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24/06/2022 | FRANCE | N°20/020761

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 24 juin 2022, 20/020761


ARRÊT No
MD

No RG 20/02076 - No Portalis DBWB-V-B7E-FOMT

LE PROCUREUR GENERAL DE SAINT-DENIS

C/

[S]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 24 JUIN 2022

Chambre civile

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 10 OCTOBRE 2020 suivant déclaration d'appel en date du 19 NOVEMBRE 2020 RG no 19/00089

APPELANTE :

Madame LE PROCUREUR GENERAL DE SAINT-DENIS
[Adresse 3]
[Localité 4]

INTIMÉ :

Monsieur [G] [S]
[Adresse 2]
[Adresse 5]


[Localité 4]
Représentant : Me Mihidoiri ALI de la SELARL ALI-MAGAMOOTOO-YEN PON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie...

ARRÊT No
MD

No RG 20/02076 - No Portalis DBWB-V-B7E-FOMT

LE PROCUREUR GENERAL DE SAINT-DENIS

C/

[S]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 24 JUIN 2022

Chambre civile

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 10 OCTOBRE 2020 suivant déclaration d'appel en date du 19 NOVEMBRE 2020 RG no 19/00089

APPELANTE :

Madame LE PROCUREUR GENERAL DE SAINT-DENIS
[Adresse 3]
[Localité 4]

INTIMÉ :

Monsieur [G] [S]
[Adresse 2]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentant : Me Mihidoiri ALI de la SELARL ALI-MAGAMOOTOO-YEN PON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/4021 du 12/07/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

DATE DE CLÔTURE :

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Avril 2022 devant Monsieur DELAGE Martin, Président de chambre à la Chambre d'Appel de Mamoudzou, délégué à la Cour d'Appel de Saint Denis de la Réunion par ordonnance de Monsieur Le Premier Président , qui en a fait un rapport, assisté de Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président :Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre à la Chambre d'Appel de Mamoudzou, délégué à la Cour d'Appel de Saint Denis de la Réunion par ordonnance de Monsieur Le Premier Président
Conseiller :Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre à la Chambre d'Appel de Mamoudzou, délégué à la Cour d'Appel de Saint Denis de la Réunion par ordonnance de Monsieur Le Premier Président
Conseiller :Madame Nathalie COURTOIS, Présidente de chambre à la Chambre d'Appel de Mamoudzou, déléguée à la Cour d'Appel de Saint Denis de la Réunion par ordonnance de Monsieur Le Premier Président
Qui en ont délibéré

Greffier : Mme Nathalie TORSIELLO

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 24 Juin 2022.

* * *

LA COUR :

EXPOSE DU LITIGE

1. Monsieur [G] [S] est né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 7] (Comores). Son acte de naissance a été détruit en 1977 et reconstitué par jugement supplétif de naissance rendu le 29 novembre 1980 à la requête de sa mère, Madame [T] [J] née vers 1937 à [Localité 6] (Comores), de nationalité française.

2. La mère de Monsieur [G] [S], Madame [J], a conservé la nationalité française par déclaration souscrite le 11 juillet 1977 devant le Tribunal d'instance de Mamoudzou (Mayotte).

3. S'estimant français par filiation maternelle, Monsieur [G] [S] a sollicité la délivrance d'un certificat de nationalité, lequel a été rejeté le 22 juin 2010 aux motifs suivants :

- La filiation de Monsieur [G] [S] à l'égard de sa mère a été établie par jugement supplétif no1627 du 31 décembre 1980 rendu par le cadi de [Localité 7] (Comores) soit postérieurement à la déclaration de réintégration dans la nationalité française souscrite par sa mère le 11 juillet 1977 devant le TI de Mamoudzou (Mayotte), dossier no1977 DX 013988. Il ne peut bénéficier en conséquence de l'effet collectif attaché à cette déclaration.

- La mère de Monsieur [G] [S] n'a mentionné aucun enfant dans son dossier de déclaration.

4. Le 24 août 2010, le Ministre de la Justice a opposé une décision de rejet au recours gracieux qu'il avait exercé à l'encontre de cette décision.

5. Par assignation délivrée le 29 novembre 2018, Monsieur [S] a saisi le tribunal judiciaire de Saint Denis (Réunion) pour faire constater qu'il a la qualité de français.

6. Par jugement du 10 octobre 2020, le Tribunal a fait droit à sa demande en jugeant qu'il est français.

7. Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour en date du 19 novembre 2020, Monsieur le Procureur Général a interjeté appel de ce jugement.

******

Vu les conclusions prises pour le PROCUREUR GENERAL, déposées et notifiées par RPVA le 8 octobre 2021,

Vu les conclusions d'intimé No1 prises pour Monsieur [G] [S], déposées et notifiées par RPVA le 2 août 2021,

******

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la recevabilité:

8. A titre liminaire, il convient de noter que la formalité prescrite par l'article 1043 du code de procédure civile a été accomplie par le Ministère public. Le récépissé y afférent est délivré le 1er décembre 2020. L'action du Ministère public est donc recevable.
Sur le fond:

9. Le tribunal a considéré que la désignation de la mère dans le jugement supplétif rendu le 29 novembre 1980 valait établissement de la filiation au jour de la naissance de l'intéressé et ainsi déduit que [G] [S] pouvait bénéficier de l'effet collectif attaché à la déclaration souscrite par sa mère, [T] [J].

10. Le Ministère public considère que [G] [S] échouerait à faire la preuve de sa nationalité française, sa filiation n'ayant été établie a l'égard de [T] [J], que le 24 novembre 1980, soit après qu'elle se soit vu reconnaître la nationalité française par déclaration souscrite le 11/07/1977 devant le juge d'instance de Mamoudzou en application des dispositions de l'article 10 de la Loi no 75 560 du 03/07/1975 et de l'article 9 de la Loino131337 du 31/12/1975.

11. Il incombe en effet à Monsieur [S] de justifier d'un état civil fiable et d'une filiation établie à l'égard de sa mère française pour pouvoir bénéficier de la nationalité française sur le fondement de l'effet collectif attaché à la déclaration précitée.

12. L'état civil de Monsieur [S] est justifié par les pièces suivantes :

- une copie certifiée conforme délivrée le 30 octobre 2019 et légalisée par le Consul des Comores à la Réunion le 14 novembre 2019 de l'acte de naissance no1643 dressé le 31 décembre 1980 au centre d'état civil de [Localité 7] (Comores) aux termes duquel : « Le [Date naissance 1] 1968 est né [G] [S] à [Localité 7], du sexe masculin, fils de [S] [C] né vers mil neuf cent vingt-sept à [Localité 7], maçon, demeurant à [Localité 7] et [T] [J] née vers 1937 à [Localité 7], ménagère, demeurant à [Localité 7] » (pièce no2 de l'intimé).

Cet acte a été établi sur la base du jugement supplétif de reconstitution rendu le 29 novembre 1980 par le Tribunal de Cadi de [Localité 7] (Comores).

- une expédition conforme à l'original de ce jugement délivrée le 30 octobre 2019 et régulièrement légalisée par Monsieur [I] [H], Consul des Comores à La Réunion, le 14 novembre 2019 (Pièce no3 de l'intimé).

- un certificat d'authenticité et de conformité établi par le Substitut du Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Mutsamudu le 8 novembre 2019, légalisé par le Consul des Comores en France le 14 novembre 2019 (pièce no9 de l'intimé).
Aux termes de ce certificat le Procureur de la République de Mutsamudu (Comores) certifie que « l'acte de naissance no1643 – année 1980 de la Commune de [Localité 7] et le Jugement civil no1627/1980 rendu le 29 novembre 1980 par le Tribunal de Cadi de [Localité 7] sont réguliers et authentiques. Ils ont été rédigés conformément aux formes usitées aux Comores à l'époque, définies par la délibération no61-16 du 17 mai 1961 de l'assemblée territoriale des Comores. Aucun recours n'a été formulé contre le jugement supplétif de naissance ci-dessus référencé de l'intéressé. La commune de [Localité 7] est seule habilitée à recevoir la transcription de l'acte de naissance de l'intéressé. Le registre et les feuilles sont cotés et paraphés par le Procureur de la République. L'acte est mentionné dans la table alphabétique du registre et aucun rajout n'a été effectué postérieurement à la date à laquelle l'acte a été transcrit. »

13. La Cour considère que ces éléments permettent de considérer que l'état civil de Monsieur [S] est suffisamment établi conformément à l'article 47 du code civil.

14. Par suite, Monsieur [S] est né à [Localité 7] (Comores) le [Date naissance 1] 1968, alors que le territoire des Comores était encore sous la souveraineté française, l'indépendance n'ayant été acquise que depuis le 6 juillet 1975. Par déclaration souscrite en 1977, Madame [J], sa mère a conservé la nationalité française (pièce 5). Il est ainsi établi que Madame [J] était française au jour de la naissance de son fils, Monsieur [S].

15. Le jugement du tribunal de Cadi de Sima le 29 novembre 1980, s'il a bien été rendu après la date de la déclaration de nationalité souscrite par la mère de l'intimé, n'a fait que reconstituer l'acte de naissance de ce dernier. La motivation de cette décision démontre que Monsieur [S] [G] disposait auparavant d'un ancien acte de naissance « no1679 – année 1968 ». Le Tribunal retient que «les registres sur lesquels a été inscrite la naissance du fils de [S] [C] et de [T] [J] ont été détruits en 1977 par le régime déchut ». (pièce 3 de l'intimé).

16. Il est ainsi établi que l'identité des père et mère de l'intimé figurait dans son acte de naissance, qui a été plus tard détérioré par les faits du régime révolutionnaire alors au pouvoir en 1977. Cette décision, reconstituant l'acte de naissance de l'intimé n'a fait que confirmer que lien de filiation déjà établi dans son acte de naissance originaire détruit dont une copie avait été produite devant le Tribunal de Cadi de [Localité 7], permettant ainsi à cette juridiction de prononcer la reconstitution de cet acte, au vu des « autres pièces versées au dossier, les témoignages corroborant et la conclusion favorable du Procureur de la république ».

17. Dès lors, la filiation de Monsieur [S] à l'égard de sa mère, Madame [T] [J], est parfaitement établie dès sa naissance et non depuis le 29 novembre 1980 comme l'a soutenu le ministère public.

18. Selon l'article 11 de la loi no 15-560 du 3 juillet 1975 relative à l'indépendance du territoire des Comores : « Les déclarations souscrites en application de l'article 10 produiront effet à l'égard des enfants mineurs de dix-huit ans du déclarant dans les conditions prévues à l'article 84 du code de la nationalité ».

19. Dans sa rédaction résultant de la loi no73-42 du 9 janvier 1973, applicable en l'espèce, cet article 84 prévoyait : « L'enfant mineur de dix-huit ans, légitime, naturel ou ayant fait l'objet d'une adoption plénière, dont l'un des deux parents acquiert la nationalité française, devient français de plein droit. »

20. Eu égard aux éléments qui précèdent, Monsieur [S], mineur au moment de la déclaration de nationalité souscrite par sa mère, Madame [T] [J], est français en vertu de l'effet collectif attaché à la déclaration souscrite par sa mère le 11 juillet 1977 devant le Juge d'instance de Mamoudzou et enregistrée le 15 septembre 1977.

21. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont reconnu la qualité de français de M. [S] [G]. La décision sera confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS:

La Cour d'appel de Saint Denis, statuant par décision contradictoire et en dernier ressort,

CONSTATE que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal judiciaire de Saint Denis le 10 octobre 2020.

ORDONNE les mentions prévues aux articles 28 et 28-1 du code civil ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LAISSE les dépens à la charge de l'Etat.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre, et par Mme Nathalie TORSIELLO, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT
Signe


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/020761
Date de la décision : 24/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, 10 octobre 2020


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-06-24;20.020761 ?
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