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01/07/2022 | FRANCE | N°21/005701

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 01 juillet 2022, 21/005701


ARRÊT No
PC

R.G : No RG 21/00570 - No Portalis DBWB-V-B7F-FQ64

[I]

C/

S.A.R.L. C2J RENOV
S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT (SOREFI)

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-PIERRE en date du 05 FEVRIER 2021 suivant déclaration d'appel en date du 31 MARS 2021 RG no 19/01879

APPELANT :

Monsieur [G] [U] [I]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Bernard VON PINE, avocat au barreau de

SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉES :

S.A.R.L. C2J RENOV
[Adresse 2]
[Localité 5]

S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT (S...

ARRÊT No
PC

R.G : No RG 21/00570 - No Portalis DBWB-V-B7F-FQ64

[I]

C/

S.A.R.L. C2J RENOV
S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT (SOREFI)

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-PIERRE en date du 05 FEVRIER 2021 suivant déclaration d'appel en date du 31 MARS 2021 RG no 19/01879

APPELANT :

Monsieur [G] [U] [I]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Bernard VON PINE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉES :

S.A.R.L. C2J RENOV
[Adresse 2]
[Localité 5]

S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT (SOREFI)
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Stéphane BIGOT, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 27 janvier 2022

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Avril 2022 devant Madame Pauline FLAUSS, Conseillère qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 01 Juillet 2022.

* * *

LA COUR :

Le 5 décembre 2017, Monsieur [I] [G] a souscrit auprès de la SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT (SOREFI) un crédit (no 11201710700) de 25.000 euros pour financer l'acquisition d'un véhicule d'occasion LEXUS, immatriculé [Immatriculation 9], auprès de la société MULTI-MARQUES AUTOS. Le 12 avril 2018, la SOREFI a requis de la Préfecture l'inscription d'un gage sur le véhicule financé après avoir enregistré aux Impôts ledit contrat. L'inscription de gage a été réalisée le 31 juillet 2018.

Le 19 juillet 2018, Monsieur [I] a cédé son véhicule à la société ‘C2J RENOV', en contrepartie de deux autres véhicules. La veille de la vente, il avait présenté une demande de situation administrative dudit véhicule, qui ne faisait apparaitre aucune particularité, et mentionnait "absence de gage et d'opposition."

Par courrier recommandé en date du 29 novembre 2018, le conseil de la société ‘C2J RENOV' a mis en demeure Monsieur [I] de procéder aux démarches nécessaires à la levée du gage inscrit sur le véhicule par la SOREFI.

Puis, suivant assignation du 6 juin 2019, la société ‘C2J RENOV', a demandé au tribunal judiciaire de SAINT PIERRE d'ordonner la levée du gage grevant ce véhicule au motif que ce gage serait inopposable aux tiers dès lors qu'il n'aurait pas été inscrit auprès de l'administration avant la cession. Subsidiairement, la société C2J RENOV sollicitait l'annulation de la vente et la condamnation de Monsieur [I] à lui rembourser la somme de 22 400 euros ou à ordonner la restitution des véhicules cédés, avec paiement d'une indemnité forfaitaire de 5000 euros par véhicule cédé pour compenser leur usure, ainsi que la condamnation solidaire de Monsieur [I] et de la SOREFI à lui payer la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résistance abusive de son débiteur, et la somme de 3.000 euros pour ses frais irrépétibles.

Par jugement contradictoire en date du 5 février 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion a statué en ces termes :
Déclare la SARL C2J RENOV' recevable en ses demandes ;
Déboute la SARL C2J RENOV' de sa demande de mainlevée du gage ;
Prononce la nullité de la cession intervenue le 19 juillet 2018 entre la SARL C2J RENOV' et M. [G] [U] [I] et portant sur les véhicules suivants :
etgt; Lexus immatriculé [Immatriculation 9]
etgt; Mercedes immatriculé [Immatriculation 8]
etgt; Volkswagen immatriculé [Immatriculation 7]
Condamne M. [G] [U] [I] à restituer à la SARL C2J RENOV' les véhicules Mercedes immatriculé [Immatriculation 8] et Volkswagen immatriculé [Immatriculation 7] ;
Ordonne à la SARL C2J RENOV' de restituer à M. [G] [U] [I] le véhicule Lexus immatriculé [Immatriculation 9] ;
Déboute la SARL C2J RENOV' de sa demande d'indemnisation complémentaire au titre de la dépréciation des véhicules ;
Déboute la SARL C2J RENOV' de sa demande de dommages et intérêts ;
Déboute M. [G] [U] [I] de toutes ses demandes ;
Condamné M. [G] [U] [I] à payer à la SARL C2J RENOV' la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [G] [U] [I] à payer à la SA Société Réunionnaise de Financement la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [G] [U] [I] aux dépens ;
Ordonne l'exécution provisoire.

Par déclaration déposée au greffe de la cour par voie électronique le 31 mars 2021, Monsieur [G] [I] a relevé appel de cette décision.

Par ordonnance du 1er avril 2021, un conseiller chargé de la mise en état a été désigné.

L'avocat de Monsieur [G] [I] prétend avoir déposé ses conclusions d'appelants au greffe de la cour par RPVA le 14 juin 2021 en même temps que la signification de la déclaration d'appel et des conclusions aux intimés par actes d'huissier délivrés le 3 juin 2021.

Une ordonnance disant n'y avoir lieu à caducité de la déclaration d'appel a été rendue le 7 décembre 2021.
Cependant, ces conclusions ne figurent pas dans le fichier transmis par RPVA à la cour.

La SOREFI a déposé ses premières conclusions d'intimée par RPVA le 27 août 2021.

La SARL ‘C2J RENOV' n'a pas constitué avocat.

La clôture est intervenue le 27 janvier 2022.

***
Aux termes de ses conclusions d'appelant, Monsieur [G] [I] demande à la cour de :
INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Saint-Pierre le 05 février 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a :
Débouté la SARL C2J RENOV de sa demande d'indemnisation complémentaire au titre de la dépréciation des véhicules.
Débouté la SARL C2J RENOV de sa demande de dommages et intérêts.
DIRE ET JUGER que l'action de la Société C2J RENOV contre Monsieur [I] est infondée, pour défaut de qualité à défendre.
Ce fait,
DÉBOUTER, la société C2J RENOV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
DÉBOUTER, la SOREFI de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
DIRE que la SOREFI a manqué à son obligation d'information auprès de Monsieur [I].
DÉBOUTER la Société C2J RENOV de sa demande de restitution des véhicules cédés accompagnée d'une indemnité forfaitaire de 10.000 euros (5.000 euros par véhicule) afin de compenser l'usure desdits véhicules.
DÉBOUTER la Société C2J RENOV de sa demande de dommages et intérêts pour le prétendu préjudice subi.
CONFIRMER l'acte de vente en date du 19 juillet 2018.
CONDAMNER la Société SARL C2J RENOV, à rembourser à Monsieur [I] la somme de 11.200 euros.
CONDAMNER la Société SARL C2J RENOV à payer à Monsieur [I] la somme forfaitaire de 10.000 euros de dommages et intérêts au titre des préjudices subis.
CONDAMNER la SOREFI à payer à Monsieur [I] la somme forfaitaire de 10.000 euros de dommages et intérêts au titre des préjudices subis.
ORDONNER l''exécution provisoire de la décision à intervenir en vertu de l'article 515 du code de procédure civile.
CONDAMNER la Société C2J RENOV et la SOREFI à régler la somme de 3.000 euros chacun à Monsieur [G] [I] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Monsieur [I] expose que le tribunal judiciaire de Saint-Pierre n'a pas tenu compte que le litige porte sur un contrat d'échange entre trois parties, la société ‘C2J RENOV', Monsieur [I] et Madame [E] [I]. En l'espèce Madame [E] [I] est la seule propriétaire des véhicules Mercedes immatriculé [Immatriculation 8] et Volkswagen immatriculé [Immatriculation 7]. L'action de la SARL C2J RENOV dirigé à l'encontre de Monsieur [G] [I] est irrecevable.

Au fond, l'appelant plaide que le premier juge a prononcé à tort la nullité de la cession intervenue le 19 juillet 2018 entre Monsieur [G] [I] et la SARL C2J RENOV, alors qu'il reconnait en même temps que le gage n'était pas opposable à la SARL C2J RENOV au moment de la vente. Monsieur [I] soutient que le gage n'était pas parfait car il ne répond à aucune formalité prévue à l'article 2336 du code civil. De surcroît le gage n'est inscrit qu'à la date du 31 juillet 2018. A cette date, le certificat de situation administrative indique " absence de gage et d'opposition. ?? Cet élément démontre l''absence d'intention de vouloir tromper l'autre partie à la vente.
L'appelant fait valoir que rien ne prouve sa faute intentionnelle. A l'inverse, tous les éléments montrent qu'il n'a commis aucune manoeuvre frauduleuse ou eu la volonté de tromper son co-contractant.
Il affirme que la SOREFI n'a jamais informé Monsieur [I] de son intention d'inscrire un gage sur le véhicule. De même, cette condition de garantie ne figure pas dans le contrat de prêt avec la SOREFI puisque l'offre de crédit stipule expressément et seulement la possibilité pour la SOREFI d'inscrire un tel gage.

A fortiori la société C2J RENOV ne rapporte pas la preuve que Monsieur [I] a manqué à son obligation d'information au sens de l'article 1112-1 du code civil, sans oublier que Monsieur [I] est un profane et la société C2J RENOV' un professionnel.

Monsieur [I] précise qu'il s'est toujours acquitté des sommes dues à la SOREFI qu'il ne pouvait pas prédire l'existence d'un quelconque gage sur le véhicule mis en cause, avant même que cela ne se produise.
L'appelant demandé à la cour de confirmer le contrat d'échange, et d'ordonner la restitution de la somme de 11.200 euros à Monsieur [I]. En effet c'est de bonne foi que Monsieur [I] a cédé son véhicule de marque LEXUS en contrepartie de deux véhicules, qui s'avèrent être non conformes à une utilisation normale. Selon lui, la Société C2J RENOV a abusé de la situation et de la bonne foi de Monsieur [I], en ne recherchant que la bonne affaire que cette transaction allait lui procurer.

L'appelant soutient que les défauts des deux véhicules cédés, la MERCEDES et la VOLKSWAGEN PASSAT, les rendent impropres à leur destination normale.

Il conteste l'existence du préjudice allégué par la société C2J RENOV', résultant de l'impossibilité d'utiliser son véhicule acquis de manière tout à fait régulière.

Monsieur [I] s'estime bienfondé à solliciter une demande de 10.000 euros de dommages et intérêts. Si la juridiction s'estimait insuffisamment informée, elle peut organiser une expertise au frais de la Société C2J RENOV.
De plus, Monsieur [I] demande de condamner la SOREFI au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

***

Par conclusions déposées par RPVA le 27 août 2021, la SOREFI demande à la cour de :

Au principal,
DONNER ACTE à la SOREFI qu'elle s'en rapporte sur le moyen de Monsieur [I] tiré de l'irrecevabilité de l'action engagée par la société C2J RENOV, par défaut de qualité pour agir contre lui,
CONFIRMER, même dans ce cas, la validité et l'opposabilité du gage inscrit par la SOREFI,
Subsidiairement, et en cas de rejet de ce moyen d'irrecevabilité,
Sur appel incident,
DECLARER la société C2J RENOV irrecevable en sa demande de mainlevée de gage,
CONFIRMER, pour le surplus, le jugement querellé sur les chefs de jugement concernant la SOREFI,
En conséquence,
DIRE ET JUGER que la SOREFI dispose d'un gage valide et opposable tant à Monsieur [I] qu'à la société C2J RENOV,
DIRE ET JUGER que la SOREFI n'a commis aucune faute envers Monsieur [I],
Y ajoutant,
CONDAMNER Monsieur [G] [I] à porter et payer à SA SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT (SOREFI) la somme de 2000€ par application de l'article 700 du Code de procédure civile, pour les frais irrépétibles d'appel exposés ici,
CONDAMNER Monsieur [G] [I] en tous les dépens d'appel .

La SOREFI soutient d'abord que, même si la fin de non-recevoir dirigée contre la SARL ‘C2J RENOV' était retenue, il conviendrait néanmoins de confirmer le jugement sur la validité et l'opposabilité du gage grevant le véhicule LEXUS immatriculé [Immatriculation 9], profitant à la SOREFI. Invoquant l'article 2 du Décret no 53-968 du 30 septembre 1953 relatif à la vente à crédit des véhicules automobiles, l'intimée expose que la possibilité de demander la radiation, ou la mainlevée, de l'inscription de gage, appartient exclusivement au créancier ou au débiteur mais pas à un tiers.

Elle fait valoir que l'inscription de gage à son profit est opposable à Monsieur [I] et à la société ‘C2J RENOV'. Le contrat de prêt souscrit par Monsieur [I] auprès de la SOREFI prévoit bien le droit pour la SOREFI de procéder à l'inscription d'un gage sur le véhicule financé. Dans ces conditions, la SOREFI ne saurait se voir reprocher un défaut d'information, et le jugement querellé sera donc confirmé sur ce point. Dès lors, la SOREFI n'était donc pas juridiquement tenu de mettre en place le gage dès la signature de l'offre de crédit et le déblocage des fonds. De plus, l'inscription n'est pas une condition d'existence du gage et ne conditionne que l'opposabilité de la sûreté aux tiers. Selon la SOREFI, Monsieur [I] ne peut donc pas nier l'existence de ce gage au profit de la SOREFI en arguant du document erroné qu'il a obtenu de la Préfecture, alors qu'il reconnaissait l'existence de ce gage dès la signature du contrat de crédit, qui en fait expressément mention. Selon l'intimée, le récépissé de la demande d'inscription de gage prouve que cette demande a été déposée le 12 avril 2018, soit plusieurs mois avant la cession du véhicule litigieux.

En outre, la SOREFI plaide que Monsieur [I] et la société C2J RENOV ne sauraient opposer la date du 19 juillet 2018, portée dans les actes de cession et d'achat car elle n'a pas date certaine, compte tenu du fait que reste inconnue la date de déclaration en préfecture de cette cession, exigée par l'article R. 322-4 du code de la route. Or, ni Monsieur [I] et la société C2J RENOV ne rapportent la preuve de la date à laquelle ont été effectuées les déclarations en Préfecture, conformément à l'article précité.
Elle soutient que le fait que l'administration ait pu délivrer par erreur à Monsieur [I] un certificat de non-gage, n'invalide pas le gage dont il a été demandé antérieurement l'inscription.
Enfin, la SOREFI considère qu'elle n'a commis aucune faute à l'égard de Monsieur [I]. Au surplus, l'existence d'un gage dit contractuel est reconnu par l'Emprunteur, de sorte que Monsieur [I] savait, dès la signature de son offre de crédit, que son véhicule était gagé et que la SOREFI pouvait procéder à une inscription administrative de son gage. Monsieur [I] s'est d'ailleurs bien gardé d'avertir la SOREFI de son projet de vendre son véhicule alors que les échéances du prêt sont toujours en cours de prélèvement à ce jour.

***
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

En cours de délibéré, à la suite de la demande de production des conclusions d'appelants, le Conseil de Monsieur [I] a répondu qu'il avait transmis celles-ci par message du 14 juin 2022 et que la décision du conseiller de la mise en état disant n'y avoir lieu à caducité avait autorité de chose jugée pour la cour.

Par note adressée par RPVA à la cour d'appel le 1er juin 2022, l'intimée plaide que, bien que signifiées par acte d'huissier du 03 juin 2021, les conclusions de l'appelant doivent, en application de l'article 908 du code de procédure civile, et sous peine de caducité de l'appel, être enrôlées dans le délai de 3 mois à compter de la date de la déclaration d'appel, formée ici le 31 mars 2021 par Monsieur [I], soit au plus tard le 30 juin 2021. En fait, la SOREFI n'est pas en mesure de confirmer ou infirmer la présence des conclusions de l'appelant en pièce jointe du message RPVA de ce dernier émis vers la cour le 14 juin 2021, ne disposant plus de ce message. La SOREFI s'en rapporte donc à justice quant à la réalité de ce défaut d'enrôlement.

MOTIFS

Sur les conclusions d'appelant :

La décision disant n'y avoir lieu à caducité, rendue par le conseiller de la mise en état, présente les caractères de l'autorité de la chose jugée en application du dernier alinéa de l'article 914 du code de procédure civile.

Il n'y a donc pas lieu de statuer sur l'absence matérielle de ces conclusions dans l'acte déposé à la cour par RPVA le 14 juin 2022, même s'il présente une différence sensible avec les pièces versées au dossier de l'appelant, notamment par l'absence des conclusions de Monsieur [I]. Celles-ci doivent être prises en compte à partir du document versé aux débats par l'avocat de l'appelant dans son dossier de plaidoirie.

La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de " constatations " ou de " dire et juger " qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

En outre, en l'absence de constitution de la SARL C2J RENOV', celles-ci est présumée adopter les motifs du premier juge en application de l'article 954 du code de procédure civile.

Monsieur [G] [I] demande à la cour de " DÉBOUTER, la société C2J RENOV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions. " Mais la société C2J RENOV' est défaillante et n'a pas conclu en appel.
Il demande ensuite de " DÉBOUTER la Société C2J RENOV de sa demande (de restitution des véhicules cédés) accompagnée d'une indemnité forfaitaire de 5.000 euros par véhicule afin de compenser l'usure desdits véhicules. " Or, le dispositif du jugement a débouté la SARL C2J RENOV' de ses demandes de mainlevée de l'inscription de gage et d'indemnisation complémentaire au titre de la dépréciation des véhicules sans que cette société n'interjette appel de cette décision. Il n'y a donc pas lieu de statuer de ces chefs qui ne sont pas contestés en appel.
Il reste donc à trancher le litige relatif à la nullité de la cession intervenue le 19 juillet 2018 entre la SARL C2J RENOV' et M. [G] [U] [I], portant sur les véhicules suivants :
etgt; Lexus immatriculé [Immatriculation 9]
etgt; Mercedes immatriculé [Immatriculation 8]
etgt; Volkswagen immatriculé [Immatriculation 7].

En ce qui concerne la SOREFI, l'appelant demande à la cour de condamner la SOREFI à lui payer la somme forfaitaire de 10.000 euros de dommages et intérêts au titre des préjudices subis à raison du manquement à son obligation d'information.

La SOREFI, sur appel incident, demande de déclarer la société C2J RENOV' irrecevable en sa demande de mainlevée de gage et de confirmer pour le surplus, le jugement querellé sur les chefs de jugement la concernant. Mais cette demande a été rejetée par le tribunal sans que ce point ne fasse l'objet d'un recours. Il n'y a donc pas lieu de statuer de ce chef en appel.

Sur la qualité à défendre de Monsieur [G] [I] :

Vu l'article 32 du code de procédure civile ;

Monsieur [I] soutient que l'action dirigée exclusivement contre lui au titre de l'échange des véhicules est irrecevable car l'un de ces véhicules appartiendrait à Madame [I].

La facture en date du 19 juillet 2018, émise par la SARL C2J RENOV' mentionne que le client est Madame [I] [E] [N] (pièce no 1 de l'appelant), il est aussi incontestable que cet échange concerne le véhicule LEXUS d'un montant de 22.400 euros, immatriculé DG252PA.

Pourtant, le certificat de cession du véhicule LEXUS de type IS 300 H, présente bien Monsieur [I] comme l'ancien propriétaire de ce véhicule alors que le certificat de cession du véhicule MERCEDES-BENZ de type C 200, du même jour, présente bien Madame [I] comme la nouvelle propriétaire des deux véhicules échangés.

Or, le prêt souscrit par Monsieur [I], d'un montant de 25.000 euros, finance aussi le même véhicule, ce qui permet de considérer que Monsieur [I] s'en est attribué la propriété, indépendamment de l'opération d'échange réalisée entre la SARL C2JRENOV' et Madame [I] pour le même véhicule.

En outre, tous les documents contractuels ou annexes de la SOREFI, relatifs au financement de ce véhicule LEXUS, pour un montant prêté de 25.000 euros, sont au nom de Monsieur [G] [I] et non de Madame [I].

Ainsi, s'agissant de la demande de mainlevée du gage, la SARL C2J RENOV' devait bien appeler en cause son vendeur, soit Monsieur [G] [I].

Le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur la nullité de la cession des véhicules en date du 19 juillet 2018 :

Aux termes de l'article 1130 du code civil, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

Selon l'article 1137 du même code, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.

Le premier juge a considéré que constituait une dissimulation intentionnelle le fait pour Monsieur [I] d'avoir cédé un véhicule affecté d'un gage sans en informer son acquéreur.
Il a suivi en cela l'argumentation de la SARL C2J RENOV' qui plaidait que Monsieur [I] avait failli à son obligation d'information et que la dissimulation de l'existence d'un gage, information essentielle, constitue un dol.

Pourtant, la SARL C2J RENOV' ne rapporte aucunement la preuve de manoeuvres frauduleuses ou de dissimulation intentionnelle portant sur l'existence du gage sur le véhicule LEXUS acquis en échange de deux autres véhicules alors que la société C2J RENOV', professionnelle de l'automobile, devait s'assurer de l'absence de gage sur le véhicule qu'elle allait acquérir.

A cet égard, Monsieur [I] a obtenu le 18 juillet 2018, veille de la vente litigieuse, le certificat de situation administrative simple du véhicule LEXUS immatriculé [Immatriculation 9]. Selon ce document, aucun gage ni opposition n'affectait le véhicule vendu par Monsieur [I].

Pour retenir des manoeuvres frauduleuses, la SOREFI affirme que Monsieur [I] savait qu'il existait un gage sur le véhicule acquis au moyen du prêt accepté le 5 décembre 2017.

Le contrat de prêt stipule en première page, encadrée, parmi les caractéristiques du financement une clause de " Garanties " dont le 2o - b) stipule que si le montant du crédit est strictement supérieur à 20 000 €, le Prêteur inscrira un gage sur le bien financé, conformément au décret 53-968 du 30 septembre 1953 ou tout autre réglementation applicable, ce que l'Emprunteur accepte sans réserve. L'Emprunteur communiquera au prêteur tous documents nécessaires à la constitution et l'inscription du gage. Dans le cas où les formalités d'inscription n'auraient pas été réalisées, l'Emprunteur reconnaît l'existence d'un gage contractuel au profit du prêteur.

Ainsi, Monsieur [I] ne pouvait se satisfaire de la simple situation administrative résultant de sa demande à la préfecture alors qu'il avait contractuellement accepté sans réserve le principe du gage contractuel, et ce même si les formalités d'inscription n'avaient pas été réalisés par la SOREFI.

Malgré la demande de situation administrative du véhicule le 18 juillet 2018, mentionnant une absence d'inscription de gage, Monsieur [I] ne pouvait faire abstraction de son obligation contractuelle reconnaissant l'existence du gage sur le véhicule qu'il a pourtant cédé à la SARL C2J RENOV'.

En conséquence, le premier juge a justement retenu que Monsieur [I] avait commis un dol constitué par la manoeuvre frauduleuse relative à la délivrance d'un certificat de situation attestant l'absence de gage alors qu'il savait pertinemment que le véhicule constituait une garantie au profit de la SOREFI et qu'il ne pouvait donc pas le vendre.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les conséquences de la nullité :

La cour adopte les motifs du premier juge qui, rappelant les dispositions de l'article 1178 du code civil, a ordonné la restitution des trois véhicules objet de la cession.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [G] [U] [I] à restituer à la SARL C2J RENOV' le véhicule Mercedes C 200, immatriculé [Immatriculation 8] et le véhicule Volkswagen PASSAT, immatriculé [Immatriculation 7] tout en ordonnant à la SARL C2J RENOV' de restituer à Monsieur [I] le véhicule LEXUS immatriculé [Immatriculation 9].

La cour observe que Monsieur [I] n'a pas estimé utile d'appeler en cause Madame [E] [I] mais qu'il reste le propriétaire du véhicule cédé à la SARL C2J RENOV' au mépris du gage contractuel grevant ce bien au profit de la SOREFI.

Il n'a pas plus produit aux débats les cartes grises des deux véhicules acquis auprès de la SARL C2J RENOV' pour permettre à la juridiction de vérifier le nom de leur propriétaire déclaré, ce qui, en tout état de cause, ne constituerait pas forcément la preuve de la propriété, eu égard à l'échange réalisé avec le véhicule LEXUS appartenant à Monsieur [I] et le lien de famille entre Monsieur et Madame [I] qui sont domiciliés à la même adresse dans l'ensemble des documents communiqués à la cour.

Sur le manquement de la SOREFI à son obligation d'information auprès de Monsieur [I] :

Monsieur [I], fait grief à la SOREFI de ne pas l'avoir informé sur sa démarche de mettre le véhicule de marque LEXUS en gage.

Toutefois, les termes du contrat de prêt stipulent clairement que Monsieur [I] acceptait purement et simplement le fait que le véhicule serait gagé, même si les formalités de publicité n'étaient pas formalisées par le prêteur.

Ainsi, la SOREFI n'a commis aucune faute à l'égard de Monsieur [I], et ce même si l'appelant fonde à tort sa demande sur une responsabilité délictuelle à l'encontre de son cocontractant comme l'avait aussi souligné le premier juge.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

Monsieur [G] [I] supportera les dépens de l'appel ainsi que les frais irrépétibles de la SOREFI.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

CONDAMNE Monsieur [G] [I] à payer à la SOREFI une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [G] [I] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 21/005701
Date de la décision : 01/07/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-07-01;21.005701 ?
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