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01/07/2022 | FRANCE | N°21/006111

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 01 juillet 2022, 21/006111


ARRÊT No
PC

R.G : No RG 21/00611 - No Portalis DBWB-V-B7F-FRBM

[C]

C/

Caisse LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L A REUNION "CRCAMR"

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 26 JANVIER 2021 suivant déclaration d'appel en date du 07 AVRIL 2021 RG no 19/04308

APPELANT :

Monsieur [F] [C]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Me Stéphanie IÈVE, avocat

au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

Caisse LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L A REUNION "CRCAM...

ARRÊT No
PC

R.G : No RG 21/00611 - No Portalis DBWB-V-B7F-FRBM

[C]

C/

Caisse LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L A REUNION "CRCAMR"

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 26 JANVIER 2021 suivant déclaration d'appel en date du 07 AVRIL 2021 RG no 19/04308

APPELANT :

Monsieur [F] [C]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Me Stéphanie IÈVE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

Caisse LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L A REUNION "CRCAMR"
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentant : Me Amina GARNAULT de la SELAS AMINA GARNAULT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 9 Décembre 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Avril 2022 devant Madame Pauline FLAUSS, Conseillère, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 01 Juillet 2022.

* * *

LA COUR :

Le 26 février 2013, Monsieur [F] [C] a conclu avec la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion (CRCAMR), un prêt immobilier no 90027776855, d'un montant de 122.030,00 euros, d'une durée initiale de 252 mois, au taux annuel de 3,6 %.
Exposant que cette offre était entachée d'irrégularités, Monsieur [C] a fait assigner le 13 novembre 2019, la CRCAMR devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins de prononcer la nullité de la stipulation des intérêts contenu dans l'acte de prêt, condamner la CRCAMR au remboursement de l'excédent d'intérêts indus, condamner la CRCAMR à produire un nouvel échéancier pour le contrat de prêt, sous astreinte, ou, subsidiairement, prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, condamner la CRCAMR au remboursement de l'excédent d'intérêts indus, condamner la CRCAMR au paiement de la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 26 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a statué en ces termes :
DIT n'y avoir lieu à écarter des débats le rapport de la société LAURANAEL ;
DÉCLARE recevable l'action en nullité de la stipulation d`intérêts conventionnels ;
DÉCLARE irrecevables comme prescrites l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels et l'action en indemnisation pour manquement par la banque à ses obligations d'information, de loyauté et d'honnêteté ;
DÉBOUTE Monsieur [F] [C] de sa demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ;
CONDAMNE Monsieur [F] [C] à payer à la CAISSE RÉGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;
CONDAMNE Monsieur [F] [C] aux entiers dépens.

Monsieur [F] [C] a interjeté appel du jugement par déclaration déposée par RPVA au greffe de la cour le 7 avril 2021.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état par ordonnance du 8 avril 2021.

L'appelant a déposé ses premières conclusions d'appel par RPVA le 23 juin 2021.

Les conclusions d'intimée No 1 ont été déposées par RPVA le 24 août 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 décembre 2021.

***

Aux termes de ses conclusions d'appel No 2, déposées le 5 août 2021, Monsieur [F] [C] demande à la cour de :
Vu les articles L. 312-1 et suivants (anciens) du Code de la Consommation et plus particulièrement les articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-8, L. 312-10 (anciens),
Vu les articles L. 313-1, L .313-3 et L. 313-4 (anciens) du Code de la Consommation,
Vu l'article L. 312-33 (ancien) du Code de la Consommation,
Vu l'article R. 313-1 (ancien) du Code de la Consommation,
Vu les articles 1304, 1907 et 2224 du Code Civil,
Vu l'ensemble des pièces versées aux débats,
Vu la jurisprudence citée,
DIRE ET JUGER que l'offre de prêt émise par la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION, acceptée par Monsieur [C], ne respecte pas les dispositions légales et réglementaires ci-dessus visées ;
CONFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire du 26 janvier 2021 en ce qu'il a déclaré recevable l'action en nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts;
INFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire du 26 janvier 2021 pour le surplus ;
En conséquence :
A titre principal,
PRONONCER la nullité de la stipulation d'intérêts contenue dans l'acte de prêt liant les parties en raison de l'utilisation par la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION de l'année de 360 jours pour calculer les intérêts du prêt ;
PRONONCER la nullité de la stipulation d'intérêts contenue dans l'acte de prêt liant les parties en raison des erreurs de la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION dans la détermination du taux de période, de l'absence d'affichage de la durée de la période, du Taux Effectif Global ;
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION au remboursement de l'excédent d'intérêts indus, à savoir la somme de 29.000,00 €, à parfaire au jour de la décision à intervenir, avec intérêt légal à compter du 28 février 2015, date de la mise en demeure ;
CONDAMNER la société CREDIT AGRICOLE à rembourser à Monsieur [C] le montant des intérêts prélevés indument, à savoir la somme de :
- Soit 19.130,00 € si le Tribunal applique le taux d'intérêt légal année par année, à parfaire au jour de la décision à intervenir,
- Soit 23.130 € si le Tribunal applique le taux d'intérêt légal de l'année du prêt, à parfaire au jour de la décision à intervenir,
FIXER le taux applicable au contrat de prêt à hauteur du taux d'intérêt légal pour la période restant à courir à compter de la décision à intervenir ;
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION à produire un nouvel échéancier pour le contrat de prêt en cause, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;
A titre subsidiaire,
PRONONCER la déchéance du droit aux intérêts conventionnels en application de l'article L. 312-33 dernier alinéa (ancien) du Code de la consommation ;
CONDAMNER la société CREDIT AGRICOLE à rembourser à Monsieur [C] le montant des intérêts prélevés indument, à savoir la somme de :
- Soit 19.130,00 € si le Tribunal applique le taux d'intérêt légal année par année, à parfaire au jour de la décision à intervenir,
- Soit 23.130 € si le Tribunal applique le taux d'intérêt légal de l'année du prêt, à parfaire au jour de la décision à intervenir ;
FIXER le taux applicable au contrat de prêt à hauteur du taux d'intérêt légal pour la période restant à courir à compter de la décision à intervenir ;
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION à produire un nouvel échéancier pour le contrat de prêt en cause, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;
En tout état de cause :
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION à payer à Monsieur [C] la somme de 15.000 € à titre de dommages-et intérêts pour manquement à ses obligations d'information, de loyauté et d'honnêteté ;
DEBOUTER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION à payer à Monsieur [C] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile de première instance, et de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile d'appel ;
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION aux entiers dépens de l'instance.

Monsieur [F] [C] rappelle que les dispositions du code de la consommation, relatives à la régularité de l'offre de prêt sont d'ordre public.
Il demande à la cour de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a estimé que Monsieur [C] ne disposait pas des compétences requises pour déterminer seul la durée de l'année utilisée par la banque pour calculer les intérêts du prêt. Mais il fait grief au jugement d'avoir déclaré irrecevable l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels en retenant à tort la date de l'acceptation de l'offre de prêt comme point de départ du délai de prescription.
Sur le fond, il reproche à la banque d'avoir eu recours à l'année lombarde de 360 jours pour calculer les intérêts du prêt.
L'appelant fait ensuite valoir le caractère erroné de la stipulation d'intérêt figurant au contrat de prêt, ce qui devrait entraîne la nullité de la stipulation d'intérêts.
Monsieur [C] soutient aussi que la société CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION a omis d'afficher le taux de période du prêt dans son offre. Si la nullité de la stipulation d'intérêts contenue dans l'acte de prêt ne devait pas être prononcée, il conviendrait subsidiairement de prononcer la déchéance du droit aux intérêts.
De la même manière, l'appelant affirme que le caractère erroné de la stipulation d'intérêt figurant au contrat de prêt doit entraîner la nullité de la stipulation d'intérêts ou, subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts.

Monsieur [C] reproche à la CRCAMR des manquements à son obligation générale d'information, de loyauté et d'honnêteté envers son client. Cette attitude fautive aurait généré directement un préjudice à l'emprunteur dont l'action n'est pas prescrite.

***
Par conclusions No 1, la CRCAMR demande à la cour de :
DEBOUTER Monsieur [F] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
CONFIRMER le jugement rendu le 26 janvier 2021 par le Tribunal judiciaire de Saint-Denis en toutes ses dispositions ;
CONDAMNER Monsieur [F] [C] à payer à la CRCAMR 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER Monsieur [F] [C] aux entiers dépens.

Selon l'intimée, les demandes de Monsieur [C] sont irrecevables car prescrites. Pourtant, la convention de prêt a été conclue le 26 février 2013. Monsieur [C], dans son assignation, a prétendu que c'est à la faveur d'un article édité par le magazine UFC QUE CHOISIR au mois de septembre 2012 qu'il aurait découvert la prétendue irrégularité affectant le TEG stipulé au contrat et d'en soumettre l'étude à la société LAURANAEL.
La banque conteste le mode de calcul de la prescription telle qu'il est opéré par Monsieur [C], dépendant exclusivement de sa volonté, en décidant unilatéralement de faire partir le délai de prescription au jour où le rapport de la société LAURANAEL a été établi, tout en admettant avoir été éclairé d'une éventuelle erreur affectant le TEG par la lecture d'un article de presse de septembre 2012.
En outre, le CRCAMR affirme que les résultats obtenus par la société LAURANAEL - ambigus et incertains, l'ont été d'après les données figurant sur l'offre de prêt litigieuse.
La CRCAMR conclut aussi à la prescription de l'action en responsabilité dirigée contre elle au titre de prétendus manquements à son obligation d'information et de loyauté.
Subsidiairement au fond, le CRCAMR plaide que les demandes de Monsieur [C] sont mal fondées. Le TEG n'est pas affecté d'erreur. L'omission du taux de période n'est pas établie dès lors que la périodicité mensuelle est indiquée et que le taux est proportionnel. Il n'y aucun recours fautif de la banque à l'année lombarde pour calculer les intérêts du prêt qui ont bien été calculés sur la méthode de l'année civile. Enfin, selon le prêteur, Monsieur [C] ne justifie d'aucun préjudice.
***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes de constatations ou de dire et juger ne saisissent pas la Cour de prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, de sorte qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur ces points.

En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Sur la recevabilité de l'action de Monsieur [C] :

Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

S'agissant des crédits consentis à des fins non professionnelles, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci a l'emprunteur

Le premier juge a considéré que les irrégularités alléguées concernant l'absence de taux de période, de durée de période étaient parfaitement décelables lors de la conclusion du prêt tandis que le recours fautif à l'année lombarde nécessitait un calcul qu'un profane ne pouvait concevoir à la lecture de l'offre de prêt.

Monsieur [C] soutient que le point de départ du délai de la prescription de son action doit être fixé au jour où il a eu connaissance des vices affectant l'offre de prêt du 26 février 2013, grâce à l'analyse de son contrat de prêt qu'il avait confiée au cabinet LAURANAEL (pièce No 3 de l'appelant). Il précise aussi avoir décidé de procéder à cette analyse après la lecture de l'article de l'association UFC QUE CHOISIR (portant sur les erreurs affectant le calcul du Taux Effectif Global) de septembre 2013 et d'un article du journal LE MONDE (Contestation d'un TEG quelle prescription ?)

Le rapport du cabinet LAURANAEL est daté du 15 avril 2019 mais la date de sa saisine ne figure pas parmi les pièces du document versé aux débats. Monsieur [C] a fait assigner le CRCAMR le 13 novembre 2019.

Il est donc nécessaire de rechercher si Monsieur [C] pouvait connaître les faits relatifs aux vices allégués de l'offre de prêt avant le 26 février 2018, date d'expiration initiale du délai de prescription.

La charge de cette preuve incombe à la société CRCAMR. L'intimée invoque les assertions de Monsieur [C] pour conclure que celui-ci avait les moyens de connaître les vices affectant le contrat de prêt depuis qu'il avait été alerté par les articles de presse en septembre 2012.

Ainsi, même profane mais alertée par l'article du journal QUE CHOISIR en septembre 2017, Monsieur [C] aurait dû agir avant le mois d'octobre 2017, ce qui n'est pas le cas.

Ainsi, s'agissant de l'absence de mention du taux de période et de la durée de période dans l'offre de prêt, Monsieur [C] disposait de la faculté d'agir avant le mois de septembre 2017.

Le jugement querellé doit être confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action intentée par Monsieur [C] au titre de l'absence du taux de période et de la durée de période dans l'offre de prêt.

Sur l'erreur de calcul du TEG :

Pour établir le caractère erroné du TEG qui justifierait la nullité des intérêts conventionnels stipulés à tous les prêts contestés, Monsieur [C] affirme que le calcul de l'intérêt conventionnel a été réalisé sur la base illicite d'une année dite lombarde.

Selon les prescriptions de l'article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur à la date de conclusion du contrat de prêt, dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels.
Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.
Pour les contrats de crédit entrant dans le champ d'application du chapitre Ier du présent titre, le taux effectif global, qui est dénommé "Taux annuel effectif global", ne comprend pas les frais d'acte notarié.
En outre, pour les prêts qui font l'objet d'un amortissement échelonné, le taux effectif global doit être calculé en tenant compte des modalités de l'amortissement de la créance.
Un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions d'application du présent article.

Selon l'article L. 312-33 du même code, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2002 au 19 mars 2014, le prêteur ou le bailleur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues aux articles L. 312-7 et L. 312-8, à l'article L. 312-14, deuxième alinéa, ou à l'article L. 312-26 sera puni d'une amende de 3 750 euros.
Le prêteur qui fait souscrire par l'emprunteur ou les cautions déclarées, ou reçoit de leur part l'acceptation de l'offre sans que celle-ci comporte de date ou dans le cas où elle comporte une date fausse de nature à faire croire qu'elle a été donnée après expiration du délai de dix jours prescrit à l'article L. 312-10, sera puni d'une amende de 30 000 euros.
La même peine sera applicable au bailleur qui fait souscrire par le preneur ou qui reçoit de sa part l'acceptation de l'offre sans que celle-ci comporte de date ou dans le cas où elle comporte une date fausse de nature à faire croire qu'elle a été donnée après l'expiration du délai de dix jours prescrit à l'article L. 312-27.
Dans les cas prévus aux alinéas précédents, le prêteur ou le bailleur pourra en outre être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Selon les prescriptions de l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa version applicable entre le 1er mai 2011 et le 1er juillet 2016 :,
I. Le calcul du taux effectif global repose sur l'hypothèse que le contrat de crédit restera valable pendant la durée convenue et que le prêteur et l'emprunteur rempliront leurs obligations selon les conditions et dans les délais précisés dans le contrat de crédit. Pour les contrats de crédit comportant des clauses qui permettent des adaptations du taux d'intérêt et, le cas échéant, des frais entrant dans le taux effectif global mais ne pouvant pas faire l'objet d'une quantification au moment du calcul, le taux effectif global est calculé en partant de l'hypothèse que le taux d'intérêt et les autres frais resteront fixes par rapport au niveau initial et s'appliqueront jusqu'au terme du contrat de crédit.
II. Pour les opérations de crédit destinées à financer les besoins d'une activité professionnelle ou destinées à des personnes morales de droit public ainsi que pour celles mentionnées à l'article L. 312-2, le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.
Le taux de période est calculé actuariellement, à partir d'une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l'emprunteur. Il assure, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part, les sommes prêtées et, d'autre part, tous les versements dus par l'emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers, ces éléments étant, le cas échéant, estimés.
Lorsque la périodicité des versements est irrégulière, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements. Le plus petit intervalle de calcul ne peut cependant être inférieur à un mois.
Lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu'annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l'année civile et celle de la période unitaire. Le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d'au moins une décimale.

Si le crédit prend la forme d'une ouverture de droits de tirage destinée à financer les besoins d'une activité professionnelle, le taux effectif global est calculé sur la totalité des droits mis à la disposition du client.
III. pour toutes les opérations de crédit autres que celles mentionnées au II, le taux effectif global est dénommé " taux annuel effectif global " et calculé à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires, selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent article. La durée de la période doit être expressément communiquée à l'emprunteur.
Le taux annuel effectif global est calculé actuariellement et assure, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part, les sommes prêtées et, d'autre part, tous les versements dus par l'emprunteur au titre de ce prêt pour le remboursement du capital et le paiement du coût total du crédit au sens du 5o de l'article L. 311-1, ces éléments étant, le cas échéant, estimés.
Les frais d'acte notarié établis en application du décret no 78-262 du 8 mars 1978 portant fixation du tarif des notaires ne sont pas pris en compte pour le calcul de ce taux.

L'annexe à l'article R. 313-1 prévoit que le résultat du calcul du taux effectif global est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale.

En outre, la déchéance du droit aux intérêts est la seule sanction encourue en cas d'inexactitude du taux effectif global résultant d'un calcul des intérêts conventionnels sur une autre base que celle de l'année civile.

Enfin, si la règle de l'arrondi est inapplicable au calcul du taux de période, l'inexactitude de ce taux, contrairement à celle du taux effectif global, n'est pas de nature à entraîner la déchéance du droit aux intérêts (1ère Civ., 6 janvier 2021, pourvoi no 18-25.865).

En l'espèce, le rapport non contradictoire versé aux débats, soumis à la discussion contradictoire avec le CRCAMR (pièce No 3 de l'appelant), retient les éléments suivants dans ses conclusions :
1/ Contrat en date du 7 février 2013, pour un montant de 122.030 euros, au taux de 3,60 % (TEG : 4,577 %) par an.

L'expert a retenu un taux d'intérêt conventionnel réel de 3,64999968 % au lieu de 3,60 % l'an, soit une différence de 0,04999968 % (page 20 du rapport).

Il aboutit à un TEG " réel " de 4,64561899121 % (page 19 du rapport), soit une différence de 0,0686189912 % par rapport au TEG affiché dans l'offre de prêt de 4,577 %.

En tout état de cause, ces calculs n'établissent nullement que l'erreur affectant le calcul du TEG excède la décimale tolérée par les textes susvisés.

Monsieur [C] a justement été débouté de sa demande de nullité de la stipulation d'intérêt ou de déchéance de ce droit, étant enfin rappelé que seule la déchéance du droit aux intérêts sanctionne une erreur de calcul du TEG, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Sur le recours allégué à l'année lombarde de 360 jours pour calculer les intérêts :

En application combinée des articles 1907 du Code civil, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, le taux de l'intérêt conventionnel mentionné dans l'acte de prêt consenti à consommateur ou un non professionnel doit, comme le TEG, être calculé sur la base d'une année civile de 365 jours.
Le mode de calcul de l'intérêt conventionnel ayant été aligné sur le mode de calcul du TEG, il en résulte que le mois normalisé d'une durée de 30,416 66 jours prévu à l'annexe de l'article R 313-1 du code de la consommation a vocation à s'appliquer au calcul de l'intérêt conventionnel lorsque celui-ci est calculé sur la base d'une année civile et que le prêt est remboursable mensuellement.

Un calcul d'intérêts sur la base d'une année de 360 jours n'est susceptible d'être sanctionné que si l'emprunteur démontre que les intérêts conventionnels calculés sur cette base ont généré un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation, étant précisé que le taux concerné par l'erreur supérieure à la décimale, est le taux effectif global.

Selon l'appelant, le Cabinet LAURANAEL a révélé l'utilisation de l'année lombarde en analysant le tableau d'amortissement édité par la banque et l'état de frais du notaire ayant dressé l'acte de cession du bien immobilier.

Le CRCAMR soutient que la simple lecture du tableau d'amortissement établit qu'elle a eu recours à l'année civile pour calculer les intérêts contractuels. Elle soutient que la durée de la période est le mois normalisé de 30,41666 jours (=3 65/12) et que, par voie de conséquence, les intérêts du prêt sont calculés sur la base d'une année civile de 365 jours.

Ceci étant exposé,

Grâce au tableau d'amortissement " théorique " accompagnant l'offre de prêt, versé aux débats par Monsieur [C], et analysé par le Cabinet LAURANAÊL, il suffit de comparer quelques lignes de ce tableau pour vérifier la réalité du calcul.

La banque prend pour exemple la 3ème échéance, de 690,83 euros hors assurance, laisse apparaître un capital restant dû (CRD) de 121.052,86 euros. La 4ème échéance réduit le capital restant dû à la somme de 120.725,19 euros. Ainsi, cette échéance de 690,83 euros a réduit le CRD de 327,67 euros, laissant pour intérêts la somme de 363,16 euros, correspondant au taux conventionnel de 3,60 %.
Le CRCAMR revendique la formule suivante : (Capital restant dû x taux intérêt conventionnel) / 365 x 30,41666. Mais elle propose le résultat suivant dans ses écritures :
(121.052,86 x 3,6%) / 365 x 30,41666 = 363,16 euros.

La 34ème échéance laisse un CRD de 110.424,41 euros. La 35ème échéance présente un CRD de 110.064,85 euros. Compte tenu du montant identique de la mensualité, de 690,83 euros, le CRD a été réduit de 359,56 euros, retenant donc la somme de 331,27 euros au titre des intérêts de la période. Selon la même méthode, le calcul produit le résultat suivant :
(110.424,41 X 3,6 %) / 365 x 30,41666 = 331,27 euros.

La 132ème échéance laisse un CRD de 69.531,53 euros. Compte tenu du montant identique de la mensualité, de 690,83 euros, le CRD du mois précédent d'un montant de 70.012,32 a été réduit de 480,79 euros, retenant donc la somme de 210,04 euros au titre des intérêts.
Selon la même méthode, le calcul produit le résultat suivant :
(70.012,32 X 3,6 %) / 365 x 30,41666 = 210,036 euros.

Dans ces trois cas exemplaires, la formule (Capital restant dû x taux intérêt conventionnel) / 365 x 30,41666 donne bien le montant des intérêts retenus pour chaque échéance, au centième près.

Ainsi, la démonstration développée par l'appelant, sur le fondement de l'analyse du cabinet LAURANAEL, n'est pas pertinente à partir d'une échéance unique et de surcroît incomplète dès lors qu'un prêt immobilier est calculé non pas sur une base journalière mais sur une base annuelle et qu'il existe une équivalence financière des modes de calcul pour les échéances pleines , que l'on calcule les intérêts avec un mois de 30 jours rapporté à une année de 360 jours ou un mois normalisé de 30,416 66 jours rapporté à une année de 365 jours soit dans tous les cas, une échéance telle que stipulée au tableau d'amortissement qui a été remis à l'emprunteur lors de la souscription du prêt.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [C] de ses prétentions relatives au calcul des intérêts contractuels selon l'année lombarde.

Sur la responsabilité de la société CRCAMR et les manquements à ses obligations :

Les manquements reprochés au prêteur par Monsieur [C] sont en réalité constitués par les griefs reprochés à la forme de l'offre de prêts et au mode de calcul des intérêts conventionnels ou du TEG. Ces manquements, s'ils existaient, seraient sanctionnés par la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts conventionnels.

Or, Monsieur [C] se borne à soutenir que " En procédant ainsi qu'il est décrit ci-dessus, il est manifeste que la banque a manqué à l'ensemble de ces obligations. Il a été démontré ci-dessus que l'attitude de la banque est fautive et a généré directement un préjudice aux emprunteurs. "

Ainsi, son action est mal fondée dès lors qu'il n'a pas été retenu d'erreurs du TEG, d'utilisation de l'année lombarde pour le calcul des intérêts conventionnels et que l'action au titre de l'omission du taux de période et de sa durée est prescrite.

Le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

Monsieur [C] supportera les dépens et les frais irrépétibles de la société CRCAMR.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE Monsieur [F] [C] à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [F] [C] aux dépens

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 21/006111
Date de la décision : 01/07/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-07-01;21.006111 ?
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