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28/06/2022 | FRANCE | N°21/011461

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 28 juin 2022, 21/011461


Arrêt No
PF

R.G : No RG 21/01146 - No Portalis DBWB-V-B7F-FSMP

[I]

C/

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une ordonnance rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 01 JUIN 2021 suivant déclaration d'appel en date du 28 JUIN 2021 rg no: 20/00647

APPELANT :

Monsieur [V] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Florence CHANE-TUNE de la SELARL

WIZE AVOCATS REUNION, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE...

Arrêt No
PF

R.G : No RG 21/01146 - No Portalis DBWB-V-B7F-FSMP

[I]

C/

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une ordonnance rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 01 JUIN 2021 suivant déclaration d'appel en date du 28 JUIN 2021 rg no: 20/00647

APPELANT :

Monsieur [V] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Florence CHANE-TUNE de la SELARL WIZE AVOCATS REUNION, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 4] (CRCAMR), société civile coopérative à capital variable régie par les dispositions des articles L 512-20 à L 512-24 du code monétaire et financier, immatriculée au RCS de Saint-Denis sous le no D 312 617 046, dont le siège social est [Adresse 5], représentée par Monsieur [S] [D], Directeur Général, nommé à cette fonction aux termes d'une délibération du Conseil d'Administration en date du 24 septembre 2018.
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentant : Me Amina GARNAULT de la SELAS AMINA GARNAULT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Clôture: 19 avril 2022

DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 779 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Avril 2022 devant la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, conseillère
Conseiller : Madame Isabelle OPSAHL, Vice-présidente placée

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 28 Juin 2022.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 28 Juin 2022.

Greffier : Mme Véronique FONTAINE,

EXPOSE DE LA PROCEDURE

Suivant acte authentique du 31 octobre 2005, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion (CRCAMR) a octroyé à M. [I] un prêt no 90011710431 de 411.796,29 €.

Par acte d'huissier du 4 mars 2020, M. [I] a assigné la CRCAMR devant le tribunal judiciaire de St Denis aux fins de déchéance des intérêts conventionnels et octroi de dommages-intérêts pour non-respect de son devoir de mise en garde envers l'emprunteur.

Saisi par la CRCAMR suivant conclusions du 29 octobre 2020, le juge de la mise en état désigné pour instruire l'affaire a notamment:
- déclaré irrecevable car prescrite l'action de M. [I] en responsabilité pour manquement au devoir de mise en garde de la banque ;
- rejeté toutes autres demandes;
- condamné M. [I] à payer à la CRCAMR la somme de 800 euros en application de l'article 700 du CPC.

Par déclaration du 28 juin 2021, M. [I] a formé appel de l'ordonnance.

Il sollicite de la cour de :
A titre liminaire,
- juger qu'il est recevable en ce qu'il a interjeté appel d'une ordonnance statuant sur une fin de non-recevoir tenant à la contestation d'une prescription ;
A défaut,
- ordonner le sursis à statuer de la présente procédure ;
- juger qu'il n'est pas prescrit dans son action relative au manquement de la CRCAMR à son devoir de mise en garde ;
Sur le fond, infirmer l'ordonnance querellée ;
- juger qu'il n'est pas prescrit dans sa demande de dommages-intérêts en raison du non-respect par la CRCARM de son devoir de mise en garde ;
Par conséquent,
- Prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la CRCAMR ;
- condamner la CRCARM à lui payer des dommages-intérêts, pour octroi fautif du prêt, lesquels seraient à tout le moins égaux au montant réclamé par la Banque, soit la somme de 200.190,43 € (arrêté au jugement d'orientation au 26 septembre 2019) ;
En tout état de cause,
- débouter la CRCAMR de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la CRCAMR au paiement de la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure.

La CRCAMR demande:
A titre principal,
- juger que la décision déférée n'appartient pas à la catégorie des ordonnances susceptibles d'appel indépendamment du jugement sur le fond;
- déclarer irrecevable l'appel formé par M. [I] contre l'ordonnance du juge de la mise en état du 1er juin 2021 ;
A titre subsidiaire,
- juger qu'en l'espèce, le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle de la Banque pour manquement à son obligation de mise en garde est la date de conclusion du contrat ;
- juger acquise la prescription de l'action en responsabilité contractuelle de la Banque pour manquement à son obligation de mise en garde ;
- déclarer non fondé l'appel formé par M. [I] ;
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 1er juin 2021;
A titre très subsidiaire,
- juger que M. [I] ne démontre pas un risque d'endettement au regard de sa situation patrimoniale et financière ;
- juger que M. [I] ne démontre pas sa qualité d'emprunteur non averti;
- juger que M. [I] ne rapporte pas la preuve de ce qu'il l'aurait informée des autres prêts contractés auprès de GE CAPITAL BANK et de la CASDEN;
- juger en conséquence, que M. [I] ne peut invoquer un devoir de mise en garde pesant sur elle;
- juger que sa responsabilité ne saurait être engagée :
En tout état de cause
- débouter M. [I] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions;
- condamner M. [I] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les dernières conclusions de M. [I] du 13 mars 2022 et celles de la CRCARM du 12 avril 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties;

Vu la clôture des débats intervenue à l'audience du 19 avril 2022 ;

Vu l'article 789-6o du code de procédure civile ;

Sur la recevabilité de l'appel

L'article 795 2o du code de procédure civile prévoit que, par exception au principe suivant lequel les ordonnances du juge de la mise en état sont insusceptibles d'appel indépendamment de la décision au fond, la voie de l'appel est ouverte lorsque l'ordonnance statuent sur une fin de non-recevoir.

La prescription étant une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, la banque n'est pas fondée à soutenir que l'appel M. [I] ayant déclaré son action irrecevable comme prescrite ne peut être reçue.

Sur la prescription de l'action de M. [I] pour défaut de mise en garde de la banque

L'article 2224 du code civil prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits permettant de l'exercer.

La CRCAMR énonce que le préjudice dont se prévaut M. [I] étant une perte de chance de ne pas avoir contracté le prêt litigieux faute pour elle de l'avoir mis en garde sur son endettement, celui-ci s'est manifesté dès l'octroi du prêt en 2007 et que l'action est donc prescrite. Elle ajoute que M. [I] ne peut être regardé comme un emprunteur profane dès lors qu'il avait déjà souscrit divers prêts par ailleurs et qu'il n'apporte pas la preuve d'être non averti.

M. [I] soutient quant à lui que la prescription a commencé à courir lors de la réalisation du dommage lié à la perte de chance de ne pas avoir contracté faute d'information de la banque sur le risque d'endettement, et donc, au jour du premier incident de paiement, en octobre 2017, et que son action n'est donc pas prescrite. Il ajoute que, n'étant pas emprunteur averti, il n'avait pas les compétences pour apprécier le risque lié au crédit proposé.

Sur ce,

Il est rappelé que la preuve de la prescription incombe à celui qui s'en prévaut.

En l'espèce, l'action de M. [I] est fondée sur la faute qu'aurait commise la banque dans son manquement à son devoir de conseil face au risque d'endettement. Il dénonce ainsi un préjudice lié à la perte de chance de ne pas avoir souscrit l'emprunt.

Le seul fait que M. [I] ait par le passé souscrit trois autres crédits auprès de banque différents n'est pas en soi suffisant à établi le caractère d'emprunteur averti de M. [I] au moment de la souscription du prêt.

Sa connaissance de l'existence du manquement invoqué et de ses conséquences éventuelles n'ont donc pu être appréhendées par M. [I] qu'au jour du premier incident de paiement non régularisé, dont il est constant qu'il est intervenu en octobre 2017.

Lorsque l'action de M. [I] a été introduite le 4 mars 2020, le délai de prescription de cinq ans à compter de cette date n'était pas échu.

Aussi, sans présumer du bienfondé de l'action qu'il n'appartient pas à la cour de connaitre comme juge d'appel de la décision du juge de la mise en état, il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise et d'écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de M. [I].

Sur les dépens et les frais irréptibles

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile;

La CRCAMR, qui succombe, supportera les dépens de l'appel. En revanche, dès lors qu'il a partiellement été fait droit à sa demande devant le juge de la mise en état sur les points non frappés d'appel, il n'y a pas lieu d'infirmer la condamnation prononcée au titre des dépens à l'encontre de M. [I].

Pour ce même motif, la CRCAMR devra verser la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles de l'appel et la décision de première instance sur ce point sera confirmée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

- Écarte la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel;

- Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré l'action de M. [I] irrecevable comme prescrite;

Statuant à nouveau,

- Confirme l'ordonnance pour le surplus, dans les limites de la dévolution opérée par l'appel;

Y ajoutant,

- Condamne la CMCAMR à verser à M. [I] la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles de l'appel;

- Condamne la CMCAMR aux dépens de l'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 21/011461
Date de la décision : 28/06/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-06-28;21.011461 ?
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