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12/05/1999 | FRANCE | N°1997-5785

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre criminelle, 12 mai 1999, 1997-5785


FAITS ET PROCEDURE

La SCI LA COMETE a fait construire en 1970 un ensemble immobilier sis à PARIS 19°, 58 rue Riquet.

La construction de ce bien immobilier a été financée par un crédit spécial du CREDIT FONCIER DE FRANCE aux termes d'un acte en date du 4 février 1970, ledit contrat prévoyant en son article 15, l'existence d'un loyer de référence pour l'ensemble des logements, lequel est révisable à concurrence de 60 % de son montant.

Suivant acte en date du 27 janvier 1971, la SCI LA COMETE a donné à bail à Monsieur X... un appartement situé dans cet ens

emble immobilier.

Suivant acte authentique en date du 22 décembre 1983, la SCI L...

FAITS ET PROCEDURE

La SCI LA COMETE a fait construire en 1970 un ensemble immobilier sis à PARIS 19°, 58 rue Riquet.

La construction de ce bien immobilier a été financée par un crédit spécial du CREDIT FONCIER DE FRANCE aux termes d'un acte en date du 4 février 1970, ledit contrat prévoyant en son article 15, l'existence d'un loyer de référence pour l'ensemble des logements, lequel est révisable à concurrence de 60 % de son montant.

Suivant acte en date du 27 janvier 1971, la SCI LA COMETE a donné à bail à Monsieur X... un appartement situé dans cet ensemble immobilier.

Suivant acte authentique en date du 22 décembre 1983, la SCI LA COMETE a vendu au profit de la SA d'H.L.M. LE FOYER DU PROGRES ET DE L'AVENIR "FPA", désormais dénommée EFIDIS, les locaux d'habitation de l'immeuble, les locaux commerciaux restant la propriété de la SCI LA COMETE.

En 1984, Monsieur X... a contesté le montant des loyers et la répartition des charges réclamées par la société FPA devenue EFIDIS.

Dès l'origine du litige, le FPA s'est rapproché de la CONFEDERATION NATIONALE DU LOGEMENT.

Monsieur X... persiste dans son refus de régler le montant des loyers et charges réclamés par le FPA. La commission départementale des rapports locatifs de PARIS a été saisie par l'association des locataires de l'immeuble.

La commission a, le 15 novembre 1985, rendu un avis favorable au bailleur.

Monsieur X... a continué à ne régler qu'une partie du loyer et des charges appelées.

C'est dans ces conditions que le FPA a saisi le tribunal d'instance de PARIS 19°.

Par jugement avant dire droit en date du 12 juillet 1988, le tribunal a ordonné une mesure de constatation.

Le constatant a déposé son rapport le 21 juillet 1989.

Madame X... suite au décès de son mari a repris cette procédure.

Par jugement en date du 7 mai 1991, le tribunal a :

- débouté le FOYER DU PROGRES ET DE L'AVENIR de toutes ses demandes, - dit que l'augmentation annuelle du loyer doit être calculée conformément au bail du 27 janvier 1971 dans les conditions énoncées au contrat de prêt du CREDIT FONCIER DE FRANCE tel qu'il est reproduit audit bail,

- donné acte à Madame X... de ce qu'elle offre de régler la somme de 534.54 Francs représentant le solde restant du à ce titre,

- dit que les charges doivent être réparties au prorata des loyers, conformément aux dispositions du bail du 27 janvier 1971 (article 38 de la loi du 1er septembre 1948),

- donné acte à Madame X... de ce qu'elle offre de régler la somme de 22.412,43 Francs représentant le solde des sommes restant dues à ce titre,

- donné acte à Madame X... de ce qu'elle se réserve toute action tendant à établir la réalité du montant des charges présenté par le FOYER DU PROGRES ET DE L'AVENIR, les opérations de constat n'ayant porté que sur, d'une part, le critère de répartition des charges, et d'autre part, sur la comptabilisation des loyers versés par la locataire à l'exclusion de l'examen du détail des charges,

- condamné en tant que de besoin, Madame X... à payer lesdites sommes,

- condamné le FOYER DU PROGRES ET DE L'AVENIR à payer à Madame X... la somme de 3.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- rejeté les autres demandes comme mal fondées.

La SA EFIDIS a relevé appel de cette décision.

Par arrêt en date du 2 mai 1994, la Cour d'Appel de PARIS a infirmé

le jugement entrepris et statuant à nouveau a :

- dit que la clause d'indexation contractuelle jouerait de plein droit sur la base du loyer perçu au 22 décembre 1983 et sans atténuation tant que l'ensemble des sommes perçues des locataires à la seule exclusion des charges visées à l'article 38 de la Loi du 1er septembre 1948 ne dépasse pas le loyer maximal afférent à l'ensemble des logements financés, révisé en fonction de l'indice INSEE dans la limite de 60 % de son montant soit de 733.212,48 Francs jusqu'au 24 décembre 1986 et sans application de cette clause d'atténuation passée cette date,

- dit que les charges de copropriété récupérables incombant à la société EFIDIS soit sur la base de l'état de division soit celle du règlement de copropriété, seraient réparties entre ses locataires au prorata des loyers lorsque la ventilation entre eux serait impossible, et sur la base de la surface corrigée lorsque la ventilation serait possible,

- ordonné une constatation,

- sursis à statuer sur toutes les autres demandes.

Par arrêt rendu le 22 janvier 1997, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation a :

Vu l'article 1134 du code civil,

- cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a dit que la clause d'indexation contractuelle jouait de plein droit sur la base du loyer perçu au 22 décembre 1983 et sans atténuation tant que l'ensemble des sommes perçues des locataires, à la seule exclusion des charges visées à l'article 38 de la Loi du 1er septembre 1948, ne dépasse pas le loyer maximal afférent à l'ensemble des logements financés, révisé en fonction de l'indice INSEE dans la limite de 60 % de son montant, soit 733.212,48 Francs jusqu'au 24 décembre 1986 et sans application de cette clause d'atténuation passée cette date et en ce qu'il a nommé un expert avec mission de faire les comptes entre les parties sur les bases retenues, l'arrêt rendu le 2 mai 1994, entre les parties, par la Cour d'Appel de PARIS,

- remis en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour de céans.

La Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'Appel de PARIS au motif que :

"pour décider que la clause d'indexation contractuelle jouait de plein droit sur la base du loyer perçu au 22 décembre 1983, l'arrêt

retient que le réajustement annuel des loyers s'appliquant de plein droit sans être subordonné à une manifestation de volonté du bailleur, le fait que le précédent propriétaire n'ait pas réclamé le montant intégral des augmentations résultant de l'application de la clause d'indexation vaut renonciation au bénéfice de cette clause et interdit au nouveau propriétaire de calculer le loyer convenu en appliquant fictivement ladite clause; qu'en statuant ainsi, alors que la renonciation à un droit ne se présume pas et doit résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer, la Cour d'Appel a violé le texte susvisé".

La société EFIDIS demande à la Cour de :

- infirmer le jugement entrepris,

- dire et juger qu'en l'absence de renonciation à l'application de la clause d'indexation contractuelle, celle-ci joue de plein droit :

par la suite, annuellement, à chaque fin de période annuelle et selon les mêmes critères,

* et ce, tant que l'ensemble des sommes perçues par les locataires à la seule exclusion des charges visées à l'article 38 de la Loi du 1er septembre 1948, ne dépasse pas le loyer maximal afférent à l'ensemble des logements financés, révisé en fonction de l'indice INSEE dans la limite de 60 % de son montant, soit de 733.212,48 Francs jusqu'au 24 décembre 1986 et sans application de cette clause d'atténuation passée cette date,

- désigner Monsieur Y... en qualité d'expert.

Madame X... fait valoir que son bail n'est en aucun cas individualisé puisqu'il fait référence à un ensemble de logements et fixe un loyer annuel valable pour l'ensemble des appartements loués et invoque le non respect des dispositions de l'article 1709 du code civil.

Elle estime que la SA EFIDIS mal fondée en son appel et conclut à la confirmation du jugement du tribunal d'instance de PARIS.

En réplique, la SA EFIDIS, vu les dispositions de l'article 638 du nouveau code de procédure civile, prie la cour de juger Madame X... tant irrecevable que mal fondée en sa demande de confirmation du jugement entrepris et l'en débouter.

L'ordonnance de clôture a été signée le 25 février 1999 et l'affaire plaidée le 10 mars 1999.

SUR CE LA COUR

Considérant que le bail litigieux prévoit que le loyer sera réajusté de plein droit en plus ou en moins à la fin de la troisième année du bail en fonction de la variation de l'indice trimestriel national du coût de la construction publié par l'INSEE, les indices à retenir étant ceux du dernier trimestre connu à la date de signature du bail et celui du dernier trimestre connu à la date de la fin de la période à réviser, puis annuellement à chaque fin de la période à réviser, selon les mêmes critères ;

Qu'est expressément mentionné sur le bail le chiffre de l'indice de référence propre à chacun des locataires ;

Considérant qu'aux termes de l'arrêt de la Cour de Cassation, la Cour de céans doit uniquement rechercher si les parties ont manifesté sans équivoque la volonté de renoncer à la clause d'indexation figurant dans le bail les liant ;

Considérant que la renonciation à un droit ne se présume pas ;

Que la vente intervenue entre la SCI LA COMETE, ancien propriétaire, et la SA EFIDIS est sans incidence sur les clauses initiales du bail ;

Considérant en effet que les baux en cours s'imposent au nouveau propriétaire qui bénéficie alors des mêmes droits et obligations que l'ancien bailleur ;

Considérant qu'il n'est nullement démontré que la SCI LA COMETE a expressément, voire même tacitement, renoncé à sa prévaloir de la clause d'indexation litigieuse ;

Considérant, en effet, que le fait que la SCI LA COMETE n'ait réclamé qu'une partie des augmentations résultant de l'application de la clause d'indexation, ne peut constituer un acte manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;

Considérant que Madame X..., invoquant pour la première fois les dispositions de l'article 1709 du code civil, prétend que la SA EFIDIS ne pouvait procéder à l'augmentation de loyer contestée, eu égard au fait que le bail qui lui a été consenti n'est pas individualisé et ne comporte ni descriptif précis de la surface louée, ni le montant du loyer à la surface occupée, ni une clé de répartition du loyer par rapport à l'ensemble ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes du bail, consenti à Monsieur X..., le 27 janvier 1971, que les lieux loués consistent en un appartement de type F3, que le loyer est fixé à la somme de 383 Francs et enfin que les modalités de révision du loyer y sont définies avec précision ;

Considérant qu'est indiqué le montant du loyer annuel maximal afférent à l'ensemble des logements financés par le prêt contracté auprès du CREDIT FONCIER DE FRANCE pour leur acquisition ;

Qu'il est enfin précisé que la révision de ce loyer ne pourra dépasser 60 % de ce montant ;

Considérant que Madame X... disposait, par conséquent, des éléments lui permettant de connaître les conditions précises de son engagement en ce qui concerne le montant du loyer et des charges dont elle est redevable ;

Qu'elle est mal fondée à invoquer l'absence de prix déterminable du loyer ;

Considérant qu'il y a lieu, par conséquent, de dire que la clause

d'indexation contractuelle, doit jouer à la fin de la troisième année du bail, en fonction de l'indice trimestriel national du coût de la construction à savoir à compter du 1er janvier 1974 puis annuellement, à la fin de chaque période d'un an, selon les mêmes critères, ce à concurrence de 60 % du montant du loyer annuel maximal pour l'ensemble des logement (733.21 Francs), étant rappelé que le montant des loyers ainsi pris en considération, s'entend de l'ensemble des sommes perçues des locataires à l'exclusion des prestations, taxes locatives et fournitures individuelles visées à l'article 38 de la Loi du 1er septembre 1948 et remboursées sur justifications du propriétaires ;

Considérant qu'il est nécessaire d'ordonner une expertise afin de faire les comptes entres les parties sur cette base et de désigner à cet effet Monsieur Z...

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement en audience solennelle, sur renvoi après cassation :

Vu le jugement du tribunal d'instance de PARIS 19° :

Vu l'arrêt rendu par la 3° chambre de la Cour de Cassation rendu le

22 janvier 1997 :

- DIT ET JUGE qu'en l'absence de renonciation à l'application de la clause d'indexation contractuelle, celle-ci joue de plein droit et doit être calculée conformément au bail liant les parties, dans les conditions énoncées au contrat de prêt du CREDIT FONCIER DE FRANCE

- ORDONNE une expertise .

- DESIGNE à cet effet Monsieur Y..., expert, demeurant 7, rue Constance à PARIS 18°, lequel aura pour mission de faire les comptes entre les parties sur cette base pour la période du 1er février 1974 au 1e février 1999 ;

- FIXE à 5.000 Francs la consignation à valoir sur la rémunération de l'expert que devra verser la SA EFIDIS au greffe du service des expertises de la Cour dans le délai de deux mois à compter du présent arrêt ;

- DIT que l'expert devra déposer son rapport dans le délai de quatre mois à compter de l'acceptation de sa mission ;

- DESIGNE Madame METADIEU, conseiller, qui sera chargée de suivre les opérations d'expertise ;

- SURSOIT à statuer sur les autres demandes ;

- CONDAMNE Madame X... aux dépens du présent arrêt qui pourront être recouvrés par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile et LES RESERVE pour le surplus.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

C. DAULTIER

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 1997-5785
Date de la décision : 12/05/1999
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

RENONCIATION - Renonciation tacite - - Preuve - - Manifestation sans équivoque de l'intention de renoncer

En cas de vente d'un immeuble loué, les baux en cours s'imposent au nouveau propriétaire qui bénéficie des mêmes droits et obligations que l'ancien bailleur. En conséquence, dès lors qu'il n'est pas démontré que l'ancien bailleur avait renoncé à se prévaloir de la clause d'indexation prévue dans le bail, la renonciation à un droit ne se présumant pas et ne pouvant résulter que d'un acte manifestant sans équivoque la volonté de renoncer, cette clause doit jouer au profit du nouveau bailleur


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-05-12;1997.5785 ?
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