COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET N°0
CONTRADICTOIRE
DU 16 DECEMBRE 2009
R.G. N° 08/01461
AFFAIRE :
[T] [C]
C/
S.A.R.L. LE BOISQUILLON
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 20 Mars 2008 par le Conseil de Prud'hommes de MONTMORENCY
Section : Activités diverses
N° RG : 07/00510
Copies exécutoires délivrées à :
Me Nathalie NAVON SOUSSAN
Copies certifiées conformes délivrées à :
[T] [C]
S.A.R.L. LE BOISQUILLON
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE NEUF,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [T] [C]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par M. Jean-Luc LELONG (Délégué syndical ouvrier)
APPELANTE
****************
S.A.R.L. LE BOISQUILLON
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Nathalie NAVON SOUSSAN(avocat au barreau de PARIS)
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Octobre 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président chargé(e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Monsieur Hubert LIFFRAN, conseiller,
Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
La SARL LE BOISQUILLON est un établissement privé gestionnaire d'établissements pour personnes âgées autonomes ou handicapées.
Madame [T] [C] a été engagée suivant contrat à durée indéterminée à compter du 28 octobre 1996 en qualité de 'veilleuse de nuit' à la résidence ' [Adresse 5]' située à [Localité 4].
Elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 2.382 €.
La relation de travail était régie par la Convention collective unique (CCU), l'entreprise employant plus de dix salariés.
Madame [T] [C] devait être convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement le 19 août 2006.
Son licenciement pour motif personnel lui était notifié par lettre recommandée avec accusée de réception en date du 5 septembre 2006. Elle était motivée dans les termes suivants :
'Je vous ai convoqué par lettre remise en main propre le 19 août à un entretien préalable le 28 août 2006 auquel vous ne vous êtes pas présentée.
Vous m'aviez adressé un courrier par l'intermédiaire d'une de vos collègues le samedi 26 août m'indiquant que vous ne seriez pas au rendez vous fixé en dehors de vos horaires de travail, invoquant également le fait que le délégué syndical était en congé.
Je vous ai alors répondu par télégramme téléphoné, qui vous a été remis ce 26 août à 12h31, que l'entretien était maintenu à la date du 28 août sachant d'une part que nous pouvions vous convoquer en dehors de vos heures de travail, temps qui était alors considéré comme du temps de travail effectif et que le délégué syndical étant en congé pendant encore une semaine, vous pouviez vous faire assister de tout autre salarié de la [Adresse 5].
Vous nous avez alors contacté le 27 août pour nous informer que vous veniez de vous faire arrêter par un médecin jusqu'au 3 septembre 2006, les sorties vous étant autorisées.
Toutefois, au regard de la gravité des faits qui vous sont reprochés, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs personnels suivants :
Manquement grave aux procédures de sécurité en cas de déclenchement d'alarme incendie durant vos heures de travail.
En qualité de veilleuse de nuit, vous avez en charge la sécurité des résidents et des locaux qu'ils occupent et en particulier la surveillance de la détection incendie, risque majeur de ce type de structure ; Si l'alarme incendie se déclenche (signal sonore), la personne de garde doit alors identifier la zone d'alarme, couper le signal sonore et se rendre sur les lieux indiqués sur l'écran de la centrale de détection, pour déterminer s'il est nécessaire d'appeler les pompiers. Si cela n'est pas nécessaire la personne de garde revient à la centrale et acquitte l'alarme suivant la procédure affichée au niveau de la centrale.
Cette procédure était connue de vous pour l'avoir déjà utiliser à de multiples reprises, depuis votre embauche. Par ailleurs, cette procédure est écrite et conservée au sein du poste d'accueil où se déroule votre permanence.
Or, alors que vous étiez de permanence la nuit de veille du 15 au 16 août 2006, le 16 août 2006 à 07h49, une alarme incendie s'est déclenchée au 3ème étage du batiment B de la résidence et vous n'avez pas respecté la procédure.
En effet, la personne qui vous a succédé à 8h30 a constaté sur l'écran qu'une alarme incendie s'était déclenchée à 07h49 et n'avait pas été acquittée, c'est à dire remise en service.
Elle est alors montée au 3ème étage pour vérifier qu'il n'y avait pas de dommages, a acquitté l'alarme comme il se doit. Puis, lors de mon arrivée, cette salariée m'a immédiatement informé de cette anomalie.
Ce fait est d'autant plus grave qu'il s'est reproduit durant votre garde du 25 au 26 août : le samedi 26 août, à 07h37, une alarme incendie s'est déclenchée au RDC du bâtiment A. Là encore l'alarme n'a pas été acquittée, pas plus que vous n'êtes aller voir le couple de résidents chez qui l'alarme s'est déclenchée.
C'est moi qui ai du acquitter cette alarme lors de mon passage et suis allé voir ce couple qui m'a alors exprimé son étonnement de n'avoir vu personne venir alors que le voyant d'alarme incendie était allumé dans leur appartement.
Ce manquement à votre obligation de vigilance, objet même de votre fonction de veilleuse de nuit, dans un établissement de personnes âgées, souvent physiquement dépendants est inacceptable et aurait pu avoir des conséquences graves voire dramatiques, si un feu s'était déclaré dans l'un des appartements de nos résidents.
Je vous rappelle que vous êtes seule de 7 heures à 8 heures du matin et que vous devez faire preuve d'attention, de rigueur et de réactivité dans le respect de vos obligations.
Je vous ai alerté tant verbalement que par écrit à plusieurs reprises sur des dysfonctionnements liés au respect des consignes données.
Pour mémoire, vous avez déjà fait l'objet d'un avertissement le 22 mars 2005 pour un manquement aux consignes d'intervention chez une résidente aux heures prescrites, ce qui pouvait entraîner des conséquences graves pour cette personne compte tenu de sa pathologie.
Par conséquent, je n'ai d'autre choix que de rompre notre relation contractuelle et je suis donc contraint de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif personnel.
Votre préavis de deux mois commencera à courir dès la première présentation à votre domicile du présent courrier par la poste. Vous serez dispensez d'exécuter ce préavis qui vous sera toutefois payé à échéance normale de paie.
Toutefois, votre préavis ne commencera à courir qu'à l'issue vos congés payésqui se déroulent du 06 au 24 septembre 2006.
Vous pouvez faire valoir les droits que vous avez acquis au titre du Droit individuel à la Formation (DIF) sous réserve d'en formuler la demande avant l'expiration de votre préavis. A défaut d'une telle demande dans le délai imparti, ce droit sera définitivement
perdu. Pour votre parfaite information, je vous précise que vous bénéficiez au titre du DIF d'un volume de 40 heures qui, dans le cadre de la rupture de votre contrat de travail, peut se traduire par le versement d'une allocation.
Cette allocation doit être utilisée pour financer en tout ou partie et à votre initiative, une action de bilan de compétence de validation des acquis de l'expérience ou de formation. Dans le cas où vous en feriez la demande dans le délai imparti, le versement de cette allocation interviendra donc à réception du justificatif de suivi de l'une des actions susvisées.
Votre solde de tout compte, votre attestation ASSEDIC et votre certificat de travail vous seront remis à l'expiration de votre préavis.'
C'est dans ces circonstances que Madame [T] [C] devait saisir le Conseil des Prud'hommes de [Localité 4] le 22 juin 2007 aux fins de contester la légitimité de son licenciement et se voir allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 28.584 €.
Le Conseil des Prud'hommes de [Localité 4] par jugement contradictoirement prononcé le 20 mars 2008 a débouté la salariée de ses demandes en considérant le licenciement parfaitement causé.
Madame [T] [C] a régulièrement injecté appel de cette décision.
*
* *
Par conclusions déposées au greffe et soutenues oralement à l'audience Madame [T] [C] a demandé l'infirmation de ce jugement et la condamnation de la SARL LE BOISQUILLON à lui verser la somme de 28.584 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.
Par conclusions en réplique soutenues oralement à l'audience la SARL LE BOISQUILLON a demandé la confirmation du jugement entrepris outre l'allocation de la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Considérant qu'il est constant que Madame [T] [C] assurait dans la résidence de personnes âgées dont la moyenne d'âge est de 87 ans, la surveillance de nuit de 20h30 à 8h30, que sa mission consistait notamment à gérer le déclenchement de l'alarme incendie en fonction du protocole affiché dans son bureau ;
Considérant qu'il résulte de l'attestation régulière de Madame [Z] [K], employée en qualité d'agent d'accueil, que le 16 août 2006 lors de sa prise de poste à 8h30 'l'alarme incendie était déclenchée et que celle-ci n'avait pas été acquittée (témoins lumineux allumés)' qu'elle s'était rendue immédiatement sur les lieux pour contrôler l'endroit indiqué sur le panneau de l'alarme, qu'elle précisait : 'après vérification de l'ensemble de l'étage, je suis redescendu pour acquitter son processus' et par conséquence remettre en état de marche le système d'alarme incendie ;
Considérant que des observations ont été alors faite à Madame [T] [C] par le directeur de l'établissement, que néanmoins un nouvel incident était constaté dans la nuit du 25 au 26 août 2006 ; qu'en effet les époux [L], résidents dans l'établissement, ont attesté régulièrement qu'ayant fait griller du pain vers 7h30 dans leur appartement le grille pain s'était mis à fumer déclenchant alors le détecteur incendie 'la lampe placée au dessus s'est mise en marche et s'est allumée' ; qu'a leur grande surprise 'personne n'est venue voir ce qui se passait comme cela est toujours arrivé dans les mêmes circonstances' ;
Considérant que la société avait un contrat de maintenance avec la société ERIS, que le système d'alarme était régulièrement contrôlé ; qu'il résulte du courrier de cette entreprise en date du 14 janvier 2008 que l'installation était en bon état de fonctionnement; que les rapports d'intervention de la société ERIS confirme l'attestation et le bon fonctionnement du système ;
Considérant dès lors que Madame [T] [C] n'a pas satisfait à ses obligations contractuelles, qu'il est établi qu'elle a fait preuve d'un manque de vigilance alors qu'une aide soignante était également sur place toute la nuit pour répondre directement aux demandes éventuelles des personnes âgés ; qu'au surplus les faits dont il est fait grief à la salariée s'étant déroulé dans une résidence de personnes âgées peu mobiles, il s'ensuit que le licenciement litigieux est fondé sur une cause réelle et sérieuse;
Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non taxables qu'elles ont dues exposer ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
- Reçoit l'appel de Madame [T] [C],
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du CPC,
- Condamne Madame [T] [C] aux dépens d'appel.
Arrêt prononcé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier présent lors du prononcé.
Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,