La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/10/2022 | FRANCE | N°19/024681

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 06, 12 octobre 2022, 19/024681


ARRÊT No22/
SP

R.G : No RG 19/02468 - No Portalis DBWB-V-B7D-FIE3

[X]
[V] EPOUSE [X]

C/

S.A.R.L. L'AMBASSADEUR

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2022

Chambre commerciale

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE SAINT PIERRE en date du 14 AOUT 2019 suivant déclaration d'appel en date du 16 SEPTEMBRE 2019 RG no 17/02078

APPELANTES :

Madame [Y] [X]
[Adresse 4]
[Localité 10]
Représentant : Me Georges-André HOARAU de la SELARL GEORGES-ANDRE HO

ARAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Madame [Z] [U] [V] épouse [X]
[Adresse 4]
[Localité 10]
Représ...

ARRÊT No22/
SP

R.G : No RG 19/02468 - No Portalis DBWB-V-B7D-FIE3

[X]
[V] EPOUSE [X]

C/

S.A.R.L. L'AMBASSADEUR

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2022

Chambre commerciale

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE SAINT PIERRE en date du 14 AOUT 2019 suivant déclaration d'appel en date du 16 SEPTEMBRE 2019 RG no 17/02078

APPELANTES :

Madame [Y] [X]
[Adresse 4]
[Localité 10]
Représentant : Me Georges-André HOARAU de la SELARL GEORGES-ANDRE HOARAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Madame [Z] [U] [V] épouse [X]
[Adresse 4]
[Localité 10]
Représentant : Me Georges-André HOARAU de la SELARL GEORGES-ANDRE HOARAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

S.A.R.L. L'AMBASSADEUR
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER et ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION, Me Apolline DARRE, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 31/01/2022

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 avril 2022 devant Madame PIEDAGNEL Sophie, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 06 juillet 2022 prorogé par avis au 12 octobre 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 12 octobre 2022.

* * *

LA COUR

Par acte sous signature privée en date du 12 juin 2001, M. [K] [S] [X] et son épouse Mme [Z] [U] [V] (M. et Mme [X]) ont donné à bail à la SARL L'ambassadeur un local commercial situé [Adresse 7] moyennant un loyer de 1.966 euros mensuels hors taxes pour une durée de neuf années.

Par acte sous signature privée en date du 13 janvier 2003, M. et Mme [X] ont donné à bail à la société L'ambassadeur un local commercial situé [Adresse 9] moyennant un loyer mensuel de 580 euros pour une durée de neuf années, soit 2.598,60 euros mensuels pour les deux baux.

Le premier bail est venu à expiration le 31 juillet 2010 et s'est poursuivi par tacite reconduction, de même pour le second bail venu à expiration le 31 janvier 2012.

M. [X] est décédé le [Date décès 2] 2014, laissant pour lui succéder sa veuve et sa fille, Mme [Y] [X] (Mmes [X]).

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception en date du 14 septembre 2016, la SARL Vendali II, agence immobilière représentant les bailleurs, a notifié à la société L'ambassadeur une demande de fixation du montant total des deux loyers, après application de l'indexation prévue aux contrats (révision triennale selon l'indice trimestriel de la construction publié par l'INSEE) à 2.737,60 euros par mois.

Par mémoire préalable du 30 mai 2017, la société L'ambassadeur s'est opposée à cette hausse et a notifié au bailleur une demande tendant à voir fixer le loyer total à 1.280 euros par mois.

Par acte d'huissier en date du 15 septembre 2017, la société L'ambassadeur a fait assigner M. et Mme [X] devant le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Saint Pierre de la Réunion aux fins de statuer sur la révision du loyer.

Par acte d'huissier en date du 19 octobre 2017, la société L'ambassadeur a assigné en intervention forcée Mme [Y] [X].

Les deux affaires ont été jointes par mention au dossier du 8 novembre 2017.

Par jugement avant dire droit en date du 13 décembre 2017, le juge des loyers commerciaux a ordonné une expertise confiée à Mme [G] [P] [R] qui a déposé son rapport le 8 mars 2019.

C'est dans ces conditions que, par jugement rendu le 14 août 2018, le juge des loyers près le tribunal de grande instance de Saint Pierre de la Réunion a :
-fixé le montant mensuel du loyer des deux locaux commerciaux sis [Adresse 7] à la somme de 1.582,58 euros hors taxes et, ce, à compter de la présente décision
-condamné solidairement Mme [X] [Z] et Mme [X] [Y] à payer à La SARL L'ambassadeur une somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
-débouté la SARL L'ambassadeur de sa demande d'exécution provisoire de la décision
-condamné solidairement Mme [X] [Z], ainsi que Mme [X] [Y] aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 16 septembre 2019, les consorts [X] ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 15 octobre 2021, les consorts [X] demandent à la cour de :
-déclarer leur appel recevable et ledit parfaitement fondé
-infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris
Statuant à nouveau
-débouter le preneur de toutes ses demandes
-fixer le loyer total pour les deux locaux à 2.598,60 euros TTC
-condamner la SARL L'ambassadeur à payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
-condamner la SARL L'ambassadeur aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 janvier 2021, la société L'ambassadeur demande à la cour, au visa des articles L145-33 à L145-38, R145-6, R145-7,et R145-23 à R.145-31 du code de commerce et du rapport d'expertise de Mme [G] [P] [R], de :
-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le montant du loyer à 1.582,59 euros HT, et ce à compter de la décision rendue
Et, statuant à nouveau
-fixer le loyer commercial au montant de 1.235 euros HT par mois, soit 19,29 euros par m² correspondant à sa valeur locative réelle
-juger que le loyer renouvelé s'appliquera de manière rétroactive à compter de la date de la demande en révision, soit au 1er août 2016
-condamner solidairement Mmes [X] à restituer à la SARL L'ambassadeur le montant du trop-perçu de loyer commercial à compter du 1er août 2016
-débouter Mmes [X] de leurs plus amples demandes, fins et conclusions
-condamner solidairement Mmes [X] à payer à la SARL L'ambassadeur la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 31 janvier 2022 et l'affaire a reçu fixation pour être plaidée à l'audience rapporteur du 6 avril 2022. Le prononcé de l'arrêt, par mise à disposition du greffe, a été fixé au 6 juillet 2022 prorogé au 12 octobre 2022.

SUR CE, LA COUR

A titre liminaire

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif. Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir "constater" ou "donner acte" ou encore "considérer que" voire "dire et juger que" et la cour n'a dès lors pas à y répondre.

Sur la fixation du loyer

Mmes [X] soutiennent que le prix doit être fixé sur la base de deux baux et locaux distincts et non d'un seul local, ce d'autant que selon l'expert, « le loyer serait plus important en cas de location des deux lots distincts et que plus le local commercial est d'une petite contenance, et plus le prix au mètre carré peut être élevé » et qu'il n'a pas été tenu compte des travaux réalisés par le preneur qui a consisté à abattre le mur séparatif entre les deux locaux sans autorisation écrite du bailleur.
Mme [X] reprochent à l'expert d'avoir mal évalué la situation en déterminant la valeur locative du local loué à la société L'ambassadeur situé au centre ville de [Localité 10] à des locaux de situation secondaire en y ajoutant 20% à leur prix au m² sans aucune justification. Elles produisent un contrat de bail commercial portant sur la location d'un local situé sur l'avenue principale, presqu'en face du local litigieux et il s'agit d'un local de 92 m² loué en mars 2016 au prix de 3.500 euros/mois auquel s'ajoute le remboursement de la taxe foncière de 6280 euros soit un prix au m² de 43.73 euros/m², étant précisé que ce local n'est pas situé sur le meilleur côté de l'avenue du DR [W], sans aussi être dans un angle de rues. Concernant la valeur locative des petits locaux par rapport aux grands locaux, elles justifient de la location d'un local de 20 m² sur l'avenue principale loué à 900 €/mois, soit 45 € le m², alors que dans ce cas présent il s'agit d'une situation secondaire par rapport au local loué par l'Ambassadeur qui est mieux situé à l'angle d'une rue ([Adresse 9] /[Adresse 8]), ajoutant que la location des petits locaux ne se fait pas au m².

La société L'ambassadeur soutient que vu la configuration des locaux, ces derniers ne peuvent être analysés séparément l'un de l'autre puisqu'ils forment un ensemble permettant l'exploitation du même fonds de commerce et rappelle que les deux baux ont été signés « avec la même destination » et qu'en pratique, le règlement du loyer commercial intervient dans le cadre d'un seul paiement correspondant au montant total des loyers de chacun des locaux.
S'agissant de la valeur locative, la société L'ambassadeur fait valoir que :
-les lieux loués ne présentent pas de commodités particulières permettant de justifier une augmentation de la valeur locative, bien au contraire, l'expert relève dans son rapport une « possibilité de stationnement peu aisée »
-la destination des lieux loués qui consiste en l'exploitation de toutes activités se rattachant à la boulangerie-pâtisserie n'a pas connu de modification
-les obligations respectives des parties sont restées les mêmes
-les facteurs locaux de commercialité sont de qualité moyenne et n'ont en tout état de cause pas été améliorés depuis la conclusion du bail ; au contraire, l'évolution des loyers pratiqués a baissé, la ville de [Localité 10] étant de plus en plus délaissée au profit de celle de [Localité 11], ville proche dont l'attrait commercial est plus important ; la concurrence est forte dans le centre-ville même de [Localité 10] puisqu'une autre boulangerie-pâtisserie est installée à quelques mètres seulement des locaux loués ; certes, cette autre boulangerie est dans une rue perpendiculaire à l'avenue principale mais elle dispose d'un local plus grand et reste située au c?ur du centre-ville, puisque son local se trouve également face à la mairie
-le loyer de la société L'ambassadeur s'élève à 2.598,60 euros HT/mois au total, soit 40,60 euros/m², alors que le loyer moyen dans le voisinage n'excède pas 20 euros/m², tous types de commerce confondus ; pour comparaison, un local commercial de 140 m² situé au rez-de-chaussée, au centre-ville de [Localité 10], [Adresse 3], est loué à 2.237 euros HT par mois actuellement, soit un loyer de15,98 euros/m², or, la situation de ce local est tout à fait comparable puisque, s'il n'est effectivement pas sur l'avenue principale de Saint Louis, il est situé à quelques mètres à peine, sur une rue très fréquentée au c?ur de la ville
-le juge a appliqué une majoration de 25% au lieu des 20% suggérés par l'expert retenant que les locaux étaient situé dans un secteur commerçant de très bonne commercialité avec une très bonne visibilité alors que la localisation a déjà été prise en compte dans les loyers ayant premier la détermination du loyer moyen
- la majoration de 10% retenu par l'expert du fait du positionnement en angle ne peut pas s'appliquer du fait des difficultés de stationnement relevées
-selon l'article L145-38 du code de commerce, la révision du loyer prend effet à compter de la date de demande en révision, soit le 14 septembre 2016 et non à compter de la décision.

Sur quoi,

Pour rappel, conformément aux dispositions des articles L145-9 et suivant du code de commerce, par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux commerciaux ne cessent que par l'effet d'un congé donné six mois à l'avance ou d'une demande de renouvellement. A défaut de congé ou de demande de renouvellement, le bail fait par écrit se prolonge tacitement au-delà du terme fixé par le contrat.

Le mécanisme du plafonnement du loyer instauré par l'article L145-38 du code de commerce est écarté dans plusieurs situations qui permettent au juge de fixer le loyer du bail renouvelé exclusivement en fonction de la valeur locative sans avoir à tenir compte du prix plafond :
-soit en raison de la durée du bail expiré
.lorsque la durée contractuellement prévue au bail à renouveler était supérieure à 9 ans, que le renouvellement intervienne effectivement à la date d'expiration envisagée à l'origine ou que ce renouvellement intervienne plus tard après une période de tacite reconduction
.lorsque le bail à renouveler avait une durée contractuelle prévue de 9 ans mais que, par suite d'une tacite reconduction, cette durée a été supérieure à 12 ans
.lorsque le nouveau bail est conclu pour une durée supérieure à 9 ans. En ce cas, le déplafonnement se justifie par la nécessité d'obtenir l'accord des parties pour une durée supérieure à la durée légale de 9 ans et, le cas échéant, si le bail expiré avait une durée contractuelle de 9 ans, par une modification notable d'un des éléments de la valeur locative.
-soit en raison d'une modification notable de l'un des éléments d'appréciation de la valeur locative définis aux articles R145-3 à R145-6 et R145-8 du code de commerce
-soit en raison de la nature même de l'objet du bail qui implique le recours à des méthodes particulières pour la fixation du prix :
.terrain loué nu (article R145-9),
.locaux monovalents (article R145-10)
.locaux à usage exclusif de bureaux (article R145-11).

En l'espèce, il convient de relever que les parties ne contestent pas le principe du déplafonnement du loyer du fait de la durée du bail expiré (supérieure à 12 ans) mais uniquement le montant de la valeur locative ainsi que la date d'application du loyer renouvelé pour la société L'ambassadeur.

Aux termes de l'article L145-33
« Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1 Les caractéristiques du local considéré ;
2 La destination des lieux ;
3 Les obligations respectives des parties ;
4 Les facteurs locaux de commercialité ;
5 Les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;
Un décret en Conseil d'État précise la consistance de ces éléments. »

Conformément aux dispositions de l'article R145-2 du code de commerce, les éléments mentionnés aux 1o à 5o de l'article L145-33, à savoir les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité et les prix couramment pratiqués dans le voisinage, s'apprécient dans les conditions fixées par les articles R145-3 à R145-11.

Selon l'article R145-3 du code de commerce :
« Les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération :
1o De sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;
2o De l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;
3o De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée ;
4o De l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;
5o De la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire. »

L'article R145-4 alinéa 1er précise que « Les caractéristiques propres au local peuvent être affectées par des éléments extrinsèques constitués par des locaux accessoires, des locaux annexes ou des dépendances, donnés en location par le même bailleur et susceptibles d'une utilisation conjointe avec les locaux principaux. »

Les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire (article R145-6)

Aux termes de l'article R145-7 :
« Les prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unité de surfaces, concernent des locaux équivalents eu égard à l'ensemble des éléments mentionnés aux articles R145-3 à R145-6.
A défaut d'équivalence, ils peuvent, à titre indicatif, être utilisés pour la détermination des prix de base, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence.
Les références proposées de part et d'autre portent sur plusieurs locaux et comportent, pour chaque local, son adresse et sa description succincte. Elles sont corrigées à raison des différences qui peuvent exister entre les dates de fixation des prix et les modalités de cette fixation. »

En vertu de l'article R145-8 :
« Du point de vue des obligations respectives des parties, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. Les améliorations apportées aux lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, directement ou indirectement, notamment par l'acceptation d'un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge.
Les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l'une ou l'autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer.
Il est aussi tenu compte des modalités selon lesquelles le prix antérieurement applicable a été originairement fixé. »

En l'espèce, il existe deux locaux, un local ayant fait l'objet d'un bail du 12 juin 2001 et portant sur une surface de 39 m2 situé à l'angle des rues de l'église et du docteur [B] [W] pour un loyer de 1.966 euros mensuels et un autre local situé avenue principale ayant fait l'objet d'un bail le 13 janvier 2003 pour une surface de 25 m2 pour un loyer de 580 euros mensuels.

Selon l'expert judiciaire le bien loué se situe au c?ur du centre ville, bénéficie d'une bonne desserte avec un environnement immédiat urbanisé et majoritairement constitué de commerces et de locaux professionnels.

La ville de [Localité 10] est décrite comme une ville bénéficiant de commodités, de supermarchés, de commerces de proximité, d'un lycée, d'un collègue et d'écoles primaires et maternelles, de la présence de plusieurs pharmacies, médecins et spécialistes et d'un réseau de bus.

Les locaux, d'une contenance utile d'environ 57,59 m² (hors pondération) se situent sur l'axe principal de desserte en angle de rue, ce qui, selon l'expert, sont davantage attractifs ; ils se composent d'un espace de vente, d'un espace de fabrication avec des chambres froides et des fours, d'un espace de stockage, d'un espace vestiaire et d'un WC avec lave-mains ; la distribution intérieure est bonne, les locaux son d'une vétusté normale, l'espace de vente et le reste des locaux sont entretenus.

Selon l'expert, la zone de commercialité et la desserte sont bonnes.

L'activité sur site est connue et bénéficie d'une clientèle d'habituée.

Pour fixer la valeur locative à 1.524 € soit 26,46 €/m², l'expert a pris trois références : une au c?ur de ville d'une surface de 110 m² pour un loyer mensuel de 1.667 €, soit environ 15,15 €/m² et deux au centre ville de [Localité 10], l'une d'une superficie de 140 m² pour un loyer mensuel de 2.400 € soit 17,14 €/m² et l'autre d'une superficie de 80 m² pour un loyer mensuel de 2.300 €, soit 28,75 €/m², soit une moyenne de 20,35€/m² pour des locaux commerciaux situés à [Localité 10] sur des axes secondaires.

Il a appliqué une majoration de 20% compte tenu de la situation en hyper centre et de la commercialité ainsi qu'une majoration de 10% pour le local en angle de rue, soit 20,35 + 30% = 26,46 ; 57,59 m² x 26,46 €/m² = 1.523,83 €.

Il a estimé que les deux locaux ne peuvent plus être loués séparément compte tenu de l'exploitation actuelle et rappelé que plus un local est petit plus le prix au m² peut être élevé.

L'expertise comprend 8 photographies de la rue du Docteur [B] [W], de l'immeuble vue de la rue et en intérieur ainsi qu'un plan permettant de présenter la configuration des locaux.

Mmes [X] versent aux débats un extrait d'un bail commercial (ne comprend ni la date ni la signature des parties) situé [Adresse 1] pour une activité de snack-sandwicherie à emporter et boissons ; le nombre de m² n'est pas indiqué : il ne peut donc être utilement retenu.

Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le juge des loyers a considéré que les locaux se situaient incontestablement dans un secteur commerçant de très bonne commercialité avec une très bonne visibilité, ce qui expliquait et justifiait, tant l'application de la majoration de 20 % en raison de l'hyper centre ainsi que la majoration de 10 % de l'angle de rue.

C'est également à bon droit que le juge des loyers a estimé que la majoration de 20% était sous-estimée sous évaluée et a fixé celle-ci à 25 %.

S'agissant de la date d'application du loyer renouvelé, comme les intérêts, il y a lieu de retenir la date de la demande en fixation du loyer du bail renouvelé : cette demande résulte de l'assignation introductive d'instance en fixation du prix lorsque le bailleur est à l'origine de la procédure, et de la notification du mémoire en défense lorsque c'est le preneur qui a saisi le juge.

En l'espèce, la demande en fixation du loyer du bail renouvelé émane du preneur, à savoir la société L'ambassadeur.

Il convient en conséquence de retenir la date du 30 mai 2017 et non celle du 1er août 2016 comme sollicité par la société L'ambassadeur et le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a fixé le loyer à compter de la décision.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Mmes [X] succombant, il convient de :
-les condamner aux dépens d'appel
-les débouter de leur demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure d'appel
-confirmer le jugement en ce qu'il les a condamnées aux dépens de première instance
-confirmer le jugement en ce qu'il les a déboutées de leur demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance.

L'équité commandant de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société L'ambassadeur, il convient de lui accorder de ce chef la somme de 5.000 euros pour la procédure d'appel et de confirmer le jugement en ce qu'il lui a alloué à ce titre la somme de 2.500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

CONFIRME le jugement rendu le 14 août 2019 par le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Saint Pierre de la Réunion, sauf en ce qu'il a fixé le montant mensuel du loyer des deux locaux commerciaux sis [Adresse 7] à la somme de 1.582,58 euros hors taxes et, ce, à compter sa présente décision ;

LE REFORME sur ce point ;

Statuant à nouveau sur le seul chef infirmé,

FIXE le montant mensuel du loyer des deux locaux commerciaux sis [Adresse 7] à la somme de 1.582,58 euros hors taxes et, ce, à compter du 30 mai 2017 ;

CONDAMNE Mme [Z] [U] [V] veuve [X] et Mme [Y] [X] à payer à la SARL L'ambassadeur la somme de 5.000 euros ;

Y ajoutant,

DEBOUTE Mme [Z] [U] [V] veuve [X] et Mme [Y] [X] de leur demande au titre des frais irrépétibles ;

LES CONDAMNE à payer à la SARL L'ambassadeur la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

LES CONDAMNE aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE SIGNE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 06
Numéro d'arrêt : 19/024681
Date de la décision : 12/10/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-10-12;19.024681 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award