COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
DR
Code nac : 30E
12ème chambre section 1
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 11 MAI 2010
R. G. No 09/ 08238
AFFAIRE :
Slimane X...
...
C/
S. C. I. J4
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 27 Mai 2008 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 7
No Section :
No RG : 07/ 07616
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
représentés par la SCP KEIME GUTTIN JARRY,
représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE ONZE MAI DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Slimane X...
né le 23 Juin 1975 à BOGHNI (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
...
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95130 FRANCONVILLE
concluant par la SCP KEIME GUTTIN JARRY-avoués No du dossier 08000556
plaidant par Me Virginie BORIONE ROY (avocat au barreau de PARIS)
Madame Dehbia Y... veuve X...
née le 29 Novembre 1949 à LARBA NAIT IRATEN-TIZI OUZOU
de nationalité Algérienne
...
92700 COLOMBES
concluant par la SCP KEIME GUTTIN JARRY-avoués No du dossier 08000556
plaidant par Me Virginie BORIONE ROY (avocat au barreau de PARIS)
Mademoiselle Nadia X...
née le 15 Septembre 1976 à AT IMGHOUR (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
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92700 COLOMBES
concluant par la SCP KEIME GUTTIN JARRY-avoués No du dossier 08000556
plaidant par Me Virginie BORIONE ROY (avocat au barreau de PARIS)
Madame Ghalia X... épouse Z...
née le 24 Décembre 1977 à BOGHNI (ALGERIE)
de nationalité Française
...
95600 EAUBONNE
concluant par la SCP KEIME GUTTIN JARRY-avoués No du dossier 08000556
plaidant par Me Virginie BORIONE ROY (avocat au barreau de PARIS)
Monsieur Karim X...
né le 30 Mars 1979 à BOGHNI (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
...
92700 COLOMBES
concluant par la SCP KEIME GUTTIN JARRY-avoués No du dossier 08000556
plaidant par Me Virginie BORIONE ROY (avocat au barreau de PARIS)
Monsieur Hocine Saïd X...
né le 14 Mai 1980 à LEVALLOIS PERRET (92300)
de nationalité Française
...
92700 COLOMBES
concluant par la SCP KEIME GUTTIN JARRY-avoués No du dossier 08000556
plaidant par Me Virginie BORIONE ROY (avocat au barreau de PARIS)
APPELANTS
****************
S. C. I. J4
ayant son siège 15 rue Henri Heine
75016 PARIS
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
concluant par la SCP DEBRAY-CHEMIN-avoués No du dossier 08000685
plaidant par Me Mireille MARCHI (avocat au barreau de PARIS)
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Avril 2010 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Mme Dominique ROSENTHAL, Président et Madame Marie-Hélène POINSEAUX, conseiller chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Dominique ROSENTHAL, Président,
Mme Marie-Hélène POINSEAUX, Conseiller,
M. Claude TESTUT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,
Vu l'appel interjeté par Slimane X..., Dehbia Y... veuve X..., Nadia X..., Ghalia X... épouse Z..., Karim X..., Hocine X... d'un jugement rendu le 27 mai 2008 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :
* les a déboutés de leurs demandes,
* constaté qu'ils sont occupants sans droit ni titre depuis le 30 juin 2007,
* a validé le congé délivré le 4 octobre 2006, par la société J4,
* ordonné leur expulsion et celle de tous occupants de leur chef dans le mois de la signification du jugement, au besoin avec l'assistance de la force publique,
* les a condamnés à payer à la société J4 une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et des charges en vigueur, jusqu'à la libération effective des lieux,
* dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile,
* les a condamnés aux dépens ;
Vu les dernières écritures en date du 8 février 2010, par lesquelles les consorts X..., poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, demandent à la cour de :
* annuler le congé délivré le 4 octobre 2006, pour défaut de mise en demeure préalable,
* subsidiairement, dire que le défaut de mise en demeure ouvre droit à indemnité d'éviction,
* dire qu'en présence d'un contrat de location-gérance, le preneur bénéficie du statut des baux commerciaux sans avoir à justifier de l'immatriculation au registre du commerce,
* constater que l'indivision successorale est régulièrement inscrite au registre du commerce du chef des co-indivisaires de la succession de Belaïd X...,
* dire que le commencement d'activité de Slimane X... antérieur à l'immatriculation du 10 décembre 2006, justifie de la réalité de ladite immatriculation à la date du congé,
* les déclarer recevables et bien fondés en leur demande d'indemnité d'éviction,
* condamner la société J4 au paiement d'une indemnité provisionnelle de 100. 000 euros au titre de l'indemnité d'éviction,
* ordonner la désignation d'un expert avec pour mission de fixer l'indemnité d'éviction,
* condamner la société J4 au paiement de la somme de 50. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* condamner la société J4 au versement de la somme de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel ;
Vu les dernières écritures en date du 25 janvier 2010, aux termes desquelles la société J4 prie la cour de :
* confirmer la décision déférée,
* valider le congé délivré le 4 octobre 2006,
* constater que les consorts X... depuis cette date occupent sans droit ni titre les locaux,
* ordonner leur expulsion ainsi que celle de tous occupants de leur chef sous astreinte de 100 euros par jour de retard avec le concours de la force publique s'il y a lieu,
* condamner les consorts X... au règlement d'une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et des charges en vigueur jusqu'à la libération effective des lieux,
* dire n'y avoir lieu au paiement d'une indemnité d'éviction, les consorts X... ayant perdu le bénéfice des dispositions protectrices du statut des baux commerciaux,
* condamner les consorts X... au paiement de la somme de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :
* par acte sous seing privé du 19 mai 1995, la société J4 a donné à bail en renouvellement à Belaïd X... des locaux à usage de café, restaurant, hôtel meublé, dans un immeuble situé à Levallois Perret (92300)..., pour une durée de 9 ans à compter du 24 mai 1994, moyennant un loyer de 110. 000 francs en principal et par an,
* Belaïd X... est décédé le 21 août 2005, laissant pour lui succéder sa veuve Dehbia Y..., ses enfants Slimane X..., Nadia X..., Ghalia X... épouse Z..., Karim X..., Hocine X..., Régine X...,
* par acte d'huissier du 4 octobre 2006, la société J4 a délivré un congé à Slimane X... représentant l'indivision successorale et repreneur de l'exploitation du fonds de commerce, comportant dénégation du droit au bénéfice du statut des baux commerciaux faute d'immatriculation au registre du commerce,
* le 9 octobre 2006, le conseil de l'indivision X... a adressé à la société J4 un courrier pour contester le congé en faisant état d'une immatriculation au registre du commerce selon extrait au 10 août 2006,
* la société J4 a répondu ne pas renoncer au congé qui n'a pas été délivré par erreur,
* c'est dans ces conditions, que les consorts X... ont assigné la société J4 devant le tribunal de grande instance de Nanterre afin que soit annulé le congé et que leur soit reconnu le droit au versement d'une indemnité d'éviction,
* ils ont été déboutés de leurs demandes aux termes de la décision déférée ;
Sur la validité du congé :
Considérant que le bail consenti pour une durée de 9 ans à compter du 24 mai 1994, devant expirer le 23 mai 2003, s'est poursuivi par tacite prorogation ;
qu'en effet, contrairement à ce que soutiennent les indivisaires, la société J4 n'a pas donné son accord au renouvellement du bail, la lettre recommandée adressée au locataire le 15 février 2005, s'analysant en une notification d'une révision du loyer et nullement en une offre de renouvellement ;
que dans ces conditions, le bailleur pouvait donner, à tout moment, congé en respectant un préavis de six mois ;
considérant que le congé délivré le 4 octobre 2006, pour le 30 juin 2007, comporte dénégation du statut des baux commerciaux pour défaut d'immatriculation des indivisaires au registre du commerce, formalité prescrite par l'article L. 145-1 du code de commerce ;
considérant que l'extrait K Bis du 9 août 2006, identifiant Belaïd X... mentionne : décès le 21/ 08/ 2005. Poursuite de l'exploitation pour le compte de l'indivision composée de MME DEHBIA Y... X...- MELLE REGINE X...- M. SLIMANE X...- MLLE NADIA X...- MME GHALIA X...- M. KRAIM X...- M. HOCINE X... par M. X... SLIMANE ;
qu'un second extrait daté du 10 décembre 2006, indique : Monsieur X... Slimane, numéro 492846381 RCS Nanterre, date d'immatriculation 7 décembre 2006. Origine du fonds : héritage d'un fonds de commerce. Activité : Hôtel. Commencement d'activité le 20 août 2006 ;
considérant que les consorts X... soulèvent la nullité du congé délivré le 4 octobre 2006, faute de mise en demeure préalable ;
mais considérant que la formalité de la mise en demeure préalable n'était pas nécessaire, s'agissant d'un congé délivré, non pour un motif grave et légitime au sens de l'article L. 145-17 du code de commerce, mais pour dénégation du statut des baux commerciaux faute d'immatriculation au registre du commerce, laquelle est l'une des conditions du bénéfice de ce statut ;
considérant que les indivisaires, pour écarter l'exigence d'immatriculation au registre du commerce invoquent les dispositions de l'article L. 145-1 du code de commerce ;
qu'ils soutiennent que depuis le décès de Belaïd X..., le fonds de commerce a toujours été exploité notamment en location-gérance selon contrat conclu le 18 novembre 2005 entre Eric A... et Slimane X... ès qualités de mandataire de l'indivision X... ;
mais considérant que n'est pas opposé aux preneurs un défaut d'exploitation du fonds de commerce, mais le bénéfice du statut des baux commerciaux accordé aux commerçants régulièrement immatriculés à la date du congé ;
que par ailleurs, au visa des dispositions de l'article 1328 du code civil, l'acte sous seing privé du 18 novembre 2005, par lequel a été consenti une location gérance n'a date certaine à l'égard des tiers que du jour où il a été enregistré ; qu'en l'espèce, la seule publication dans un journal d'annonces légales est inopérante ;
qu'au surplus, la location gérance n'est que partielle dès lors qu'elle ne porte que sur l'exploitation du bar-restaurant, Slimane X... exploitant personnellement l'hôtel ainsi qu'il résulte des mentions précitées, portées au registre du commerce ;
considérant que les consorts X... invoquent enfin les dispositions de l'article L. 145-1. III du code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 4 août 2008 et font valoir qu'en cas de décès du titulaire du bail, le statut des baux commerciaux s'applique à ses héritiers ou ayants droit qui, bien que n'exploitant pas de fonds de commerce, demandent le maintien de l'immatriculation de leur ayant droit pour les besoins de la succession ;
mais considérant que la loi nouvelle ne peut s'appliquer aux procédures engagées avant son entrée en vigueur, de sorte qu'il convient de se référer aux dispositions applicables au moment de la délivrance du congé ;
qu'il appartient ainsi aux indivisaires de démontrer qu'ils étaient immatriculés au registre du commerce, ou au moins l'un d'entre eux, s'il exploitait pour le compte de l'indivision, leur immatriculation au registre du commerce à la date du congé ;
que force est de constater qu'à la date du 4 octobre 2006, aucun des héritiers indivis n'était inscrit au registre du commerce ;
qu'il est acquis aux débats que Slimane X..., exploitant pour le compte de l'indivision, ne s'est immatriculé au registre du commerce que le 7 décembre 2006, soit deux mois après la délivrance du congé, la seule mention portée antérieurement à ce registre ne visant que la poursuite par l'indivision de l'activité du défunt, Belaïd X..., demeurant seul inscrit, et ne constituant aucunement l'immatriculation requise ;
que Belaïd X... étant décédé le 21 août 2005, l'indivision a disposé d'un délai suffisant pour accomplir les démarches nécessaires à l'immatriculation, plus d'une année s'étant écoulée entre son décès et la notification du congé ;
considérant dans ces circonstances, ainsi que l'a retenu le tribunal, par des motifs pertinents adoptés par la cour, que le congé du 4 octobre 2006, a été régulièrement délivré par la société bailleresse, les locataires étant mal fondés à se prévaloir de sa nullité et d'un droit au paiement d'une indemnité d'éviction, dès lors qu'ils sont déchus du droit au statut des baux commerciaux ;
que par voie de conséquence, la décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions ;
qu'eu égard aux circonstances du litige, il n'y a pas lieu d'assortir d'une astreinte la mesure d'expulsion prononcée par le tribunal ;
Sur les autres demandes :
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que les consorts X... ne sauraient solliciter l'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Considérant que l'équité ne commande pas, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré,
REJETTE toutes autres demandes,
CONDAMNE Slimane X..., Dehbia Y... veuve X..., Nadia X..., Ghalia X... épouse Z..., Karim X..., Hocine X... aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,