RELATION DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE Sa'd X... a été engagé par la société ABILIS le 22 juillet 1994, suivant contrat verbal à durée indéterminée, en qualité "d'agent de propreté" et affecté notamment à l'entretien de succursales de la Caisse d'épargne. Il devait être repris par la société SA NET ADONIS à compter du 1er avril 1997 en application de l'article L 122-12 du code du travail. Par courrier du 23 décembre 1998, la société SA NET ADONIS confirmait au salarié que les chantiers de la Caisse d'épargne ayant été confiés à la société SARL AB'ENTRETIEN comme il en avait été informé le 17 décembre, son contrat de travail pour ce qui était desdits chantiers, se poursuivrait au sein de cette nouvelle société. Par lettre du 30 décembre, le salarié informait alors la direction de la société AB'ENTRETIEN que la société NET ADONIS mettait un véhicule à sa disposition pour lui permettre de se rendre à son travail, qu'aucun véhicule ne lui étant désormais affecté, il était dans l'impossibilité d'assurer celui-ci. Par lettre du 2 janvier 1999, la société AB'ENTRETIEN l'informait qu'un véhicule automobile serait mis à sa disposition à compter du 4 janvier de 17 H à 23 H afin qu'il puisse se rendre sur ses lieux de travail. Par lettre du 6 janvier, il répondait que son domicile étant à GUYANCOURT Il n'avait aucun moyen de transport pour rentrer de POISSY à GUYANCOURT, que dès lors il y avait selon lui, modification substantielle de son contrat de travail. Par lettre du 15 janvier suivant la société lui répondait :
"notre client nous a demandé impérativement par lettre recommandée de vous affecter sur d'autres sites, instruction formulée par les responsables des agences compte tenu du manque de sérieux dans l'exécution de votre travail. En conséquence, nous étions obligés de vous affecter aux chantiers suivants : - Agence LE PECQ ... - Agence MARLY LE ROI ... - Agence ORGEVAL ... - Agence SAINT GERMAIN ... Le véhicule est à votre disposition à partir du mercredi 20 janvier 1999
à 17 H au 15 rue Jean Bouin à POISSY et il devra être ramené chaque jour à la même adresse après fin de votre travail." Par lettre du 20 janvier, Sa'd X... renouvelait ses observations, affirmait ne pouvoir rentrer chez lui au moyen des transports en commun et concluait : "Dans ces conditions et ne pouvant subir plus longtemps la situation que vous m'imposez depuis le 22 décembre dernier, je suis aujourd'hui contraint de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail à vos torts et griefs exclusifs". La société par lettre du 26 janvier demandait à Sa'd X... de reprendre son travail. Il était par la suite convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement fixé au 5 février 1999. Son licenciement lui était notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 février 1999 pour abandon de poste constitutif d'une faute grave à compter de ce jour." C'est dans ces circonstances que Sa'd X... devait attraire devant le conseil de prud'hommes de VERSAILLES, par requête du 3 février 1999, la société SARL AB'ENTRETIEN au paiement des sommes suivantes : - dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
32.840 F - indemnité compensatrice de préavis :
6.568,80 F - congés payés y afférents :
656,80 F - indemnité de licenciement :
1.609,16 F - rappel de salaire pour la période du 22 décembre 1998 au 20 janvier 1999 :
3.776,60 F - congés payés y afférents :
377,66 F - indemnité fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Il sollicitait en outre la remise des documents légaux devant lui revenir. Le premier juge par la décision dont appel a estimé que le licenciement litigieux ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et a condamné la société SARL AB'ENTRETIEN à payer à Sa'd X... les sommes suivantes : - 19.704 F à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 6.568 F à titre d'indemnité compensatrice de préavis, - 656,80 F au titre des congés payés y afférent, - 1.609,16 F au titre de l'indemnité légale de licenciement, - 3.776,60 F à titre de rappel de salaire du 22 décembre 1998 au 20 janvier 1999, - 377,66 F au titre des congés payés y afférent. Il a ordonné la remise au salarié des documents légaux, et a condamné en outre la société à payer à celui-ci la somme de 3.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société S.A.R.L. AB'ENTRETIEN a régulièrement relevé appel de cette décision. PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES La société appelante fait conclure à l'infirmation du jugement déféré, demande à la Cour de constater la faute grave de Sa'd X... qui
devra être condamné à rembourser les sommes versées au titre de l'exécution provisoire. Elle sollicite en outre l'allocation d'une somme de 6.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. A titre subsidiaire, de constater que l'usage du véhicule était attaché au chantier de la Caisse d'épargne et que dès lors, le changement de chantier du salarié entrainait la perte de celui-ci ; Très subsidiairement de constater que ce dernier ne justifie pas d'un préjudice supérieur au forfait prévu à l'article L 122-14-4 du code du travail. Elle fait valoir qu'il n'y a eu aucune modification d'un élément essentiel du contrat de travail de Sa'd X... dont le contrat de travail ne contenait aucune disposition relative aux moyens de transport. La mise à disposition d'un véhicule automobile était pour celui-ci une simple commodité relevant de l'aménagement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur. Elle expose par ailleurs que le contrat de travail de l'intéressé comportait une clause de mobilité, qu'elle était par conséquent parfaitement fondée à affecter son salarié sur d'autres chantiers. Sa'd X... fait conclure à la confirmation du jugement entrepris en reprenant son argumentation de première instance et à la condamnation de la société AB'ENTRETIEN au paiement de la somme de 7.176 F (6.000 F hors taxe) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR QUOI LA COUR, Considérant qu'il n'est pas contesté que Sa'd X... bénéficiait dès son embauche à temps partiel d'un véhicule automobile pour effectuer sa prestation de travail eu égard à la distance entre les chantiers et aux horaires imposés ; qu'il utilisait ledit véhicule pour se rendre sur les chantiers et des chantiers à son domicile ; Considérant que les chantiers de la Caisse d'épargne d'Ile de France Ouest de GIF sur YVETTE, de SAINT REMY, de JOUY en JOSAS, de LIMOURS et de SAINT ARNOULT étaient confiés en décembre 1998 à la société
AB'ENTRETIEN, que le contrat de travail de Sa'd X... était parallèlement transféré à cette entreprise en application des dispositions résultant de l'article L 122-12 du code du travail ; Considérant que malgré le transfert du contrat, la société AB'ENTRETIEN dans un premier temps informait son salarié qu'il devrait se déplacer par ses propres moyens pour effectuer son travail sur les chantiers susvisés ; Que devant la protestation de ce dernier, il lui était indiqué qu'une voiture serait mise à sa disposition pour se rendre exclusivement sur les chantiers, et qu'elle devrait impérativement être restituée chaque soir à 23 H au garage de POISSY ; Considérant que la fourniture d'un véhicule à Sa'd X... compte tenu tant de la distance des chantiers entre eux que de l'horaire tardif de ses interventions, paraît parfaitement justifiée ; Considérant que la fourniture d'un véhicule en tant qu'avantage en nature constitue un élément du salaire ; qu'en l'espèce si cet avantage était partiellement maintenu, il est établi qu'il était supprimé dans sa partie lieu de travail domicile ; Que dès lors la suppression de cet avantage constitue une modification d'un élément essentiel du contrat de travail ; Considérant qu'un élément essentiel du contrat de travail ne peut être modifié unilatéralement, que l'employeur qui propose une telle modification doit obtenir l'accord du salarié ; qu'en cas de refus de celui-ci, il doit soit renoncer à la modification envisagée, soit procéder au licenciement du salarié ; Considérant que Sa'd X... avait fait connaître à la direction de la société AB'ENTRETIEN par lettre du 20 janvier 1999 qu'il ne pouvait accepter la proposition qui lui était faite en raison des difficultés de transport, auxquelles il était confronté pour se rendre de POISSY à son domicile à une heure tardive de la soirée ; Que dès lors la rupture est imputable à l'employeur et faute d'une lettre conforme aux dispositions légales, elle équivaut à un licenciement sans cause
réelle et sérieuse ; Qu'il y a lieu en conséquence d'entrer en voie de confirmation ; Considérant qu'il serait en outre inéquitable de laisser à la charge du salarié la totalité des frais qu'il a dû exposer en cause d'appel, qu'il y a lieu de lui allouer la somme complémentaire de 3.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS : La COUR, STATUANT publiquement et contradictoirement, CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, Y ajoutant, CONDAMNE la société SARL AB'ENTRETIEN à payer à Sa'd X... la somme complémentaire de 3.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, LAISSE les dépens à la charge de la société S.A.R.L. AB'ENTRETIEN. Et ont signé le présent arrêt Monsieur LIMOUJOUX, Président, et Mme Y..., Greffier. Le greffier,
Le président.