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22/07/2022 | FRANCE | N°20/015881

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 22 juillet 2022, 20/015881


ARRÊT No22/388
PC

No RG 20/01588 - No Portalis DBWB-V-B7E-FNMR

[Y]
[Y]

C/

[Y]
[Y]

RG 1èRE INSTANCE : 17/02366

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 22 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS en date du 24 juillet 2020 RG no: 17/02366 suivant déclaration d'appel en date du 16 septembre 2020

APPELANTS :

Madame [Z] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-R

EUNION

Monsieur [W] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMES...

ARRÊT No22/388
PC

No RG 20/01588 - No Portalis DBWB-V-B7E-FNMR

[Y]
[Y]

C/

[Y]
[Y]

RG 1èRE INSTANCE : 17/02366

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 22 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS en date du 24 juillet 2020 RG no: 17/02366 suivant déclaration d'appel en date du 16 septembre 2020

APPELANTS :

Madame [Z] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [W] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMES :

Madame [B] [Y] épouse [T]
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentant : Me Iqbal AKHOUN de la SELARL IAVOCATS et PARTNERS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [R] [Y]
[Adresse 1],
[Localité 8]
Représentant : Me Anne laure HIBERT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

CLÔTURE LE : 09 décembre 2021

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mars 2022 devant la Cour composée de :

Président :Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller :Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller :Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 10 juin 2022 puis prorogé au 22 Juillet 2022.

Greffier: Madame Alexandra BOCQUILLON, ff.

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 22 Juillet 2022.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [I] [K] [Y] est décédé le [Date décès 5] 2005, en laissant pour lui succéder ses quatre enfants, issus de son union avec [S] [U] [E], dont il avait divorcé par jugement du 23 juillet 1998 :
- Monsieur [R] [Y],
- Madame [B] [O] [Y] épouse [T]
- Madame [Z] [Y]
- Monsieur [W] [Y].

Par acte notarié du 20 septembre 2006, la dévolution successorale a été constatée par Maître [A], notaire à [Localité 6].

En raison de désaccords les opposant sur le sort des libéralités reçues par certains d'entre eux, l'un des héritiers, Madame [B] [O] [Y] épouse [T] a fait assigner les trois autres devant le tribunal de grande instance de SAINT-DENIS par acte d'huissier du 8 août 2008 pour voir ordonner le partage judiciaire et le rapport ou la réduction des dons et donations dont ont bénéficié ses frère et s?ur, [W] et [Z] [Y], ainsi que pour faire fixer l'indemnité d'occupation due par cette dernière de 1998 à mai 2004.

Par jugement du 17 mars 2010, le Tribunal de grande instance a :
- ordonné le partage de l'indivision existant entre les parties ;
- commis le Président de la Chambre départementale des notaires de la Réunion ou son délégataire pour procéder aux opérations de compte, liquidation partage ;
- dit que le notaire devra déterminer s'il y a lieu de procéder à la réduction des libéralités consenties à [Z] [Y], [W] [Y] et [B] [T] née [Y], conformément aux dispositions des articles 860, 920 et suivants du code civil et en tenant compte des libéralités suivantes:
* don d'argent à hauteur de 242.130 francs pour [W];
* don d'argent à hauteur de 527.500 francs pour [Z] outre la maison objet de la donation du 4 mai 1994 à évaluer dans son état à l'époque de la donation pour sa valeur à l'ouverture de la succession déduction faite des dettes ou charges la grevant ;
* don d'argent dont a bénéficié [B] [T] qui devra justifier du montant exact auprès du notaire;
- débouté les parties de toutes demandes plus amples;
- dit que le notaire devra effectuer ses opérations et établir un état liquidatif dans l'année de sa désignation;
- commis un juge commissaire pour veiller au déroulement des opérations;
- dit qu'en cas de désaccord sur le projet d'état liquidatif un procès-verbal de difficulté conforme aux prescriptions de l'article 1373 du code de procédure civile sera soumis au juge commissaire ;
- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage;
- ordonné l'exécution provisoire.

Sur appel interjeté par Madame [Z] et Monsieur [W] [Y], la cour d'appel de Saint-Denis a rendu un arrêt en date du 3 février 2012, dont le dispositif est ainsi rédigé :
- Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que [Z] [Y] et [W] [Y] avaient bénéficié d'un don d'argent de respectivement 80.416,86 € (527.500 Francs) pour la première et 3.811,22 € (25.000 Francs) pour le second, devant être retenus pour la composition de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible.

- Statuant à nouveau de ces chefs, dit et juge non fondées les prétentions des consorts [B] et [R] [Y] tendant à voir dire et juger que leur s?ur [Z] [Y] et frère [W] [Y] ont respectivement bénéficié de ces sommes à titre de dons en numéraire et les en déboute.
- Y ajoutant:
* dit et juge que la donation de bien immobilier consentie le 4 mai 1994 par les époux [K] [Y] à leur fille [Z] [Y], n'est pas rapportable en raison de son caractère préciputaire ;
* dit que cette libéralité devra être retenue dans la composition de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible pour la moitié de la valeur du bien à l'ouverture de la succession en octobre 2005 selon son état au mois de mai 1994;
* rappelle que l'indemnité de réduction s'il y a lieu sera déterminée selon les modalités de l'article 924-2 du code civil selon l'état du bien à la date de prise d'effet de la donation le 4 mai 1994 mais pour sa valeur à l'époque du partage.
* dit non fondées les demandes de M. [W] [Y] tendant à faire juger que le don de la somme de 30.489,80 € (200.000 francs) dont il a bénéficié ne doit être pris en compte que pour la moitié de son montant correspondant à la part concernée par la succession de son père et que ceux de 914,69 € (6.000 F) du 07/03/2001 et 1.130,00 € du 11/12/2002 constitueraient des présents d'usage : L'en déboute.
* dit que les dons en espèces consentis par le de cujus à Madame [G] [N] devront être retenus pour leur montant nominal dans la composition de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible.
* constate qu'aucune demande de réduction n'est formée contre cette donataire tiers à la succession, non partie à l'instance.
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
- Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
- Déclare les dépens frais privilégiés de partage sans qu'il n'y ait lieu d'en prononcer la distraction.

A la suite de cette décision, la Chambre des Notaires a désigné Me [C] [L], notaire au [Localité 10], pour procéder aux opérations de liquidation en partage de l'indivision prévalant entre les consorts [Y].

Des difficultés relatives au versement d'une provision sur frais de l'Etude notariale, seuls Monsieur [R] [Y] et Madame [B] [T] ayant versé la somme de 20,00 euros en mars 2015. Ainsi, aucun projet de partage ni aucun procès-verbal de difficulté n'était rédigé au début de l'année 2015.

Une réunion a eu lieu au tribunal de grande instance de Saint-Denis le 10 février 2015 en présence du Juge Commissaire, sans suite.

Un projet d'état liquidatif de la succession a été présenté aux avocats des héritiers par courrier daté du 16 juin 2016.

Le Conseil de Madame [B] [T] a adhéré à ce projet par courrier daté du 28 juillet 2016, confiant à Maître [L] la mission de dresser l'acte définitif.

Par courrier en date du 25 juillet 2016, le Conseil de Mme [Z] [Y] et de Monsieur [W] [Y] a interrogé le notaire sur le montant retenu dans le projet d'acte au titre d'une donation reçue par Mme [B] [T] (395 euros au lieu de 150.000 euros).

Maître [L] a ensuite tenté de réunir les parties le 26 avril 2017 afin que les parties lui exposent les points de divergence relatifs au projet liquidatif.

Par acte d'huissier du 18 juillet 2017, Madame [B] [O] [Y], épouse [T], a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis, Messieurs [R] et [W] [Y] et Madame [Z] [Y] aux fins de :
- Dire que l'action en partage judiciaire de la requérante est recevable et bien fondée,
- Condamner Mme [Z] [Y] in solidum avec [W] [Y] à payer à Mme [B] [T], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement les sommes suivantes:
* 47.604,59 euros soit (95.209,19€ / 2) comme le prévoit l`état liquidatif,
* 5.000 euros compte tenu de la valeur réelle de 475.000 euros de la maison reçue en préciput et hors part,
* 20.000 euros de dommages intérêts,
* 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner M. [W] [Y] in solidum avec [Z] [Y] à payer à Mme [B] [T], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement les sommes suivantes:
* 9.097 euros au titre du partage judiciaire,
* 12.000 euros au titre du remploi,
* 20.000 euros de dommages intérêts,
* 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner [W] et [Z] [Y] in solidum à prendre en charge tous les frais de notaire et d`enregistrement et de publication,
- Comme le prévoit l'état liquidatif, [B] [T] doit également se voir attribuer la moitié des comptes bancaires soit la somme de 10.816,04 euros.

Par jugement du 6 février 2019, le tribunal a :
- révoqué l'ordonnance de clôture,
- ré-ouvert les débats,
- enjoint aux parties de présenter leurs observations sur l'absence de saisine du juge commis et de rapport qu'il aurait pu établir,
- réservé les demandes et dépens.

Par ordonnance du 25 mars 2020, le juge de la mise en état a indiqué ne pas être compétent pour ordonner une conciliation ou médiation dans ce cadre procédure.

Par jugement du 24 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a statué en ces termes :
- dit que la partage judiciaire a été déjà ordonné aux termes du jugement rendu le 17 mars 2010, confirmé par l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Saint-Denis le 3 février 2012 ;
- dit que Monsieur [W] [Y] doit rapporter la somme, déjà réévaluée, de 78.611 € ;
- dit que Madame [B] [T] doit rapporter la somme de 395 € en nominal au partage successoral;
- dit que le bien immobilier sis à [Adresse 2], objet de la donation préciputaire consentie par Monsieur et Madame [K] [Y], à leur fille, [Z] [Y], avait une valeur de 475.000€, au jour du décès de Monsieur [Y] dans l'état où il était au jour de la donation; la moitié de ladite valeur, soit 237.500 €, devra s'imputer sur la quotité disponible, laquelle est excédée;
-dit que l'indemnité de réduction due par Madame [Z] [Y] est de 175.237,65 €;
-dit que l'indemnité de réduction due par Monsieur [W] [Y] est de 9.642,07;
-dit que la liquidation de la succession de Monsieur [K] [Y] est établie comme suit:
(...)
-Ordonne que la somme de 10.816,03€ provenant du solde créditeur des comptes bancaires du de cujus soit remise à Madame [B] [T] au titre d'une quote-part des droits lui revenant;
-Condamne Monsieur [W] [Y] à payer à Madame [B] [T] la somme de 9.642,07 € au titre de la soulte à elle due ;
-Condamne Madame [Z] [Y] à payer à Madame [B] [T] la somme de 48.115,83 € au titre de la soulte à elle due ;
-Ordonne que la somme de 10.816,04 € provenant du solde créditeur des comptes bancaires du de cujus soit remise à Monsieur [R] [Y] au titre d'une quote-part des droits lui revenant;
-Condamne Madame [Z] [Y] à payer à Monsieur [R] [Y] la somme de 58.152,89 € au titre de la soulte à lui due ;
-Dit que pour le cas où le montant des avoirs bancaires de Monsieur [K] [Y] serait supérieur à 21.632,07 €, le surplus sera partagé en parts égales entre les quatre enfants du de cujus ;
-Prend acte que Monsieur [R] [Y] n'a bénéficié d'aucune donation rapportable ;
-Déboute [W] et [Z] [Y] de leur demande de prise en compte de la valeur du bien immobilier appartenant à [B] [T], sis à [Adresse 9], dans la liquidation de la succession de leur père, Monsieur [K] [Y] ;
-Dit que les frais d'acte notarié seront partagés à parts égales entre les copartageants;
-Renvoie le dossier entre les mains de Maître [L], notaire à le [Localité 10], afin que l'acte de partage soit dressé impérativement sur la base de ces éléments;
-Dit que Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] seront condamnés à payer, chacun, à Madame [B] [T], la somme de 1.000 € au titre de dommages-intérêts ;
-Rejette les demandes formulées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-Dit que les dépens seront supportés par les parties conformément aux règles de partage successoral;
-Dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation sous astreinte ;
-Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;
-Rejette toutes autres demandes plus amples et contraires.

Par déclaration du 16 septembre 2020, Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] ont interjeté appel du jugement précité.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état par ordonnance en date du 16 septembre 2020.

Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] ont déposé leurs premières conclusions d'appelants le 30 novembre 2020.

Monsieur [R] [Y] a déposé ses conclusions d'intimé le 25 février 2021.

Madame [B] [Y], épouse [T], a déposé ses conclusions d'intimée le 25 février 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 décembre 2021.

* * * * *

PRETENTIONS ET MOYENS

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 1er décembre 2021, Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] demandent à la cour de :
-Déclarer recevable l'appel formé par les appelants à l'encontre du jugement du 24 juillet 2020.
Vu les décisions judiciaires déjà intervenues dans le cadre de la liquidation de la succession de [K] [Y] ;
Vu les pièces versées au débat,
Vu l'article 860-1 du code civil,
-Juger que preuve est rapportée de ce que la donation reçue par Madame [B] [Y] a bien été réemployée dans l'achat d'un bien immobilier situé à [Adresse 9].
-Juger que pour établir la masse successorale à partager, il convient avant tout d'avoir l'évaluation du bien appartenant à Madame [B] [Y] épouse [T].
-Constater par ailleurs que les premiers juges n'ont absolument pas déterminé le montant de la donation à rapporter par [B] à partir des pièces justificatives, mais seulement en référence d'un chiffre « retenu » par le notaire [L],
En conséquence,
-Infirmer le jugement du 24 juillet 2020 en ce qu'il a retenu comme seule donation à rapporter par [B] une somme de 395 €.
-Constater qu'il n'existait au dossier aucun élément permettant de déterminer le prix de la donation reçu par [Z] [Y] en 1994 dans la consistance de 1994.
-Infirmer en conséquence le jugement critiqué en ce qu'il a retenu la valeur de 475 000 €.
-Juger que la somme « réemployée » par [W] [Y] dans des biens achetés par lui ne peut excéder la somme de 51 072 €.
-Infirmer là encore la décision du 24 juillet 2020 en ce qu'elle a acté à ce niveau une somme de 78 611 €.
Statuant de nouveau,
-Donner acte aux concluants de ce qu'ils ont toujours sollicité du Notaire des opérations contradictoires de liquidation pour favoriser une situation amiable.
-Constater que le notaire et Madame [B] [T] ont refusé tout débat contradictoire.
-Constater que le « projet » établi par Me [L] n'a fait que reprendre les revendications de Madame [B] [Y], épouse [T],
-Constater que cette réalité ne pouvait que conduite à un procès-verbal de difficultés du 3 mai 2017.
-Surseoir à statuer dans l'attente de la production par [B] [T], née [Y], de la valeur du bien immobilier situé [Adresse 9], permettant de déterminer la masse à partager.
-Donner acte aux concluants de qu'ils concluront plus avant une fois la masse à partager déterminée.
En tout état de cause,
-Juger que la valeur en 2021 de la maison donnée à [Z] en 1994 ne peut excéder le prix de 325.000 €
-Juger que le coût des travaux payés par [Z] [Y] pour la somme de 43.883 € doit venir en déduction de la valeur de la donation reçue.
-Juger qu'en conséquence, le rapport à succession que doit faire [Z] [Y] ne peut excéder la somme de 118.617 €.
-Juger que la valeur de la maison de [B] [Y] financée en partie par les deniers de monsieur [K] [Y] doit être évaluée en 2021 à minima à 500.000 €.
-Juger que la valeur de réemploi à prendre en considération lors de l'achat de cette maison en 1986 est de 150.000 FF correspondant à 12% du prix.
-Juger que sur la base d'une valeur en 2021 de 500.000 €, le réemploi doit être chiffré à 60.000 €.
-Juger que cette somme doit être rapportée par [B] [Y] à la masse à partager ainsi que les donations en numéraires chiffrées à la somme de 5195.83 €.
-Réformer le jugement du 24 juillet 2020 en ce qu'il a liquidé la succession de Monsieur [K] [Y] sans tenir compte des droits réels des parties.
-Juger que la liquidation de cette succession doit se faire de la manière suivante :
A) Calcul de la quotité disponible et de la réserve indivisaire (Article 922 du Code civil)
Avoir bancaire au jour du décès : 20.581,39 €
Donation au profit de [B] : 65.195,83 €
Donation au profit de [Z]: 118.617,00 €
Donation au profit de [W]: 51.072,00 €
Donation au profit de [G] [N]: 29.346,00 €
Total : 284.812,22 €

La quotité disponible est donc de 284.812,22/4 = 71203 € (Article 913).
Ce qui entraine une réserve globale de 213.609 € soit une réserve individuelle de 53402 €.

Masse à partager
Avoir bancaires: 20.589,39 €
Rapport dû par [W]: 51.072,00 €
Rapport dû par [B]: 66.195,83 €
Indemnité de réduction due par [Z]: 118.617,00
ACTIF NET TOTAL= 256.104,22 €

Chacun des héritiers a donc droit à 64.026 €

Attributions
[R] [Y] il a droit à : 64.026,00€
Il doit lui être attribué le solde des comptes bancaires pour 20.589,39€.
Il doit recevoir une soulte de 43.436,66€ qui lui sera versé par [Z] [Y].

[B] [Y]: elle a droit à 64.026,00 €
Elle a reçu la somme de 65.195,83 €.
Elle doit reverser une soulte de 1169,83 € à [W] [Y].

[W] [Y]: il a droit à : 64.026,00 €.
Il doit recevoir la somme de 12324 € qui lui sera versée partie par [B] partie par [Z].

[Z] [Y]: elle a droit à : 64.026,00 €
Elle a déjà reçu 118.617 €
Elle doit verser une soulte de 54.591 € qu'elle règlera à hauteur de 43.436,66€ à [R] et à hauteur de 11154,34 € à [W].

-Infirmer le jugement critiqué en ce qu'il a condamné les concluants à des dommages et intérêts alors qu'à aucun moment les concluants n'ont fait obstacle au règlement de la succession de leur père.
-Débouter Mme [B] [T] et Monsieur [R] [Y] de leurs demandes autres ou contraires.
-Condamner les intimés au paiement de 10 000 € de dommages et intérêts ainsi que 50 000€ de frais irrépétibles.

Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] font valoir que Madame [T] a reconnu avoir perçu de l'argent de ses parents soit 150.000 FF en janvier 1986, servant à acheter un bien immobilier

Ils prétendent que conformément à l'article 860-1 du Code civil, si les sommes en cause ont été investies dans l'achat d'un bien, il doit être tenu compte de la valeur de ce bien et du pourcentage de l'apport de la somme donnée.

Ils sollicitent donc la Cour d'infirmer la décision des premiers juges en enjoignant à Madame [B] [T] d'avoir à produire une évaluation de son bien immobilier pour pouvoir déterminer le rapport qu'elle doit faire à la succession.

Ils exposent que le bien immobilier de Madame [Z] [Y] doit être évalué en prenant en compte la valeur réelle de la maison dans l'état de la donation en 1994 et proposent une estimation à 325.000 € réalisée par Monsieur [M].

Ils affirment que Madame [Z] [Y] à effectuer de nombreux travaux sur la maison à hauteur de 43 883 € qui doivent venir en déduction de la valeur de la donation rapportable.

Ils indiquent que l'évaluation de Madame [T] du bien de Madame [Z] [Y] à hauteur de 475 000 € ne peut ainsi pas être retenue.

Les appelants certifient que [R] [Y] n'a aucune donation à rapporter à la masse successorale.

Ils avancent que la valeur de la donation rapportable par Monsieur [W] [Y] ne saurait excéder la somme de 51 072 €.

* * * * *

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 30 septembre 2021, Monsieur [R] [Y] demande à la cour de :
-Débouter [Z] [Y] et [W] [Y] de leur appel en les y disant mal fondés;
-Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf à préciser dans la partie «attributions» de l'état liquidatif que [B] reçoit également la soulte due par [W] [Y] pour un montant de 9.642,07€ et que les sommes dues par [Z] et [W] [Y] portent intérêts de retard à compter de la date de la décision, soit à compter du 24 juillet 2020 ;
-Condamner M. [W] [Y] et Mme [Z] [Y] à payer à M. [R] [Y] une somme de 10.000,00€ chacun à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral que lui cause leur appel et leur argumentation abusifs ;
-Condamner M. [W] [Y] et Mme [Z] [Y] à payer à M. [R] [Y] une somme de 3.240,88€ au titre des dispositions de l'article 700 du CPC, ;
-Condamner les mêmes aux entiers dépens ;

Monsieur [R] [Y] sollicite de la cour de débouter Madame [Z] [Y] de ses fins et conclusions sur la valeur de la donation qu'elle a reçue, et partant sur le montant de l'indemnité de réduction qu'elle doit à la succession, découlant directement de cette valeur. Il souligne que la maison a été évaluée à 460 000 et 475 000 euros par des experts inscrits.

Il soutient qu'il est établi que [W] [Y] a réemployé les fonds reçus de son père pour l'acquisition d'un premier bien et d'un second, dont la valeur avait été estimée par l'expert CMM à 411.000 € le 3 janvier 2017.

Il certifie que [Z] et [W] [Y] ne rapportent pas la preuve que [B] [T] a obtenu plus que 395 € de la part de ses parents. Il précise qu'ils ne démontrent pas la réalité, le montant et le réemploi de la donation qu'ils prétendent.

Il certifie qu'il n'a bénéficié d'aucune donation de somme d'argent, comme l'ont jugé de manière définitive le tribunal et la cour.

Il sollicite la Cour de condamner [Z] et [W] [Y] au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive.

* * * * *

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 27 septembre 2021, Madame [B] [Y] épouse [T] demande à la cour de :
-Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
-Donner acte à Madame [B] [T] de ce qu'elle rapporte à la succession de son père, la somme de 395 euros,
-Condamner Mme [Z] [Y] in solidum avec [W] [Y] à payer à Mme [B] [T], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir les sommes suivantes :
- 48 115.83 euros comme le prévoit le dernier jugement.
- 20 000.00 euros de dommages intérêts,
-Condamner M. [W] [Y] in solidum avec [Z] [Y] à payer à Mme [B] [T] sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compte de la signification de l'arrêt à intervenir les sommes suivantes :
- 9 642.07 euros au titre du partage judiciaire
- 20 000.00 euros de dommages intérêts,
-Condamner chacun des appelants à payer à la concluante la somme de 5000.00 euros pour procédure abusive,
-Condamner chacun des appelants à payer à la concluante la somme de 5000.00 euros au titre du préjudice moral subi par la concluante,
-Condamner [W] et [Z] [Y] in solidum à prendre en charge tous les frais de notaire et d'enregistrement et de publication.
-Condamner [W] [Y] à payer à la concluante la somme de 783.70 euros au titre des frais engagés (factures d'huissier).
-Condamner [Z] [Y] à payer à la concluante la somme de 3062.92 euros au titre des émoluments A 444-32.
-Les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
-Comme le prévoit le dernier jugement [B] [T] doit également se voir attribuer la moitié des comptes bancaires soit la somme de 10 816,04 euros.
-Condamner chacun des appelants à payer à la concluante la somme de 5000.00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et aux entiers frais et dépens.

Madame [B] [T] fait valoir que son acte en demande de partage judiciaire est bien fondée, et sollicite la cour de condamner au titre de ce partage :
-[Z] [Y] à 68 573.93 € et au paiement de dommages et intérêts
-[W] [Y] à 9 642,07 € et au paiement de dommages et intérêts.
L'intimée soutient que [W] et [Z] [Y] ne démontrent pas l'existence d'une donation de la part de leur père à son profit ni même son montant.

Elle soutient qu'elle a acquis avec son époux son bien immobilier en 1986 payé au moyen d'un prêt souscrit à la BFCOI d'un montant de 479.000 Francs et pour 199.727,63 Francs de leurs deniers personnels.
Elle estime que le don reçu par ses parents de « 395 euros » peut être considéré comme don d'usage.

Elle avance que [Z] et [W] [Y] ont toujours refusé de déclarer ce qu'ils avaient reçu et n'ont pas cessé de dissimuler ou de diminuer ce dont ils ont bénéficié.

Elle affirme que les parties n'exposent pas de nouveaux moyens et que l'aveu judiciaire qu'ils soulèvent n'existe pas.

L'intimée relève qu'une nouvelle évaluation du bien immobilier de [Z] [Y] par un expert immobilier près la Cour d'appel a retenu un montant de 460 000 euros et une deuxième expertise à 475 000 euros.

* * * * *

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Sur la recevabilité des demandes :

Vu l'article 480 du code de procédure civile et le principe de l'autorité de la chose jugée ;

Le partage de la succession a déjà été ordonné par l'arrêt confirmatif du 3 février 2012.

Il a aussi tranché certains points litigieux en :
-Infirmant le jugement entrepris en ce qu'il a dit que [Z] [Y] et [W] [Y] avaient bénéficié d'un don d'argent de respectivement 80.416,86 € (527.500 Francs) pour la première et 3.811,22€ (25.000 Francs) pour le second, devant être retenus pour la composition de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible puis en disant non fondées les prétentions des consorts [B] et [R] [Y] tendant à voir dire et juger que leur s?ur, [Z] [Y] et frère [W] [Y], ont respectivement bénéficié de (ces) sommes à titre de dons en numéraire et les en déboute.
-Disant que la donation de bien immobilier consentie le 4 mai 1994 par les époux [K] [Y] à leur fille [Z] [Y], n'est pas rapportable en raison de son caractère préciputaire ;
-Disant que cette libéralité devra être retenue dans la composition de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible pour la moitié de la valeur du bien à l'ouverture de la succession en octobre 2005, selon son état au mois de mai 1994 ;
-En rappelant que l'indemnité de réduction s'il y a lieu sera déterminée selon les modalités de l'article 924-2 du code civil selon l'état du bien à la date de prise d'effet de la donation le 4 mai 1994 mais pour sa valeur à l'époque du partage ;
-En rejetant les demandes de M. [W] [Y] tendant à faire juger que le don de la somme de 30.489,80 € (200.000 francs) dont il a bénéficié ne doit être pris en compte que pour la moitié de son montant correspondant à la part concernée par la succession de son père et que ceux de 914,69 € (6.000 F) du 07/03/2001 et 1.130,00 € du 11/12/2002 constitueraient des présents d'usage ;
-En disant que les dons en espèces consentis par le de cujus à Madame [G] [N] devront être retenus pour leur montant nominal dans la composition de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible ;
-En constatant qu'aucune demande de réduction n'est formée contre cette donataire tiers à la succession, non partie à l'instance.

Le procès-verbal de difficultés, dressé par le notaire désigné le 3 mai 2017 expose les dires des héritiers :
1/ Madame [B] [T] estime que tous ses arguments n`ont pas été suffisamment exposés et rappelés dans le rappel historique établi par le Notaire alors que ceux de Maître [J] [E], avocat, l'ont été point par point. Elle demande dorénavant que le bien donné à [Z] [Y] soit évalué à la somme de 475.000 euros, et ce conformément à l'avis de valeur susvisé et annexé.

Elle souhaite également que soit tenu compte du don reçu par [W] [Y], réévalué et remployé dans le financement du bien acquis par lui les 1er et 2 février 2006 )?( A cet égard, elle a remis au notaire, le 3 avril, une attestation de valeur vénale en date du 10 février 2017, du bien.

Hormis les deux points précédents, elle demande la validation du projet d'état liquidatif établi le 16 juin 2016.

2/ Monsieur [R] [Y] s'est déclaré parfaitement d'accord avec les calculs de l'état liquidatif proposé à l'exception des deux points suivants :
La valeur prise en compte pour la maison de [Z] [Y] soit 440.000 euros au lieu de 475.000 euros, seule valeur estimée par un expert ;
La valeur de remploi des sommes dont il a bénéficié après investissement dans des acquisitions immobilières.

3/ Madame [Z] [Y] a exposé qu'elle n'est pas d'accord avec le projet d'état liquidatif car il n'applique pas les décisions de justice et qu'il ne tient pas compte de la réalité des donations reçues par Madame [B] [T].

4/ Monsieur [W] [Y] s'est associé aux dires de sa s?ur [Z] et a précisé que le calcul de réemploi figurant au projet d'état liquidatif n'est pas conforme au jugement rendu.

Il résulte donc de ce procès-verbal de difficultés que les parties sont en désaccord sur :

1/ la valorisation du bien immobilier donné à Madame [Z] [Y] afin qu'il soit évalué à la somme de 475.000 euros, conformément à un avis de valeur établi par un expert.

2/ La valeur de l'indemnité de remploi du don reçu par Monsieur [W] [Y], remployé dans le financement du bien acquis par lui les 1er et 2 février 2006.

3/ Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] ont seulement fait valoir que le projet d'état liquidatif n'applique pas les décisions de justice et ne tient pas compte de la réalité des donations reçues par Madame [B] [T] sans apporter plus de précision au notaire instrumentaire dans le procès-verbal de difficultés.

Comme a justement procédé le premier juge, il convient de d'examiner ces différentes difficultés.

Sur la valorisation du bien immobilier donné à Madame [Z] [Y] :

Vu l'article 860-1 et l'article 924-2 du code civil ;

L'arrêt de la cour d'appel du 3 février 2012 a décidé que l'indemnité de réduction s`il y a lieu sera déterminée selon les modalités de l'article 924-2 du code civil selon l'état du bien à la date de prise d'effet de la donation le 4 mai 1994 mais pour sa valeur à l'époque du partage.

Le premier juge a estimé que la valeur du bien acquis par Madame [Z] [Y] grâce à cette donation devait être évaluée à la somme de 475.000 euros.

Madame [Z] [Y] conteste le projet d'état liquidatif en ce qu'il retient qu'elle doit rapporter la somme de 475.000 euros au titre d'une donation dont elle a bénéficié en 1994, et ce en vertu d'une attestation de valeur rédigée par Monsieur [F], qui n'aurait pas visité l'immeuble en question. Avant la présente instance, elle avait accepté la valorisation à 440.000 euros.

Se fondant sur un avis de valeur réalisé par Monsieur [M], elle plaide qu'en 2005, le bien doit être estimé à la somme de 258.000 euros et en 2021 à 325.000 euros.

Elle conclut que sur cette estimation de 325.000 euros, la donation rapportable s'élève à la moitié de cette somme moins celle de 43.883 euros au titre des travaux qu'elle a faits réaliser, soit 118.617 euros.

Madame [B] [T], fait valoir que, déjà en première instance en 2009, Madame [Z] [Y] avait produit les factures qui avaient été écartées car certaines ne sont que des devis, d'autres sont au nom d'un M. [V] tandis que deux d'entre elles, parmi les huit factures, ne comportent ni SIRET de l'entreprise ni nom du client. Enfin, la facture No 7 est antérieure à la donation.

L'intimée précise que la cour dispose désormais d'une autre évaluation établie le 22 septembre 2021 par un Expert près la cour d'appel (pièce No 22 de Mme [T]), retenant une estimation de 460.000 euros.

Le jugement querellé s'est limité à une motivation succincte à propos de cette évaluation.

L'attestation de valeur rédigée le 9 février 2015 par Monsieur [F] (pièce No 9 des appelants) propose une valeur vénale de 475.000 euros, hors droits, au second semestre 2005.

Il mentionne que le bien en question est constitué par une villa T5 à étage, d'une surface de 125 m2, élevée sur un terrain de 668 m². Cet expert, saisi par Madame [B] [T], prétend avoir utilisé la méthode par comparaison, dit qu'il s'est appuyé sur les données de l'Observatoire de l'Immobilier pour parvenir à cette estimation. Cependant, il ne propose aucun élément de comparaison pour renforcer son estimation.

En appel, Madame [Z] [Y] et Monsieur [W] [Y] produisent deux avis de valeur plus complets, rédigés par Monsieur [X] [M], expert, déterminant la valeur vénale en 2005 et la valeur vénale du bien en 2021 (pièces No 13 et 13 bis).

Ces deux rapports, régulièrement versés aux débats, ont pu faire l'objet de la libre discussion des parties en cours d'instance. Ils sont donc recevables.

Ils évoquent précisément la réalité des constructions, leur implantation, les règles d'urbanisme applicables et leur environnement, incluant une décote pour vétusté, et déduisant le coût des murs de soutènement qui n'existaient pas en 1994. Il propose une évaluation de 170.000 euros pour le foncier et celle de 88.000 euros pour les constructions, arrêtée pour l'année 2005.

Selon les mêmes méthodes de calcul, Monsieur [M] parvient à une estimation de 217.000 euros pour le foncier en 2021 et de 108.000 euros pour les constructions, soit la somme de 325.000 euros.

Madame [B] [T] produit une estimation intitulée « rapport d'expertise », établie par la SCI [W] PIMPEC CONSULTANT IMMOBILIER, le 24 septembre 2021. Pour parvenir à la valeur vénale de 460.000 euros, celui-ci décrit le bien, indique qu'il a consulté les trois bases PERVAL/IMMOPRIX des notaires, PATRIM et DVF ETALAB de l'administration fiscale, ainsi que celle de deux observatoires des prix de l'immobilier de la Réunion, considérant que la valeur moyenne des biens de ce [Adresse 2], peut être estimé actuellement à 4.500 euros le m², ce prix devant être ajusté en fonction des particularités du bien.

Précisant qu'il s'est référé à la seule méthode non aléatoire de réalité des prix et des transactions locales, il retient la valeur de 460.000 euros. Cependant, cet expert ne fournit aucun élément de comparaison pour établir la valeur moyenne de 4.500 euros du m² pas plus que pour comparer le bien litigieux à d'autres similaires.

Compte tenu de la qualité de ces estimations, la cour choisit de retenir les deux rapports de Monsieur [M], plus complets et plus précis, se référant à une véritable analyse du bien tant en 2005 qu'en 2021.

En conséquence, il conviendra de fixer la valeur du bien à la somme de 325.000 euros au jour du partage, le rapport dû par Madame [Z] [Y] devant s'élever à la somme de 162.500 euros sans qu'il n'y ait lieu à déduction des dépenses non justifiées par les factures alléguées et non produites en appel.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la valeur de l'indemnité de remploi du don reçu par Monsieur [W] [Y], remployé dans le financement du bien acquis par lui les 1er et 2 février 2006 :

Le premier juge a estimé que Monsieur [W] [Y] devait rapporter la somme de 78.611 euros en soulignant que si le partage avait pu être réglé rapidement, il aurait pu être envisagé de retenir la valeur nominale de la somme totale au titre de l'indemnité de réduction éventuellement due au titre des sommes énumérées par le jugement du 17 mars 2010, soit 200.000 Francs plus 35.000 Francs et 7.130 Francs, pour un total de 242.130 Francs ou 36912,48 euros.

La cour d'appel a d'ailleurs réformé le jugement en statuant comme suit le 3 février 2012 :
« * dit non fondées les demandes de M. [W] [Y] tendant à faire juger que le don de la somme de 30.489,80 € (200.000 francs) dont il a bénéficié ne doit être pris en compte que pour la moitié de son montant correspondant à la part concernée par la succession de son père et que ceux de 914,69 € (6.000 F) du 07/03/2001 et 1.130,00 € du 11/12/2002 constitueraient des présents d'usage, l'en déboute. »

Il a donc déjà été statué sur le principe de ces donations et leur montant en 2012.

Madame [T] a été suivie par le premier juge sur le principe de l'indemnité de remploi des sommes données à Monsieur [W] [Y], tenant compte du fait que le partage n'est pas intervenu.

Monsieur [W] [Y] et Madame [Z] [Y] estiment que l'appelant ne peut être tenu de rapporter à la masse à partager une somme supérieure à 51.072 euros, correspondant à la valeur de la donation rapportable (soit 335.010,36 Francs).

Il demande à la cour de prendre connaissance de la pièce No 18 sans articuler de moyens pour soutenir sa prétention. Cette pièce est constituée par un courrier personnel semblant adressé à la juridiction, en réponse aux conclusions de Madame [B] [T]. Mais elles ne sont pas reprises en substance dans les conclusions de son avocat alors que la procédure est écrite et que les éléments qui y sont évoqués ne peut donc tenir lieu de conclusions auxquelles devrait répondre la cour d'appel.

Ainsi, en vertu des articles 6, 9 et 954 du code de procédure civile, la cour ne peut que confirmer le jugement querellé de ce chef, en l'absence de développement de moyens propres à soutenir la demande figurant au dispositif à propos du principe et du montant du rapport dû à la succession par Monsieur [W] [Y].

Sur les donations alléguées et leur montant au profit de Madame [B] [Y], épouse [T] :

Selon les prescriptions des articles 6 et 9 du code de procédure civile, il incombe aux parties de prouver les faits qu'ils allèguent.

Les appelants contestent le jugement querellé en ce qu'il a retenu la somme de 395 euros au titre du rapport de donation dû par Madame [T] à la succession.

Ils affirment que ls de cujus aurait remis à sa fille la somme totale de 23.898,88 euros. Pour parvenir à cette somme, les appelants exposent que, selon leurs pièces No 10 et 11, Madame [B] [T] aurait admis avoir reçu en janvier 1986 un prêt de 150.000 francs dont elle aurait remboursé 50.000 francs. Elle reconnaitrait aussi avoir reçu en 1992 une somme de 50.000 francs.

Ils invoquent enfin un tableau (pièce no 11), élaboré par le Conseil de Madame [B] [T], récapitulant les mouvements financiers réalisés entre celle-ci et son père.

Madame [T] réplique que la production de la pièce No 11 par les appelants démontre que toutes les pièces avaient bien été produites en première instance et déjà en 2010. En 2007, le courrier de Mme [B] [T] déclarait, sans justificatifs, sur un plan familial et non judiciaire, des montants non remboursés par elle. L'intimée souligne que les recherches sur ses comptes bancaires ont révélé que les montants déclarés initialement étaient totalement erronés tandis que le Notaire s'est fondé exclusivement sur les justificatifs apportés régulièrement par les parties pour aboutir à la somme de 395 euros.

La cour, reprenant les motifs du premier juge sur ce point, considère aussi que le jugement rendu le 17 mars 2010 a retenu que Madame [T] avait bénéficié de sommes d'argent et qu'elle devrait préciser de quel montant elle a ainsi bénéficié auprès du notaire commis.

Ce chef de jugement a été confirmé par l'arrêt de la cour d'appel en date du 3 février 2012.

En effet, cet arrêt a statué d'abord sur les chefs de jugement portant sur « les prétentions des consorts [B] et [R] [Y] tendant à voir dire et juger que leur s?ur [Z] [Y] et frère [W] [Y] ont respectivement bénéficié de ces sommes à titre de dons en numéraire. » Il a confirmé le jugement pour le surplus.

Or, le premier juge avait décidé dans son dispositif que « le notaire devra déterminer s'il y a lieu de procéder à la réduction des libéralités consenties à [Z] [Y], [W] [Y] et [B] [T] née [Y], conformément aux dispositions des articles 860, 920 et suivants du code civil et en tenant compte des libéralités suivantes :
(?)
* don d'argent dont a bénéficié [B] [T] qui devra justifier du montant exact auprès du notaire. »

Ainsi, en confirmant ce chef de jugement, la cour d'appel avait maintenu que le notaire serait chargé, le cas échéant, de procéder à la réduction d'éventuelles libéralités consenties aussi à Madame [T].

Ceci étant exposé,

Il résulte clairement du courrier rédigé par Madame [B] [T] le 20 juillet 2007 qu'elle a admis avoir bénéficier de la somme de 75.000 euros au titre du reliquat de prêts ou de dons manuels à rapporter le cas échéant à la succession de son père (pièce No 10 des appelants). Elle a produit aussi un document non daté (pièce No 11 des appelants) récapitulant les différents mouvements de fonds entre elle et son père entre 1982 et 1992, dont le résultat révèle un solde débiteur de 5.181 francs, outre les extraits de ses relevés de compte.

Maître [L], en page 12 du procès-verbal de difficultés, relate bien que Madame [T] lui a adressé, via son Conseil, le dossier complet portant sur ces prêts ou donations. Il annexe aussi les différents courriers de Madame [B] [T] qui a toujours rappelé que le jugement du 17 mars 2010 et l'arrêt de la cour d'appel du 3 février 2012 ont retenu seulement le principe de dons manuels et non celui de donation pour l'acquisition de biens immobiliers.

Néanmoins, face à ces éléments, la cour observe que l'inventaire non daté des sommes ayant été échangées entre Madame [B] [T] et son père, évoque bien le chèque de 50.000 francs du 9 avril 1992, qu'elle a aussi admis dans son courrier du 20 juillet 2007. Mais aucune trace du versement du prêt de 150.000 Francs dont elle a bénéficié en janvier 1986 ne figure dans son récapitulatif, de sorte qu'il y a lieu de retenir qu'elle restait devoir à son père la somme de 100.000 francs qu'elle précisait ne jamais avoir remboursé à son père.

En conséquence, il doit être rapporté à la succession non la somme de 5.181,00 Francs, ou 395 euros, mais celle de 105.181 Francs ou 16.034,74 euros.

Le jugement doit être réformé de ce chef.

Sur le remploi allégué dans l'achat de la maison de Monsieur et Madame [T] le 21 janvier 1986 :

Les appelants invoquent les dispositions de l'article 860-1 du code civil, pour réclamer le rapport des libéralités à la valeur du bien dans les conditions prévues à l'article 860, résultant de la Loi No 2006-728 du 23 juin 2006, postérieure au décès de Feu [I] [K] [Y], le [Date décès 5] 2005, date de l'ouverture de la succession, mais applicable à la cause puisque le partage n'a pas été réalisé à la date d'entrée en vigueur de cette loi le 1er janvier 2007.

En l'espèce, l'acte dressé le 21 janvier 1986, portant acquisition par Madame [B] [T] et son époux, d'un bien sis à [Adresse 9], moyennant le prix de 329.999 Francs payé au moyen d`un prêt souscrit à la BFCOI d'un montant de 429.999 Francs, et pour 199.222,63 Francs, de leurs deniers personnels ne contient aucune clause de remploi et n'évoque aucunement que cette dernière somme serait propre à Madame [T]. Cet apport personnel est donc réputé être issu d`acquêts appartenant au couple [T]/ [Y].

Les appelants affirment que la coïncidence entre le versement d'une somme de près de 200.000 francs et la remise reconnue par Madame [T] dans son inventaire d'une somme de 32.000 Francs par chèque le 21 janvier 1986 suffit à établir que Madame [T] a pu acheter le bien immobilier du couple grâce aux fonds donnés par leur père à la même époque.

Cependant, Madame [T] n'a jamais contesté avoir emprunté la somme de 150.000 Francs en janvier 1986. Elle a pourtant expliqué et justifié comment elle l'avait partiellement remboursé alors que la somme de 32.000 Francs est décomptée dans l'inventaire non daté susvisé.

En conséquence, il convient de rejeter la prétention des appelants et de Monsieur [R] [Y] sur le fondement de l'article 860 du code civil puisqu'il ne résulte nullement des pièces versées aux débats que le de cujus a effectué une donation à sa fille en vue d'acquérir le bien immobilier en cause tandis que l'acte authentique de vente ne contient aucune mention du caractère propre des sommes apportées par le couple [Y] / [T].

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande relative à une indemnité de remploi due par Madame [B] [T].

Sur les autres demandes :

Sur la rédaction de l'état liquidatif :

L'article 1373 du code de procédure civile, prévoit qu'en cas de désaccord des copartageants sur le projet d'état liquidatif dressé par le notaire, ce dernier transmet au juge commis un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties ainsi que le projet d'état liquidatif.

Le greffe invite les parties non représentées à constituer avocat.

Le juge commis peut entendre les parties ou leurs représentants et le notaire et tenter une conciliation.
Il fait rapport au tribunal des points de désaccord subsistants.

Il est, le cas échéant, juge de la mise en état.

Aux termes de l'article 1375 du même code, le tribunal statue sur les points de désaccord.

Il homologue l'état liquidatif ou renvoie les parties devant le notaire pour établir l'acte constatant le partage.

En l'espèce, le premier juge a estimé opportun, mais à tort, de procéder lui-même à la réalisation de l'état liquidatif de la succession alors qu'il n'y était pas tenu et qu'un notaire est déjà saisi.

Or, le notaire avait déjà préparé un projet de liquidation en saisissant la juridiction seulement des difficultés résultant du procès-verbal de difficultés.

En conséquence, la cour infirmera le jugement en ce qu'il a élaboré l'entier projet de liquidation de la succession et renverra cette mission au notaire saisi.

Sur les demandes de dommages et intérêts :

Vu l'article 1240 du code civil ;

Madame [Z] [Y] et Monsieur [R] [Y] réclament la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en alléguant « l'outrance des propos des intimés et leur mauvaise foi. »

Madame [B] [T] sollicite la condamnation de chacun des appelants à lui payer la somme de 5 000.00 euros au titre du préjudice moral subi en s'estimant harcelée et en soutenant qu'elle souffre d'avoir sans cesse à se défendre sur des points qui ont déjà été jugés à trois reprises en raison d'un acharnement malsain et injuste, qui amplifie ses souffrances et son préjudice moral depuis plus de treize ans.

Monsieur [R] [Y] demande l'allocation de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts à l'encontre de chacun des appelants, en réparation du préjudice moral que lui cause leur appel et leur argumentation abusifs.

Cependant, s'agissant d'un conflit ancien relatif à la liquidation de la succession de leur parent, alors que les documents versés aux débats établissent clairement que chacune des parties a décidé de camper sur ses positions à raison de celles des autres héritiers, retardant même le partage en omettant de verser au notaire commis dans un délai raisonnable la provision qu'il réclamait afin de commencer ses opérations.

En outre, les échanges versés aux débats, annexés au procès-verbal de difficulté, révèlent que l'ensemble des parties ont contribué aux préjudices qu'ils allèguent alors que peu d'efforts pour résoudre leurs désaccords ont été réalisés depuis plus de douze années.

Qu'il ne peut être reproché aux appelants d'avoir interjeté appel alors que la cour admet au moins partiellement le bienfondé de leur action en contestation du projet d'état liquidatif tandis que Madame [B] [T] disposait aussi de l'estimation acceptée par le notaire commis pour soutenir ses prétentions.

En conséquence, il convient de rejeter toutes les demandes de dommages et intérêts, infirmant le jugement querellé en ce qu'il a alloué une indemnité à ce titre à Madame [B] [T].

Sur les autres demandes :

Le jugement querellé doit être confirmé en ce qu'il a jugé que les frais de notaire seraient partagés à parts égales entre les copartageants.

Il est équitable de laisser les parties supporter leurs frais irrépétibles en rejetant les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile tandis que les dépens seront liquidés en frais de succession.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement en ce qu'il a retenu la somme de 395,00 euros au titre du rapport des libéralités reçues par Madame [B] [Y], épouse [T], et 475.000 euros au titre de la valeur vénale du bien immobilier de Madame [Z] [Y], en ce qu'il a rédigé un état liquidatif de la succession et en ce qu'il a alloué des dommages et intérêts à Madame [B] [T] ;

LE CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

ORDONNE que soit rapportée à la succession la somme de 16.034,74 euros au titre des libéralités reçues par Madame [B] [Y] épouse [T] ;

FIXE à la somme de 325.000 euros la valeur vénale du bien immobilier de Madame [Z] [Y] devant faire l'objet d'un rapport succession à hauteur de la moitié ;

DIT n'y avoir lieu pour la juridiction saisie à proposer un état liquidatif ;

RENVOIE les parties devant le notaire commis afin qu'il procède à la rédaction de l'état liquidatif de la succession en tenant compte des points de désaccords tranchés ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes de dommages et intérêts en cause d'appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les dépens seront liquidés en frais de partage de la succession.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Alexandra BOCQUILLON, faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈREsignéLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/015881
Date de la décision : 22/07/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-07-22;20.015881 ?
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