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20/09/2007 | FRANCE | N°454

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0087, 20 septembre 2007, 454


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 28A

3ème chambre
(Renvoi après Cassation)

ADD

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 20 SEPTEMBRE 2007

R. G. No 06 / 06813

AFFAIRE :

Jean A...

C /

Odette B... épouse A...
...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Mars 2001 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 05
No Section : A
No RG : 98 / 6688

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :

-SCP GAS
-

SCP FIEVET-LAFON
-SCP JUPIN et ALGRIN
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 28A

3ème chambre
(Renvoi après Cassation)

ADD

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 20 SEPTEMBRE 2007

R. G. No 06 / 06813

AFFAIRE :

Jean A...

C /

Odette B... épouse A...
...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Mars 2001 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 05
No Section : A
No RG : 98 / 6688

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :

-SCP GAS
-SCP FIEVET-LAFON
-SCP JUPIN et ALGRIN
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDEUR devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (1ère chambre civile) du 25 avril 2006 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de VERSAILLES (1ère chambre 1ère section) le 6 février 2003 et INTIME

Monsieur Jean A...
né le 26 Février 1934 à Paris 18ème
de nationalité FRANCAISE
...
92600 ASNIERES

représenté par la SCP GAS, avoués-No du dossier 20060799
plaidant par Me GERARD-PAILLARD, avocat au barreau de PARIS

****************

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI et APPELANTE

1 / Madame Odette B... Veuve A...
née le 08 Juin 1936 à CLICHY 92 (92110)
...
Appartement 58
92150 SURESNES

représentée par la SCP FIEVET-LAFON, avoués-No du dossier 261258
plaidant par Me DERSOIR, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI et INTIMEE

2 / S. A. SOCIETE GENERALE
29 boulevard Haussmann
75454 PARIS CEDEX 09
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP JUPIN et ALGRIN, avoués-No du dossier 0023495

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Juin 2007, Monsieur Marc REGIMBEAU, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Joëlle BOURQUARD, Président,
Monsieur Marc REGIMBEAU, Conseiller,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claire THEODOSE
FAITS, PROCEDURE, et DEMANDES DES PARTIES

Le litige oppose, au sujet de la succession de M. Gabriel A..., décédé le 1er octobre 1995, son fils unique, M. Jean A..., né en 1934 de son union avec Mme Georgette NICKLAUS, aujourd'hui décédée, à Mme Odette A... née F..., épouse en seconde noces du défunt.

M. Jean A... suspectant Mme Odette F... Veuve A... de détournement de fonds à partir de comptes, et celle-ci suspectant le premier nommé de détournements de dividendes, les deux parties ont obtenu, suivant deux ordonnances de référé du 25 novembre 1996, la désignation de M. MASGNAUX, en qualité d'expert, lequel a vu sa mission étendue à l'examen des comptes pour 1990 et 1991 par une 3o ordonnance du 2 juillet 1997.

Le 10 novembre 1997 deux rapports, l'un sur les comptes de la succession, l'autre sur ceux de la société RICIKA, ont été déposés.

Par acte d'huissier du 12 mai 1998, M. Jean A... a saisi le tribunal de grande instance de NANTERRE au fond, en liquidation-partage de la succession, concluant notamment, à ce que Mme Odette F... veuve A... soit reconnue coupable de recel, et condamnée à rapporter à la succession la somme de 5. 880. 585 francs.

A la suite de cette assignation, le tribunal de grande instance de Nanterre a rendu le 22 mars 2001, le jugement objet de la présente instance.

Par arrêt du 25 avril 2006, la Cour de cassation a, au visa des articles 16,410 et 514 du nouveau code de procédure civile, cassé et annulé un arrêt rendu sur appel de Mme Odette F... veuve A..., par la cour d'appel de céans le 6 février 2003, mais seulement en ce qu'il avait condamné Mme Odette F... veuve A... à reverser à la succession la somme de 629. 429,52 euros.

Sont donc définitives, les dispositions suivantes de cet arrêt, par lesquelles la Cour a :

-donné acte à Mme Odette F... veuve A... de son désistement d'action à l'égard de la SA SOCIETE GENERALE,

-débouté Mme Odette F... veuve A... de sa demande d'indemnisation pour l'assistance apportée à son époux,

-débouté Mme Odette F... veuve A... de sa demande aux fins de voir M. Jean A... privé de tout droit sur la quotité disponible,

-attribué à titre préférentiel à Mme Odette F... veuve A... les lots 48 et 39 du règlement de copropriété de l'immeuble sis 6 promenade Saint-Leufroy à Suresnes,

-dit que les actions de la Société RICIKA données par M. Gabriel A... à son petit fils Alain sont retournées dans le patrimoine de M. Gabriel A... du fait du décès de M. Alain A...,
-confirmé le jugement en ce qu'il a :

. dit que Mme Odette F... veuve A... n'était pas convaincue de recel successoral,

. attribué à M. Jean A... le surplus des biens, dont les actions de la société RICIKA, et les véhicules dont M. Gabriel A... était propriétaire au jour du décès,

. mis hors de cause la SA SOCIETE GENERALE et la société RICIKA,

-condamné Mme Odette F... veuve A... à payer au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

. 1. 524,49 euros à M. Jean A...,
. 762,25 euros à la SA SOCIETE GENERALE,
. 762,25 euros à la Société RICIKA

-condamné Mme Odette F... veuve A... aux entiers dépens d'appel.

------

La Cour est saisie, dans une composition différente, sur renvoi après cassation de cet arrêt.

M. Jean A... se trouve ainsi appelant du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 22 mars 2001, mais seulement en ce qu'il a, sur son assignation, statué comme il suit :

-Vu le rapport de M. MASGNAUX, Expert Judiciaire en date du 6 novembre 1997 :

-Vu les conclusions récapitulatives no 4 de M. Jean A... ;

Constate que Mme Odette A... est hors d'état de justifier d'une différence entre les recettes de M. Gabriel A... et les dépenses de leur couple qu'elle était seule à gérer, de 1990 au décès de son mari, à raison de 4. 128. 787 francs.

Dit qu'elle doit, en conséquence, rapporter ou reverser cette somme à la succession de M. Gabriel A....

Dit que le compte no 50299909 à la SOCIETE GENERALE est un compte dépendant de la succession de M. Gabriel A..., la banque ne justifiant pas de l'accord donné par celui-ci à sa transformation de compte personnel en un compte joint entre lui et son épouse.

------

Mme Odette F... veuve A... demande à la Cour de :
-la recevoir en ses conclusions, la déclarer bien fondé, et y faire droit,
-constater que la demande de rapport formulée par M. Jean A... ne repose sur l'existence d'aucune libéralité prouvée, et, par voie de conséquence, rejeter cette demande,
-dire et juger que les fonds gérés par elle, Mme Odette F... veuve A...,4. 536. 213 francs (691. 541 euros) pendant la période 1992 à 1995, n'ont fait l'objet de la part de M. Gabriel A..., d'aucune réclamation,

-vu les articles,1539-1540, du Code Civil, dire qu'il n'y a pas lieu, pour elle, de rendre compte, des fruits de sa gestion, et, qu'en l'absence, de demande de reddition de comptes, portant sur des actes d'aliénation, aucune restitution, ne peut-être ordonnée,
-vu l'arrêt de la Cour de Cassation, dire et juger que les dépenses effectuées, pendant la période des années 1990-1991, d'un montant de 5. 033. 018 francs (767. 278 euros) ont été ordonnées et faites sous la seule responsabilité de M. Gabriel A..., comme M. Jean A... l'a lui-même reconnu dans trois écrits, et ne peuvent, de ce fait, être prises en compte, les annuler purement et simplement,
-subsidiairement, si par impossible, la Cour estimait ne pas avoir suffisamment d'informations, il y aurait lieu de désigner, un nouvel expert, avec mission de revoir les comptes de 1992 à 1995 exclusivement ; ainsi que l'examen du montant des dividendes, non distribués, et qui auraient du être perçus par M. Gabriel A... de1991 à1996, exercice 1995, indiquer la valeur des actions faisant partie du Patrimoine,

-dire que l'examen des chèques ne sera repris qu'à partir de 10. 000 francs (1. 524. 50 euros),
-dire et juger que depuis,10 ans, M. Jean A... présente au débat un acte de propriété tronqué (35 pages au lieu de 41 pages), ayant omis d'y annexer, le pouvoir de son père,

-dire et juger qu'elle bénéficiera dans le partage des 3 / 4 de l'appartement conjugal, au lieu de la moitié, volonté express de M. Gabriel A... qui a signé et paraphé cet acte,

-dire et juger, que M. Jean A... a falsifié un document officiel, qui a eu pour but, de rompre l'égalité de partage, fraude commise sciemment,
-dire et juger, qu'aux termes d'une donation entre vifs, du : 06 / 02 / 1992, M. Gabriel A... avait fait donation, à ses deux petits fils, Alain, et Guy, de la nue-propriété, de 999 actions à chacun avec l'obligation d'un paiement d'usufruit de 30. 000 francs ou 4. 573 euros pour chacun, annuellement. Aucun des deux petits fils, ne s'est acquitté, du paiement, de cet usufruit,

Alain, est décédé, en mars 1993, les 999 actions données, sont retournées, dans le patrimoine de son grand-père..
Guy, au décès de son grand-père, a repris ces 999 actions données,

-dire que l'inexécution, des conditions et des charges, de cette donation, n'ont pas été respectées et qu'il conviendra de procéder à leur réintégration, dans la masse successorale,
-dire et juger que M. Jean A..., s'est rendu coupable de recel successoral, et en tirer toutes les conséquences de droit, article 792, il a falsifié, les chiffres de 1990 et 1991, pour un montant de : 4. 256. 627 francs ou 648. 918 euros depuis 10 ans, il a prétendu, que seuls,1. 500. 000 francs ou 228. 673 euros, étaient rapportables à la succession, son Conseil, son défunt Comptable et son Notaire, depuis 1996, ne font état, que d'un rapport à la succession de 159. 800 francs ou 24. 361 euros, alors que l'expert judiciaire, et, telle était sa mission, a reconnu, que 3. 500. 000 francs (533. 571 euros) plus les dividendes de 1991, d'un montant de 159. 800 francs ou 24. 361 euros devaient faire, partie, de la masse successorale, à partager,

Que M. Gabriel A..., était vivant de 1991 à 1995, qu'il n'a perçu aucun dividende, pour les 2 / 3 de ses actions,
-dire et juger que le montant des 3995 actions, dont la majorité du capital appartient à la succession en fonction des droits de chacun font partie de la masse successorale à partager,
-lui donner acte de ce qu'elle n'a jamais contesté, mais au contraire, reconnu depuis le 03 mars 1997, qu'elle devait rapporter, à la succession 755. 000 francs ou 115. 099 euros, et, qui sont pour partie, compensables, avec les sommes, que, la succession lui doit, pour les avances faites,-dire et juger que les assurances-vie de 650. 000 francs ou 99. 092 euros plus celle de 500. 000 francs (76. 224 euros), ne doivent pas faire partie de la succession, les impôts ayant été réglés par Mme Odette F... veuve A...,
-constater, que la SA SOCIETE GENERALE a reconnu le caractère joint du compte no 050299909, ouvert dans ses livres, au nom des époux A...,
-constater, qu'aux termes, de l'article 767 du Code Civil, elle peut prétendre du quart en usufruit des biens composant la succession de son défunt époux,

-condamner M. Jean A... aux entiers dépens qui comprendront l'intégralité des frais d'expertise,
-débouter, purement et simplement, M. Jean A..., de l'ensemble de ses écritures, et, notamment, des conclusions signifiées, le 16 avril 2007,

-condamner M. Jean A..., au paiement, d'une somme de 10. 000 euros, à titre de dommages et intérêts et 5. 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

------

M. Jean A... a conclu :

-débouter Mme Odette F... veuve A... de l'ensemble de ses demandes,
-à titre principal, confirmer le jugement en ce qu'il a :
. constaté que Mme Odette F... veuve A... était hors d'état de justifier d'une différence entre les recettes de M. Gabriel A... et les dépenses de leur couple qu'elle était seule à gérer, de 1990 au décès de son mari, à raison de 4. 128. 787 francs (629. 429,52 euros),
. dit qu'elle doit rapporter ou reverser cette somme à la succession de M. Gabriel A...,

-à titre subsidiaire, si la Cour venait à estimer que l'expert n'a pas tenu compte pour l'établissement de son rapport définitif du dire que lui avait transmis Mme Odette F... veuve A... et qu'il n'a pas rempli sa mission en respectant le principe du contradictoire,
-nommer un nouvel expert qui aura pour mission d'examiner les comptes de M. et Mme A... de 1990 à 1995 et ce aux frais partagés des parties,

-surseoir à statuer sur le quantum des sommes que devra reverser Mme Odette F... veuve A... à la succession,
-à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour venait à estimer qu'elle peut être saisie des demandes de Mme Odette F... veuve A... relatives à la société RICIKA, il conviendrait d'ordonner une expertise pour examiner les comptes de cette société,
-en tout état de cause,
-condamner Mme Odette F... veuve A... à verser au concluant une somme de 3. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
-condamner Mme Odette F... veuve A... en tous les dépens.

------

La SA SOCIETE GENERALE a conclu :

-la mettre hors de cause,

-condamner M. Jean A... à lui payer 2. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

et les entiers dépens d'appel.

DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que M. Jean A... expose que :

-en 1953, à l'occasion de son mariage avec Mme Marguerite B..., s œ ur aînée de Mme Odette B..., cette dernière a fait la connaissance de M. Gabriel A... et de Mme Georgette NICKLAUS,

-à partir de cette date, Mme Odette B... est devenue un élément perturbateur pour la famille,

-lui et son épouse Marguerite, n'ont appris la liaison entre M. Gabriel A... et Mme Odette B... qu'en 1969, quelques mois avant le suicide de Mme Georgette NICKLAUS, épouse A...,

-cette situation était inacceptable pour le fils et la belle-fille de Mme Georgette NICKLAUS, épouse A...,

-M. Gabriel A... avait une autre maîtresse, Mme Henriette B., et il poursuivit cette relation malgré son mariage, en 1983, avec Mme Odette B...,

-Mme Georgette NICKLAUS, épouse A..., est décédée à Asnières le 28 novembre 1969 laissant son mari survivant commun en biens et usufruitier légal du quart de la succession et lui, M. Jean A..., son fils unique seul héritier,

-un acte de liquidation partage a été dressé par Maître DARPHIN, Notaire à Asnières le 4 décembre 1970,

-après le décès tragique de Mme Georgette NICKLAUS et en vue du règlement de sa succession, M. Gabriel A... a fait un « partage officieux » pour se rembourser de l'argent qu'il avait prêté à son fils pour acheter la maison de campagne en déduisant le prix de celle-ci de la part de ce dernier ; contrairement à ce que prétend la partie adverse, cette maison a bien été vendue à M. Jean A..., comme l'atteste Maître CHEMEL dans son courrier du 12 mars 1964 : cette maison n'a jamais fait partie de la succession de Mme Georgette A... ni de celle de M. Gabriel A...,

-à la suite du décès de M. Gabriel A..., Maître VINCENT a dressé un acte de notoriété après décès le 23 janvier 1996, précisant les droits du conjoint survivant et du seul et unique héritier, M. Jean A...,

-après différents rendez-vous entre les ayants droit et en présence de leurs notaires respectifs, il est apparu que Mme Odette F... veuve A... ne donnait pas toutes les explications souhaitées sur un certain nombre de mouvements de fonds qui pouvaient paraître suspects ;

-Sur les comptes des époux A... et la gestion de Mme Odette F... veuve A...

Considérant que M. Jean A... estime que :

-il peut valablement fonder sa demande tendant à voir condamner Mme Odette F... veuve A... à reverser la somme de 4. 128. 787 francs, sur les comptes figurant au rapport de M. MASGNAUX,

-Mme Odette F... veuve A... n'ayant reçu aucun mandat exprès de gestion de M. Gabriel A..., seules les dispositions de l'article 1540 du Code civil qui exigent que le mandataire rende compte, seraient applicables, alors que Mme Odette F... veuve A... n'a pas rendu compte, ni expliqué l'utilisation de la somme de 4. 943. 797 francs, de sorte que si les articles 1539 et 1540 du Code civil étaient jugés applicables, il conviendrait de constater qu'elle ne peut s'en prévaloir pour justifier l'utilisation de la somme de 4. 943. 797 francs,

-Mme Odette F... veuve A... est mal fondée à soutenir qu'en l'absence de demande de reddition de compte, aucune restitution ne peut être ordonnée ;

Que Mme Odette F... veuve A... soutient de son côté, que :

-elle a agi en vertu d'un mandat que M. Gabriel A... lui a donné le 25 mars 1992, une grande partie des dépenses effectuées à partir de ses comptes, a été ordonnée par lui, et le surplus fait en vertu de la procuration, ou d'un mandat tacite de gestion, et rien ne peut donc lui être reproché,

-les opérations litigieuses, relèvent des articles 1539 et 1540 du Code civil, ce que selon elle la Cour de Cassation aurait reconnu,

-aucun de ces articles ne permet de fonder les demandes de M. Jean A... ;

Mais considérant que dès lors que l'expert judiciaire n'a pas tenu compte pour l'établissement de son rapport définitif du dire que lui avait transmis Mme Odette F... veuve A..., et qu'il a ainsi violé le principe du contradictoire, ce rapport ne peut pas fonder une décision judiciaire ;

Qu'il y a donc lieu de reprendre l'examen de l'ensemble des moyens des parties ;

Considérant que l'absence de demande de reddition de compte par M. Gabriel A... de son vivant, n'interdit nullement à son ayant-droit de le faire après son décès ;

Que Mme Odette F... veuve A... verse aux débats une procuration à son profit sur le compte no 50299909 ouvert à la SA SOCIETE GENERALE au nom du défunt, datée du 25 mars 1992 ;

Que pour ce compte, sont donc applicables les dispositions de l'article 1539 du Code civil, selon lequel " si pendant le mariage, l'un des époux confie à l'autre l'administration de ses biens, les règles du mandat sont applicables. L'époux mandataire est toutefois dispensé de rendre compte des fruits, lorsque la procuration ne l'y oblige pas expressément " ;

Que la procuration ne mentionne aucune obligation de rendre compte des fruits ;

Qu'il en résulte que Mme Odette F... veuve A... doit rendre compte, en ce qui concerne le compte no 50299909 ouvert à la SA SOCIETE GENERALE de l'usage de capitaux, mais non des fruits ;

Que les réclamations de M. Jean A... de ce chef ne peuvent donc prospérer qu'autant qu'il s'agit d'opérations sur capitaux ;

Que si Mme Odette F... veuve A... prétend que M. Jean A... n'émet aucune réclamation au titre de capitaux, il convient d'observer que la nature desdites réclamations n'est pas précisées ;

Qu'en tout état de cause seule une mesure d'expertise est susceptible d'éclairer la cour sur la nature des sommes manquantes ;

Que pour le surplus, c'est à dire pour les autres opérations effectuées par Mme Odette F... veuve A..., en l'absence d'éléments de preuve d'une opposition de M. Gabriel A... à la gestion de son épouse, et n'étant pas contesté que cette gestion était connue de lui, il y a lieu de faire application de l'article 1540 du code civil qui dispose que : " Quand l'un des époux prend en main la gestion des biens de l'autre, au su de celui-ci, et néanmoins sans opposition de sa part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d'administration et de gérance, mais non les actes de disposition.
Cet époux répond de sa gestion envers l'autre comme un mandataire. Il n'est cependant, comptable que des fruits existants ; pour ceux qu'il aurait négligé de percevoir ou consommé frauduleusement, il ne peut être recherché que dans la limite des 5 dernières années. " ;

Que pour ces actes, Mme F... veuve Odette A... ayant été assignée par acte d'huissier du 12 mai 1998, elle ne peut donc valablement être recherchée que pour les fruits existants, et les opérations sur capitaux, sans limitation de durée, et pour les fruits qu'elle aurait négligé de percevoir ou consommé frauduleusement, pour ceux effectués depuis le 12 mai 1993 seulement ;

Que Mme Odette F... veuve A... prétend qu'aucune des réclamations de M. Jean A... n'entrent dans cette définition ;

Que cependant la cour ne disposant pas d'éléments de détermination suffisants, en l'état de l'absence de validité de l'expertise de M. MASNIAUX, il échet de recourir à expertise sur ce point, depuis le 1er octobre 1990, point de départ non critiqué de la mission du précédent expert ;

-Sur le point de départ de la reddition de compte due par Mme Odette F... veuve A... sur le compte no 50299909

Considérant que Jean M. A... demande que l'expert examine les comptes depuis le 1er octobre 1990 ;

Que Mme Odette F... veuve A... affirme que durant ces exercices, les comptes ont été gérés par M. A... et n'avaient rien à voir avec la succession, ni la gestion de son épouse ;

Mais considérant qu'il n'est pas possible de déduire du seul fait que Mme Odette F... veuve A... avait accepté que la mission de l'expert nommé en référé fût étendue aux exercices 1990 / 1991, qu'elle était l'auteur des opérations faites pendant ces exercices, puisque la décision du juge des référés du 2 juillet 1997 étendant la mission confiée à l'expert à l'examen des comptes de M. Gabriel A... au titre de ces deux années était exécutoire par provision ;

Que si M. Jean A... invoque au soutien de sa demande, le fait qu'il aurait constaté des anomalies dans les comptes, et que son père avait été atteint d'une attaque cérébrale en 1989 et n'avait plus la même vigilance, il ne propose à la cour aucun élément de preuve de ce que celui-ci aurait été frappé d'incapacité, ou victime de pressions illicites, ou de fraudes ;

Que par suite la mission de l'expert ne saurait concerner que la période postérieure au 25 mars 1992, date de la procuration ;

-Sur les demandes de Mme Odette F... veuve A... relatives à l'appartement de Suresnes

Considérant que M. Jean A... fait justement valoir que la cour n'est pas saisie de ce point de litige, seule faisant l'objet d'une cassation, la question du montant du reversement de fonds auquel Mme Odette F... veuve A... a été condamnée ;

-Sur la demande de Mme Odette F... veuve A... relative aux dividendes de la société RICIKA

Considérant que la demande de Mme Odette F... veuve A... de ce chef porte sur des dividendes qui n'auraient pas été distribués de 1991 à 1996 ;

Que dés lors ces dividendes ne sont pas entrés dans le patrimoine du défunt ;

Que par suite Mme Odette F... veuve A... ne peut qu'être déboutée de ce chef de demande ;

-Sur l'interprétation du testament du 21 juillet 1987 et la validité de la donation

Considérant que la cour n'est pas saisie, aux termes de la cassation, de l'interprétation du testament de M. Gabriel A..., faite par le tribunal et la cour d'appel, et que Mme Odette F... veuve A... voudrait remettre en cause ;

-Sur la nature du compte no 50299909

Considérant que Mme Odette F... veuve A... soutient que ce compte était un compte joint, ce que M. Jean A... conteste ;

Mais considérant que Mme Odette F... veuve A... ne rapporte pas la preuve que ce compte était joint, le fait qu'elle ait pu effectuer des opérations sous sa signature s'expliquant par la procuration dont elle disposait, et le simple avis de la SA SOCIETE GENERALE ne pouvant pas en tenir lieu ;

Qu'elle sera donc déboutée de sa demande de ce chef ;

-Sur les actions de la société RICIKA

Considérant qu'ainsi que la cour l'a dit plus haut, l'arrêt de la cour du 6 février 2003 est définitif sur ce point ;

-Sur les donations au profit des petits-enfants, le recel successoral de M. Jean A... et l'intégration à la succession des contrats d'assurance-vie

Considérant que la cour n'est pas saisie de ces points de litige, aux termes de la cassation prononcée ;

Que Mme F... veuve Odette A... sera donc déboutée de ces demandes ;

-Sur les demandes de la SA SOCIETE GENERALE

Considérant que la SA SOCIETE GENERALE fait valoir que Mme Odette F... veuve A... s'était désistée de ses demandes à son encontre devant la cour d'appel, dans l'instance avant cassation, et que rien ne lui est demandé, de sorte qu'elle devrait être mise hors de cause ;

Considérant que rien n'est demandé à la SA SOCIETE GENERALE ;

Que Mme Odette F... veuve A... s'était bien désistée devant la cour, dans la précédente instance ;

Que la SA SOCIETE GENERALE doit donc être mise hors de cause ;

-Sur la demande au titre des frais irrépétibles

Considérant qu'il y a lieu en équité d'allouer à la SA SOCIETE GENERALE la somme de 1. 000 euros à la charge de M. Jean A..., et de rejeter les autres demandes, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

-Sur les dépens

Considérant qu'il y a lieu de réserver les dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 22 mars 2001, l'arrêt de la cour d'appel de céans du 6 février 2003, et l'arrêt de la cour de cassation du 25 avril 2006,

Déclare la SA SOCIETE GENERALE hors de cause, et dit que M. Jean A... devra lui verser la somme de 1. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Déboute Mme Odette F... veuve A... de ses demandes relatives au compte joint, aux actions et dividendes de la société RICIKA, à la donation entre époux et au testament de M. Gabriel A..., à la réintégration des assurances vie à l'actif successoral, au recel de succession de M. Jean A..., et à l'appartement de Suresnes,

Dit que les l'article 1539 et 1540 du code civil son applicables au litige concernant la reddition de compte de Mme Odette F... veuve A...,
Dit qu'en application de ces textes, Mme Odette F... veuve A... doit rendre compte, en ce qui concerne le compte numéro no 50299909 ouvert à la SA SOCIETE GENERALE de l'usage de capitaux, mais non des fruits, et ce depuis le 25 mars 1992 jusqu'au décès,

Dit que pour les autres opérations de Mme Odette F... veuve A..., celle-ci n'est comptable que des capitaux et des fruits existants, depuis le 1er octobre 1990, et, pour les fruits qu'elle aurait négligé de percevoir ou consommés frauduleusement, depuis le 12 mai 1993 seulement, le tout jusqu'au décès,

Et avant dire droit sur la demande de M. Jean A... aux fins de reversement de fonds par Mme Odette F... veuve A..., ordonne une mesure d'expertise, et commet :

M. DEVYS Bertrand,
Expert près la Cour d'Appel de VERSAILLES
D. V. A.,3, Rue Petigny,78000 VERSAILLES, Tél. : 01. 30. 97. 08. 78

en qualité d'expert, lequel aura pour mission, après avoir pris connaissance du dossier, entendu les parties et tous sachants, et s'être fait remettre tous documents utiles, et notamment le rapport de l'expert MASGNAUX, de :

-examiner les comptes de M. Gabriel A... et de Mme Odette F... veuve A...,

-proposer à la cour une liste des opérations en capitaux opérées par Mme Odette F... veuve A... sur le compte no 50299909 ouvert à la SA SOCIETE GENERALE, depuis le 25 mars 1992 jusqu'au décès, en précisant les explications proposées par elle, et faire le compte des opérations inexpliquées,

-proposer à la cour une liste des autres opérations de Mme Odette F... veuve A..., portant sur les fruits existants, et les capitaux depuis le 1er octobre 1990, en précisant les explications proposées par elle, et faire le compte des opérations inexpliquées,

-proposer à la cour une liste des autres opérations de Mme Odette F... veuve A..., portant sur les fruits qu'elle aurait négligé de percevoir, mais depuis le 12 mai 1993 seulement, le tout jusqu'au décès, en précisant les explications proposées par elle, et faire le compte des opérations inexpliquées,

-proposer à la cour une liste des autres opérations de Mme Odette F... veuve A..., portant sur les fruits qu'elle aurait consommé, mais depuis le 12 mai 1993 seulement, le tout jusqu'au décès, en précisant les explications proposées par elle, et faire le compte des opérations inexpliquées, en relevant tous éléments d'information assortis dans la mesure du possible de preuves, susceptibles de caractériser la fraude.

Dit que l'expert commis, saisi par le service des expertises de la cour d'appel de Versailles, devra procéder personnellement à ses opérations, mais qu'il pourra néanmoins recueillir l'avis d'un autre Technicien mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne, accomplir sa mission,

Dit que l'expert devra procéder à ses opérations en présence des parties ou elles dûment appelées, suivant les règles de l'article 160 du nouveau code de procédure civile, les entendre en leurs dires, explications et réclamations et y répondre et, lorsque ces observations seront écrites, les joindre à son rapport si les parties le demandent et faire mention de la suite qui leur aura été donnée,

Dit que l'expert devra impartir aux parties un délai de rigueur pour déposer les pièces justificatives qui lui paraîtraient nécessaires et, éventuellement, à l'expiration dudit délai, saisir, en application de l'article 275, alinéa 2 du nouveau code de procédure civile, le magistrat chargé du contrôle des expertises pour faire ordonner la production de ces documents s'il y a lieu sous astreinte ou, le cas échéant, être autorisé à passer outre, poursuivre ses opérations et conclure sur les éléments en sa possession,

Dit que l'expert devra vérifier que les parties ont été à même de débattre des constatations ou des documents au vu desquels il entend donner son avis,

Dit que l'expert devra communiquer aux parties la teneur de son rapport (par un pré-rapport) en leur enjoignant de lui faire connaître leurs observations dans un délai d'un mois, à l'expiration duquel l'expert achèvera son rapport en répondant aux observations des parties : et que s'il n'a reçu aucune observation, il le précisera,

Dit que si l'expert se heurte à des difficultés qui font obstacle à l'accomplissement de sa mission ou si une extension de celle-ci s'avère nécessaire il en rendra compte au juge,

Dit que l'expert devra déposer rapport de ses opérations au service des expertises de la cour d'appel de Versailles dans un délai de 5 MOIS à compter du jour où il aura été avisé de la réalisation de la consignation, sauf prorogation de délai expressément accordé par le Juge chargé du contrôle,

Dit que l'expert indiquera sur la page de garde de son rapport le numéro du rôle de l'affaire et de la chambre,

Subordonne l'exécution de la présente décision en ce qui concerne l'expertise à la consignation à la Régie des Avances et Recettes de la cour d'appel de Versailles par M. Jean A... d'une avance de 5. 000 euros dans un délai de 2 mois à compter du prononcé de la présente décision,

Rappelle qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque en vertu de l'article 271 du nouveau code de procédure civile,

Dit que lors de la première ou, au plus tard, de la deuxième réunion des parties, l'expert dressera un programme de ses investigations et évaluera d'une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et de ses débours,

Dit qu'à l'issue de cette réunion l'expert fera connaître au juge chargé du contrôle des expertises la somme globale qui lui parait nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et de ses débours et sollicitera, le cas échéant, le versement d'une consignation complémentaire,

Dit que l'expert informera le juge de l'avancement de ses opérations et de ses diligences,

Dit qu'au cas d'empêchement, retard ou refus de l'expert commis il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête,

Désigne le magistrat chargé du contrôles des expertises pour surveiller les opérations d'expertise,

Rejette les autres demandes,

Réserve les dépens.

-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

-signé par Madame Joëlle BOURQUARD, Président et par Madame THEODOSE, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : 454
Date de la décision : 20/09/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nanterre, 22 mars 2001


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2007-09-20;454 ?
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