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24/10/2007 | FRANCE | N°599

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0144, 24 octobre 2007, 599


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A
17ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 24 OCTOBRE 2007

R. G. No 06 / 02302

AFFAIRE :

X...Y... M... Z...épouse A...B...C...

C /
E. U. R. L. DRIVE LES MUREAUX
(ENSEIGNE MAC DONALD'S)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Mai 2006 par le Conseil de Prud'hommes de POISSY
Section : Commerce
No RG : 04 / 00450

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

A

U NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Anabella Y... M...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A
17ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 24 OCTOBRE 2007

R. G. No 06 / 02302

AFFAIRE :

X...Y... M... Z...épouse A...B...C...

C /
E. U. R. L. DRIVE LES MUREAUX
(ENSEIGNE MAC DONALD'S)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Mai 2006 par le Conseil de Prud'hommes de POISSY
Section : Commerce
No RG : 04 / 00450

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Anabella Y... M... Z...épouse A...B...C...
19 chemin vert
78970 MEZIERES SUR SEINE

comparant en personne, assistée de Me Virginie D..., avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C 2504

APPELANTE
****************

E. U. R. L. DRIVE LES MUREAUX (ENSEIGNE MAC DONALD'S)
Rue de Seine
Bp 2006
78132 LES MUREAUX CEDEX

représentée par Me Jean-Marie ALEXANDRE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 3

INTIMEE
****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Septembre 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Régine CAPRA, Conseiller chargé (e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :

Madame Marie-Noëlle ROBERT, conseiller faisant fonction de président,
Madame Sylvie BOURGOGNE, conseiller,
Madame Régine CAPRA, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Catherine E...,

EXPOSE DU LITIGE

Suivant contrat à durée indéterminée, Mme X...A...Silva C...a été engagée par l'E. U. R. L. Drive les Mureaux, locataire-gérant de la société McDonald's France, le 25 mai 1994, en qualité d'équipière, moyennant un salaire brut mensuel s'élevant en dernier lieu à 2 084,21 euros.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective de la restauration rapide.

Au mois de janvier 2002, Mme A...Silva C...a été nommée assistante du personnel.

Elle a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire le 16 septembre 2004. Après entretien préalable le 23 septembre 2004, elle a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 27 septembre 2004.

Contestant son licenciement, Mme A...Silva C...a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy aux fins d'obtenir la condamnation de la société Drive les Mureaux à lui payer les sommes suivantes :

-4 168,72 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-416,68 euros au titre des congés payés y afférents,
-1 024,59 euros à titre de rappel de salaire,
-120,45 euros au titre des congés payés y afférents,
-2 084,21 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
-38 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
-1 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

L'employeur a sollicité à titre reconventionnel l'allocation d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par jugement du 18 mai 2006, le conseil de prud'hommes de Poissy a :

-dit que le licenciement de Mme A...Silva C...reposait sur une faute grave,

-débouté Mme A...Silva C...de l'ensemble de ses demandes,

-condamné Mme A...Silva C...à verser à la société Drive Les Mureaux la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

-condamné Mme A...Silva C...aux dépens, y compris ceux afférents aux actes et procédures d'exécution éventuels.

La salariée a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Mme A...Silva C...demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de juger que :

-son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-la société Drive les Mureaux devra lui verser les sommes suivantes :

-4 168,72 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-416,68 euros au titre des congés payés y afférents,
-1 024,59 euros à titre de rappel de salaire,
-120,45 euros au titre des congés payés y afférents,
-2 084,21 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
-38 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
-1 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes de Poissy, et capitalisation des intérêts en vertu de l'article 1154 du Code civil.

Mme A...Silva C...conteste avoir commis les faits qui lui sont imputés dans la lettre de licenciement. Elle fait valoir :

-qu'il lui est reproché d'avoir procédé à l'embauche d'un étudiant étranger n'ayant pas d'autorisation de travail, alors que c'est le directeur du restaurant qui a procédé à l'entretien de recrutement et qui a signé le contrat de travail,

-qu'elle est accusée de malversation financière, sans aucune preuve,

-qu'il lui est reproché, sans d'ailleurs que ces faits aient été évoqués lors de l'entretien préalable, de ne pas tenir compte de la législation sociale, des contrats de travail et des disponibilités des différents salariés lors de l'établissement des plannings, alors que le logiciel dont elle dispose est programmé pour éviter que des planifications non conformes à ces éléments soient validées et qu'elle n'a pas ôté cette sécurité,

-qu'il lui est reproché d'avoir violé la législation sociale spécifique aux mineurs, sans que l'employeur fasse état d'un quelconque fait précis.

Elle souligne que son préjudice moral est important, tant en raison de la procédure vexatoire suivie, l'entretien préalable à son licenciement s'étant déroulé dans la salle de restauration, aux heures d'ouverture au public, et ayant été précédé d'une mise à pied immédiate sous le regard des autres salariés, qu'en raison du fort sentiment d'injustice éprouvé, eu égard à l'investissement dont elle avait fait preuve dans son travail.

La société Drive les Mureaux sollicite la confirmation du jugement entrepris, le rejet des demandes de la salariée et la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

L'employeur soutient, à titre principal, que Mme A...Silva C..., qui était en charge depuis janvier 2002, en sa qualité d'assistante du personnel, de la gestion du personnel du restaurant McDonald's des Mureaux, sous la responsabilité du gérant, puis à compter du 1er avril 2004 d'un directeur, a commis des fautes graves dans l'exécution de son travail. Il reproche à la salarié :

-d'avoir intégré dans l'entreprise un salarié étranger sans avoir vérifié au préalable son autorisation de travail sur le territoire français, alors qu'il lui appartenait de s'occuper des aspects administratifs de l'embauche et qu'une mise en garde lui avait été faite à la suite d'un rapport d'audit datant de mars 2004,

-de ne pas avoir immédiatement prévenu la direction de la disparition de tickets restaurant et de chèques-vacances, ne l'avisant des faits que deux mois plus tard,

-d'avoir établi et diffusé aux employés des plannings horaires comportant de nombreuses anomalies, en s'affranchissant volontairement des sécurités du logiciel utilisé,

Il fait valoir subsidiairement que si la faute grave n'était pas retenue, les faits dénoncés constitueraient à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Il estime très subsidiairement que les sommes réclamées à titre de réparation sont exorbitantes et que le préjudice moral allégué n'est pas établi. Il indique que tout entretien préalable a lieu dans la salle de restauration, conformément aux directives de la société McDonald's, pour se prémunir de toute accusation, notamment d'une accusation de harcèlement sexuel, compte-tenu de l'exiguïté des locaux.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

EXPOSE DES MOTIFS

Considérant que la lettre de licenciement notifiée à Mme A...Silva C..., qui fixe les limites du litige, est rédigée en ces termes :

" Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements constitutifs d'une faute grave :

En tant qu'" Assistante du personnel ", vous êtes responsable des formalités liées à l'embauche des différents salariés dans notre société et vous êtes tenue de vérifier toutes les obligations pesant sur l'employeur.

Or, le directeur du restaurant, M. Daniel F..., s'est aperçu à la mi-août dernier que vous aviez intégré au sein de l'entreprise, le 24 mai 2004, M. ABROUG G..., de nationalité tunisienne, sans avoir au préalable vérifié son autorisation de travail sur le sol français. Celui-ci n'avait pas d'autorisation de travail et ne bénéficiait que d'une " carte de séjour " sans mention " salarié ". M. Daniel F...a donc averti le gérant de la société, M. Eric H..., dès son retour de congés au début septembre, de vos agissements.

Seule la mention " salarié " autorise son titulaire à exercer une activité professionnelle en France et, par application de l'article L. 341-6 du code de travail, nul ne peut directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France.

C'est l'employeur qui est en infraction lorsqu'il emploie un étranger non autorisé à travailler. Ce délit est puni de sanctions pénales : d'une peine d'emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 15 000 euros et le juge peut en outre prononcer des peines complémentaires.

Vous étiez parfaitement au courant de ces différentes obligations.

D'autre part, nous nous sommes aperçus, début septembre dernier, de plusieurs malversations financières concernant les remises de tickets restaurants et de chèques vacances dont vous aviez la charge. En effet, plusieurs de ces remises ont disparu et n'ont jamais été créditées auprès de notre établissement bancaire, et ce pour un montant total de 1498,08 euros suivant le détail si dessous :

-Le 01 Juillet 2004
Tickets restaurants pour une valeur de 823,80 euros (735,22 euros et 88,58 euros)
Chèques vacances pour une valeur de 80,00 euros (2 fois 40,0 euros)

-Le 02 Juillet 2004
Tickets restaurants pour une valeur de 182,11 euros.
Chèques vacances pour une valeur de 10,00 euros.

-Le 24 Juillet 2004
Tickets restaurants pour une valeur de 196,38 euros.
Chèques vacances pour une valeur de 100,00 euros.

-le 30 Juillet 2004
Tickets restaurants pour une valeur de 85,79 euros.
Chèques vacances pour une valeur de 20,00 euros.

Les plannings horaires des employés dont vous avez la charge ont aussi révélé plusieurs anomalies. Il apparaît que les plannings affichés au sein du restaurant (en retard le plus souvent) ne tiennent aucunement compte des disponibilités des différents salariés, vous ne respectez pas non plus leurs horaires contractuels et faites même fi des contraintes sociales obligatoires liées au travail des mineurs. Vous aviez pourtant bénéficié de plusieurs formations sur le plan social ainsi que sur l'organisation des plannings et aviez même fait l'objet de plusieurs observations dans le rapport d'audit social effectué le 03 mars 2004.

Cette conduite met en cause la bonne marche de la Société. Les explications recueillies auprès de vous en cours de notre entretien du 23 septembre 2004 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute.

Compte tenu de la gravité de celle-ci, votre maintien dans la Société s'avère impossible. Le licenciement prend donc effet immédiatement à la date de présentation de cette lettre, sans indemnisation de préavis ni de licenciement.
La période non travaillée du 16 septembre 2004 à la date de présentation de cette lettre, nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement, ne sera pas rémunérée. " ;

Considérant que s'il est constant que Mme A...Silva C...occupait depuis janvier 2002 la fonction d'assistante du personnel et s'il ressort des bulletins de salaire versés aux débats que lui était reconnue la qualification niveau 4, échelon 1, aucun avenant à son contrat de travail initial d'équipier polyvalent n'a été signé, ni aucune description de ses nouvelles fonctions établie ; qu'il n'est pas contesté qu'elle exerçait ses fonctions sous la responsabilité du gérant, M. H..., puis, à compter de la création d'un poste de directeur en avril 2004, sous la responsabilité de ce dernier, M. I..., sans bénéficier d'aucune délégation de pouvoir ;

Considérant que dans la lettre de licenciement il est fait grief à Mme A...Silva C...d'avoir intégré au sein de l'entreprise, le 24 mai 2004, M. Ihsen J..., de nationalité tunisienne, sans avoir au préalable vérifié son autorisation de travail sur le sol français ; qu'il ressort effectivement des pièces produites que M. J...a été engagé par la société Drive Les Mureaux le 24 mai 2004 alors qu'il ne bénéficiait pas à cette date d'une autorisation de travail, celle-ci ne lui étant accordée que le 30 août 2004 ; qu'il résulte cependant de l'attestation de M. J...versée aux débats que c'est M. I..., le directeur, qui avait " fait " l'entretien de recrutement ainsi que le contrat ; que si l'employeur indique, en réponse à cette attestation, que M. I...a effectivement procédé à l'entretien d'embauche mais n'a pas assisté à la signature du contrat de travail par le salarié, ayant lui-même signé ce contrat par avance du fait de ses vacances, et soutient qu'il appartenait à Mme A...Silva C..., lors de la venue du salarié pour la signature du contrat, de procéder aux vérifications de la situation administrative de celui-ci, celle-ci fait observer qu'elle n'avait pas accès au dossier de l'intéressé ;

Considérant que si le rapport d'audit social établi par la société McDonald's le 5 mars 2004, indique que pour les salariés de nationalité étrangère, il faut joindre au titre de séjour la photocopie de leur autorisation de travail, citant à cet égard le nom de deux salariés, et relevant que, pour quatre salariés, le numéro des titres de séjour et leur date d'expiration ne sont pas mentionnés sur le contrat de travail, cela ne permet pas d'imputer la responsabilité de la vérification de la situation administrative des salariés étrangers à l'assistante du personnel plutôt qu'au gérant ;

Considérant qu'il n'est pas établi, en l'absence de tout descriptif du poste d'assistante du personnel, que la vérification de la situation administrative de M. J...incombait à celle-ci plutôt qu'au directeur qui procédait à l'entretien et décidait de l'embauche ; que le grief allégué de ce chef sera en conséquence déclaré non fondé ;

Considérant que dans la lettre de licenciement il est également fait état de ce que l'employeur s'est aperçu, début septembre 2004, de plusieurs malversations financières concernant des remises de tickets restaurants et de chèques vacances d'un montant total de 1 498,08 euros dont Mme A...Silva C...avait la charge, plusieurs de ces remises n'ayant jamais été créditées en banque et ayant disparu ; que si l'employeur précise qu'il n'entendait pas imputer dans cette lettre, aux termes ambigus, la responsabilité des détournements à Mme A...Silva C..., mais qu'il lui reprochait d'avoir tardé à l'informer de leur existence, la salariée soutient dans la lettre adressée

en réponse à son employeur, le 4 octobre 2004, avoir signalé les faits à plusieurs reprises au directeur ainsi qu'au gérant, au retour de congés de celui-ci ; qu'aucun des éléments versés aux débats ne permet d'établir que Mme A...Silva C...ait dissimulé à son employeur l'existence des détournements, ni même tardé à l'en aviser ; que le grief allégué de ce chef sera en conséquence déclaré non fondé ;

Considérant que dans la lettre de licenciement il est aussi fait grief à Mme A...Silva C...d'avoir établi des plannings horaires comportant des anomalies, l'employeur indiquant que les plannings affichés au sein du restaurant, en retard le plus souvent, ne tenaient pas compte des disponibilités des salariés, des horaires contractuels et enfreignait les règles concernant le travail des mineurs ;

Considérant que Mme A...Silva C...allègue que ces faits n'ont pas été évoqués lors de l'entretien préalable, ainsi qu'elle l'a relevé dans le courrier adressé à son employeur à réception de sa lettre de licenciement ; que cependant, à supposer cette irrégularité établie, elle constituerait une irrégularité de forme, qui n'empêcherait pas le juge de retenir les faits litigieux comme constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il n'y a pas lieu dès lors d'écarter le grief ci-dessus évoqué ;

Considérant que si, s'agissant du travail des mineurs, aucun fait précis pouvant donner lieu à vérification n'est allégué, il est établi par l'employeur, qui produit un état informatique des anomalies constatées pour la période du 25 juillet au 21 août 2004, que les plannings que l'assistante du personnel était chargée d'établir ne respectaient pas toutes les obligations légales et contractuelles, alors que le logiciel utilisé ne permettait de valider de tels plannings qu'après s'être affranchi du respect des " contraintes sociales " qu'il intègre ; que Mme A...Silva C...conteste cependant avoir volontairement agi sur le paramétrage du logiciel pour désactiver le contrôle du respect des règles légales et conventionnelles qu'il comporte ; qu'il n'est pas établi en l'espèce qu'elle ait, au-delà de simples erreurs, délibérément enfreint ces règles dans l'établissement des plannings, dont elle précise, sans être contredite, qu'elle les soumettait avant diffusion au directeur ;

Considérant que si l'employeur souligne que Mme A...Silva C...a fait l'objet de plusieurs observations dans le rapport d'audit social établi par la société McDonald's le 5 mars 2004, il y a lieu de relever que ce rapport, qui ne fait pas référence à l'intéressée, ne formule aucune observation concernant l'utilisation faite, dans l'entreprise, du logiciel permettant d'établir les plannings ; que le locataire-gérant, M. H..., à qui ce rapport a été transmis, ne justifie pas avoir mis en garde la salariée ; qu'aucune faute ne peut dès lors être retenue à l'encontre de Mme A...Silva C...de ce chef ;

Considérant que l'employeur ne rapporte pas dès lors la preuve, qui lui incombe, d'une faute grave du salarié, c'est-à-dire d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié constituant une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise durant la durée du préavis ; qu'il n'est pas non plus établi au vu des éléments versés aux débats de faute imputable au salarié constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Poissy et de déclarer le licenciement de Mme A...Silva C...dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Considérant que la salariée est bien fondée à solliciter dès lors le paiement des salaires qu'elle aurait dû percevoir si elle n'avait pas fait l'objet d'une mise à pied conservatoire injustifiée à compter du 16 septembre 2004 jusqu'à son licenciement ; qu'il convient en conséquence de condamner la société Drive Les Mureaux à payer à Mme A...Silva C...la somme de 1 024,59 euros de ce chef et celle de 102,45 euros au titre des congés payés y afférents ;

Considérant que la salariée est également bien fondée à solliciter le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis ; que le délai de préavis stipulé par la convention collective de la restauration rapide étant de deux mois, il lui sera alloué la somme de 4 168,42 euros réclamée de ce chef, outre la somme de 416,84 euros correspondant aux congés payés y afférents ;

Considérant que la convention collective de la restauration rapide applicable en l'espèce prévoit l'allocation d'une indemnité de licenciement équivalant à 1 / 10ème de mois par année d'ancienneté ; qu'il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande de la salariée tendant à l'allocation d'une somme de 2 084,21 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Considérant qu'au moment de son licenciement, Mme A...Silva C...avait au moins deux ans d'ancienneté et que l'EURL Drive Les Mureaux employait habituellement au moins onze salariés ;

Considérant qu'en application de l'article L 124-14-4 du Code du travail, la salariée peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts qu'elle a perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement, soit en l'espèce 12 438,64 euros ;

Considérant qu'en raison de l'âge de la salariée au moment de son licenciement,29 ans, de son ancienneté,10 ans, et du préjudice matériel et moral qu'elle a nécessairement subi, il convient de lui allouer la somme de 23 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant que les conditions vexatoires de ce licenciement, intervenu brutalement, après une mise à pied conservatoire et un entretien préalable organisé dans la salle du restaurant pendant les heures d'ouverture au public, ont en l'espèce causé un préjudice moral distinct à la salariée ; qu'il convient de lui allouer la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi de ce chef ;

Considérant que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce à compter du 24 novembre 2004 ;

Considérant que les créances indemnitaires que constituent l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et les dommages-intérêts pour préjudice moral distinct porteront quant à elles intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;

Considérant qu'il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;

Considérant qu'en application de l'article L 122-14-4 du Code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société Drive Les Mureaux aux organismes concernés, parties au litige par l'effet de la loi, des indemnités de chômage qu'ils ont versées à Mme A...Silva C...à concurrence de six mois ;

Considérant que la société Drive Les Mureaux qui succombe à l'instance doit supporter les dépens et qu'il est équitable de la condamner à payer à Mme A...Silva C...une indemnité pour les frais irrépétibles qu'elle a supportés de 1 500 euros ; qu'elle doit être déboutée de sa propre demande de ce chef, tant en première instance qu'en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La COUR,
Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme le jugement du conseil des prud'hommes de Poissy du 18 mai 2006 et statuant à nouveau :

Condamne l'EURL Drive Les Mureaux à payer à Mme X...A...Silva C...les sommes suivantes :

-1 024,59 euros à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied injustifiée,

-102,45 euros au titre des congés payés y afférents,

-4 168,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-416,68 euros au titre des congés payés y afférents,

-2 084,21 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

-23 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral distinct ;

Dit que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement porteront intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2004 ;

Dit que les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;

Déboute Mme A...Silva C...du surplus de ses demandes ;

Ordonne le remboursement par la société Drive Les Mureaux aux organismes concernés des indemnités de chômage qu'ils ont versées à Mme A...Silva C...à concurrence de six mois ;

Déboute la société Drive Les Mureaux de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en première instance ;

Y ajoutant :

Condamne la société Drive Les Mureaux à payer à Mme A...Silva C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Déboute la société Drive Les Mureaux de sa demande d'indemnité de procédure en cause d'appel ;

Condamne la société Drive Les Mureaux aux dépens.

Arrêt et signé par Madame Marie-Noelle ROBERT, Conseiller faisant fonction de Président, et signé par Madame Armelle K...faisant fonction de greffier présent lors du prononcé.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0144
Numéro d'arrêt : 599
Date de la décision : 24/10/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Poissy, 18 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2007-10-24;599 ?
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