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20/06/2006 | FRANCE | N°05/01552

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11ème chambre, 20 juin 2006, 05/01552


COUR D'APPEL DE VERSAILLES
11ème chambre ARRET No contradictoire DU 20 JUIN 2006
R. G. No 05 / 01552
AFFAIRE : S. A. GRAND OPTICAL FRANCE C / Cécile X...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Février 2005 par le Conseil de Prud'hommes de VERSAILLES No RG : 03 / 01440
LE VINGT JUIN DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S. A. GRAND OPTICAL FRANCE 18 parc Ariane 5 rue Alfred Kastler 78284 GUYANCOURT CEDEX Représentée par Me Geneviève CATTAN-DERHY, avocat au barreau de NANTERRE, vestiaire : 702

APPELANTE
Madame Cécile X...... 91370 VERRIERES LE BUISSON Comparante en per...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES
11ème chambre ARRET No contradictoire DU 20 JUIN 2006
R. G. No 05 / 01552
AFFAIRE : S. A. GRAND OPTICAL FRANCE C / Cécile X...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Février 2005 par le Conseil de Prud'hommes de VERSAILLES No RG : 03 / 01440
LE VINGT JUIN DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S. A. GRAND OPTICAL FRANCE 18 parc Ariane 5 rue Alfred Kastler 78284 GUYANCOURT CEDEX Représentée par Me Geneviève CATTAN-DERHY, avocat au barreau de NANTERRE, vestiaire : 702 APPELANTE
Madame Cécile X...... 91370 VERRIERES LE BUISSON Comparante en personne, assistée de Me Bruno BENEIX-CHRISTOPHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0035 INTIMÉE
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Avril 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, vice-Présidente et Madame Christine FAVEREAU, conseillère, chargées d'instruire l'affaire. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Colette SANT, présidente,
Madame Christine FAVEREAU, conseillère,
Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, vice-Présidente, Greffier, lors des débats : Madame Sabine MAREVILLE,
FAITS ET PROCÉDURE, Cécile X... a été engagée à compter du 1er juillet 1991 en qualité d'opticienne débutante par la société GRAND OPTICAL FRANCE, puis est devenue directrice de magasin. Par lettre du 7 novembre 2003, elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 18 novembre 2003. Elle a été licenciée pour faute grave par courrier du 21 novembre 2003. Contestant cette mesure, elle a saisi le conseil de prud'hommes de VERSAILLES lequel par jugement en date du 23 février 2005, a condamné la société GRAND OPTICAL FRANCE au paiement des sommes suivantes :
12. 840, 30 ç à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 8. 694 ç à titre d'indemnité de préavis, 864, 40 ç à titre de congés payés, 37. 668 ç à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, 1. 759, 50 ç à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, 175, 95 ç à titre de congés payés afférents, 2. 898 ç à titre de 13ème mois, 1. 000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens. et ce avec intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2003, a ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration en date du 3 mars 2005, la société GRAND OPTICAL FRANCE a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier, soutenues oralement à l'audience, la société GRAND OPTICAL FRANCE demande à la cour de : infirmer le jugement dans son intégralité, débouter Cécile X... de ses demandes, condamner Cécile X... à restituer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement, condamner Cécile X... au paiement de la somme de 1. 000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. Elle fait valoir notamment que : la salariée a violé son obligation de loyauté en tentant de débaucher au profit de l'enseigne AFFLELOU plusieurs collaborateurs de la société GRAND OPTICAL FRANCE, son licenciement est donc fondé sur une faute grave, le 13ème mois n'est pas dû, la salariée étant absente au 31 décembre 2003,
Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier, soutenues oralement à l'audience, Cécile X... demande à la cour de : confirmer le jugement entrepris sauf à porter le montant des dommages et intérêts à la somme de 46. 360 ç avec intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2003, pour la partie supérieure à 37. 668 ç, condamner la société GRAND OPTICAL FRANCE au paiement de la somme de 5. 000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle soutient notamment que : les pièces versées aux débats par l'employeur n'apportent pas la preuve des faits allégués, elle apporte quant à elle la preuve des agissements de l'employeur à son encontre avant son licenciement. Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément aux dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'aux prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessus.
SUR CE, LA COUR
Sur la faute grave Considérant que la faute grave résulte d'un fait fautif ou d'un ensemble de faits fautifs imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié pendant la durée du préavis ;
Qu'en l'espèce la lettre de licenciement fait état des faits suivants : Vous avez émis le souhait de renoncer à vos responsabilités de Directrice de l'un de nos plus gros magasins pour raisons personnelles. S'il apparaît à la lecture de votre courrier en date du 14 octobre que vous souhaitiez intégrer une fonction à titre définitif au siège social, à aucun moment Monsieur B..., votre Responsable, ne vous a laissé entendre que nous serions en mesure d'accéder à votre demande. L'opportunité d'une mission au sein de la Direction Ressources Humaines s'est présentée à l'occasion du départ d'un chargé de recrutement. Vous avez accepté cette mission sans qu'une solution durable n'ait été envisagée avec certitude. Un chargé de recrutement ayant intégré cette structure en septembre, les besoins de la DRH ne nécessitaient pas la présence d'une collaboratrice supplémentaire. Or, par le passé, vous avez contribué à la formation de l'équipe de notre magasin de CERGY ; c'est pourquoi une mission similaire vous a été proposée dès le 20 octobre. A votre demande, nous n'avons pas manqué de préciser sur votre avenant au contrat que nous prendrions à notre charge les frais de déplacements associés à cette mission. De plus, conformément à votre souhait, nous avons mentionné sur ce même courrier, qu'à terme, nous entendions bien vous réintégrer à un poste de direction. Par un courrier du 22 octobre, vous contestez cette affectation provisoire sur le magasin de CERGY alors même que le souhait de ne plus occuper dans l'immédiat un poste de direction émane de vous. Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir qu'aucun poste correspondant à vos compétences n'est en voie de se libérer à ce jour ; aussi, notre intention réaffirmée dans l'avenant précité était de vous proposer, dès que possible, la direction d'un magasin nécessitant un investissement moins important en tant que Directeur. C'est dans ce contexte que nous avons pris connaissance du fait que vous aviez contacté, fin octobre 2003, certains salariés du magasin de Vélizy, où vous exerciez vos anciennes fonctions de directrice de magasin, afin de les inciter à quitter notre enseigne pour rejoindre une société concurrente. Vous avez ainsi reconnu avoir contacté Laurent C..., l'un de nos salariés. Nous pouvons d'autant moins tolérer de tels agissements que notre enseigne vous a donné les moyens pour évoluer de manière significative au cours de ces douze dernières années. Si nous comprenons votre désir de changement après douze années passées en magasin, rien ne justifie un tel comportement déloyal de votre part. Votre attitude nous est d'autant plus préjudiciable que nous évoluons sur un marché particulièrement concurrentiel où les enseignes se livrent une lutte acharnée pour attirer les candidats à l'embauche. A ce titre, votre position de Directrice aggrave davantage la portée de vos actes. Nous sommes par conséquent contraint de procéder à votre licenciement pour faute grave liée à une perte de confiance à votre égard pour avoir incité certains de nos salariés à rejoindre une société concurrente. ; Considérant que la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis, objectifs et vérifiables ;
Qu'en outre, la perte de confiance de l'employeur ne constitue pas en tant que telle une cause de licenciement, même quand elle repose sur des éléments objectifs ; que seuls ces éléments objectifs peuvent, le cas échéant, justifier le licenciement mais non la perte de confiance qui en a pu en résulter pour l'employeur ;
Qu'en l'espèce, l'employeur reproche à la salariée des actes déloyaux consistant à tenter de débaucher des salariés de l'entreprise au profit d'une société concurrente ;
Qu'à l'appui de ses griefs, la société GRAND OPTICAL FRANCE produit des attestations de trois salariés, mises en conformité avec dispositions du nouveau Code de procédure civile, lesquels salariés indiquent avoir été contactés par Cécile X... qui avait été leur directrice au sein du magasin de Vélizy, qui leur proposait dans l'éventualité de son départ chez un concurrent un poste au sein de l'entreprise concurrente ;
Que l'une des attestations (Sophie Y...) mentionne la date de la proposition 27 octobre 2003 et le nom du concurrent AFFLELOU ; Que Stéphane Z... indique également le jour de l'appel 28 octobre 2003 et précise qu'au cours de la conversation Cécile X... l'avait informé avoir contacté Laurent C... pour lui proposer un poste chez un concurrent et lui avait proposé également le même type de proposition ; Qu'enfin, Laurent C... confirme avoir reçu un appel téléphonique de Cécile X... sans préciser la date dont l'objet (était) de me proposer un poste dans une société d'optique concurrente ;
Que la lecture des trois attestations démontre que les faits se sont déroulés pour les trois salariés, y compris Laurent C..., dans le courant du mois d'octobre 2003 ;
Que l'attestation du délégué ayant assisté Cécile X... lors de l'entretien préalable confirme l'existence de cette conversation téléphonique avec Laurent C..., Cécile X... l'ayant d'emblée reconnue alors même que l'employeur n'avait encore cité aucun des noms des salariés ayant révélé cette démarche jugée déloyale par l'employeur ;
Qu'il résulte des attestations précitées que Cécile X... avait à l'époque des contacts avec le concurrent direct de la société GRAND OPTICAL FRANCE, la société AFFLELOU, ce que confirme la promesse d'embauche signée par AFFLELOU en décembre 2003 laissant supposer eu égard au poste important qu'allait occuper Cécile X... (responsable d'un nouveau magasin créé au centre commercial 4 Temps de LA DEFENSE), des entretiens depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois ;
Considérant que l'employeur qui avancent des faits précis, objectifs et vérifiables et les démontrent par l'ensemble des pièces produites, justifie l'existence d'une faute grave commise par Cécile X... laquelle, alors qu'elle était toujours dans des liens de subordination, profitant des relations qu'elle pouvait encore avoir avec ses anciens subordonnés du magasin de Vélizy qu'elle avait dirigé, a clairement exprimé par des manoeuvres déloyales sa volonté de porter préjudice aux intérêts de l'employeur, en tentant d'attirer ces salariés chez l'un de ses plus importants concurrents directs dans le domaine de l'optique, concurrent qui allait devenir son nouvel employeur ; Que le contexte des relations contractuelles entre les parties devenues difficiles-sans qu'il soit démontré que l'employeur en soit la cause-, notamment suite aux souhaits de la salariée de changer de fonctions au sein de l'entreprise, ce que rappelle la lettre de licenciement en préambule, confirme le ressentiment de la salariée face à une situation qui n'évoluait pas selon ses désirs et sa volonté de quitter l'entreprise dans des conditions dommageables pour l'employeur ;
Que le licenciement est donc bien fondé sur une faute grave ;
Que le jugement entrepris sera infirmé ;
Que la salariée sera déboutée de ses demandes liées à la rupture du contrat ;
Sur le treizième mois
Considérant que le contrat de travail excluait expressément le paiement prorata temporis du 13ème mois exigeant une présence au 31 décembre ;
Que le contrat ayant été rompu en novembre 2003, la prime n'est pas due à Cécile X... pour l'année 2003 ;
Que le jugement sera également infirmé de ce chef ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Considérant que l'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Que Cécile X... sera condamnée au paiement d'une somme de 200 ç à ce titre ;
Que succombant sur ses prétentions, Cécile X... sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
DÉCLARE recevable l'appel interjeté par la société GRAND OPTICAL FRANCE,
DÉCLARE recevable la demande incidente de Cécile X...,
INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de VERSAILLES en date du 23 février 2005,
Statuant à nouveau,
DÉBOUTE Cécile X... de l'ensemble de ses demandes,
RAPPELLE que l'infirmation du jugement entraîne l'obligation pour la salariée de rembourser à l'employeur l'intégralité des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement,
CONDAMNE Cécile X... à payer à la société GRAND OPTICAL FRANCE la somme de 200 ç (DEUX CENTS EURO) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
CONDAMNE Cécile X... aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt prononcé et signé par Madame Colette SANT, présidente, et signé par Madame Sabine MAREVILLE, greffier présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11ème chambre
Numéro d'arrêt : 05/01552
Date de la décision : 20/06/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2006-06-20;05.01552 ?
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