COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 51A 1ère chambre 2ème section ARRET No REPUTE CONTRADICTOIRE DU 21 FEVRIER 2006 R.G. No 04/08913 AFFAIRE : Mouhamed X... C/ Lily Y... ... Décision déférée à la cour :
Jugement rendu(e) le 27 Avril 2004 par le Tribunal d'Instance de CLICHY No Chambre : No Section : No RG : 59/04 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me Jean-Pierre BINOCHE Me Claire RICARD REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Mouhamed X... né le 24 Mai 1968 à TU MEDENINE de nationalité TUNISIENNE 7 Place Georges Brassens 93380 PIERREFITTE SUR SEINE représenté par Me Claire RICARD - N du dossier 240445, avoués assisté de Me Cyrille TREHUDIC (avocat au barreau de PONTOISE) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2004/8241 du 20/10/2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES) APPELANT Madame Lily Y... 5 avenue de la Forêt 60300 SENLIS représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE - N du dossier 542/04, avoué assisté de Me Hubert TETARD (avocat au barreau de SENLIS) Madame Z... 7 PLace Georges Brassens 93380 PIERREFITTE SUR SEINE défaillante, assignée selon les modalités de l'article 659 du ncpc INTIMES Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Décembre 2005 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Charles LONNE, président chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Charles LONNE, président,
Madame Evelyne LOUYS, conseiller,
Mme Annie DABOSVILLE, conseiller, Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
FAITS ET PROCEDURE,
Par jugement rendu le 27 avril 2004 le tribunal d'instance de CLICHY a :
- condamné Monsieur X... et Madame A... à payer à Madame Y... la somme de 9 989,21 ç, au titre des loyers, charges et réparations locatives arrêtées au 30 novembre 2003, avec intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2003 sur la somme de 2.031,91 ç, à compter du 6 février 2004, date de l'assignation, pour le surplus ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
- débouté Madame Y... de toutes ses autres demandes;
- condamné Monsieur X... et Madame A... à payer à Madame Y... la somme de 500 ç, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- condamné Monsieur X... et Madame A... aux entiers dépens, en ce compris le coût de la moitié du constat d'état des lieux, soit 250 euros.
Monsieur X... a régulièrement interjeté appel de cette décision les 23 juillet et 2 août 2004 et, aux termes de ses dernières conclusions, déposées le 12 octobre 2005, demande à la Cour de :
- constater que sa dette s'élève à un mois de loyer (avril 2003), soit la somme de 381,12 ç, outre la régularisation des charges afférentes à la période d'occupation pour 2003 non justifiée en l'état ;
Subsidiairement,
- constater que le bail a été résilié au plus tard le 24 septembre 2003 par l'effet de la clause résolutoire ;
- limiter, en conséquence, les sommes dues au titre des loyers à la période du 1er avril 2003 au 24 septembre 2003 ;
En tout état de cause,
- infirmer le jugement pour le surplus et débouter Madame Y... du surplus de ses demandes ;
- condamner Madame Y... à lui verser une indemnité de 1 000 euros, en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- condamner Madame A... à le garantir à hauteur de la moitié des éventuelles condamnations prononcées à son encontre ;
- condamner Madame A... aux entiers dépens, de première instance et d'appel.
A l'appui de ses demandes, il soutient en substance :
- que Madame Y... ayant fait délivrer le commandement de payer à sa nouvelle adresse, elle ne peut prétendre ne pas avoir été informée de son départ, ni percevoir des loyers au-delà du 30 avril 2003 ;
- que, le commandement de payer ayant été délivré le 24 juillet 2003, la clause résolutoire n'a pu jouer que deux mois plus tard, soit au 24 septembre 2003 ;
- qu'aucune indemnité d'occupation ne pouvant être due au-delà puisqu'il avait quitté les lieux, la dette de loyer ne pourrait courir que jusqu'au 24 septembre 2003, et non jusqu'au 30 novembre 2003 comme l'a retenu le premier juge ;
- que l'état des lieux de sortie, même réalisé en l'absence du preneur, peut valablement prouver la charge qui incombe au locataire d'assumer les frais de remise en état, à la condition que celui-ci soit fait à une date proche de la sortie effective des lieux par le preneur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisqu'il prouve que Madame Y... savait qu'il avait quitté les lieux le 30 avril 2003 et que l'état des lieux de sortie a été dressé en novembre 2003;
- qu'il résulte des diverses contestations qu'il a faites à l'encontre de l'état des lieux que Madame Y... ne prouve pas le lien causal entre les dégradations constatées en novembre 2003 et l'occupation ou l'inoccupation fautive du logement litigieux ;
- que les devis qu'il a proposés pour remédier à certains désordres affectant le bien démontrent que les dégradations et l'état de
vétusté préexistaient à son entrée dans les lieux ;
- que l'absence d'état des lieux d'entrée résulte des relations de confiance qui le liaient, à l'époque, à Madame Y... ;
- qu'il résulte des dispositions de l'article 1315 du Code civil qu'il incombe au propriétaire de justifier tant du principe que du montant des charges dont il demande le règlement à son locataire ;
- que Madame Y... ne justifie pas de telles charges ;
- que le bail a également été signé par Madame A... ;
- que l'appartement litigieux n'a fait l'objet d'aucune occupation après son départ, le 30 avril 2003 ;
- qu'il se demande comment l'appartement litigieux a pu être occupé jusqu'au milieu de l'été 2003, comme cela résulte des attestations produites, alors que l'huissier a pu constater, en novembre 2003, que l'appartement était inoccupé depuis plusieurs mois ;
- que les désordres constatés après son départ et la remise des clefs sont dus à la vétusté ;
- que la dégradation de l'état général des lieux est due à l'insouciance de Madame Y... qui a toujours refusé de faire des travaux de réparation de ces locaux quasi insalubres;
- que, suite à son départ des lieux, Madame Y... a récupéré les clefs de la porte d'entrée extérieure, de la boîte aux lettres, de la
cave et de la porte de l'appartement ;
- qu'en ce qui concerne la deuxième clef de l'appartement, elle a été remise, comme convenu entre les parties, entre les mains d'une amie commune ;
- qu'il a toujours assuré l'appartement, ce dont il justifie par les pièces produites au débat.
Madame Y..., intimée, dans ses dernières écritures, déposées le 8 septembre 2005, demande à la Cour de :
- débouter Monsieur X... de toutes ses demandes ;
- confirmer la décision querellée, sauf à rectifier l'erreur matérielle affectant le total des sommes dues au titres des loyers/indemnités d'occupation, charges et réparations locatives ;
- condamner solidairement "Monsieur et Madame X..." à lui verser la somme totale de 10.569,32 ç, au titre de l'arriéré des loyers/indemnités d'occupation, charges et réparations locatives ;
- condamner Monsieur et Madame X... au paiement de la somme de 1.500 ç, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, de première instance et d'appel. Au soutien de ses prétentions, elle fait essentiellement valoir :
- que la libération définitive des lieux n'a pu être constatée que
selon constat d'huissier du 5 novembre 2003 ;
- que sont produites des attestations de voisins qui rapportent que le local litigieux était encore occupé pendant l'été 2003 ;
- que si Monsieur X... prétend avoir quitté le logement le 30 avril 2003, il n'a nullement restitué l'intégralité des clefs sécurisées et qu'il a même installé dans le local un occupant sans droit ni titre ; - que c'est en consultant l'annuaire qu'elle a pu connaître la nouvelle adresse de Monsieur X... et lui délivrer un commandement de payer;
- qu'il n'avait ni vidé ni remis en état l'appartement litigieux ainsi qu'il résulte du constat d'huissier du 5 novembre 2003 ;
- que toutes les clés n'ayant pas été restituées, elle a dû faire intervenir, le 15 novembre 2003, un serrurier afin de changer les serrures ;
- que, le commandement de payer ayant été délivré le 24 juillet 2003, il devra être constaté l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 24 septembre 2003 ;
- que c'est bien l'abandon soudain du local par Monsieur X... qui ne lui a pas permis de faire établir un constat des lieux de sortie contradictoire ;
- que l'huissier qui a établi ce constat est neutre, ayant été
judiciairement désigné;
- que l'article 1731 du Code civil dispose qu'en l'absence d'état des lieux d'entrée, "le preneur est présumé avoir reçu l'appartement en bon état de réparation locative (...)" ;
- que les devis dont se prévaut Monsieur X... pour faire tomber la présomption de bon état de l'article 1731 du Code civil ont été établis deux ans après son entrée dans les lieux et sont nullement de nature à démontrer que les locaux étaient vétustes ou insalubres en mai 2000.
Madame A..., qui a fait l'objet d'un procès verbal de recherches infructueuses, n'a pas constitué avoué. L'arrêt sera en conséquence réputé contradictoire.
MOTIFS 1 - Sur la date à laquelle le bail a pris fin et sur l'arriéré locatif
Considérant que les parties sont en désaccord sur la fin du contrat qui les lie; que l'appelant soutient avoir quitté le logement appartenant à Madame Y... le 30 avril 2003, ce que ne pouvait ignorer la bailleresse puisqu'elle lui a fait délivrer un commandement de payer à son nouveau domicile de PIERREFITTE - SUR - SEINE le 24 juillet 2003 et qu'elle avait récupérer les clés; qu'il considère en conséquence ne devoir aucun loyer au delà du 30 avril 2003 et, subsidiairement jusqu'au 24 septembre 2003, date à laquelle le commandement de payer du 24 juillet 2003 a produit effet;
Considérant que l'intimée fait au contraire valoir qu'il lui est dû 3.128,95ç de loyers, indemnités d'occupations et charges jusqu'au 30 novembre 2003 comme l'a retenu le tribunal;
Mais considérant qu'aucun congé n'a été donné par Monsieur X... dans
les formes de l'article 15 I de la loi du 6 juillet 1989; qu'il résulte des pièces contradictoirement versées au débat et non sérieusement discutées par Monsieur X... ( notamment les attestations de deux voisins Monsieur EL B... et Monsieur C... ) que l'appartement dont s'agit était occupé au cours de l'été 2003 et que Madame Y... n'a pu le récupérer que postérieurement au commandement de payer délivré le 24 juillet 2003 avec effet au 24 septembre 2004 après un constat d'huissier du 5 novembre 2003 et l'intervention d'un serrurier le 15 novembre 2003 pour faire changer les serrures ( facture de la serrurerie DEVAL de 360 ç)
Considérant, dès lors, que ce n'est qu'à compter du 15 novembre 2003 que Madame Y... a pu récupérer son appartement et que c'est à cette date que doit être chiffrée sa créance locative;
Considérant au vu des pièces du dossier, des loyers et des charges dûs jusqu'au 24 septembre 2004 et des indemnités d'occupations correspondant au montant des loyers et des charges pour la période du 25 septembre au 15 novembre 2004, que la dette locative de Monsieur X... et de Madame A... s'élève à 2.915,50 ç (soit 3.128,95 ç dont à déduire la somme de 213,45 ç correspondant à l'indemnité d'occupation de la deuxième quinzaine de novembre que Madame Y... n'est pas fondée à réclamer).
2 - Sur les réparations locatives
Considérant que le premier juge a chiffré ces réparations à 7080,37 ç;
Que Madame Y... sollicite la confirmation du jugement en se fondant sur les dispositions de l'article 1731 du code civil et sur un procès verbal de constat d'état des lieux de sortie du 5 novembre 2003;
Considérant que Monsieur X..., rappelant qu'aucun état des lieux n'a été fait lors de sa prise de possession des locaux, conteste le
constat de sortie sus visé dressé de façon non contradictoire sept mois après son départ et soutient que les locaux étaient en état d'usure lorsqu'il y est rentré et que la bailleresse n'a jamais voulu les remettre en état même lorsque il lui avait proposé de le faire;
Considérant qu'aux termes de l'article 1731 du code civil "s'il n'a pas été fait d'état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire";
Considérant, en l'espèce, que Madame D..., précédente propriétaire qui venait de vendre les locaux à Madame Y... lorsque Monsieur X... les a occupés atteste qu'ils étaient "propres et en bon état même si les embellissements étaient à l'état d'usage";
Que l'appelant ne peut valablement soutenir que l'état des lieux de sortie est tardif dans la mesure où la bailleresse n'a pu reprendre possession de son appartement que bien après qu'il l'ait quitté;
Considérant que ce constat, document contradictoirement versé au débat et établi non par un huissier choisi par Madame Y... mais désigné, sur requête, par le président du tribunal d'instance de CLICHY, fait état de locaux sales, à l'état d'usage, et parfois en mauvais état; que l'on ne relève cependant pas de détériorations particulières;
Or considérant que pour justifier sa demande de 7.080,37 ç Madame Y... produit un devis de la société CICELENP qui consiste en une rénovation, voire une transformation partielle des lieux puisque l'on relève des travaux de maçonnerie consistant en une ouverture de porte de salle de bain côté chambre avec la fourniture et la pose d'un bloc porte pour un montant de 1.172 ç H.T; une modification du sol des wc avec la fabrication d'une chape et la pose d'un carrelage blanc pour 900 ç H.T.; le remplacement des wc, la pose d'une "kitchenette", d'un mélangeur pour évier et d'un lavabo avec son robinet, le tout pour
2.650 ç H.T.; de nouvelles installations électriques pour un montant de 610,13 ç H.T.; et enfin la réfection de toutes les peintures pour une somme de 3.915,02 ç H.T;
Considérant dès lors, et compte tenu de ce qui précède, que Madame Y... est mal fondée à demander la remise à neuf et la transformation de son appartement que Monsieur X... n'a pas à assumer;
Qu'en l'état des pièces du dossier, notamment de l'attestation de la précédente propriétaire, du constat de la SCP KRIEF- BEDDOUK et du temps qu'a duré l'occupation des lieux, c'est à dire un peu plus de trois ans, la cour chiffre à 2.000 ç la somme que devra verser l'appelant à Madame Y... au titre des réparations locatives, somme à laquelle il convient d'ajouter celle de 360 ç correspondant à la facture de serrurerie
3 - Sur la demande de garantie de Monsieur X...
Considérant que le bail a été consenti par Madame Y..., en tant que bailleur, à Monsieur X... et Madame A...; que compte tenu de la solidarité existant entre les locataires Monsieur X... est tenu de la totalité de la dette locative à l'égard de Madame Y... mais est en droit de demander que Madame A... le garantisse de la moitié des sommes dues; 4 - Considérant que le jugement sera donc réformé sauf en ce qui concerne les dispositions relatives à l'article 700 du NCPC et aux dépens; Qu'en cause d'appel il n'y a pas lieu de faire application du texte susvisé; que les dépens seront supportés par l'appelant qui succombe principalement;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire;
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne les dispositions relatives à l'article 700 du NCPC et aux dépens;
Statuant à nouveau;
Condamne solidairement Monsieur X... et Madame A... à payer à Madame Y... la somme de 2.915,50 ç au titre de l'arriéré des loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 15 novembre 2003, ainsi que la somme de 2.360 ç au titre des réparations locatives;
Condamne Madame A... à garantir Monsieur X... de la moitié des sommes susvisées;
Déboute les parties de leurs autre demandes plus amples ou contraires au présent dispositif;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du NCPC dans le cadre de la présente procédure;
Condamne Monsieur X... aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC par Maître BINOCHE, avoué. Arrêt prononcé et signé par Monsieur Charles LONNE, président et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, présent lors du prononcé Le GREFFIER,
Le PRESIDENT,