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01/07/2022 | FRANCE | N°21/004441

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 01 juillet 2022, 21/004441


ARRÊT No
PC

R.G : No RG 21/00444 - No Portalis DBWB-V-B7F-FQQ6

[X]

C/

S.A.S.U. CAPWEST GROUPE

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-PIERRE en date du 05 FEVRIER 2021 suivant déclaration d'appel en date du 11 MARS 2021 RG no 19/02302

APPELANT :

Monsieur [T] [X]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Normane OMARJEE de la SELARL KER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INT

IMÉE :

S.A.S.U. CAPWEST GROUPE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Thierry CODET de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barre...

ARRÊT No
PC

R.G : No RG 21/00444 - No Portalis DBWB-V-B7F-FQQ6

[X]

C/

S.A.S.U. CAPWEST GROUPE

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-PIERRE en date du 05 FEVRIER 2021 suivant déclaration d'appel en date du 11 MARS 2021 RG no 19/02302

APPELANT :

Monsieur [T] [X]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Normane OMARJEE de la SELARL KER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

S.A.S.U. CAPWEST GROUPE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Thierry CODET de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 9 Décembre 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Avril 2022 devant Madame Pauline FLAUSS, Conseillère qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 01 Juillet 2022.

* * *

LA COUR :

Monsieur [T] [X] a conclu deux contrats de réservation, en date du 15 décembre 2017, avec la société SASU CAP WEST GROUPE pour l'acquisition de deux appartements dans une résidence sise à [Localité 5] (49). Le même jour, il a signé deux baux commerciaux avec la même société ayant pour objet la location des deux appartements objets de la réservation.

A la suite d'un courrier du 13 juillet 2018 informant la venderesse de l'annulation des deux réservations, la société SASU CAP WEST GROUPE a fait assigner Monsieur [X] devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre de la Réunion, par acte délivré le 25 juin 2019, aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer une indemnité de résiliation de 17.148,00 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 octobre 2018, outre capitalisation des intérêts.

Par jugement en date du 5 février 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion Denis a statué en ces termes :
DEBOUTE M. [T] [X] de l'ensemble de ses demandes,
CONDAMNE M. [T] [X] à payer à la société SASU CAP VVEST GROUPE la somme de 17 148 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 octobre 2018,
ORDONNE la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une armée entière,
CONDAMNE M. [T] [X] à payer à la société SASU CAP WEST GROUPE la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT n'y avoir lieu à l'exécution provisoire.
CONDAMNE M. [T] [X] aux dépens.

Monsieur [T] [X] a interjeté appel du jugement par déclaration déposée par RPVA au greffe de la cour le 11 mars 2021.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état par ordonnance du 11 mars 2021.

L'appelant a déposé ses premières conclusions d'appel par RPVA le 10 juin 2021.

Les conclusions d'intimée No 1 ont été déposées par RPVA le 6 août 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 décembre 2021.

***

Aux termes de ses conclusions d'appel, déposées le 10 juin 2021, Monsieur [T] [X] demande à la cour de :
INFIRMER le jugement du 5 février 2021 du Tribunal Judiciaire de Saint-Pierre en toutes ses dispositions,
A TITRE PRINCIPAL
JUGER que les contrats préliminaires de réservation signés le 15 décembre 2017 sont entachés d'irrégularités au sens des dispositions de l'article L. 261-15 du Code de la construction et de l'habitation.
JUGER que les contrats préliminaires de réservation signés le 15 décembre 2017 sont entachés d'irrégularités au sens des dispositions des articles L. 271-15, D. 271-6 et D. 271-7 du Code de la construction et de l'habitation.
En conséquence,
PRONONCER la nullité des contrats préliminaires de réservation signés le 15 décembre 2017.
REJETER la demande de la société SASU CAP WEST GROUPE tendant à obtenir la condamnation de Monsieur [T] [X] au paiement de la somme de 17.148,00€ à titre d'indemnité d'immobilisation puisque non fondée.
A TITRE SUBSIDIAIRE
-JUGER que l'indemnité d'immobilisation constitue une clause pénale.
REJETER la demande de la société SASU CAP WEST GROUPE tendant à obtenir la condamnation de Monsieur [T] [X] au paiement de la somme de 17.148,00€ à titre d'indemnité d'immobilisation puisque non fondée.
A défaut,
REDUIRE à de plus justes proportions le montant de la clause pénale.
EN TOUT ETAT DE CAUSE
DEBOUTER la société SASU CAP WEST GROUPE de toutes ses demandes plus amples ou contraires.
CONDAMNER la société SASU CAP WEST GROUPE à payer à Monsieur [T] [X] la somme de 2.500,00€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Monsieur [X] expose que les contrats litigieux relèvent du champ d'application de l'article L. 261-10 du code de la construction et de l'habitation, dès lors que les lots vendus étaient destinés à l'usage d'habitation, contrairement à ce que prétend la société CAP WEST GROUPE, et ce indépendamment des modalités de gestion et de l'existence d'un bail commercial.

Il fait valoir que les deux contrats préliminaires de réservation sont nuls pour, d'une part, manquements aux dispositions de l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. Il affirme qu'aucun des deux contrats ne stipule le délai d'exécution des travaux, la date prévue pour la conclusion de la vente, ni les modalités de révision du prix de vente.
D'autre part, ces contrats sont en infraction avec les dispositions de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, relatives au droit de rétractation et à l'information obligatoire devant être donnée à l'acquéreur. Monsieur [X] plaide que la clause intitulée rétractation figurant à l'article 9 des contrats, n'est aucunement mis en valeur par une police distincte du reste du contrat dont la notification par courrier recommandé du 5 janvier 2018, ne contient aucune précision sur l'existence et le point de départ du délai de rétractation.

Subsidiairement, il invoque le caractère manifestement excessif du montant de la clause pénale, faussement intitulée " indemnité d'immobilisation. ? ? L'appelant affirme que le défaut de diligences dans l'obtention des prêts dans le but d'obtenir la réalisation de la condition suspensive ne peut constituer une faute, s'il est établi, que la banque, aurait, de toute façon, refusé le prêt en raison de l'insuffisance des capacités financières de l'emprunteur acquéreur.
Monsieur [X] soutient que la vente n'a pas eu lieu suite à l'information transmise par la société LDF CONSEIL selon laquelle il ne disposait pas des ressources suffisantes pour obtenir les financements nécessaires pour finaliser le projet. Ainsi, indépendamment du comportement de Monsieur [T] [X], aucune vente ne pouvait aboutir compte tenu de sa situation financière car les prêts sollicités étaient ainsi subordonnés au rachat de différents crédits et au respect des taux d'endettement légaux. L'appelant expose que l'opération d'investissement projetée aller doubler son taux d'endettement en lui imposant le remboursement d'une somme supérieure à 3.000,00 euros par mois au titre des différents crédits souscrits. En outre, la société SASU CAP WEST GROUPE ne s'est jamais plainte du prétendu manque de diligences de Monsieur [T] [X] et ne justifie aucunement l'avoir mis en demeure de justifier avoir déposé des offres de prêt. Elle ne démontre pas plus avoir subi un préjudice.
Monsieur [X] conclut en conséquence que le premier juge a, à tort, considéré qu'il aurait renoncé à son acquisition sans motif légitime et serait redevable d'une indemnité de 5 % du prix TTC des biens réservés.

***

Par conclusions d'intimée, la SASU CAP WEST GROUPE demande à la cour de :
Débouter Monsieur [X] de l'intégralité de ses demandes, écrits, fins et conclusions.
Confirmer le jugement du Tribunal judiciaire de SAINT PIERRE DE LA REUNION ;
Y ajoutant,
Condamner Monsieur [X] à régler à la société SASU CAP WEST GROUPE une indemnité de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais non répétibles d'appel.
Condamner Monsieur [X] aux entiers dépens de l'instance d'appel qui seront recouvrés suivant les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Selon l'intimée, le contenu des contrats de réservations est conforme aux dispositions du code de la construction et de l'habitation. Les règles relatives au droit de rétractation ont été parfaitement respectées.
La société CAP WEST considère que les stipulations contractuelles contestées sont bien précisées aux contrats et parfaitement suffisantes au regard des dispositions de l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable aux contrats en litige.
Elle expose que ces deux contrats ne prévoient qu'une seule condition suspensive au bénéfice exclusif de Monsieur [X] relative à l'obtention d'un prêt.

Pour contester la prétention de l'appelant relative au délai de rétractation, l'intimée souligne que Monsieur [X] cite une version de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation résultant de la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018, inapplicable aux contrats de réservations signés antérieurement à cette loi, le 26 juillet 2017. En second lieu, elle affirme que la clause de rétractation comprise aux contrats de réservation signés par Monsieur [X] est parfaitement " lisible et compréhensible ? ?, ainsi que la loi a pu l'imposer par la suite. En soutenant à tort que la formule du droit de rétractation ne serait pas suffisamment lisible en raison de son écriture dans une police similaire aux autres clauses, Monsieur [X] cherche ainsi à imposer une condition qui n'est pas prévue par la loi selon l'intimée.

La société CAP WEST GROUPE expose aussi que le formulaire, spécialement joint au contrat de réservation en annexe 4, est également paraphé par Monsieur [X], comme les autres pièces du contrat. Il reprend les conditions d'exercice de la faculté de rétractation (délai et modalité de mise en oeuvre). Cette clause apparait alors en gras et soulignée.

En troisième lieu, la société CAW WEST GROPE plaide que les contrats de réservation ont été notifiés à Monsieur [X] par courrier recommandé, de sorte que l'article D. 271-6 du code de la construction et de l'habitation n'est pas applicable. Il n'y avait donc pas lieu de rappeler la faculté de rétractation dans le courrier de notification du contrat.

Pour soutenir la demande de condamnation à paiement de Monsieur [X], la société CAP WEST GROUPE fait valoir que Monsieur [X] n'a pas satisfait à son obligation contractuelle au titre de la levée de la condition suspensive d'obtention de prêt.

Il n'a pas adressé d'offre de prêt, ni de refus de prêt, dans les délais fixés aux contrats. De plus, il n'a même pas justifié avoir effectué la moindre démarche en ce sens et ne le fait toujours pas dans le cadre de la présente procédure. A cet égard, son conseiller en patrimoine a seulement fait référence à une pré-étude qui aurait été faite par un courtier, mais non seulement cette pré-étude a été sollicitée hors délai mais, en toute hypothèse, ceci ne vaut pas véritable demande de financement bancaire. De ce chef, Monsieur [X] est donc également redevable de l'indemnité égale à 5% du prix TTC de vente pour chacun des lots réservés, par application de l'article 6.2 du contrat (absence de diligence pour lever la condition suspensive).
Selon la société CAP WEST GROUPE, Monsieur [X] présente à tort l'indemnité d'immobilisation comme une clause pénale. En effet, cette indemnité constitue la contrepartie de la réservation du bien par le promettant qui s`oblige à ne pas contracter avec quelqu'un d'autre, immobilisant ainsi le bien ce qui lui occasionne des frais. L'engagement de la société SASU CAPWEST GROUPE envers Monsieur [X] l'empêchait de vendre le bien à des tiers. Il obligeait également la société SASU CAPWEST GROUPE à préfinancer les travaux tant que le contrat de vente n'était pas régularisé, de sorte que le contrat de réservation entrainait la dépense de frais pour la société SASU CAPWEST GROUPE.

Subsidiairement, en cas de qualification de la clause litigieuse en clause pénale, il n'y aurait pas eu matière à modération car elle est parfaitement proportionnée, au regard de l'immobilisation de sept mois imposée par Monsieur [X] alors que celui-ci, par un courriel du 29 juin 2018, a demandé des délais supplémentaires pour obtenir ses prêts, faisant ainsi durer excessivement l'immobilisation, alors même qu'il s`était engagé à faire diligence.

La société CAP WEST GROUPE plaide enfin qu'il n'y a pas lieu d'apprécier la solvabilité de Monsieur [X]. Soit il entre dans l`un des cas lui permettant de se désister sans indemnité, soit il ne répond pas à ces conditions et il est tenu à paiement. Or, il appartenait à Monsieur [X] de justifier du refus de lui accorder un prêt par trois banques. A défaut, il ne peut se prévaloir de ce motif pour être exonéré de l'indemnité d'immobilisation et ce alors qu'il était accompagné d'un conseiller en patrimoine indépendant et choisi par ses soins, qui disposait de tous les éléments pour l'assister et l'orienter au mieux dans ses démarches.

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes de constatations ou de dire et juger ne saisissent pas la Cour de prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, de sorte qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur ces points.

Sur la demande de nullité des contrats préliminaires de réservation signés le 15 décembre 2017 :

Monsieur [X] demande de prononcer la nullité des deux contrats préliminaires de réservation en raison de leurs irrégularités au regard des dispositions de l'article L. 261-15 du Code de la construction et de l'habitation, puis pour défaut d'information suffisante sur son droit de rétractation.

Sur les textes applicables :

Selon les dispositions de l'article L. 261-10 du code de la construction et de l'habitation, tout contrat ayant pour objet le transfert de propriété d'un immeuble ou d'une partie d'immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation et comportant l'obligation pour l'acheteur d'effectuer des versements ou des dépôts de fonds avant l'achèvement de la construction doit, à peine de nullité, revêtir la forme de l'un des contrats prévus aux articles 1601-2 et 1601-3 du code civil, reproduits aux articles L. 261-2 et L. 261-3 du présent code. Il doit, en outre, être conforme aux dispositions des articles L. 261-11 à L. 261-14 ci-dessous.
Celui qui s'oblige à édifier ou à faire édifier un immeuble ou une partie d'immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, lorsqu'il procure directement ou indirectement le terrain ou le droit de construire sur le terrain à celui qui contracte l'obligation d'effectuer les versements ou les dépôts ci-dessus définis, doit conclure un contrat conforme aux dispositions de l'alinéa précédent, sauf si le terrain ou le droit est procuré à une société régie par les chapitres Ier, II (sections I et II) et III du titre Ier du présent livre, ou si celui qui les procure est un organisme d'habitations à loyer modéré agissant comme prestataire de service.

A la date de conclusions des deux contrats litigieux, l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation (CCH) était ainsi rédigé :
La vente prévue à l'article L. 261-10 peut être précédée d'un contrat préliminaire par lequel, en contrepartie d'un dépôt de garantie effectué à un compte spécial, le vendeur s'engage à réserver à un acheteur un immeuble ou une partie d'immeuble.

Ce contrat doit comporter les indications essentielles relatives à la consistance de l'immeuble, à la qualité de la construction et aux délais d'exécution des travaux ainsi qu'à la consistance, à la situation et au prix du local réservé.

Les fonds déposés en garantie sont indisponibles, incessibles et insaisissables jusqu'à la conclusion du contrat de vente.

Ils sont restitués, dans le délai de trois mois, au déposant si le contrat n'est pas conclu du fait du vendeur, si la condition suspensive prévue à l'article L. 313-41 du code de la consommation n'est pas réalisée ou si le contrat proposé fait apparaître une différence anormale par rapport aux prévisions du contrat préliminaire.
Est nulle toute autre promesse d'achat ou de vente.

Selon l'article L. 261-16 du même code, toute clause contraire aux dispositions des articles L. 261-11 à L. 261-15 du présent code et à celles des articles 1642-1 et 1646-1 du code civil, reproduits aux articles L. 261-5 et L. 261-6 du présent code, est réputée non écrite.

Aux termes de l'article R. 261-25 du même code, le contrat préliminaire doit indiquer la surface habitable approximative de l'immeuble faisant l'objet de ce contrat, le nombre de pièces principales et l'énumération des pièces de service, dépendances et dégagements. S'il s'agit d'une partie d'immeuble, le contrat doit en outre préciser la situation de cette partie dans l'immeuble.

La qualité de la construction est suffisamment établie par une note technique sommaire indiquant la nature et la qualité des matériaux et des éléments d'équipement. Si le contrat porte sur une partie d'immeuble, cette note technique doit contenir également l'indication des équipements collectifs qui présentent une utilité pour la partie d'immeuble vendue.
Cette note technique doit être annexée au contrat.

L'article R. 261-26 du même code prescrit que le contrat doit également indiquer :
-le prix prévisionnel de vente et, le cas échéant, les modalités de sa révision dans les limites et conditions prévues aux articles L. 261-11-1 et R. 261-15 ;
-la date à laquelle la vente pourra être conclue ;
-s'il y a lieu, les prêts que le réservant déclare qu'il fera obtenir au réservataire ou dont il lui transmettra le bénéfice en précisant le montant de ces prêts, leurs conditions et le nom du prêteur.

L'article R. 261-28 édicte que le montant du dépôt de garantie ne peut excéder 5% du prix prévisionnel de vente si le délai de réalisation de la vente n'excède pas un an ; ce pourcentage est limité à 2% si ce délai n'excède pas deux ans. Aucun dépôt ne peut être exigé si ce délai excède deux ans.

Selon les prescriptions de l'article R. 261-30 Le dépôt de garantie est restitué, sans retenue ni pénalité au réservataire :
a) Si le contrat de vente n'est pas conclu du fait du vendeur dans le délai prévu au contrat préliminaire ;
b) Si le prix de vente excède de plus de 5% le prix prévisionnel, révisé le cas échéant conformément aux dispositions du contrat préliminaire. Il en est ainsi quelles que soient les autres causes de l'augmentation du prix, même si elles sont dues à une augmentation de la consistance de l'immeuble ou à une amélioration de sa qualité ;
c) Si le ou les prêts prévus au contrat préliminaire ne sont pas obtenus ou transmis ou si leur montant est inférieur de 10% aux prévisions dudit contrat;
d) Si l'un des éléments d'équipement prévus au contrat préliminaire ne doit pas être réalisé ;
e) Si l'immeuble ou la partie d'immeuble ayant fait l'objet du contrat présente dans sa consistance ou dans la qualité des ouvrages prévus une réduction de valeur supérieure à 10%.
Dans les cas prévus au présent article, le réservataire notifie sa demande de remboursement au vendeur et au dépositaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Sous réserve de la justification par le déposant de son droit à restitution, le remboursement intervient dans le délai maximum de trois mois à dater de cette demande.

Sur la régularité des deux contrats préliminaires de réservation :

Vu les articles 6 et 9 du code de procédure civile,

Il convient de relever que l'appelant n'a versé que deux pièces en appel, énoncés dans son bordereau de communication et à la fin de ses conclusions uniques, soit la liste des documents en vue de l'étude bancaire, les pièces complémentaires transmises. L'appelant n'a donc pas versé aux débats les conventions litigieuses dont il réclame la nullité.

La société CAP WEST GROUPE a produit le contrat de réservation du lot no 220 et le contrat de réservation du lot no 301. Ces deux conventions sont rédigées selon les mêmes termes.

Ces conventions comportent bien les indications essentielles relatives à la consistance de l'immeuble, stipulant en page 2/7 qu'il s'agit d'un lot de type studio de 43,13 m² au niveau R+2 pour le premier et de type T2 pour le second d'une surface de 39,07 m² au niveau R+3. Le prix de la vente est précisé à l'article 4.
S'agissant d'un contrat de réservation, le délai de régularisation de l'acte de vente est stipulé à l'article 5, prévoyant un délai de 75 jours à partir de la signature de la réservation.

Ces deux contrats comportent, notamment, en annexe la note technique sur la qualité des constructions, la liste des équipements et mobiliers, l'état des risques naturels, miniers et technologiques, les plans.
L'article 1 des deux contrats de réservation contiennent l'engagement de livraison des lots au cours du second semestre 2019.

Ainsi, Monsieur [X] est mal fondé à soutenir que ces contrats seraient irréguliers et sujets à nullité.

Le jugement querellé sera confirmé de ce chef.

Sur l'information relative au droit de rétractation :

Selon l'article L. 271-1 du CCH, dans sa version en vigueur lors de la conclusion des deux contrats de réservation, pour tout acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, la souscription de parts donnant vocation à l'attribution en jouissance ou en propriété d'immeubles d'habitation ou la vente d'immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l'acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l'acte.

Cet acte est notifié à l'acquéreur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise. La faculté de rétractation est exercée dans ces mêmes formes.

Lorsque l'acte est conclu par l'intermédiaire d'un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation. Dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l'acte, qui doit être attestée selon des modalités fixées par décret.
Lorsque le contrat constatant ou réalisant la convention est précédé d'un contrat préliminaire ou d'une promesse synallagmatique ou unilatérale, les dispositions figurant aux trois alinéas précédents ne s'appliquent qu'à ce contrat ou à cette promesse.
Lorsque le contrat constatant ou réalisant la convention est dressé en la forme authentique et n'est pas précédé d'un contrat préliminaire ou d'une promesse synallagmatique ou unilatérale, l'acquéreur non professionnel dispose d'un délai de réflexion de dix jours à compter de la notification ou de la remise du projet d'acte selon les mêmes modalités que celles prévues pour le délai de rétractation mentionné aux premier et troisième alinéas. En aucun cas l'acte authentique ne peut être signé pendant ce délai de dix jours.

En l'espèce, la SASU CAP WEST GROUPE est le réservant et le réalisateur de l'opération de construction. Elle devait donc notifier à l'acquéreur, Monsieur [X], le contrat préliminaire de réservation, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise.

Le délai de rétractation courait donc à partir de cette notification qui a été réalisée par LRAR unique datée du 5 janvier 2018, reçue par Monsieur [X] le 11 janvier 2018 (pièce No 3 de l'intimée).

Monsieur [X] affirme que son droit à rétractation n'a pas été respecté.

Cependant, l'article 9 des deux contrats litigieux stipule clairement le droit et les conditions de rétractation de l'acquéreur, précisant que le bordereau est joint en annexe 4 du contrat.

En outre, il invoque les articles D. 271-6 et D. 271-7 du CCH pour soutenir que la société CAP WEST GROUPE a manqué à ses obligations. Ces articles sont issus du Décret no 2016-579 du 11 mai 2016, en vigueur depuis le 14 mai 2016, et donc applicables aux deux conventions litigieuses signées le 15 décembre 2017.

Selon le premier de ces textes, l'acte sous seing privé ou une copie de l'avant-contrat réalisé en la forme authentique remis directement à l'acquéreur non professionnel en application du troisième alinéa de l'article L. 271-1 reproduit les dispositions de l'article L. 271-2.
Le bénéficiaire du droit de rétractation y inscrit de sa main les mentions suivantes : " remis par (nom du professionnel) ... à (lieu)... le (date)... " et : " Je déclare avoir connaissance qu'un délai de rétractation de dix jours m'est accordé par l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, et qu'il court à compter du lendemain de la date de remise inscrite de ma main sur le présent acte, soit à compter du... ".

Mais la société CAP WEST GROUPE revendique justement le fait que les contrats n'ont pas été remis en main propre à Monsieur [X] le 15 décembre 2017.
Les prescriptions de l'article D. 271-6 ne sont donc pas applicables.

Enfin, comme l'a relevé le premier juge, il ne résulte pas des autres dispositions du CCH que le vendeur-réservataire soit tenu de rappeler la faculté de rétractation dans le courrier de notification du contrat.

D'ailleurs, cet hypothétique manquement ne saurait être sanctionné par la nullité du contrat mais aurait pour effet de ne pas faire courir le délai de rétractation en faveur de son bénéficiaire.

Il convient dès lors de débouter Monsieur [X] de ses prétentions en nullité des deux contrats préliminaires de réservation et de confirmer le jugement de ces chefs.

Sur la demande en paiement de l'indemnité d'immobilisation :

Vu l'article 1103 du code civil,

L'article 3, intitulé " Dépôt de garantie - des deux contrats préliminaires de réservation est rédigé comme suit dans son intégralité :
" En contrepartie de la réservation objet du présent contrat, le réservataire remet ce jour un chèque de " zéro euro " (mention manuscrite) à l'ordre de l'étude (Précisions sur le notaire), qui sera déposé sur un compte spécial ouvert à son nom. Cette somme restera indisponible, incessible et insaisissable jusqu'à la signature de l'acte authentique de vente, conformément à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation, ou sa restitution au réservataire ou son attribution au réservant. En cas de signature de l'acte authentique de vente, cette somme s'imputera sur la partie payant comptant du prix.
Le dépôt de garantie sera restitué au réservataire :
o dans les cas prévus à l'article R. 161-31 du code de la construction et de l'habitation reproduit ci-après,
o dans les cas prévus ou le réservataire n'aurait pas reçu les offres de prêts répondant aux conditions mentionnées à l'article six, à condition qu'il ait respecté les engagements pris pour l'obtention du ou des prêts mentionnés à l'article six (délai de dépôt des dossiers de demande de prêt, nombre de banques et d'établissements bancaires sollicités,) et qu'il se soit vu opposer un refus partout les prêteurs sollicités,
o en cas d'exercice de la faculté de rétractation.
À titre d'indemnité d'immobilisation non révisable, en cas de décision du réservataire de ne plus acquérir dans tous les autres cas, quelle que soit la date de cette décision, et également si le réservataire ne dépose pas les demandes de prêt dans le délai de 10 jours ou ne fournit pas avec diligence aux établissement prêteur les précisions et justifications demandées par eux, le réservataire sera redevable d'une somme de 5 % du prix TTC mentionnées ci-dessous. À cet égard, la somme déposée en garantie servira d'indemnité d'immobilisation et sera versée et restera acquise au réservant. En cas de non versement du dépôt de garantie ou dans l'hypothèse où le dépôt de garantie serait inférieur à 5 % du prix TTC, le réservataire devra verser au réservant le complément afin d'atteindre les 5 % du prix TTC dans un délai de huit jours à compter de l'envoi de la facture. "

Cette clause stipule donc bien le versement d'un dépôt de garantie, susceptible d'être remboursé au réservataire en cas de rétractation régulière, de non réalisation de la condition suspensive d'obtention de prêts ou, selon les termes de l'article R. 261-31 du CCH,
a) Si le contrat de vente n'est pas conclu du fait du vendeur dans le délai prévu au contrat préliminaire ;
b) Si le prix de vente excède de plus de 5% le prix prévisionnel, révisé le cas échéant conformément aux dispositions du contrat préliminaire. Il en est ainsi quelles que soient les autres causes de l'augmentation du prix, même si elles sont dues à une augmentation de la consistance de l'immeuble ou à une amélioration de sa qualité ;
c) Si le ou les prêts prévus au contrat préliminaire ne sont pas obtenus ou transmis ou si leur montant est inférieur de 10% aux prévisions dudit contrat;
d) Si l'un des éléments d'équipement prévus au contrat préliminaire ne doit pas être réalisé ;
e) Si l'immeuble ou la partie d'immeuble ayant fait l'objet du contrat présente dans sa consistance ou dans la qualité des ouvrages prévus une réduction de valeur supérieure à 10%.

En l'espèce, Monsieur [X] n'a pas fait application de son droit de rétractation. Il n'invoque pas les cas prévus par l'article R. 261-31 susvisé. Il n'affirme pas non plus que la condition suspensive relative à l'obtention des prêts n'a pas été réalisée.

Mais il soutient en premier lieu que l'indemnité d'immobilisation est une clause pénale, susceptible de minoration par le juge en application de l'article 1231-5 du code civil.
En second lieu, il soutient qu'il ne disposait pas des ressources suffisantes pour obtenir les financements nécessaires pour finaliser le projet, faisant ainsi valoir une absence de faute de sa part.

La société CAP WEST GROUPE affirme que l'indemnité d'immobilisation n'est pas une clause pénale car l'indemnité d'immobilisation constitue la contrepartie de la réservation du bien par le promettant qui s'oblige à ne pas contracter avec quelqu'un d'autre, immobilisant ainsi le bien ce qui lui occasionne des frais.

Ceci étant exposé,

Aux termes de l'article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.

Les clauses pénales sont les clauses par lesquelles les contractants évaluent forfaitairement et par avance les dommages et intérêts dus par le débiteur en cas d'inexécution totale, partielle ou tardive du contrat. Elles ont pour objet d'assurer l'exécution par une partie de ses obligations et se distinguent des clauses d'immobilisation qui permettent au contraire à une partie de se soustraire à ses obligations, moyennant le cas échéant paiement d'une indemnité.

En cas de vente sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt par le réservataire, la stipulation d'une indemnité d'immobilisation n'a pas pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation. Elle ne constitue donc pas une clause pénale et n'est pas sujette à modération par le juge.

Il n'y a donc pas lieu d'analyser le comportement fautif ou non de Monsieur [X] puisque celui-ci n'a pas respecté ses engagements alors qu'il ne justifie pas de la réalisation de la condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt.

En conséquence, le jugement querellé doit être confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [X] à payer pour chaque contrat une somme représentant 5 % TTC de la vente en l'état futur d'achèvement.

Sur les autres demandes :

Monsieur [T] [X] supportera les dépens et les frais irrépétibles de la société SASU CAP WEST GROUPE en appel, en sus de ceux déjà alloués en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE Monsieur [T] [X] à payer à la SASU CAP WEST GROUPE une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles en appel ;

CONDAMNE Monsieur [T] [X] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 21/004441
Date de la décision : 01/07/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-07-01;21.004441 ?
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