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16/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949602

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0141, 16 mars 2006, JURITEXT000006949602


COUR D'APPEL DE VERSAILLES AC/KP Code nac : 55B 12ème chambre section 1 ARRET No CONTRADICTOIRE DU 16 MARS 2006 R.G. No

04/03095

04/03457 AFFAIRE : S.A. SDV LOGISTIQUE INTERNATIONAL ... C/ S.A. TURBOMECA ... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Janvier 2004 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE No chambre : 8 No RG : 3644F/02 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP KEIME-GUTTIN- JARRY SCP JUPIN etamp; ALGRIN SCP GAS Me BINOCHE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE SEIZE MARS DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERS

AILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : 1. S.A. SDV LOGI...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES AC/KP Code nac : 55B 12ème chambre section 1 ARRET No CONTRADICTOIRE DU 16 MARS 2006 R.G. No

04/03095

04/03457 AFFAIRE : S.A. SDV LOGISTIQUE INTERNATIONAL ... C/ S.A. TURBOMECA ... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Janvier 2004 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE No chambre : 8 No RG : 3644F/02 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP KEIME-GUTTIN- JARRY SCP JUPIN etamp; ALGRIN SCP GAS Me BINOCHE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE SEIZE MARS DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : 1. S.A. SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE (anciennement dénommée SCAC), dont le siège est 31/32 Quai de Dion Bouton, 92811 PUTEAUX, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP KEIME-GUTTIN-JARRY, avoués - N du dossier 04000198 Plaidant par Maître PESTEL-DEBORDE du Cabinet BOLLET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE 2. S.A. SNECMA, dont le siège est 2 Boulevard du Général Martial Valin - 75015 PARIS, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS 3. S.A. TURBOMECA, dont le siège est : 64510 BORDES CEDEX, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS APPELANTES et INTIMEES 1. COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE, dont le siège est 45 rue de Paris - 95747 Roissy Charles de Gaulle Cédex, agissant

poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP GAS, avoués - N du dossier 20040286 Plaidant par Me Fabrice PRADON, avocat au barreau de PARIS 2. Société SDV (USA) INC, dont le siège est 436 Rossi Place SO - 94280 SAN FRANCISCO CA - ETATS UNIS, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par Me Jean-Pierre BINOCHE, avoué - N du dossier 544/04 Plaidant par Me Marianne SCHEUBER, avocat au barreau de PARIS INTIMEES 3. COMPAGNIE AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, anciennement dénommée AXA GLOBAL RISKS, dont le siège est 4, rue Jules Lefebvre - 75426 PARIS CEDEX 09, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 4. Société ASCO, société de droit belge, dont le siège est Lange Nieuwstraat - 17, B 2000 - ANVERS - 70000 BELGIQUE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 5. Société CHUBB INSURANCE COMPANY OF EUROPE SA, dont le siège est Rue Neerveld, 12000 BRUXELLES - 70000 BELGIQUE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 6. Société ALLIANZ MARINE et AVIATION, anciennement AGF MAT, dont le siège est : 23, rue Notre Dame des Victoires - 75002 PARIS, agissant poursuites et diligences en la

personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 7. Société HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES, anciennement LANOIRE etamp; CHEVILLIAT, société de droit suisse, dont le siège est 40, Dufourstrasse Saint Gall - 57340 SUISSE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 8. CNA INSURANCE COMPANY LIMITED, anciennement dénommée CNA MARITIME, dont le siège est 37, rue de Liège - 75008 PARIS, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 9. Société HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES, anciennement ROYAL etamp; SUN ALLIANCE, société de droit suisse, dont le siège est 40, Dufourstrasse - Saint Gall - 57340 SUISSE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 10. Société ZURICH INTERNATIONAL (FRANCE) COMPAGNIE D'ASSURANCES, dont le siège est 96, rue Edouard Vaillant - 92309 LEVALLOIS PERRET, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - N du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE 11. S.A. AIG

EUROPE, dont le siège est Tour AIG, Paris la Défense, 92400 COURBEVOIE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, avoués - No du dossier 0020194 Plaidant par le Cabinet Gildas ROSTAIN, avocats au barreau de PARIS INTERVENANTE VOLONTAIRE Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Janvier 2006 devant la cour composée de :

Madame Sylvie MANDEL, président,

Madame Marie-José VALANTIN, conseiller,

Monsieur André CHAPELLE, conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Marie X...

La société Turbomeca, filiale de la société Snecma, propriétaire d'une turbine Rolls-Royce d'une valeur de 663.000 US $, a envoyé cette turbine pour réparation à son fabricant Rolls Royce à Oakland aux Etats Unis, la valeur de l'ensemble s'établissant à 834.773,53 euros.

Une fois la réparation terminée, la société Turbomeca a confié à la société SCAC, commissionnaire de transports, l'organisation du retour de cet ensemble vers son établissement de Pau, le transport devant se faire par voie aérienne à partir de Los Angeles.

La SCAC s'est adressée à son agent local, la société SDV USA, qui a pris en charge la turbine le 31 mai 2001 et l'a remise à la société Air France, intervenant en qualité de sous-traitant pour le voyage

Los Angeles - Pau.

Sans consultation préalable, la société Air France a confié la turbine à la société Aeroground Transportation Services pour le transport par voie routière de San Francisco à Chicago.

Une fois arrivés à Chicago, les chauffeurs ont laissé la remorque sur une aire de stationnement et sont partis se reposer.

Le 4 juin 2001 au matin, les chauffeurs, revenus sur place, ont constaté la disparition de la remorque. Une plainte a été déposée auprès des services américains compétents. Un rapport d'expertise d'avarie a été déposé le 17 août 2001 et la société Air France a émis un certificat de perte le 28 septembre 2001.

C'est dans ces conditions que par acte des 3 et 4 juin 2002, les sociétés Snecma et Turbomeca ont fait assigner devant le tribunal de commerce de Nanterre les sociétés SCAC et Air France aux fins d'obtenir leur condamnation conjointe et solidaire à leur payer la somme de 834.773,53 ç avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation des intérêts, outre une indemnité de 10.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

De son côté, par acte du 1er juillet 2002, la SCAC a fait assigner en garantie les sociétés SDV (USA) Inc et Air France.

Enfin, par acte du 16 octobre 2002, la société SDV (USA) a fait assigner en garantie la société Air France.

Par jugement du 20 janvier 2004, le tribunal de commerce de Nanterre a tout d'abord déclaré irrecevables les demandes des sociétés Turbomeca et Snecma à l'encontre d' Air France, au motif qu'en application de la Convention de Varsovie, le droit d'action n'appartient qu'aux seules parties au contrat de transport, alors que dans la LTA émise le 1er juin 2001 par Air France, l'expéditeur était la société SDV et le destinataire la société SCAC. Il a par ailleurs déclaré irrecevable la demande formée par la Snecma, seule la société Turbomeca ayant la qualité de propriétaire de la turbine. En revanche, le tribunal a déclaré recevables les demandes formées par Turbomeca à l'encontre de la SCAC, commissionnaire de transport, ainsi que les demandes formées par la SCAC à l'encontre de la société SDV USA, commissionnaire substitué, et de la société Air France, transporteur.

S'agissant de la compagnie Air France, le tribunal a noté qu'elle n'avait pas informé la société SDV USA qu'elle ne disposait pas d'un avion au départ de San Francisco, ni du transport routier jusqu'à Chicago, ni de la limitation de responsabilité résultant de la Convention de Varsovie. Que de plus, elle n'avait pas donné au transporteur routier d'information sur la valeur de la marchandise qu'elle lui avait confiée et qui a été abandonnée le week-end, sur une aire de stationnement sans système de verrouillage et de surveillance.

Le tribunal a considéré que si ces circonstances étaient constitutives d'une faute lourde, elles ne caractérisaient pas la faute inexcusable au sens de la Convention de Varsovie, laquelle est seule de nature à écarter la limitation de responsabilité prévue à la Convention (16,5837 DTS/Kg). Compte tenu du poids de la marchandise (

1.873 kg ) , le tribunal a condamné Air France à payer à SDV USA, son donneur d'ordre, la somme de 31.061 DTS, au cours en vigueur au jour du prononcé du jugement.

S'agissant de la société SDV USA , commissionnaire substitué, le tribunal a retenu qu'elle était tenue d'un devoir de conseil à l'égard de ses mandants, dont elle aurait du attirer l'attention sur les limitations de responsabilités prévues à la Convention de Varsovie. Il a ajouté que la société SDV avait signé la LTA préparée par Air France sans précaution et sans en référer à la SCAC, commissionnaire principal, et sans se préoccuper de l'assurance de la marchandise. Le tribunal a jugé qu'ayant agi avec légèreté et sans professionnalisme, la SDV USA avait commis une faute lourde, et que ne bénéficiant pas de limitation de responsabilité, il y avait lieu de la condamner à payer à son mandant, la SCAC, une somme représentant 50 % de la valeur de la turbine disparue, soit 417.386,77 ç ainsi que 31.061 DTS qu'Air France serait condamnée à lui verser.

Enfin s'agissant de la SCAC, le tribunal a jugé que celle-ci, qui était intervenue en qualité de commissionnaire principal, n'avait commis aucune faute lourde mais qu'elle était garante des fautes du commissionnaire substitué et du transporteur. Le tribunal a en conséquence condamné la société SCAC à verser à la société Turbomeca la somme de 417.386,77 ç ainsi que celle de 31.061 DTS, que laonséquence condamné la société SCAC à verser à la société Turbomeca la somme de 417.386,77 ç ainsi que celle de 31.061 DTS, que la société SDV serait condamnée à lui payer.

Le tribunal a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du

nouveau code de procédure civile et a ordonné l'exécution provisoire. * Les sociétés Snecma et Turbomeca ont interjeté appel.

La compagnie AXA Corporate Solutions et sept autres compagnies d'assurance, qui ont indemnisé la société Turbomeca pour un montant de 802.336,98 ç, sont intervenues volontairement à l'instance par conclusions du 20 septembre 2005.

Les sociétés appelantes et leurs assureurs indiquent que la remorque et la marchandise volée ont été retrouvées le 13 octobre 2004 mais que la turbine est aujourd'hui obsolète, si bien que les assureurs ont dû accepter une offre de reprise par la société Centrax pour un montant de 425.000 US $.

Ils concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que les demandes de la société Turbomeca sont recevables et fondées, et demandent à la cour de déclarer recevable l'intervention volontaire des assureurs.

Ils demandent en conséquence la condamnation solidaire de SDV LI ( anciennement SCAC), SDV USA et Air France à payer à la société Turbomeca la somme de 32.436,55 ç laissée à sa charge, et aux assureurs, la somme de 834.773,53 ç dont il convient de déduire la valeur de sauvetage de 425.000 US $ ( 366.683,83 ç), soit 467.752,72 ç avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation des intérêts. Ils sollicitent en outre une indemnité de 20.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les assureurs soulignent que la dépréciation est inhérente à la marchandise et constitue un dommage couvert par la police d'assurance, si bien que subrogés dans les droits de leur assurée, ils sont recevables et fondés à intervenir dans la procédure.

Ils font valoir pour l'essentiel, que la société SDV LI, (nouvelle dénomination de la SCAC), était responsable du bon déroulement de l'opération de transport, qu'elle a engagé sa responsabilité par sa propre défaillance et qu'elle aurait dû s'assurer que la turbine était acheminée aux Etats Unis par voie aérienne uniquement, la société Turbomeca n'ayant jamais donné son accord pour un transport terrestre.

Ils ajoutent que la société SDV LI a engagé sa responsabilité pour les faits commis par son substitué, lesquels relèvent du droit américain des transports terrestres, et qu'en tout état de cause, si la Convention de Varsovie était applicable, les circonstances du vol constituent une faute inexcusable engageant l'entière responsabilité des sociétés SDV USA et SDV LI.

* Appelante également, la société SDV Logistique International, dénommée SCAC à l'époque des faits, reproche tout d'abord à la société Snecma d'avoir dit aux premiers juges qu'elle n'avait pas souscrit d'assurance ad valorem, alors que non seulement elle était assurée, mais qu'elle avait été indemnisée par ses assureurs un an avant le jugement.

Elle fait valoir que l'indemnité d'assurance a été versée indûment à la société Turbomeca et que ni cette dernière ni ses assureurs ne

sont recevables à demander la contre-valeur d'une turbine retrouvée intacte dont ils se sont désintéressés depuis plus d'un an, étant observé qu'il n'est pas justifié du rachat de cette turbine. Elle en conclut que les assureurs intervenants sont forclos et dépourvus d'intérêt à agir

La société SDV Logistique Internationale ajoute que ni elle-même, ni la société SDV USA n'ont commis aucune faute, la turbine étant assurée par Turbomeca, que le "vol camionné" est une pratique courante à laquelle il n'est pas fautif de recourir compte tenu du caractère non urgent du transport convenu, et fait valoir qu'elle ne saurait être plus responsable que ses substitués SDV USA et Air France dûment appelés en garantie.

A titre subsidiaire, la société SDV Logistique Internationale appelle en garantie les sociétés SDV USA et Air France.

Elle sollicite enfin une indemnité de 10.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* Intimée, la société SDV USA conclut au débouté des sociétés appelantes et de leurs assureurs et à leur condamnation à lui restituer la somme de 457.964,19 ç qu'elle a versée au titre de l'exécution provisoire du jugement.

Elle rappelle que la turbine retrouvée ne présentait aucun dommage et qu'à la suite de deux incidents de communication de pièces, il a été

établi que la société Turbomeca avait été indemnisée en mars 2003 par ses assureurs si bien qu'elle est dépourvue de qualité et d'intérêt à agir.

Elle ajoute que le litige ne porte plus aujourd'hui sur l'indemnisation de la perte de la turbine mais sur la dépréciation éventuelle de la turbine entre juin 2001 et octobre 2004. Elle souligne que les assureurs ad valorem ne sont jamais tenus de garantir les préjudices immatériels, lesquels ne sont pas couverts par l'assurance. Elle indique que les valeurs de reprise dont fait état la société Turbomeca sont fantaisistes ( de 25.000 US $ à 425.000 US $) et que la circonstance que la société Turbomeca ne veuille pas reprendre la machine lui est inopposable.

A titre subsidiaire, elle considère que l'indemnité susceptible d'être mise à sa charge ne peut être supérieure à l'équivalent en euros 31.061 DTS. Elle fait valoir qu'elle n'a pas manqué à son devoir de conseil et qu'elle n'a commis aucune faute, le commissionnaire de transport n'étant tenu d'effectuer aucune déclaration de valeur, a fortiori lorsque la marchandise est assurée. En tout état de cause, la société SDV USA appelle en garantie la société Air France et sollicite une indemnité de 8.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* Enfin, la société Air France, intimée, fait valoir qu'il y a lieu d'appliquer la Convention de Varsovie au litige, cette convention régissant l'ensemble du déplacement quand bien même il comprendrait un transport partiel par route. Elle ajoute qu'elle n'a jamais reçu

instruction d'acheminer la turbine uniquement par voie aérienne et que le vol camionné a été convenu par les parties.

Air France conclut ensuite à l'irrecevabilité des demandes des sociétés Snecma et Turbomeca et de leurs assureurs pour défaut de qualité à agir, seules les parties au contrat de transport (en l'espèce SDV USA et SCAC, devenue SDV Logistique Internationale) disposant d'un droit d'action au titre de la Convention de Varsovie. Elle demande, dans l'hypothèse où la cour ferait droit aux demandes formées par SDV USA et SDV Logistique Internationale en condamnant Turbomeca, Snecma et ses assureurs à rembourser la somme de 457.964,19 ç, de condamner SDV USA à rembourser à Air France la somme de 36.748,58 ç.

Air France poursuit en faisant valoir que dans l'hypothèse où les demandes formées par Snecma, Turbomeca et leurs assureurs contre SDV LI et SDV USA seraient déclarées recevables et fondées , elle n'a commis aucune faute dans le choix du transporteur terrestre, et a fortiori aucune faute inexcusable au sens de la Convention de Varsovie. Elle considère dès lors que les limitations de responsabilité prévues à l'article 22 de la Convention lui sont applicables.

La société Air France conteste enfin le préjudice dont font état les sociétés Snecma, Turbomeca et leurs assureurs et fait valoir que la perte de valeur de la turbine n'est pas établie.

Elle indique enfin qu'elle est toujours dépositaire de la turbine

litigieuse, et demande à la cour d'enjoindre la société Turbomeca et/ou ses assureurs de la récupérer dans un délai de quinze jours et sous astreinte.

Elle sollicite enfin une indemnité de 10.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 janvier 2006.

Les 30 janvier 2006, les conseils de la société Turbomeca ont fait parvenir à la cour une note en délibéré, à laquelle il a été répondu le 6 février 2006 par le conseil de la SCAC - SDV LI.

Ces notes, qui n'ont pas été demandées par la cour, seront écartées des débats.

SUR QUOI :

1) Sur la recevabilité de la demande de la société Snecma :

Considérant que la turbine litigieuse était la propriété de la société Turbomeca et non de la société Snecma.

Que par ailleurs, la société Snecma n'était partie à aucun des contrats de transport ou de commission.

Qu'elle doit donc être déclarée irrecevable pour l'ensemble de ses demandes.

2) Sur la recevabilité de la société Turbomeca et de ses assureurs :

Considérant que la turbine, propriété de la société Turbomeca , dont la disparition avait été constatée le 4 juin 2001, a été retrouvée intacte le 13 octobre 2004, et qu'elle se trouve aujourd'hui toujours entre les mains de la société Air France, la société Turbomeca n'ayant effectué aucun délaissement de la turbine.

Considérant qu'il n'est pas justifié d'un rachat de la turbine, contrairement à ce que prétendent les assureurs.

Considérant que la société Turbomeca, qui avait souscrit une assurance ad valorem, a été indemnisée le 4 mars 2003, pour un montant de 802.336,98 ç.

Considérant que le paiement de cette indemnité d'assurance n'a pas pour effet de remettre en cause la qualité de propriétaire de la société Turbomeca.

Considérant que l'assurance ad valorem souscrite par la société Turbomeca n'avait pas pour objet de couvrir une éventuelle dépréciation du matériel transporté, une fois celui-ci retrouvé, mais d'indemniser l'assuré, en cas de perte ou d'avarie affectant la turbine litigieuse, seul le préjudice matériel étant susceptible d'être indemnisé au titre du contrat d'assurance, ainsi qu'il est dit

à l'article 4 des conditions générales de ce contrat.

Considérant qu'il n'est pas établi que la turbine ait été détériorée à l'occasion du transport, ou lors de sa perte.

Considérant qu'il est indifférent que la société Turbomeca, propriétaire de la machine ne veuille pas la reprendre dès lors que cette machine a été retrouvée intacte, et que le préjudice immatériel dont elle fait état et tenant à la dépréciation de la turbine, n'est pas couvert par l'assurance ad valorem.

Considérant que l'indemnité d'assurance n'a été versée qu'à titre commercial, si bien que les assureurs, qui ne peuvent se prévaloir d'aucune subrogation, ne sont pas recevables en leurs demandes.

Considérant par ailleurs que la cour n'est pas saisie d'une demande des assureurs tendant à la restitution par l'assurée des sommes versées indûment au titre du contrat d'assurance.

Considérant enfin que la société Turbomeca n'est pas davantage recevable à demander le remboursement de la franchise d'assurance, ni d'une quote part d'indemnité dont elle a été privée en raison de la défaillance de l'un de ses co-assureurs, , aucune indemnisation ne lui étant due au titre de la dépréciation de la turbine.

Considérant que, faute d'intérêt à agir, la société Turbomeca et ses assureurs seront donc déclarés irrecevables pour l'ensemble de leurs demandes.

Considérant en outre qu'en application de la Convention de Varsovie,

le droit d'action contre le transporteur aérien n'appartient qu'aux seules parties au contrat de transport, c'est à dire en l'espèce la société SDV USA (expéditeur) et la SCAC - SDV LI (destinataire), à l'exclusion de la société Turbomeca et de ses assureurs, lesquels n'avaient donc pas qualité pour agir à l'encontre de la société Air France.

Considérant que les demandes de la société Turbomeca et de ses assureurs étant irrecevables, les appels en garantie formés par les société SDV USA, SDV LI et Air France doivent être déclarés sans objet.

Considérant enfin qu'il n'y a lieu à restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, cette restitution étant de droit. 3) Sur la restitution de la turbine :

Considérant que la société Turbomeca est toujours propriétaire de la turbine, ainsi qu'il a été rappelé précédemment.

Qu'elle sera donc condamnée à reprendre possession de cette turbine, laquelle se trouve entre les mains de la société Air France, dans ses locaux de Chicago, et ceci sous astreinte provisoire de 500 ç par jour de retard, à l'issue d'un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt.

4) Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Considérant que les sociétés Snecma et Turbomeca seront condamnées in solidum à payer aux sociétés SDV LI et Air France une indemnité de 10.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et à la société SDV USA une indemnité de 8.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant publiquement et contradictoirement.

- ECARTE des débats les notes en délibéré adressées à la cour par les conseils des sociétés Turbomeca et SCAC-SDV LI.

- CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré dans leur ensemble irrecevables les demandes des sociétés Snecma et Turbomeca contre Air France et l'infirme pour le surplus.

- DÉCLARE irrecevables les interventions volontaires des assureurs de la société Turbomeca.

- DÉCLARE sans objet les appels en garantie formés par les sociétés SDV USA, SDV LI et Air France.

- DIT que la société Turbomeca reprendra possession de la turbine litigieuse, laquelle se trouve entre les mains de la société Air France, dans ses locaux de Chicago, sous astreinte provisoire de 500 ç (cinq cents euros) par jour de retard, à l'issue d'un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt.

- REJETTE toutes autres demandes.

- CONDAMNE in solidum les sociétés Snecma et Turbomeca et leurs assureurs à payer une indemnité de 10.000 ç (dix mille euros) aux sociétés SDV LI et Air France sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et à la société SDV USA une indemnité de 8.000 ç (huit mille euros) sur le même fondement.

- CONDAMNE in solidum les sociétés Snecma et Turbomeca et leurs assureurs aux dépens de l'instance, lesquels pourront être recouvrés directement par Maître Binoche, la SCP Keime-Guttin-Jarry et la SCP Gas, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

- arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Sylvie MANDEL, président et par Catherine CLAUDE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0141
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949602
Date de la décision : 16/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2006-03-16;juritext000006949602 ?
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