COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 72A
4ème chambre
ARRET No
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 14 AVRIL 2008
R.G. No 07/01118
AFFAIRE :
S.D.C. DU 97 RUE DE LA REPUBLIQUE A PUTEAUX (92000)
C/
Mme Anne-Sophie X... épouse Y...
...
Décision déférée à la Cour : Jugement rendu le 14 Novembre 2006 par le Tribunal d'Instance de PUTEAUX
No RG : 11-06-000107 et No RG 11-06-739
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER
SCP LEFEVRE TARDY et HONGRE BOYELDIEU
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE QUATORZE AVRIL DEUX MILLE HUIT,
La Cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU 97 RUE DE LA REPUBLIQUE A PUTEAUX (92000) représenté par son syndic la société GESTION EUROPE
Ayant son siège ...
75009 PARIS
elle-même prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représenté par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués - No du dossier 20070069
ayant pour avocat Maître Claude Z... du barreau de PARIS -D 357-
APPELANT
****************
Madame Anne-Sophie X... épouse Y...
...
75018 PARIS
Monsieur Emmanuel Y...
...
75018 PARIS
représentés par la SCP LEFEVRE TARDY et HONGRE BOYELDIEU, avoués - No du dossier 270435
ayant pour avocat Maître Philippe X... du barreau de PARIS -C 2157-
INTIMES
****************
Société R P C
Ayant son siège ...
94700 MAISONS ALFORT
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
assignation à personne habilitée
INTIMEE DEFAILLANTE
****************
Composition de la Cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Février 2008, devant la Cour composée de :
Madame Geneviève BREGEON, Président,
Madame Catherine MASSON-DAUM, Conseiller,
Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Christine COLLET
******************FAITS ET PROCEDURE,
Depuis le 22 juillet 2002, M Emmanuel Y... et son épouse, Mme Anne-Sophie X..., sont propriétaires des lots de copropriété no 24 et 28, correspondant à un pavillon avec jardin, dans l'ensemble immobilier sis ... (92), qu'ils occupaient antérieurement comme locataires depuis le 1er janvier 2001.
Les 30 janvier et 2 février 2006, le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES a assigné M et Mme Y... ainsi que le précédent propriétaire des lots, la société RPC, en paiement des sommes de :
* 9.473,12 € correspondant, à hauteur de 8.288,23 €, à la consommation d'eau pour la période de décembre 1999 à décembre 2003 et, à hauteur de 1.184,89 €, à un appel de fonds exceptionnel pour pallier un défaut de trésorerie,
* 500 € à titre de dommages-intérêts.
Le 16 juin 2006, M et Mme Y... ont appelé en garantie le syndic de la copropriété, la société GESTION EUROPE.
Par jugement réputé contradictoire en date du 14 novembre 2006, le tribunal d'instance de Puteaux a :
* joint les procédures,
* débouté le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES de l'intégralité de ses demandes,
* condamné le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES à payer à M et Mme Y... la somme de 650 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
* débouté M et Mme Y... du surplus de leurs demandes,
* dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
* condamné le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES aux dépens.
LA COUR
Vu l'appel formé par le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES à l'encontre de cette décision en intimant M et Mme Y... ainsi que la société RPC,
Vu les conclusions en date du 26 décembre 2007, par lesquelles le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES, poursuivant la réformation du jugement déféré, demande à la cour, au visa des articles 2, 3, 8, 10, 10-1, 14-1 et 43 de la loi du 10 juillet 1965, 4 à 16 du Code de procédure civile, 1134, 1147, 1382 et 1384 du Code civil, de:
* débouter M et Mme Y... de leurs demandes,
* condamner solidairement M et Mme Y... à lui payer les sommes de :
** 9.473,12 € avec intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2004 et capitalisation de ces intérêts,
** 1.000 € à titre de dommages-intérêts
** 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens,
* dire l'arrêt commun à la société RPC "afin de recours éventuel par les époux A... à son encontre",
Vu les conclusions en date du 4 décembre 2007, par lesquelles M et Mme Y..., intimés formant appel provoqué à l'encontre de la société GESTION EUROPE, demandent à la cour, au visa des articles 10 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965, 1382 et 1384 du Code civil, de:
* confirmer le jugement entrepris,
* à titre subsidiaire, en cas de condamnation contre eux, condamner la société GESTION EUROPE à les garantir,
* condamner solidairement le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES et la société GESTION EUROPE à leur payer la somme de 1.500 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
Vu l'assignation comme intimée sur appel provoqué, délivrée le 6 décembre 2007 à la société GESTION EUROPE, à personne habilitée, à la requête de M et Mme Y..., avec remise de copie de leurs conclusions et de celles du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES,
Vu l'assignation comme intimée délivrée le 28 décembre 2007 à la société RPC, à personne habilitée, à la requête du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES avec remise de copie de ses conclusions,
Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 29 janvier 2008,
SUR CE,
Considérant que la société RPC étant partie à la procédure, le présent arrêt lui est de plein droit opposable sans qu'il y ait lieu de le lui "dire ... commun" ainsi que le réclame le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES ; que force est de constater qu'aucune demande n'est articulée à l'encontre de cette intimée ;
Considérant que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES agit exclusivement contre M et Mme Y... en recouvrement, d'une part, des sommes avancées par lui au titre de la consommation d'eau afférente à leurs lots de copropriété, d'autre part, d'un appel de fonds exceptionnel pour pallier un défaut de trésorerie ; qu'il est recevable à agir à leur encontre, sur le fondement des articles 1382 et 1384 du Code civil, en ce qui concerne leur consommation d'eau personnelle pour la période antérieure à leur acquisition, puisqu'ils occupaient alors les lieux, et sur le fondement des dispositions du règlement de copropriété ainsi que des articles 10 de la loi du 10 juillet 1965, 1134 et 1147 du Code civil en ce qui concerne la consommation d'eau de la période postérieure à leur acquisition et l'appel de fonds destiné à pallier au défaut de trésorerie ;
Qu'aux termes de l'article 14 du règlement de copropriété, "les lots disposant au moins d'un poste d'eau seront équipés d'un compteur divisionnaire. Chaque copropriétaire supportera ... les dépenses correspondant à la consommation indiquée par son compteur individuel" ; que ledit règlement n'impose ni la désignation d'une personne spécialement affectée au relevé de ces compteurs ni l'obligation d'un relevé contradictoire ;
Considérant que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES paye les factures concernant la consommation d'eau de l'ensemble immobilier, dans le cadre du contrat d'abonnement et de distribution générale d'eau potable souscrit par lui, en sorte que les sommes dont il poursuit le paiement constituent des charges communes de la copropriété même si son action se réfère aux relevés du compteur individuel des lots concernés et non à une répartition de cette consommation en fonction de la quote-part afférente à chacun des lots de copropriété ;
Qu'il expose que le compteur général de la copropriété est situé dans une cave privative grevée d'une servitude de passage pour en permettre le relevé, que celui des lots no 24 et 28 se trouve dans une cave commune et que la porte du couloir d'accès aux caves est fermée à clé ; qu'il justifie du fait que, de janvier 2000 à septembre 2003, la Société Générale des Eaux a établi ses factures à partir d'estimations calculées sur les consommations des années antérieures et que, dans sa facture du 23 juillet 2003, elle a mentionné que son préposé n'avait pu procéder à un relevé effectif du compteur général en l'absence d'occupant de l'immeuble, à l'heure de son passage, ayant pu lui ouvrir la porte du couloir d'accès aux caves ;
Que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES produit la facture émise le 23 octobre 2003 par la Société Générale des Eaux à la suite d'un relevé du compteur général ; que celle-ci précise que ce relevé montre un changement de la consommation habituelle et indique que l'écart entre le montant de cette facture et celui des précédentes factures, établies par estimation, provient de cette évolution ;
Que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES indique que le 23 décembre 2003, jour de la réunion d'une assemblée générale des copropriétaires, les membres du conseil syndical ont procédé au relevé du compteur général, collecté les relevés des compteurs individuels manquants et relevé celui de M et Mme Y... qui avaient omis de transmettre les chiffres nécessaires, ainsi que le prévoit le contrat passé avec l'entreprise bailleresse de ces compteurs individuels ; qu'il ajoute que son syndic a ensuite déterminé la somme due par M et Mme Y... au titre de la consommation réelle d'eau de leurs lots (soit 9.592,33 €) avant d'en déduire les sommes versées par eux dans le cadre des estimations antérieures, aboutissant ainsi à une créance de 8.288,23 € dont il a vainement réclamé paiement le 14 mars 2004 ;
Considérant que M et Mme Y... ne peuvent utilement se prévaloir de l'absence de facture préalable du fournisseur d'eau correspondant à la somme qui leur est réclamée dans la mesure où ils ne démontrent pas l'inexactitude du relevé de leur compteur individuel ainsi que du compteur général et où il est constant que les relevés de ce dernier sont épisodiques et aléatoires, puisqu'ils dépendent de la présence d'un occupant de l'immeuble susceptible d'ouvrir la porte du couloir d'accès aux caves, en sorte que les factures sont établies à partir d'estimations ; qu'en toute hypothèse,
la Société Générale des Eaux a rétabli, le 23 octobre 2003, la situation antérieure et réclamé l'arriéré dont elle n'avait pas connaissance au moment de sa facture précédente, émise sur estimation le 23 juillet 2003 ; que les chiffres notés sur les compteurs par les copropriétaires suffisaient à établir que, lors du relevé suivant, la Société Générale des Eaux rétablirait une fois de plus la situation et réclamerait l'arriéré dont elle n'avait pas encore connaissance au 23 octobre 2003 ; qu'il incombait en conséquence au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES de pouvoir faire face à cette demande de paiement ;
Que, dès lors qu'il s'agit de charges qui leur sont personnelles et ont été déterminées postérieurement à l'assemblée du 23 décembre 2003, M et Mme Y... ne peuvent tirer argument des appels de fonds des années antérieures ainsi que de l'approbation des comptes de la copropriété et du budget prévisionnel par les assemblées générales ; que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES fait justement valoir que ces dernières n'ont pas pour objet d'approuver les comptes individuels de chacun des copropriétaires ;
Considérant qu'il ressort de l'attestation délivrée le 6 septembre 2006 par M Jean-Pierre B... que ce copropriétaire a découvert en 2002, alors que M et Mme Y... étaient encore locataires des lieux, une inondation importante de la cave de l'immeuble, en provenance du tuyau allant de leur compteur à leur pavillon, et que ceux-ci ont fait procéder aux réparations pour mettre un terme à cette fuite d'eau ; qu'il ressort en outre de la correspondance adressée le 8 avril 2004 par le syndic au notaire rédacteur de l'acte d'achat de M et Mme Y..., qu'une fuite d'eau, survenue fin 2001/début 2002 a "ruiné le plafond et les murs d'une cave, nécessitant des travaux importants exécutés courant 2ème trimestre 2002";
Que M et Mme Y... n'allèguent pas avoir vainement alerté le syndic sur la fuite mentionnée par M B... ni avoir, postérieurement à leur acquisition, vainement saisi l'assemblée générale des copropriétaires d'une demande tendant à la recherche et à la réparation d'autres fuites d'eau ; qu'ils ne produisent aucun élément probant au soutien de leur affirmation sur la fuite existant sur la colonne d'acheminement de l'eau, enfouie selon eux dans le sous-sol entre l'immeuble de façade de la copropriété et leur pavillon ; que la cour observe qu'ils n'occupaient plus les lieux lorsqu'à été découverte, le 23 décembre 2003, la consommation réelle d'eau et qu'ils ne produisent aucun élément probant sur les modalités de consommation de celle-ci ;
Et considérant que M et Mme Y... ne discutent pas la quote-part de 1.184,89 € réclamée au titre de l'appel de fonds exceptionnel pour pallier au défaut de trésorerie et dont il est constant qu'il a été approuvé par l'assemblée générale des copropriétaires ;
Considérant, en définitive, que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES est fondé à leur réclamer la somme de 9.473,12 € ; que celle-ci portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt qui admet le principe de cette créance ; que ces intérêts se capitaliseront dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;
Considérant, en revanche, que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES ne justifie pas de la réalité d'un préjudice distinct de celui résultant du retard de paiement et sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts ;
Considérant que M et Mme Y... font justement valoir que le syndic de la copropriété a fait preuve de négligence en s'abstenant d'attirer l'attention des copropriétaires sur l'absence de relevé du compteur commun par la Société Générale des Eaux depuis janvier 2000, pendant plusieurs années, alors qu'il avait connaissance d'au moins une importante fuite d'eau survenue fin 2001/début 2002 ; qu'ils ont été ainsi privés de la possibilité de connaître l'anomalie de consommation affectant leur lot et de prendre les mesures nécessaires pour y remédier ; qu'ils ont été également privés de la possibilité d'apurer les charges de copropriété avec leur vendeur au moment de l'acquisition de leurs lots ainsi que d'accepter ou non de les acquérir en connaissant le problème afférent à la consommation d'eau ;
Que cette faute du syndic est directement cause de leur perte de chance de ne pas avoir à supporter le coût d'une consommation d'eau excessive ( 736 M3 au lieu d'une consommation moyenne de 188 M3) en sorte que sa responsabilité est engagée à leur égard sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et que celui-ci doit les indemniser de leur préjudice ;
Que M et Mme Y... ne démontrent cependant pas avoir pris des mesures pour rechercher l'origine de cette consommation d'eau lorsqu'ils ont été informés début 2004 de son importance en sorte qu'ils n'établissent pas qu'ils l'auraient fait plus tôt ; que, dès lors, la société GESTION EUROPE ne les garantira pas pour la totalité de la condamnation ci-dessus mise à leur charge au titre de la consommation d'eau (soit 8.288,23 € en principal) mais seulement à hauteur de moitié ; que le jeu des intérêts au taux légal dépendant de leur propre paiement, il n'y a pas lieu de condamner le syndic à les garantir à ce sujet ;
Considérant qu'il convient d'attribuer au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES la somme de 1.500 € au titre des frais non compris dans les dépens de première instance et d'appel ; que l'équité commande de ne pas allouer d'autre somme de ce chef ;
Considérant que M et Mme Y..., parties perdantes, doivent être condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Qu'ils seront également garantis de leurs condamnations aux dépens et frais hors dépens à hauteur de moitié par la société GESTION EUROPE ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,
Réforme le jugement entrepris,
Condamne solidairement Monsieur Emmanuel Y... et son épouse, Mme Anne-Sophie X..., à payer au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES les sommes de :
* 9.473,12 € avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, au titre de la consommation d'eau et de l'appel de fonds exceptionnel pour pallier au défaut de trésorerie,
* 1.500 € au titre des frais non compris dans les dépens d'appel,
Dit que les intérêts, échus et dus au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES pour plus d'une année entière, se capitaliseront pour porter eux-mêmes intérêt au taux légal,
Dit que la société GESTION EUROPE garantira Monsieur Emmanuel Y... et son épouse, Mme Anne-Sophie X..., à hauteur de moitié des condamnations mises à leur charge au titre de la consommation d'eau (soit 8.288,23 € en principal) ainsi que des dépens et frais hors dépens,
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,
Condamne solidairement Monsieur Emmanuel Y... et son épouse, Mme Anne-Sophie X..., aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Arrêt prononcé par Madame Geneviève BREGEON, président, et signé par Madame Geneviève BREGEON, président et par Madame Marie-Christine COLLET, greffier, présent lors du prononcé.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,