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28/06/2022 | FRANCE | N°21/001261

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 28 juin 2022, 21/001261


Arrêt No
PC

R.G : No RG 21/00126 - No Portalis DBWB-V-B7F-FPYU

S.A. SOFIDER

C/

[F]

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une ordonnance rendue par le JUGE DE L'EXECUTION DE SAINT PIERRE en date du 18 DECEMBRE 2020 suivant déclaration d'appel en date du 29 JANVIER 2021 rg no: 19/00044

APPELANTE :

S.A. SOFIDER
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Laurent LABONNE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Madame [B] [E] [F]
[Adresse

3]
[Localité 4]
Représentant : Me Sylvie CHEUNG AH SEUNG de la SELARL ACTIO DEFENDI, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

DÉBAT...

Arrêt No
PC

R.G : No RG 21/00126 - No Portalis DBWB-V-B7F-FPYU

S.A. SOFIDER

C/

[F]

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une ordonnance rendue par le JUGE DE L'EXECUTION DE SAINT PIERRE en date du 18 DECEMBRE 2020 suivant déclaration d'appel en date du 29 JANVIER 2021 rg no: 19/00044

APPELANTE :

S.A. SOFIDER
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Laurent LABONNE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Madame [B] [E] [F]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Sylvie CHEUNG AH SEUNG de la SELARL ACTIO DEFENDI, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 779 et 917 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Avril 2022 devant la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseiller
Conseiller : Madame Isabelle OPSAHL, Vice-présidente placée

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 28 Juin 2022.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 28 Juin 2022.

Greffier : Mme Véronique FONTAINE

EXPOSE DE LA PROCEDURE

Par acte authentique dressé le 22 juin 2001, la SOCIETE FINANCIERE POUR LE DEVELOPPEMENT DE LA REUNION (SOFIDER) a consenti à Madame [B] [E] [F], épouse [G], un PRET A L'ACCESSION SOCIALE (PAS) No 97205040 d'un montant de 47.259,20 euros au taux de 7,35 % l'an (TEG : 8,152 %) remboursable en 204 échéances mensuelles, et un PRET A TAUX ZERO (PTZ) No 97205041, d'un montant de 18.293,88 euros, remboursable en 252 mois, dont une période de différé d'amortissement de 204 mois, la fraction du prêt différé étant remboursable en 48 échéances mensuelles. Ces prêts étaient garantis par une inscription de privilège de prêteur de deniers et d'hypothèque conventionnelle publiée à la Conservation des Hypothèques de [Localité 5] (LA REUNION) le 10 août 2001 volume 2001 V no 1533 à 1535. Alléguant le non-paiement d'échéances des prêts, la SOFIDER a adressé à Madame [F], le 08 juin 2018, une lettre de mise en demeure avec AR, avant déchéance du terme. La SOFIDER a avisé Madame [F] de la déchéance du terme par LRAR du 12 octobre 2018.

La SOFIDER a fait délivrer à Madame [F] un commandement de payer valant saisie immobilière par acte d'huissier délivré le 5 mars 2019, publié au Service de la Publicité Foncière de [Localité 5]) le 30 avril 2019 sous les références 2019 S no 25, pour obtenir paiement de la somme de 40.611,01 euros, arrêtée au 4 décembre 2018 au titre des deux prêts.

Puis, par acte d'huissier en date du 25 juin 2020, la SOFIDER a fait assigner Mme [F] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Saint-Pierre, à l'audience d'orientation du 6 septembre 2020 aux fins de voir ordonner la vente forcée du bien situé à [Localité 6], [Adresse 3], cadastré sections HE [Cadastre 1].

Par jugement en date du 18 décembre 2020, le juge de l'exécution a débouté la SOFIDER de toutes ses demandes, l'a condamnée à payer à Mme [B] [E] [Y] [F] la somme de 1.200 euros au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.

La SOFIDER a interjeté appel de la décision par déclaration déposée au greffe de la cour le 29 janvier 2021.

Par acte d'huissier délivré le 19 février 2021, selon autorisation du premier président en date du 8 février 2021, délivrée sur requête de la SOFIDER, l'appelante a fait assigner Madame [B] [F] à l'audience de la cour d'appel du 20 avril 2021. L'affaire a été renvoyée à l'audience du 18 mai 2021, pour y être plaidée.

Aux termes de l'assignation à jour fixe, déposée par RPVA le 19 avril 2021, la SOFIDER demande à la cour de :
DECLARER l'appel de LA SOFIDER recevable et fondé.
INFIRMER dans toutes ses dispositions le jugement d'orientation rendu le 18 décembre 2020 par le Juge de l'exécution de Saint Pierre ;
En rejugeant,
Dire et juger valable la procédure de saisie immobilière initiée,
Fixer le montant de la créance de la SOFIDER à la somme de 20.964,97 € au titre du PRET A L'ACCESSION SOCIALE (PAS) avec intérêts de retard au taux de 7,450% du 04/12/18 au jour du parfait paiement (MEMOIRE), et à la somme de 19.646,04 € au titre du PRET A TAUX ZERO (PTZ) avec intérêts de retard au taux de 7,200% du 04/12/18 au jour du parfait paiement (MEMOIRE).
Fixer la date de l'audience à laquelle aura lieu la vente forcée de l'immeuble.
Déterminer les modalités de la vente laquelle aura lieu sur la mise à prix de 42.000 € (QUARANTE DEUX MILLE EUROS).
Fixer les modalités de visite de l'immeuble saisi, dans le cas où la vente forcée de celui-ci serait ordonnée, en autorisant l'intervention de la SCP SELIER - PUEYO, Huissiers de Justice à [Localité 5], ou de tout autre huissier de justice qu'il plaira à la juridiction de céans de nommer, lequel pourra, si besoin est, se faire assister de tous ceux dont l'intervention lui sera nécessaire pour remplir sa mission,
Condamner Madame [F] à payer à la SOFIDER la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article
(700 du code de procédure civile),
Dire que les dépens seront passés en frais privilégiés de vente.

L'appelante expose que le premier juge a rejeté ses demandes en raison du manque d'explication de la banque sur le montant de sa créance car elle ne l'expliquait pas suffisamment. Elle rectifie donc devant la Cour ses décomptes. De la même façon le jugement querellé retient que les montants perçus directement par la Caisse d'Allocations Familiales ne correspondent pas pour l'année 2006 et 2007 au décompte par elle produit. La SOFIDER précise qu'elle rectifie son décompte en cause d'appel.

Selon la concluante, sa créance est parfaitement fondée, liquide et exigible alors que Madame [F] ne conteste pas la créance, pas plus qu'elle ne propose des modalités de règlement amiable ni ne sollicite une vente amiable du bien saisi.

***

Par arrêt avant dire droit prononcé le 26 octobre 2021, réservant toutes les demandes, la cour a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à :
Produire l'historique du prêt PAS No 97205040, afin de vérifier depuis quelle date Madame [F] s'est abstenue de payer les échéances de ce prêt ;
Produire les éléments permettant de vérifier à quelle date est devenue exigible la première échéance du prêt PTZ No 205041 ;
Présenter leurs éventuelles observations sur les effets de la prescription prévue par l'ancien article L. 137-1 du code de la consommation ou de la forclusion prévue par l'ancien article L. 311-37 du même code et leur applicabilité aux prêts immobiliers notariés ;
Présenter leurs éventuelles observations sur l'exigibilité des échéances du prêt à taux zéro à partir du mois de juillet 2018.

L'affaire a été examinée de nouveau à l'audience du 19 avril 2022.

***
La société SOFIDER n'a pas déposé de nouvelles conclusions ni de nouvelles pièces entre le 26 octobre 2021, date de l'arrêt avant dire droit et l'audience du 19 avril 2022.

***
Par conclusions No 2, suite à la réouverture des débats, en date du 11 février 2022, Madame [B] [F] demande à la cour de :
FIXER le point de départ du délai du délai biennal pour agir au titre des prêts PAS no 97205040 et PTZ no 205041 au 14 janvier 2009, déchéance du terme.
PRONONCER la forclusion de l'action de la SOFIDER au titre des deux prêts PAS no 97205040 et PTZ no 205041.
A défaut,
CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 décembre 2020 par le Juge de l'exécution statuant en matière immobilière.
DEBOUTER la SOFIDER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusion.
CONDAMNER la SOFIDER à payer à Madame [F] [B] [E] une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER la SOFIDER aux entiers dépens.

Madame [F] expose que de nombreux tableaux d'amortissements et avenants ont été édités et ont rendu la situation bancaire difficilement compréhensible pour un consommateur non professionnel.
En ce qui concerne le montant réclamé au titre des impayés du PAS, il apparait que la SOFIDER ne l'a pas actualisé alors que plusieurs échéances, honorées au moyen de dépôt d'espèces par Mme [B]-[E] [F], n'ont pas été comptabilisées pour la somme de 2.595 euros qu'il conviendrait de faire apparaitre dans le décompte final. Les montants mensuels payés par la Caisse d'Allocations familiales (CAF) pour le remboursement du PAS, n'ont pas été comptabilisés non plus. La SOFIDER a reconnu son erreur, mais n'a pas régularisé la situation.

Dès lors, ayant pris conscience des anomalies de son dossier, les rendez-vous à la SOFIDER se sont succédés afin de mieux comprendre les contradictions figurant sur les divers documents. Enfin, son dossier a été transféré au service contentieux alors que tous les incidents de paiements avaient été régularisés en 2008 et notifiés sur le document du 15/03/2010.
L'intimée plaide que le manque de transparence et les incohérences du suivi et des opérations bancaires remettent en cause le montant de la créance et son exigibilité.

Ainsi, la SOFIDER réclame un montant arrêté au 01/07/2018 de 20 964.97€ alors qu'après déduction des éléments précédents le solde devrait être de 1.364.84 €.

Enfin, le montant du Prêt à taux zéro, de 18.293,88 €, qui prévoyait un différé d'amortissement de 204 mois, n'a jamais été débloqué. Or, la banque réclame une somme de 19.480.40 €, alors qu`il n'était remboursable qu`à partir du mois d'août 2018. Le premier juge n'a pas manqué de relever que ce Prêt à taux zéro prévoyait un différé de remboursement de 17 ans, la première échéance devant intervenir en août 2018. Or dès le 8 juin 2018 la SOFIDER adressait une mise en demeure de payer une somme de 18.263,41 euros correspondant à la quasi-totalité du montant du capital emprunté tandis que le capital restant dû s'élevait au 1er août à la somme de 17.912,76 euros. La banque ne s'est pas expliquée sur ce point, ni en première instance, ni au soutien de son appel.

L'intimée considère que l'absence de communication des documents réclamés, le silence de la banque sur les demandes de renseignements répétées, la multiplication des tableaux d'échéanciers sans motif particulier, l'erreur de décompte admise par la banque, rectifiée en cause d'appel, permettent de douter sérieusement du caractère certain de la créance.

Selon l'intimée, il résulte des pièces de Madame [F], qu'une déchéance du terme avait été prononcée le 14 janvier 2009 pour le prêt PAS no 97205040. Cette déchéance du terme prononcée par la SOFIDER explique l'arrêt des prélèvements et de l'assurance en 2009, qui ont interpellé Mme [F] et l'ont conduit à tenter de rencontrer un responsable de l'établissement financier, en vain.
Madame [F] s'estime fondée à se prévaloir de la forclusion sur le fondement de l'article L 311-37 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi no 2010-737 du 1er juillet 2010 et applicable lors de la conclusion du contrat.
Par la suite, les échéances ont été partiellement couvertes par l'aide personnalisée au logement. Mais la liste des échéances principales de prélèvement du 9 janvier 2018, fait apparaître encore des impayés de 2005 à 2007 ayant donné lieu à la déchéance du terme.

A défaut de rééchelonnement ou nouveau tableau d'amortissement établi par la SOFIDER postérieurement à la déchéance du terme, le délai biennal pour engager une action au titre du prêt courait à compter de la déchéance du terme prononcée le 14 janvier 2009. La SOFIDER ayant fait délivrer le commandement de payer en date du 5 mars 2019, elle n'a pas agi dans le délai de 2 ans à compter de l'incident de paiement, caractérisé par la déchéance du terme prononcée le 14 janvier 2009.

En ce qui concerne le second prêt, l'intimée soutient que, dans l'hypothèse d'une forclusion prononcée pour le défaut d'action de la SOFIDER dans le délai de deux ans à compter de la déchéance du terme prononcée le 14 janvier 2009 au titre du non-paiement des échéances du PAS no 97205040, la forclusion vaut pour les poursuites au titre du PTZ no 205041. En tout état de cause, la SOFIDER n'apporte pas la preuve du déblocage des fonds de sorte que les sommes réclamées ne sont pas exigibles.

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon les prescriptions des articles 6 et 9 du code de procédure civile, il incombe aux parties de prouver les faits qu'ils allèguent.

Aux termes de l'article 1315 ancien du Code civil, devenu 1353, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Le commandement de payer litigieux, délivré le 5 mars 2019, mentionne que les sommes réclamées sont les suivantes :
PRET A L'ACCESSION SOCIALE (PAS) No 97205040 :
- échéances impayées au 01/07/2018 : 19 480,40 €
- intérêts de retard au taux de 7,450% du 02/07/18 au 04/12/1 8 :120,94€ - indemnité contractuelle de résiliation au taux de 7% : 1 363,63 €
- intérêts de retard au taux de 7,450% à partir du 04/12/18 : MEMOIRE
TOTAL outre mémoire : 20 964 ,97 €

PRET A TAUX ZERO (PTZ) No 97205041 :
- 3 échéances impayées (392,65 € x 3) du 01/08/18 au 01/10/18: 1 177,95€
- intérêts de retard au taux de 7,200% du 01/08/18 au 12/10/18: 14,14 €
- capital restant dû : 17 150,52 €
- intérêts de retard au taux de 7,200% du 01/08/18 au 04/12/18: 102,90€ - indemnité contractuelle de résiliation au taux de 7%: 1 200,54 €
- intérêts de retard au taux de 7,200% depuis le 04/12/18 : MEMOIRE
TOTAL outre mémoire : 19 646,04 €

Il résulte de la lecture de la mise en demeure avant déchéance du terme adressée le 8 juin 2018 à Madame [F] que la SOFIDER a regroupé les deux prêts pour présenter son décompte.

Ainsi, elle indiquait que l'emprunteur restait devoir la somme de 19.066,14 euros au titre des « impayés » pour le prêt No 97205040 et un capital restant dû de 414,26 euros, tandis que le capital restant dû au titre du prêt No 97205041 s'élevait à la somme de 18.263,41 euros.

Dans la lettre de mise en demeure en date du 12 octobre 2018, dans laquelle la SOFIDER prononce la déchéance du terme, la banque confirme que le prêt No 97205040 s'élevait à la somme de 47.259,20 euros tandis que le prêt No 97205041, à taux zéro (PTZ) s'élevait à la somme de 18.293,88 euros.

La mise en demeure et la lettre dans laquelle se prévaut de la déchéance du terme la SOFIDER établissent le caractère exigible du solde des prêts en vertu d'un titre exécutoire constitué par l'acte authentique dressé le 22 juin 2001.

La cour observe que, malgré la réouverture des débats, la société SOFIDER, sur qui pèse la charge de la preuve que son action est toujours recevable, n'a pas produit l'historique des prêts litigieux.

Celle-ci considère d'ailleurs, dans ses écritures, que le premier juge a rejeté ses demandes en raison du manque d'explication de la banque sur le montant de sa créance. Pourtant, malgré la durée de l'instance, elle n'est pas parvenue à mieux expliquer ses décomptes.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion ou de la prescription de l'action de la société SOFIDER :

Madame [F] sollicite le prononcé de la forclusion de l'action de la société SOFIDER dans le dispositif de ses conclusions tout en visant les dispositions de l'ancien article L. 311-37 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, dans ses motifs.

L'article R. 312-35 du code de la consommation n'est en effet pas applicable à la cause puisque la société SOFIDER dispose déjà d'un titre exécutoire, constitué par les actes authentiques de prêt. Elle n'agit pas non plus en paiement mais en exécution forcée de ses titres exécutoires, ce qui exclut l'application des textes nouveaux ou anciens relatifs à la forclusion d'une action en paiement.

Aux termes de l'article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.
Le point de départ du délai biennal de prescription se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer l'action concernée.

Sur le prêt PAS No 97205040 :

Le prêt (PAS) No 205040 a été consenti à Madame [F], selon acte authentique dressé le 22 juin 2001, selon offre de prêt reçue le 21 avril 2001, acceptée le 3 mai 2001.

Une offre d'avenant au prêt initial a été présentée à Madame [F], en régularisation, le 5 novembre 2001 alors que Madame [F] avait déjà signé cette offre le 29 octobre 2001, proposée par la SOFIDER afin de se mettre en conformité avec la réglementation du FGAS, réduisant le taux du crédit à 7,35 % à compter du 1er novembre 2001 alors que le contrat initial stipulait un taux effectif global de 8,084 %, hors frais de notaire et taxes, taux trop élevé selon un avis d'anomalie adressé à la SOFIDER le 25 octobre 2001.

Puis, un nouvel avenant a été proposé et accepté par Madame [F] le 10 février 2002, réduisant de nouveau le taux d'intérêt contractuel à 7,10 % l'an et le taux effectif global à 7,41 %.

Le nouveau tableau d'amortissement, daté du 29 janvier 2002, a été joint en tenant compte de la rectification du taux d'intérêt.

La SOFIDER n'a joint à la lettre de déchéance du terme que le décompte des sommes dues pour le prêt (PAS) No 97205040 en mentionnant que restait due la somme de 19.480,40 euros au titre des échéances impayées au 1er juillet 2018 alors qu'elle avait souligné dans la mise en demeure du 8 juin 2018 que le dernier virement dans ses livres datait du 10 août 2017.

Compte tenu du montant des échéances stipulées à l'acte de prêt PAS, d'un montant de 414,26 euros, la somme due au titre des échéances impayées, de 19.480,40 euros, correspondrait à 47 échéances impayées, ce qui est manifestement contradictoire avec un dernier versement réalisé en août 2017, un an avant le calcul du décompte de la déchéance du terme.

Dans son assignation, la SOFIDER précise son décompte des sommes restant dues au titre du prêt PAS en retenant la somme de 19.480,40 euros au titre des échéances impayées sans retenir de capital restant dû, corroborant ainsi l'absence de paiement des échéances par Madame [F] au cours des quatre années antérieures.

Madame [F] produit d'ailleurs un décompte détaillé des sommes dues au 1er avril 2015 ( pièce No 18), rédigé par le service contentieux de la SOFIDER qui mentionne que la déchéance du terme est intervenue le 13 janvier 2009 pour ce prêt No 97205040, le solde restant alors dû s'élevant à la somme de 14.812,78 euros en principal, outre la somme de 1.007,00 euros en accessoires.

Ainsi, en faisant délivrer le 5 mars 2019 à Madame [F] un commandement de payer valant saisie immobilière, l'action en paiement de la société SOFIDER était déjà prescrite.

Il convient donc de juger irrecevable les demandes de la société SOFIDER à l'encontre de Madame [B] [F] au titre du prêt (PAS) No 97205040.

Le jugement ayant débouté la SOFIDER de ses demandes, au fond, doit néanmoins être réformé puisque la cour retient la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement de la banque.

Sur le prêt à taux zéro (PTZ) No 97205041 :

L'acte authentique de prêt stipule clairement le cas d'exigibilité anticipée des sommes restant dues en cas de non-paiement des sommes remboursables par l'emprunteur.

L'appelante a versé aux débats son décompte par bordereau de communication de pièces le 17 mai 2021.

Le décompte des sommes restant dues au titre du prêt à taux zéro mentionne les sommes suivantes :
-Echéances impayées du 1er août 2018 au 1er octobre 2018 :1.177,95 € -Intérêts de retard au taux de 7,2 % du 1er août 2018 au 12 octobre 2018 :14,14 €
-Capital restant dû au 2 octobre 2018 :17.150,52 € -Intérêts de retard au taux de 7,2 %du 1er août 2018 au 4 décembre 2018 : 102,90 €
-Indemnité contractuelle de résiliation de 7 % : 1.200,54 €
Intérêts de retard : MEMOIRE
TOTAL sauf mémoire : 19.646,04 €

Madame [F] affirme d'une part que les fonds de ce prêt n'ont jamais été débloqués et qu'elle bénéficiait d'un différé d'amortissement de 17 ans selon les stipulations du prêt PTZ No 97205041.

Il résulte de l'offre préalable du prêt qu'il s'agit d'un « prêt immobilier long terme à 0 % » du ministère de l'Outre-mer (article 2) souscrit pour l'acquisition d'un terrain et la construction d'une villa, d'un montant de 120.000 francs. Ce prêt est lié au prêt PAS dans le cadre d'un investissement global de 583.851,00 francs (article 4), intégrant un apport personnel de 103.851 francs et une subvention de la Caisse d'allocations familiales de 50.000 francs. Deux conditions suspensives étaient prévues : l'obtention du permis de construire et l'obtention de la subvention de la CAF.

Le tableau d'amortissement, édité le 19 avril 2001, et le tableau résumant les caractéristiques du prêt établissent qu'il était convenu un différé d'amortissement de 204 mois, soit 17 années, puis un remboursement du capital pendant les 48 mois suivants, le tout avec un taux effectif global de 0,534 %, les cotisations d'assurance devant être réglées mensuellement depuis la délivrance des fonds ainsi prêtés, à hauteur de 75,64 francs.

Enfin, le contrat précise que la durée du prêt et le tableau d'amortissement sont produits à titre indicatif car il est nécessaire de connaître la date de déblocage des fonds qui dépend de l'évolution des opérations de construction de l'immeuble (article 7).

Ainsi, la première échéance due par Madame [F] au titre du prêt PTZ No 205041 devait être payée au plus tôt au mois de mai 2018.

La lecture du décompte des sommes dues au titre de ce prêt indique que des échéances auraient été dues à partir du 1er août 2018.

Madame [F] conteste le fait que des fonds auraient été débloqués tandis que la société SOFIDER n'a pas produit les éléments permettant de vérifier à quelle date est devenue exigible la première échéance due après le différé d'amortissement de 17 années stipulée au contrat PTZ 205041, sous réserve du déblocage effectif des fonds.

Ainsi, l'appelante échoue une nouvelle fois à démontrer le caractère exigible de sa créance au titre du prêt à taux zéro No 97205041.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté la société SOFIDER de ses demandes au titre de ce prêt à taux zéro.

Sur les autres demandes :

La cour observe que le jugement attaqué a omis d'ordonner la mainlevée de l'inscription du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 5 mars 2019, publié au Service de la Publicité Foncière de [Localité 5]) le 30 avril 2019 sous les références 2019 S no 25. Cette omission sera donc rectifiée dans le dispositif de l'arrêt.

La société SOFIDER supportera les dépens ainsi que les frais irrépétibles de Madame [F] en appel, en plus de ceux déjà alloués en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société SOFIDER de ses demandes relatives au prêt PAS No 97205040 ;

Statuant à nouveau de ce chef,

DECLARE IRRECEVABLE comme prescrite l'action de la société SOFIDER au titre du prêt (PAS) No 97205040 ;

Ajoutant au jugement querellé,

ORDONNE la mainlevée de l'inscription du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 5 mars 2019, publié au Service de la Publicité Foncière de [Localité 5]) le 30 avril 2019 sous les références 2019 S no 25 ;

CONDAMNE la société SOFIDER à payer à Madame [B] [F] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société SOFIDER aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 21/001261
Date de la décision : 28/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-06-28;21.001261 ?
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