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10/10/2006 | FRANCE | N°633

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0003, 10 octobre 2006, 633


COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80C 6ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 10 OCTOBRE 2006 R.G. No 06/00506 AFFAIRE : Société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL en la personne de son représentant légal C/ Vahid X... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2005 par le Conseil de Prud'hommes de ST GERMAIN EN LAYE Section : Encadrement No RG :

05/00167 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS LE DIX OCTOBRE DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant

dans l'affaire entre : Société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL en la p...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80C 6ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 10 OCTOBRE 2006 R.G. No 06/00506 AFFAIRE : Société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL en la personne de son représentant légal C/ Vahid X... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2005 par le Conseil de Prud'hommes de ST GERMAIN EN LAYE Section : Encadrement No RG :

05/00167 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS LE DIX OCTOBRE DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL en la personne de son représentant légal 24 rue du Commandant Guilbaud 75116 PARIS Non comparante - Représentée par Me GIRAUD-VAN GAVER Chantal, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 53 APPELANTE Monsieur Vahid X... ... Non comparant - Représenté par Me BERTRAND Jean-Jacques, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 36 INTIMÉ Composition de la cour : L'affaire a été débattue le 05 Septembre 2006, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur François BALLOUHEY, président,

Madame Béatrice BIONDI, Conseiller,

Monsieur Hubert LIFFRAN, conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE FAITS ET PROCÉDURE,

Statuant sur l'appel régulièrement formé par la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL d'un jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye rendu par la Section Encadrement, le 19 décembre 2005, qui, dans un litige l'opposant à Monsieur X..., a :

prononcé la résolution judiciaire du contrat de travail conclu entre Monsieur X... et la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL; condamné la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à verser à Monsieur X... les sommes suivantes :

2.631.301, 82 ç sur le fondement de l'article L 122-3-8 du Code du travail

850.000 ç à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L 122-4-5 du Code du travail;

ordonné l'exécution provisoire sur la moitié des sommes sur le fondement de l'article 515 du nouveau code de procédure civile;

condamné la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à verser à Monsieur X... la somme de 2.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

condamné la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL aux ASSEDIC sur justificatif 180 allocations journalières;

ordonné la délivrance des documents sociaux actualisés (certificat de travail, attestation ASSEDIC);

débouté Monsieur X... du surplus de ses demandes;

Condamné la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL aux éventuels dépens.

Par contrat à durée déterminée du 1er juillet 2003, Monsieur Vahid X... a été engagé par la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL en qualité d'entraîneur général de l'équipe professionnelle de football, pour une durée de quatre saisons sportives, du 1er juillet 2003 au 30 juin 2007. Le contrat prévoyait que le salarié percevrait une rémunération mensuelle brute de 85.000 ç, ainsi que diverses primes.

Par avenant du 7 juillet 2003 au contrat de travail, les parties ont convenu que Monsieur X... exercerait en outre les fonctions de

manager sportif et qu'il serait chargé à ce titre de l'élaboration de la politique sportive de l'entreprise en collaboration avec le Président-directeur général, Monsieur Y...;

Le 23 juillet 2003 ont été conclus entre les parties un contrat d'entraîneur professionnel de football homologué par la Ligue nationale de football, ainsi qu'un avenant à ce contrat reprenant les clauses du contrat à durée déterminée du 1er juillet 2003 relatives à la rémunération du salarié.

Le 6 février 2005, l'équipe de football du Paris Saint Germain a perdu un match contre l'équipe de Lens.

Le 8 février 2005, Monsieur X... s'est vu remettre en mains propres la lettre suivante, ainsi rédigée :

"Je vous confirme que nous vous dispensons de vous présenter à l'entraînement à compter de demain, 9 février 2005, et ce, jusqu'à nouvel ordre."

L'employeur a envoyé par la voie postale une lettre en date du 8 février 2005, reçue par le salarié le 10 février 2005, ainsi rédigée :

"Nous vous informons que nous envisageons de procéder à la rupture anticipée de votre contrat de travail.

"Afin d'entendre vos explications sur les faits qui vous sont reprochés, nous vous convoquons à un entretien préalable qui aura lieu le jeudi 17 février 2005 à 10 heures (...).

"Dans l'attente de cet entretien, nous avons décidé de procéder à une mise à pied conservatoire.

"Nous vous demandons de ne plus vous présenter à votre poste de travail jusqu'à la notification de notre décision."

Le 17 février 2005, Monsieur X... a été informé par son employeur du report de l'entretien préalable au 25 février, compte tenu d'impératifs de dernière minute.

Le 23 février 2005, Monsieur X... a envoyé une lettre à son employeur ainsi rédigée :

"(...)

"Le 8 février 2005, la Direction a décidé sans aucun motif de mettre un terme à notre collaboration et de me retirer avec effet immédiat toutes mes fonctions et attributions.

"Dès le 9 février, j'ai été effectivement remplacé dans l'intégralité de celles-ci, respectivement par Messieurs Laurent Z... et Alain A....

"Il s'agit donc d'une modification unilatérale de nos conventions à laquelle je n'ai pas donné mon accord. Une telle modification s'analyse en une rupture unilatérale, prématurée et abusive du contrat de travail qui nous lie.

"Je ne peux donc que prendre acte de cette rupture dont vous devez supporter l'entière responsabilité.

"Le caractère vexatoire, brutal et public qui s'y ajoute me fait subir un préjudice considérable.

"Dès lors, la procédure de rupture de mon contrat de travail que vous avez cru devoir entreprendre à mon égard ne constitue qu'un artifice puisque, comme je l'ai déjà rappelé, votre décision définitive à mon égard a déjà été prise et révélée immédiatement et publiquement.

"Dans ces conditions, je n'ai pas à me présenter à la convocation d'entretien préalable que vous avez reportée au 25 février prochain". Par lettre du 2 mars 2005, Monsieur X... a été licencié pour faute grave.

Imputant la rupture de son contrat de travail à son employeur en invoquant des manquements de celui-ci à ses obligations contractuelles, Monsieur X... a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes.

Par conclusions écrites déposées et visées par le greffier, et soutenues oralement à l'audience, la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL demande à la cour de :

Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye;

Statuant à nouveau

A titre principal,

Constater que Monsieur X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 23 février 2005, alors qu'il était déjà mis à pied à titre conservatoire dans le cadre d'une procédure de licenciement engagée à son encontre depuis le 8 février 2005;

Dire et juger qu'à défaut pour ce dernier de caractériser des manquements graves du PSG à ses obligations contractuelles élémentaires, cette prise d'acte produit les effets d'une démission; En conséquence,

Débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes;

Condamner Monsieur X... à rembourser à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL les sommes qui lui ont été octroyées au titre de l'exécution provisoire;

A titre subsidiaire,

Dire et juger que le licenciement intervenu postérieurement à la prise d'acte de la rupture est inopérant.

En conséquence,

Débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes;

A titre reconventionnel,

Condamner Monsieur X... à payer à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL la somme de 2.341.301,82 ç pour rupture anticipée de son contrat à durée déterminée et ce à titre de dommages-intérêts;

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a octroyé

la somme de 850.000 ç de dommages-intérêts à Monsieur X..., qui devra être débouté de cette demande;

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses autres chefs de demandes;

Condamner Monsieur X... à payer à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL la somme de 15.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A l'appui de ses demandes, la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL fait valoir, notamment, que la dispense d'activité, notifiée à Monsieur X... dans le cadre d'une procédure de licenciement, le 8 février 2005, avec son remplacement concomitant dans des fonctions qui ne pouvaient rester vacantes, ne peut être qualifiée de modification unilatérale du contrat de travail par l'employeur, et qu'il convient dès lors de donner à la prise d'acte de la rupture les effets d'une démission; que si la presse a interprété la suspension d'activité ainsi prononcée comme un limogeage pur et simple en considérant que Monsieur X... avait été définitivement remplacé par messieurs Z... et A..., c'est en dépit des indications contraires que Monsieur Y..., Président-directeur général de la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL, lui avait fournies; que si le communiqué paru sur le site Internet officiel du club, le 8 février 2005, faisait état du départ de Monsieur X..., il n'était destiné qu'à des tiers ne maîtrisant pas les subtilités de la procédure et était sans incidence sur la portée juridique des échanges intervenus entre Monsieur X... et Monsieur Y...;

Par conclusions écrites déposées et visées par le greffier, et soutenues oralement à l'audience, Monsieur X... demande à la cour de :

Constater que l'appel formé par la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL est purement dilatoire et abusif;

Condamner sur le fondement de l'article 599 du nouveau code de procédure civile la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL au paiement d'une somme de 850.000 ç;

Débouter la

Débouter la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL de toutes ses demandes, fins et conclusions;

Dire et juger que Monsieur X... a, à bon droit, pris acte de la rupture de son contrat de travail à effet du 8 février 2005;

Dire et juger que du fait de cette prise d'acte, aucune faute grave ne peut être invoquée à l'encontre de Monsieur X...;

Dire et juger que la rupture anticipée du contrat de travail de Monsieur X... est imputable à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL qui a mis un terme sans son accord à toutes ses fonctions à compter du 8 février 2005, et qu'elle est en conséquence abusive;

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résolution judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... aux torts exclusifs de la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL ;

Confirmer la condamnation de la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à verser aux ASSEDIC sur justificatif 180 allocations journalières;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à verser à Monsieur X... la somme de 2.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Condamner la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à réparer le préjudice de Monsieur X... ;

Dire l'appel incident formé par Monsieur X... recevable et bien fondé;

Réformer la décision entreprise quant au montant des condamnations prononcées;

Et, statuant à nouveau,

Condamner la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à payer à Monsieur X... les sommes suivantes:

4.692.221, 82 ç pour la période du 9 février au 30 juin 2007;

634.560 ç à titre d'indemnité d'ancienneté par application de l'article 686 de la Charte du football professionnel;

200.000 ç en réparation du préjudice social subi par Monsieur X...;

400.000 çen réparation du préjudice commercial subi par Monsieur X...;

1.112.080 ç à titre de dommages-intérêts complémentaires et distincts pour perte de chance;

1.903.680 ç à titre de dommages-intérêts complémentaires et distincts pour préjudice moral, personnel, professionnel et familial;

Ordonner à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL la justification du versement des cotisations sociales aux organismes obligatoires au titre des condamnations prononcées, et ce, sous astreinte journalière de 100 ç;

Ordonner à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL la délivrance d'un certificat de travail conforme, sous astreinte journalière de 100 ç;

Ordonner à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL la délivrance d'une attestation ASSEDIC, sous astreinte journalière de 100 ç;

Dire et juger que toutes les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes;

Condamner la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à payer à Monsieur X... la somme de 15.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Condamner la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL en tous les dépens.

A l'appui de ses demandes relatives à sa prise d'acte de la rupture, Monsieur X... fait valoir, notamment, que son employeur a, par un courrier qu'il lui a remis en main le 8 février 2005, décidé unilatéralement et sans motif, de lui retirer avec effet immédiat l'intégralité de ses fonctions et attributions, qu'il a annoncé le jour même sur le site internet officiel du Paris Saint Germain sa décision de mettre un terme à sa collaboration avec son manager général, ce qui a été repris le soir même par de nombreux sites Internet nationaux et internationaux et a fait l'objet des gros titres de certains quotidiens nationaux; que Monsieur Y... a annoncé publiquement et officiellement dès le 9 février 2005, son limogeage et son remplacement définitif par messieurs Z... et A...; qu'il a ainsi procédé à une modification unilatérale des conditions d'exécution de son contrat de travail, ce qui s'analyse en une rupture unilatérale, prématurée et abusive de celui-ci;

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, ainsi qu'aux prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessus.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'imputabilité de la rupture :

Attendu que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause

réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission; que le contrat étant rompu par la prise d'acte du salarié, l'initiative prise ensuite par l'employeur de le licencier est non avenue;

Que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige; que le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit;

Attendu que, du fait de la prise d'acte par le salarié le 23 février 2005, la rupture du contrat de travail doit être fixée en toute hypothèse à cette date; que c'est donc à tort que le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye a prononcé la résolution judiciaire du contrat de travail; que son jugement doit être infirmé sur ce point;

Attendu que Monsieur X... reproche à son employeur de lui avoir retiré, dès le 9 février 2005, toutes ses fonctions et attributions, faisant valoir qu'il s'agit là d'une modification unilatérale du contrat de travail à laquelle il n'a pas donné son accord;

Que, cependant, le retrait de ses fonctions et attributions, décidé le 8 février 2005 par l'employeur, dans le cadre d'une mise à pied conservatoire avec suspension de sa rémunération, a été suivie immédiatement de la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, le salarié ayant été convoqué par lettre en date du 8 février 2005, reçue le 10 février suivant, à un entretien préalable qui a eu lieu le 25 février suivant; que l'employeur était en droit, dans l'exercice de son pouvoir de direction de procéder à cette mise à pied conservatoire, dès lors que le maintien en fonction du salarié

pendant la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire lui paraissait impossible; que Monsieur X... ayant rendu sans effet son licenciement intervenu le 2 mars 2005, en prenant acte le 25 février 2005 de la rupture de son contrat de travail, il ne peut démontrer le caractère abusif du licenciement qui priverait d'effet la mise à pied conservatoire;

Que par son caractère conservatoire cette mise à pied ne saurait constituer, sauf abus, une modification unilatérale du contrat de travail;

Attendu que Monsieur X... fait également valoir que l'employeur avait, dès le 8 février 2005, pris la décision de se séparer définitivement de lui et l'avait immédiatement et publiquement révélée; que cependant, la lettre de son employeur datée du 8 février 2005 et reçue le 10 février 2005 se borne à lui annoncer sa mise à pied conservatoire, sans faire état d'une rupture de son contrat de travail; que si le site Internet officiel du PARIS SAINT GERMAIN a fait état, dès le 9 février 2005, du remplacement du salarié dans ses fonctions d'entraîneur et de manager général, cette communication ne permet pas à elle seule de qualifier ce remplacement de définitif; qu'il n'en demeure pas moins que Monsieur Y..., dans deux interviews accordés les 9 et 10 février 2005 au quotidien "L'EQUIPE" et à l'hebdomadaire "FRANCE FOOTBALL", a pris soin de préciser que le contrat de travail de Monsieur X... n'était que suspendu et la procédure de licenciement entamée; que le contrat passé avec Monsieur Z... précise qu'il s'agit du remplacement temporaire de Monsieur X... absent, ce contrat ne contient aucune indication laissant supposer que Monsieur X... est définitivement démis de ses fonctions ; qu'il ressort ainsi de ces déclarations et des explications des parties à l'audience que la décision relative à un éventuel licenciement de l'intéressé n'avait

pas encore été prise à la date de la prise d'acte de la rupture par le salarié;

Attendu que la défaite au Parc des Princes, le 6 février 2005, du PARIS SAINT GERMAIN contre le Racing-Club de Lens, faisant suite aux mauvais résultats de l'équipe depuis le début de la saison 2004-2005, tant dans le championnat national qu'en Coupe d'Europe des Clubs Champions, a placé la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL, confrontée à la pression de ses joueurs et de ses supporters, dont l'appui est essentiel à la vie d'un club de football professionnel, dans une situation particulièrement difficile exigeant une réaction immédiate de ses dirigeants, qui ne pouvait être que publique, compte tenu du rôle essentiel des médias dans la vie d'un grand club; que, dès lors, l'annonce publique de la mise à pied conservatoire de Monsieur X..., le 9 février 2001, ne présente aucun caractère vexatoire;

Qu'aucun des faits reprochés par le salarié à son employeur à l'appui de sa prise d'acte ne justifiant ainsi la rupture de son contrat de travail, la prise d'acte de cette rupture, le 23 février 2005, produit les effets d'une démission; Sur les demandes de Monsieur X... tendant au paiement d'indemnités pour préjudice social, d'indemnités pour préjudice commercial, de dommages-intérêts pour perte de chance et de dommages-intérêts complémentaires et distincts pour préjudice moral, personnel, professionnel et familial;

Attendu que la rupture du contrat de travail étant imputable à Monsieur X... et étant intervenue, dès lors, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-3-8 du Code du travail, celui-ci n'a pas droit à l'attribution de dommages-intérêts; qu'il convient, en conséquence, de le débouter de ces demandes; Sur la demande de Monsieur X... tendant au paiement de ses salaires pour la période du 9 février 2005 au 30 juin 2007 :

Attendu que la rupture du contrat de travail est intervenue le 23 février 2005 par une prise d'acte de rupture emportant les effets d'une démission de Monsieur X..., qu'aucune faute grave ne peut lui être reprochée ;

que celui-ci est dès lors en droit de prétendre au paiement de ses salaires pendant 14 jours correspondant à la période du 9 février au 23 février 2005, soit à la somme de 39.666,66 ç au paiement de laquelle il convient de condamner la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL; qu'il y a lieu, en revanche, de débouter Monsieur X... de sa demande de paiement des salaires pour la période du 24 février au 30 juin 2007, dès lors que la rupture de son contrat de travail lui est imputable;

Sur la demande d'indemnité d'ancienneté :

Attendu que l'article 686 de la Charte du Football Professionnel prévoit que l'entraîneur qui quitte son club de sa propre initiative perd le bénéfice de l'indemnité d'ancienneté due à tout éducateur responsable de la direction technique professionnelle, en cas de non-renouvellement de son contrat; que la rupture du contrat de travail lui étant imputable, il y a lieu, en conséquence, de débouter Monsieur X... de cette demande; Sur la demande de dommages-intérêts de la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL pour rupture anticipée par le salarié de son contrat de travail :

Attendu qu'en cas de rupture anticipée du contrat à durée déterminée par le salarié, l'employeur est en droit de prétendre, conformément aux dispositions de l'article L 122-3-8, alinéa 4, du Code du travail, au paiement de dommages-intérêts correspondant au préjudice subi par l'employeur du fait de cette rupture;

Que la cour, compte tenu des éléments produits par la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL et des explications des parties aux débats, est en mesure d'évaluer le préjudice à la somme de 80.000 ç

au paiement de laquelle il convient de condamner Monsieur X...;

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

Attendu que l'équité commande de laisser à chacune des parties la charge des frais irrépétibles qu'elles ont exposés en première instance et en appel;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

STATUANT en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement et statuant à nouveau,

DIT QUE la rupture du contrat de travail de Monsieur X... est intervenue le 23 février 2005 par sa prise d'acte de rupture du contrat de travail qui produit les effets d'une démission;

CONDAMNE la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL à payer à Monsieur X... la somme de :

39.666,66 ç

(TRENTE NEUF MILLE SIX CENT SOIXANTE SIX EUROS ET SOIXANTE SIX CENTIMES) à titre de paiement de ses salaires pour la période du 9 février 2005 au 23 février 2005 ;

CONDAMNE Monsieur X... à rembourser à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL les sommes que celle-ci lui a versées au titre

de l'exécution provisoire du jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye en date du 19 décembre 2005 avec intérêt de droit à compter de la notification du présent arrêt;

CONDAMNE Monsieur X... à payer à la société SASP PARIS SAINT GERMAIN FOOTBALL la somme de :

80.000 ç

(QUATRE VINGT MILLE EUROS) à titre de dommages-intérêts pour avoir rompu de façon anticipée son contrat de travail;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes;

LAISSE à chaque partie la charge des frais non compris dans les dépens

CONDAMNE Monsieur X... aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt prononcé par Monsieur François BALLOUHEY, Président, et signé par Monsieur François BALLOUHEY, Président, et par Monsieur Alexandre GAVACHE, Greffier présent lors du prononcé

Le GREFFIER,

Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0003
Numéro d'arrêt : 633
Date de la décision : 10/10/2006

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Prise d'acte de la rupture - Prise d'acte par le salarié - Cause - Manquements reprochés à l'employeur - Preuve - Effets - Détermination de l'imputabilité de la rupture

Dès lors qu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission; l'écrit par lequel le salarié prend acte de cette rupture ne fixant pas les limites du litige, le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même s'ils ne sont pas mentionnés dans l'écrit, afin de statuer sur l'imputabilité de la rupture. Il s'ensuit que, prétendant justifier une rupture imputable à son employeur, ne peut invoquer la modification unilatérale abusive de son contrat l'entraîneur d'une équipe professionnelle de foot-ball à qui, du fait des mauvais résultats de cette dernière, la société sportive a retiré toutes ses fonctions, dans le cadre d'une mise à pied conservatoire relevant des pouvoirs de direction de l'employeur et immédiatement suivie de la mise en oeuvre régulière d'une procédure de licenciement, la prise d'acte de la rupture par l'entraîneur, s'analysant en une démission, ayant privé le licenciement d'un quelconque effet


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Monsieur François BALLOUHEY, président,

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2006-10-10;633 ?
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