteste la pertinence d'un tel planning, dont l'établissement incombe à madame Y... du fait de ses fonctions, il ne produit toutefois aucun élément objectif en infirmant la teneur ; Que ni la production d'une « liste du personnel présent » informatique comptabilisant 3 salariés dans le magasin, sans référence à une quelconque date d'effet, madame Y... soutenant que madame B..., figurant sur ce document, a été en arrêt maladie puis en congé de maternité à compter du 12 août 2008, ni la production d'un avenant au contrat de travail de madame A... Lucinda portant son horaire de travail à 45h30 sur la seule période limitée du 5 au 10 janvier 2009 ne peuvent suffire ; Que s'il est indéniable qu'à compter du 16 octobre 2008, madame Y... n'a plus besoin d'une aide permanente, elle n'est toutefois pas apte sans réserves à exécuter son travail ; Que les réserves du médecin du travail, clairement explicitées dans la lettre du 18 novembre 2008, sont inconciliables avec l'exercice solitaire d'un important temps de travail ;
Attendu que l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés de l'entreprise et doit en assurer l'effectivité en prenant en considération l'ensemble des mesures individuelles préconisées par le médecin du travail ; Qu'il ne justifie aucunement de motifs dirimants faisant obstacle à la prise en considération des préconisations du médecin du travail ;
Attendu que la société Jorcel Services a manqué à son obligation générale de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses salariés issue des articles L4121-1 et suivants et L 4624-1 et suivants du code du travail ; Qu'un tel manquement est d'une gravité suffisante pour justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail de madame Y... aux torts de l'employeur qui emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu qu'à la date d'effet de la rupture de son contrat de travail, madame Y... dispose d'une ancienneté supérieure à deux années, l'entreprise employant habituellement au moins onze salariés ; Qu'en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, elle peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement ;
Attendu que la cour dispose d'éléments suffisants, eu égard à l'âge de la salariée, aux circonstances particulières ayant entouré la rupture des relations contractuelles et des difficultés de réinsertion professionnelle prévisibles, pour allouer à madame Y... une indemnité définitive devant lui revenir personnellement, pouvant être justement évaluée à la somme de 20. 000 euros ; Attendu que madame Y... demande à titre de dommages intérêts supplémentaires une somme de 5000 euros pour préjudice résultant de l'inertie de l'employeur ; Que cette demande ne repose pas sur des fondements juridiques et des faits distincts de ceux retenus pour fixer l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Qu'elle sera déboutée de ce chef de demande ;
Attendu que les demandes formulées par madame Y... relatives à l'indemnité de préavis, l'indemnité de licenciement, dans la limite des demandes présentées, ne sont pas critiquées en leur montant par l'employeur ; Que la société Jorcel Services sera donc condamnée à lui payer à ce titre les sommes respectives de 1143, 37 euros et de 1429, 21 euros ;
Attendu que si madame Y... formule une demande de congés payés à hauteur de 6860, 22 euros, elle n'explicite ni ne justifie ce chef de demande ; Que si elle est susceptible de pouvoir prétendre au versement d'une indemnité compensatrice pour des congés non pris lors de la résiliation de son contrat de travail, elle ne peut réclamer une telle indemnité pour les années antérieures lorsqu'elle n'a pas pris ses congés payés et a travaillé en percevant un salaire ; Que sa carence dans l'administration de la preuve lui incombant doit conduire à la débouter de ce chef de demande ;
Attendu que madame Y... est fondée en sa demande de remise des documents sociaux conformes au dispositif du présent arrêt ; Que le prononcé d'une astreinte ne se justifie aucunement ;
Attendu que le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu que les dépens d'instance et d'appel resteront à la charge exclusive de la Sarl Jorcel Services qui succombe en ses demandes et sera déboutée de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les considérations d'équité justifient que soit allouée à madame Y... une indemnité de 2000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement par arrêt contradictoire Reçoit l'appel
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions
STATUANT A NOUVEAU
PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail de madame Y... aux torts de l'employeur, laquelle emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse
CONDAMNE la société Jorcel Services à payer à madame Y... les sommes suivantes : * 20. 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse * 1143, 37 euros à titre d'indemnité de préavis * 1429, 21 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
DEBOUTE madame Y... de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires et de congés payés
ORDONNE à la Sarl Jorcel Services de remettre à madame Y... les documents de travail (bulletins de paye, attestation Assedic, certificat de travail) conformes aux dispositions du présent arrêt
DIT n'y avoir lieu à prononcé d'une astreinte
CONDAMNE la société Jorcel Services à payer à madame Y... 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/02826
Date de la décision : 26/01/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-01-26;09.02826 ?
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