COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
DL
Code nac : 30B
12ème chambre section 1
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 10 AVRIL 2008
R.G. No 07/06777
AFFAIRE :
S.A.R.L. AILLEURS
C/
S.C.I. BD INDUSTRIE
Décision déférée à la cour : Ordonnance de référé rendue le 11 Septembre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
No RG : 07/847
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SCP FIEVET-LAFON
SCP GAS
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DIX AVRIL DEUX MILLE HUIT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.R.L. AILLEURS prise en son établissement situé Complexe Industriel de la Hunière 78120 SONCHAMP, venant aux droits de la société COGIS société radiée par suite de sa dissolution ayant entraîné la transmission universelle du patrimoine à l'associé unique la société AILLEURS
ayant son siège 4 rue de l'Eglise MARCHELEPOT 80200 PERONNE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP FIEVET-LAFON, avoués - No du dossier 270914
Plaidant par Me Patrick LE BOUARD, avocat au barreau de VERSAILLES
APPELANTE
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S.C.I. BD INDUSTRIE
ayant son siège 24 rue Auguste Chabrières 75015 PARIS, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP GAS, avoués - No du dossier 20070849
Plaidant par Me Laetitia BOIDIN, substituant Me Nathalie MOUYAL, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Février 2008 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique LONNE, conseiller, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie MANDEL, président,
Madame Marie-José VALANTIN, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie SAUVADET,
Un bail non daté a été consenti par la société BD INDUSTRIE à la société COGIS, aux droits de laquelle vient la société AILLEURS, bail prenant effet le 1er août 2002, pour un ensemble de bureaux de 250 m² sis à SONCHAMP (78), complexe industriel de la Hunière, moyennant un loyer principal annuel de 13.344 € plus 2.280 € de provision sur charges.
La société AILLEURS est venue aux droits de la société COGIS à la suite d'une transmission universelle du patrimoine à l'associée unique.
La société AILLEURS ne s'acquittant pas de ses loyers et charges, la société BD INDUSTRIE lui a fait délivrer, le 20 avril 2007, un commandement de payer visant la clause résolutoire stipulée au bail, pour un montant de 82.740,70 €.
Par exploit d'huissier du 30 mai 2007, la SCI BD INDUSTRIE a assigné en référé la société AILLEURS aux fins de voir "prononcer" la résiliation du bail aux torts exclusifs de la société AILLEURS par application de la clause résolutoire, la voir condamner à lui payer la somme de 82.740,70 € au titre des causes du commandement de payer du 20 avril 2007, une indemnité d'occupation trimestrielle de 5.668,21 € jusqu'à libération des lieux, voir ordonner son expulsion sous astreinte avec séquestration de meubles et objets trouvés dans les lieux, et la voir condamner à lui payer une indemnité de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La procédure a été notifiée aux créanciers inscrits.
La société AILLEURS a demandé qu'il soit constaté que la SCI BD INDUSTRIE n'a pas respecté son obligation de délivrance, que le commandement de payer ne comporte pas le décompte des sommes réclamées, que la société AILLEURS n'a jamais pu bénéficier d'un compteur EDF et elle a conclu au débouté des demandes. A titre subsidiaire, elle a demandé au juge des référés de dire n'y avoir lieu à suspendre les effets de la clause résolutoire, les locaux n'étant plus occupés par elle.
Par ordonnance de référé du 11 septembre 2007, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles a :
* débouté la société AILLEURS de toutes ses demandes reconventionnelles,
* constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail,
* ordonné l'expulsion de la société AILLEURS et de tous occupants de son chef des locaux au complexe industriel La Hunière à SONCHAMP avec le recours de la force publique si besoin est, les meubles et objets trouvés dans les lieux pouvant être séquestrés aux frais et risques de la société AILLEURS dans un local du choix de la SCI BD INDUSTRIE, en garantie de sa créance,
* condamné la société AILLEURS à payer à la SCI BD INDUSTRIE la somme de 82.740,70 € à titre de provision pour loyers et charges arriérés, selon compte arrêté au 1er trimestre 2007 inclus, et une indemnité d'occupation égale au double du montant contractuel plus charges et taxes à compter du 20 mai 2007,
* condamné la société AILLEURS à payer à la SCI BD INDUSTRIE une indemnité de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Par déclaration du 18 septembre 2007, la société AILLEURS a interjeté appel de cette ordonnance.
Aux termes de ses dernières écritures du 20 novembre 2007, elle demande à la cour de réformer l'ordonnance entreprise, et statuant à nouveau, de constater qu'il existe une contestation sérieuse, de débouter la société BD INDUSTRIE de l'ensemble de ses demandes.
Subsidiairement, elle demande à la cour de "dire n'y avoir lieu à suspendre les effets de la clause résolutoire", les locaux n'étant plus occupés par elle.
Elle sollicite en outre la condamnation de la société BD INDUSTRIE à lui payer la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
La société AILLEURS fait valoir :
- que le bailleur est obligé de délivrer au preneur la chose louée, et de l'entretenir, pendant toute le durée du bail ; qu'en l'espèce, la société BD INDUSTRIE devait remettre le local apte à être utilisé sans que le locataire soit contraint d'effectuer des réparations, et qu'il ne peut s'exonérer de sa responsabilité par une clause contractuelle ; qu'ainsi, la demande de la société BD INDUSTRIE se heurte à une contestation sérieuse,
- qu'elle n'a jamais pu bénéficier d'un compteur électrique,
- que la bailleresse a été déboutée de sa demande visant à voir acquise la clause résolutoire à l'encontre de la société COGIS par une ordonnance de référé du 23 juin 2005, au motif que le bail était non daté et le commandement de payer ne comportait pas le décompte des sommes demandées ; que c'est toujours le cas en l'espèce.
Aux termes de ses dernières conclusions du 23 novembre 2007, la société BD INDUSTRIE demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée et de condamner la société AILLEURS à lui payer la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Elle fait valoir :
- que la clause dérogatoire insérée au bail est valable, et que l'article 1720 du Code civil n'est pas d'ordre public ; que le fait que la société AILLEURS ait prétendument dû réaliser d'importants travaux pour exploiter les locaux est inopérant,
- que la société AILLEURS ne justifie pas de ce que l'obligation de délivrance n'ait pas été remplie par la société BD INDUSTRIE ; qu'au contraire, depuis la signature du bail, les locaux sont exploités par cette société, dont l'examen des comptes sociaux révèle qu'elle exerce son activité normalement,
- que la société AILLEURS ne fait qu'affirmer sans le justifier qu'elle n'a jamais pu bénéficier d'un compteur électrique et que la répartition entre les différents occupants s'effectuant selon un mode de calcul aléatoire,
- que le second original du commandement de payer, versé aux débats, permet de constater que le décompte des sommes dues fait partie intégrante de l'acte du 20 avril 2007, contrairement à ce qu'affirme l'appelante,
- que le fait qu'un bail soit non daté ne peut l'empêcher de produire ses effets dès lors qu'il contient une date d'effet, comme c'est le cas en l'espèce et comme l'a reconnu la société AILLEURS en première instance.
SUR CE
Considérant que le commandement de payer du 20 avril 2007, ainsi qu'il l'indique expressément, comprend en annexe le relevé de compte détaillé de la somme de 82.740,70 € ;
Considérant que le bail, signé par les parties, n'est pas daté mais prévoit expressément qu'il a pris effet le 1er août 2002 pour se terminer le 31 juillet 2011 ;
Considérant que sur le fondement de l'article 1720 du Code civil, qui dispose que le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparation de toute espèce, la société AILLEURS soutient que le bailleur ne saurait s'exonérer de cette obligation de délivrance par le biais de la clause insérée dans le bail et qu'elle n'a pas pu exploiter correctement les lieux loués faute de réalisation d'importants travaux et d'un compteur électrique ;
Mais considérant que l'article 1720 du Code civil n'est pas d'ordre public et les parties peuvent convenir, par une clause expresse, des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ;
Considérant qu'en l'espèce, le premier juge a exactement retenu que si la clause du bail intitulée "Désignation" mentionnait que les locaux sont à remettre en état, le 5ème alinéa de la clause intitulée "Loyer" stipulait une franchise de loyers de trois mois (août, septembre et octobre) et précisait : "En contrepartie le preneur devra assurer la remise en état des bureaux (moquettes, revêtements muraux, cloisons, tableaux électriques et faux plafonds)" ;
Que dans la désignation des lieux loués, le bail liant les parties inclut "une installation EDF et eau dont l'abonnement sera à souscrire par le preneur" ;
Que la société AILLEURS verse aux débats les pages 5-6 et 7 (sur 35 pages) d'un rapport de vérification des installations électriques, établi par QUALICONSULT Exploitation Ile de France le 25 mai 2005, contenant une liste d'observations relatives au Code du travail, élément qui ne justifie en rien que la société AILLEURS aurait dû cesser son exploitation du fait de son bailleur ; que rien ne permet de déterminer dans quels locaux ces constatations ont été faites puisqu'il est y est fait état d'une société EDIMAG ; que la société AILLEURS ne justifie pas davantage avoir, antérieurement à l'instance en référé introduite par la bailleresse, formé des réclamations en ce qui concerne l'installation électrique ;
Qu'il résulte de l'extrait K Bis versé aux débats que la société AILLEURS a commencé son activité le 1er janvier 2006 et est venue aux droits de la société COGIS plusieurs années après la prise d'effet du bail, en sorte que son affirmation selon laquelle elle n'a pas pu occuper les locaux loués n'est pas fondée ;
Considérant qu'en conséquence, il résulte des éléments soumis à l'appréciation de la cour qu'il n'existe aucune contestation sérieuse relative au respect par la SCI BD INDUSTRIE de son obligation de délivrance ; que l'ordonnance de référé entreprise doit être entièrement confirmée ;
Considérant que l'équité commande d'allouer à la SCI BD INDUSTRIE la somme de 3.000 € au titre des frais non compris dans les dépens d'appel ;
Considérant que la société AILLEURS, partie perdante, doit supporter les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
- CONFIRME l'ordonnance de référé entreprise en toutes ses dispositions, et, Y AJOUTANT,
- CONDAMNE la société AILLEURS à payer à la SCI BD INDUSTRIE la somme de 3.000 € (trois mille euros) au titre des frais non compris dans les dépens d'appel,
- CONDAMNE la société AILLEURS aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement par la SCP GAS, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Sylvie MANDEL, président, et par Sabine MAREVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,