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23/06/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950538

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0144, 23 juin 2006, JURITEXT000006950538


COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80A 17ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 23 JUIN 2006 R.G. No 05/02852 SB/AV AFFAIRE :

Thierry DE X... C/ S.A. SUEZ ENVIRONNEMENT ANCIENNEMENT ONDEO SERVICES Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Juillet 2004 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE Section : Encadrement No RG : 02/03111 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT TROIS JUIN DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Thie

rry DE X... 22,Rue Soufflot 75005 PARIS comparant, assisté de Me P...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80A 17ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 23 JUIN 2006 R.G. No 05/02852 SB/AV AFFAIRE :

Thierry DE X... C/ S.A. SUEZ ENVIRONNEMENT ANCIENNEMENT ONDEO SERVICES Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Juillet 2004 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE Section : Encadrement No RG : 02/03111 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT TROIS JUIN DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Thierry DE X... 22,Rue Soufflot 75005 PARIS comparant, assisté de Me Pierre CHAIGNE avocat au barreau de PARIS, vestiaire P278. APPELANT S.A. SUEZ ENVIRONNEMENT ANCIENNEMENT ONDEO SERVICES 18 Square Edouard VII 75009 PARIS représentée par Me Isabelle D'AUBENTON CARAFA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire G421. INTIMEE Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Avril 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BOURGOGNE, conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :

Madame Marie-Noùlle ROBERT, conseiller faisant fonction de président, Madame Patricia DEROUBAIX, conseiller,

Madame Sylvie BOURGOGNE, conseiller, Greffier, lors des débats :

Madame Nicole Y..., adjoint adùinistratif faisant fonction de greffier. Exposé des faits et de la procédure Thierry de X... est engagé le 24 janvier 1975 par la société Dumez travaux publics en

qualité d'ingénieur, puis, le 8 janvier 1998, il est engagé avec reprise d'ancienneté au 14 février 1975 par la société Lyonnaise des eaux, devenue la société Ondéo services puis Suez environnement, pour une affectation au Pakistan en qualité de directeur délégué, cadre position III C de la convention collective nationale des ingénieurs assimilés cadres des entreprises de travaux publics. Cette mission est interrompue en septembre 1998 en raison d'événements diplomatiques et politiques et il est expatrié dans différents pays (Roumanie, Chine et Corée). Sa rémunération annuelle garantie de base pour la France ressort dans son dernier état à la somme de 96.785 ç. Par lettre du 6 février 2002, Thierry de X... fait remarquer au président du groupe que depuis le 11 octobre 2001, aucun poste ne lui a été offert, malgré son ancienneté et son dévouement au service de la société. Il lui est proposé une affectation au Koweit dans le cadre d'une mise à disposition de la société Safege, filiale du groupe Suez environnement. Le 19 avril 2002, le conseil de Thierry de X... indique que celui-ci est disposé à envisager favorablement cette affectation mais souhaite que soient préalablement réglées les différentes difficultés qui avaient été soulevées pour pouvoir exercer sa mission en toute sérénité. Le 24 avril l'employeur lui demande de bien vouloir se mettre sans délai à la disposition de Safege dans le cadre de la future affectation au Koweit qui lui est proposée. Le même jour, Thierry de X... précise se mettre sans délai à la disposition de cette société, mais qu'il souhaite qu'avant toute nouvelle affectation, sa situation personnelle soit réglée par l'intermédiaire des avocats respectifs des parties qui sont déjà saisis. Le salarié reçoit ensuite un projet d' avenant à son contrat de travail ainsi qu'un ordre de mission de la société Safege et il lui est demandé de rejoindre son affectation "au plus tard à la fin de la semaine". Son conseil adresse à l'avocat

de l'employeur un courrier en date du 6 mai 2002 faisant état des conditions déplorables dans lesquelles le salarié a été traité depuis près de deux ans, et du souhait de celui-ci, non satisfait, de voir sa situation faire l'objet d'un examen complet. Il précise que dans ce contexte, répondre du jour au lendemain pour un départ au Koweit n'est ni sincère, ni convenable et que ce n'est qu'un artifice destiné à soutenir que Monsieur de X... aurait refusé son affectation et le licencier; que sauf contre indication de la part de l'employeur et l'indication des engagements et garanties de l'employeur sur l'avenir professionnel de l'intéressé, celui-ci ne peut que prendre acte de la rupture de son contrat, du fait de la société Ondéo Services. Convoqué le 7 mai 2002 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé le 29 mai suivant, Thierry de X... est licencié par lettre recommandée du 3 juin 2002 pour refus contractuel fautif de rejoindre sa nouvelle affectation au Koweit. Il est précisé: Vous avez toujours fait savoir que vous vouliez un poste à l'international et votre affectation a été maintenue à titre provisoire au sein de Ondéo Services pour vous permettre d'exécuter des missions rentrant dans le champ de votre compétence dans l'attente d'un poste à l'international. (...) Le poste que vous venez de décliner et qui correspond exactement à vos qualifications et compétence est le seul que nous ayons pu vous proposer avec certitude dans la mesure où votre future hiérarchie acceptait de ne prendre en compte que vs seules compétences professionnelles. Dans cette proposition, il a été fait abstraction des difficultés relationnelles constantes que vous avez rencontrées depuis près de trois ans avec les autres membres des équipes affectées à ces projets lors des missions que vous avez effectuées pour le compte de la direction des projets internationaux(...) (...) Faute de solutions immédiates au sein du groupe en début d'année

après de nombreuses tentatives sans aboutissement, il avait été étudié la possibilité de vous accompagner dans une démarche de reclassement externe au groupe, qui n'était envisagée qu'en support d'un nouvel emploi retrouvé à l'extérieur du groupe. (...) Pour vous permettre de prendre ce poste qui nécessitait d'urgence une courte mission d'expertise au Koweit, il vous été remis un projet d'avenant et votre lettre de mission pour effectuer ce voyage. Vous étiez attendu au Koweit d'urgence (...), pour réaliser une courte mission d'expertise d'une durée de huit jours. Vous avez pris vos congés payés déposés auparavant pour une durée de deux semaines alors que cette décision était incompatible avec la demande qui vous était faite de rejoindre de toute urgence le poste. (...) Contestant le motif de son licenciement, Thierry de X... saisit le Conseil de prud'hommes de Nanterre afin d'obtenir notamment le paiement des sommes suivantes: - 212.772 ç au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 136.467,33 ç à titre de rappel de salaire au titre du contrat d'expatriation, - 46.152 ç à titre de dommages et intérêts complémentaires, - 3.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par jugement prononcé le 6 juillet 2004, le Conseil de prud'hommes dit que le licenciement du salarié repose sur une cause réelle et sérieuse; que le contrat de travail au Pakistan a été régulièrement exécuté et qu'il ne prévoit pas de garantie d'emploi. Il déboute en conséquence le salarié de l'intégralité de ses demandes. Thierry de X... relève régulièrement appel de cette décision. Aux termes de conclusions déposées et soutenues à l'audience auxquelles la cour se réfère pour un plus ample exposé des faits et des moyens, Il demande la condamnation de l'employeur à lui verser les sommes de: -212 772 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, avec intérêts au taux légal à compter de la demande, -172 620,66 euros au

titre de son contrat d'expatriation au Pakistan des 8 et 19 janvier 1998, -4 784 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Il fait valoir: -qu'après son retour en France en octobre 2001, l'employeur a manqué à ses obligations en ne lui fournissant pas un travail effectif et ce jusqu'au mois d'avril 2002, pour lui demander ensuite d'accepter d'être détaché auprès de la société Safege et de partir immédiatement pour le Koweit en refusant d'examiner sa situation, -que l'employeur a provoqué artificiellement son licenciement, -qu'il n'a pas perçu la rémunération correspondante à sa mission au Pakistan et est fondé à en demander le paiement à laquelle il convient d'ajouter les conséquences fiscales en terme de revenus. Aux termes de conclusions déposées et soutenues à l'audience auxquelles la cour se réfère pour un plus ample exposé des faits et des moyens, la société Suez Environnement demande la confirmation du jugement déféré et la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle fait valoir: -que le salarié a mis fin à sa mission en Corée de sa seule initiative et sans préavis, -qu'il est devenu particulièrement difficile de lui trouver d'autres missions à l'étranger du fait notamment des conflits dont il était à l'origine ave les partenaires du groupe, -qu'elle a continué de le rémunérer après son retour de Corée, -que la mission au Pakistan a pris fin en raison de la situation locale et que l'intéressé a été intégralement indemnisé des dommages qu'il avait pu subir du fait de son retour prématuré de ce pays, -que la proposition de poste au Koweit était sérieuse et loyale en ce que la mise à disposition du salarié dans le cadre de cette mission ne modifiait en rien les relations contractuelles entre les parties et entrait dans les prévisions du contrat au titre de la clause de mobilité, -que le salarié, en l'absence de dispositions contractuelles en ce sens, voulait obtenir une garantie d'emploi jusqu'au 31 décembre 2003, aux

conditions financières du Koweit même si sa candidature était rejetée par les autorités compétentes de ce pays ou si la mission devait s'interrompre à la demande de Safege, -que la lettre de mission prévoyait qu'à la fin de cette mission, le salarié retrouverait un emploi au sein du groupe moyennant la rémunération attachée à son salaire de référence France, -que l'intéressé a donc de manière fautive refusé son affectation au Koweit et s'est placé volontairement en dehors des prévisions de son contrat en exigeant de son employeur, une expatriation qu'il s'employait à faire échouer pour tenter d'obtenir un départ négocié à ses propres conditions. Les parties précisent à l'audience qu'elles n'entendent pas se prévaloir de la prise d'acte de rupture du contrat de travail du salarié. Motifs de la décision Sur le bien fondé du licenciement Considérant que l'employeur soutient que le salarié s'est plaint de ce qu'il ne lui soit plus confié de mission à l'étranger alors qu'il ne pouvait exiger aux termes de son contrat de travail une affectation à l'étranger et qu'il a rempli loyalement ses obligations en recherchant en tout état de cause une telle mission de nature à répondre au souhait de l'intéressé; que cependant si l'on se réfère au courrier du conseil de Thierry de X... en date du 6 février 2002, celui-ci n'exige pas une telle affectation mais souligne que sa situation n'a pas fait l'objet d'un réexamen particulier et qu'il a dû satisfaire à diverses missions particulières sans continuité; que par ailleurs, il a dû faire face à une situation familiale très douloureuse du fait du décès de son épouse, lui laissant la charge de deux fils en cours d'études universitaires; que depuis son retour de Corée, il ne lui a pas été offert de poste bien qu'il ait été candidat à plusieurs affectations; Considérant que l'employeur fait état de ce que le poste au Koweit était le seul qui pouvait être proposé au salarié compte tenu des difficultés relationnelles

rencontrées par l'intéressé dans ces précédentes missions, en produisant une attestation du directeur des ressources humaines du siège de Ondéo Services en ce sens; que cependant aucune pièce de nature objective ne vient démontrer l'existence de telles difficultés, en ce qui concerneressources humaines du siège de Ondéo Services en ce sens; que cependant aucune pièce de nature objective ne vient démontrer l'existence de telles difficultés, en ce qui concerne notamment la rupture anticipée de la mission en Corée imputée au salarié, alors en outre, comme il a été dit plus haut, qu'il n'est pas établi que le salarié exigeait une affectation à l'étranger; Considérant que les parties sont tenues d'exécuter loyalement leurs obligations; que si le contrat de travail prévoyait une clause de mobilité, le salarié, compte tenu de son ancienneté, de son parcours professionnel et de sa situation familiale, pouvait légitimement souhaiter faire le point avec son employeur sur sa situation, comme il en a exprimé le souhait dès le 6 février 2002, pour examiner les solutions les plus favorables à l'évolution de sa carrière et les plus compatibles avec ses contraintes personnelles, sans être exposé à devoir partir en urgence pour une mission qu'il n'a pas refusée sous réserve précisément de l'examen de sa situation; Que dans ces conditions, le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse au regard des dispositions de l'article L. 122-14-3 du code du travail; Qu'il y a donc lieu d'infirmer la décision déférée sur ce point; Sur les conséquences du licenciement Considérant qu'il n'est pas prétendu que l'entreprise comptait moins de 11 salariés au moment du licenciement; qu'il y a donc lieu de faire application de l'article L. 122-14-4 du code du travail; Que compte tenu de l'ancienneté du salarié et des autres éléments du dossier, il y a lieu de fixer à 100 000 euros le montant de l'indemnité due au titre de la rupture injustifiée du contrat de

travail, les intérêts au taux légal ne pouvant courir qu'à compter de la notification du présent arrêt qui constate l'existence de la créance; Sur la demande au titre de la mission au Pakistan Considérant que le contrat du 8 janvier 1998 concernant l'affectation du salarié au Pakistan prévoit une durée de l'ordre de quatre ans prorogeable d'un commun accord; Considérant que les stipulations de durée envisagées dans un contrat d'expatriation et qui fixent un terme incertain à l'affectation du salarié ne constituent pas une clause de garantie d'emploi; Qu'en tout état de cause, un nouveau contrat a été signé le 20 janvier suivant par les parties, fixant à un an la durée de la mission au Pakistan, le contrat ne relevant plus du régime de l'expatriation; Que le salarié n'est donc pas fondé dans sa réclamation; Que la demande subséquente concernant les incidences fiscales pour le salarié de l'absence de la rémunération dont il réclame paiement doit par conséquent être également rejetée; qu'au demeurant, aucune pièce ne vient démontrer que l'intéressé aurait été dispensé du paiement de tout impôt au titre de l'expatriation; Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile Considérant qu'il y a lieu d'allouer à ce titre la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par ces motifs La Cour, Statuant publiquement, et par arrêt contradictoire, Infirme partiellement le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Nanterre le 6 juillet 2004, Statuant de nouveau, Dit que le licenciement de Thierry de X... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, Condamne la société Suez Environnement à verser à celui-ci la somme de 100 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement injustifié, avec intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt, Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement déféré, Y ajoutant, Condamne la société Suez Environnement à verser à Thierry

de X... la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Rejette la demande incidente formée au titre de cet article, Condamne la société Suez Environnement aux dépens. Arrêt prononcé par Madame Marie-Noùlle ROBERT, conseiller faisant fonction de président, et signé par Madame Marie-Noùlle ROBERT, conseiller faisant fonction de président et par Mme Catherine SPECHT, greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0144
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950538
Date de la décision : 23/06/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2006-06-23;juritext000006950538 ?
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