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13/05/2022 | FRANCE | N°20/013141

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 13 mai 2022, 20/013141


ARRÊT No22/
PC

No RG 20/01314 - No Portalis DBWB-V-B7E-FM3V

[L]

C/

[X]
S.C.P. LE GOFF OLIVIER / OMARJEE IMRANE

RG 1èRE INSTANCE : 19/00024

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 13 MAI 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 13] en date du 24 avril 2020 RG no: 19/00024 suivant déclaration d'appel en date du 04 août 2020

APPELANT :

Monsieur [P] [K] [L]
[Adresse 6]
[Localité 7]
Représentant : Me Georges-andré HOARAU de la SEL

ARL GEORGES-ANDRE HOARAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle num...

ARRÊT No22/
PC

No RG 20/01314 - No Portalis DBWB-V-B7E-FM3V

[L]

C/

[X]
S.C.P. LE GOFF OLIVIER / OMARJEE IMRANE

RG 1èRE INSTANCE : 19/00024

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 13 MAI 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 13] en date du 24 avril 2020 RG no: 19/00024 suivant déclaration d'appel en date du 04 août 2020

APPELANT :

Monsieur [P] [K] [L]
[Adresse 6]
[Localité 7]
Représentant : Me Georges-andré HOARAU de la SELARL GEORGES-ANDRE HOARAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/4368 du 21/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMES :

Monsieur [O] [X]
[Adresse 1]
[Localité 8]
non comparant non représenté

S.C.P. LE GOFF OLIVIER / OMARJEE IMRANE
[Adresse 5]
[Localité 13]
Représentant : Me Abdoul karim AMODE de la SELARL AMODE et ASSOCIES (SELARL), avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

CLÔTURE LE : 08 juillet 2021

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Février 2022 devant la Cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 08 avril 2022 puis prorogé au 13 Mai 2022.

Greffier : Madame Alexandra BOCQUILLON, ff.

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 13 Mai 2022.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 19 décembre 2016, instrumenté par la SCP notariale HOARAU/LE GOFF/ OMARJEE, Monsieur [O] [X] a vendu à Monsieur [P] [L] le terrain [Cadastre 12] sur lequel est édifié une maison de 110 m2 environ, situé [Adresse 4], au Tampon 97430.

Par acte en date du 28 décembre 2018, Monsieur [L] [P] a fait assigner Monsieur [X] [O] et la SCP de notaires HOARAU-LE GOFF-OMARJEE, pour obtenir l'annulation de la vente précitée.

Par jugement du 24 avril 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Pierre a statué en ces termes :
-déclare irrecevable la demande en annulation de la vente ;
-dit que la demande de caducité de la vente est mal fondée ;
-rejette les demandes relatives à la prétendue responsabilité contractuelle du vendeur et à la responsabilité délictuelle du notaire ;
-condamne Monsieur [L] [P] à payer à la SCP de notaire « HOARAU-LE GOFF-OMARJEE » la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamne Monsieur [L] [P] aux dépens.

Par déclaration du 4 août 2020, Monsieur [P] [K] [L] a interjeté appel du jugement précité.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état suivant ordonnance en date du 5 août 2020.

Monsieur [P] [K] [L] a déposé ses premières conclusions d'appelant par RPVA le 5 octobre 2020.

La SCP LE GOFF-OMARJEE et Associés a déposé ses conclusions d'intimés le 28 décembre 2020.

Monsieur [O] [X], régulièrement assigné et ayant reçu signification des conclusions des parties, n'a pas comparu.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 juillet 2021.

PRETENTIONS ET MOYENS

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 22 mai 2021, Monsieur [P] [K] [L] demande à la Cour de :
- Déclarer son appel recevable et ledit parfaitement fondé.
- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.
Y statuant à nouveau,
- Constater que M. [L] [P] [K] a satisfait à la publication foncière de l'acte introductif d'instance.
- Déclarer par conséquent son action recevable et ledit parfaitement fondée.
Sur le fond,
En principal,
- Constater l'existence de manoeuvres dolosives de M. [X] [O],
- Dire et juger que sans ces manoeuvres dolosives, M. [L] n'aurait jamais contracté la vente de l'immeuble,
- Prononcer en conséquence, la nullité du contrat de vente du 19 décembre 2016, établi par Maître [Y] [V], notaire au sein de la SCP « Jean Léo HOARAU, Olivier LEGOFF et Imrane OMARJEE, notaires associés à Saint-Pierre Réunion, publié le 2 janvier 2017 volume 2017 P no 189.
- Ordonner la publication de la décision à intervenir et aux services fonciers de [Localité 13] Réunion.
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement à restituer à Monsieur [L] [P] la somme de 115 900 € correspondant au prix de la vente sanctionnée de nullité.
- Condamner solidairement Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés » à verser à Monsieur [L] [P] la somme de 15 000 euros pour trouble de jouissance.
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement à verser à Monsieur [L] [P] la somme de 5000 euros au titre de son préjudice financier.
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement à verser à Monsieur [L] [P] la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice subi en raison du contrat de vente annulé.
A titre subsidiaire,
- Voir prononcer la résolution du contrat de vente du 19 décembre 2016, établi par Maître [Y] [V], notaire au sein de la SCP « Jean Léo HOARAU, Olivier LEGOFF et Imrane OMARJEE, notaires associés à Saint-Pierre Réunion, publié le 2 janvier 2017 volume 2017 P no 189, pour défaut de conformité.
- Ordonner la publication de la décision à intervenir auprès des services fonciers de [Localité 13].
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement à restituer à Monsieur [L] [P] la somme de 115 900 € correspondant au prix de la vente sanctionnée de nullité.
- Condamner solidairement Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés » à verser à Monsieur [L] [P] la somme de 15 000 euros pour trouble de jouissance.
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement à verser à Monsieur [L] [P] la somme de 5000 euros au titre de son préjudice financier.
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement à verser à Monsieur [L] [P] la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice subi.
En tous les cas,
- Condamner la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts.
- Condamner Monsieur [X] [O] et la Société Civile Professionnelle [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés », solidairement au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure Civile;
- Condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Monsieur [P] [L] fait valoir que son action est recevable puisqu'il apporte la preuve de la publication de l'assignation aux services fonciers de [Localité 13] le 20 octobre 2020.
L'appelant sollicite l'annulation de la vente pour réticence dolosive. En effet, il soutient que le vendeur, Monsieur [X] [O] l'a trompé sur plusieurs informations et lui a caché de nombreux manquements tels que:
- L'absence de permis de construire de la maison achetée, il précise être en possession d'un permis de construire au nom de M. [A] [T] portant sur un immeuble situé sur la même parcelle ;
- L'absence de raccordement en eau et en électricité ;
- L'absence d'information que la fosse septique est située sur le terrain du voisin, sur un terrain en indivision, et qu'il n'est pas démontré que ces derniers soient d'accord pour que leur fosse soit commune.

Monsieur [L] affirme être parfaitement fondé à solliciter la restitution du prix de vente soit la somme de 115 900,00 €.

Il expose avoir subi un préjudice de jouissance et un préjudice financier correspondant aux dépenses des travaux de mise aux normes du compteur d'électricité ou encore la réparation du préjudice résultant du contrat de vente annulé.

Subsidiairement, Monsieur [L] estime que le vendeur a manqué à son obligation de délivrance dans la mesure où le bien ne correspond nullement au contrat de réservation et par conséquent à l'acte définitif. Il indique être fondé à solliciter la résolution du contrat pour défaut de conformité et le remboursement du prix de vente mais aussi des préjudices qui en découlent.
Il ajoute également que la responsabilité délictuelle de la SCP [J] HOARAU, Olivier LE GOFF, Imrane OMARJEE « Notaires associés doit être engagée, puisque le notaire a manqué à son devoir de conseil et notamment d'information à son client que l'immeuble acheté comporte une construction illégale, l'absence de permis de construire ou encore l'absence d'accord d'utilisation de la fosse septique des voisins.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 28 décembre 2020, la SCP LE GOFF-OMARJEE et Associés demande à la Cour de :
- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Saint-Pierre du 24 avril 2020;
En tout état de cause,
- Dire et juger que la SCP HOARAU- LE GOFF- OMARJEE, notaires associés, n'a commis aucune faute engageant sa responsabilité civile professionnelle;
- Rejeter comme non fondé en fait et en droit, l'ensemble des conclusions, fins et prétentions d'appel de Monsieur [P] [L] ;
- Condamner Monsieur [P] [L] à payer à la SCP HOARAU- LE GOFF- OMARJEE une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et aux entiers dépens d'appel.

La SCP LEGOFF, OMARJEE et Associés fait valoir que l'action introduite par Monsieur [L] est irrégulière puisqu'il n'apporte pas la preuve de la publication de son assignation au service de la publicité foncière.

Elle soutient qu'elle n'a pas manqué à ses obligations puisqu'elle avance que la jurisprudence constante considère que le notaire n'est pas responsable lorsque les parties ont sciemment retenu des informations. Elle ajoute que le notaire n'a pas à effectuer des vérifications sur place mais sur pièces.

L'intimée indique qu'elle n'a pas commis d'erreur ou encore de tromperie sur le permis de construire portant régularisation de l'immeuble sis sur la parcelle aujourd'hui cadastrée [Cadastre 11] puisqu'il n'a jamais fait partie des annexes de l'acte authentique querellé du 19 décembre 2016.

Elle affirme qu'au jour de la rédaction de l'acte notarié querellé, aucun élément objectif ne permettait au notaire de douter de l'existence d'un compteur électrique individuel dans la maison. Elle souligne qu'elle s'est appuyée sur le rapport du diagnostiqueur sur l'état de l'installation électrique qui disposait d'une certification professionnelle valable. Elle expose qu'elle n'a pas mis en doute ses conclusions puisqu'elle n'a pas à revérifier l'expertise technique faite par un diagnostiqueur.

Elle prétend qu'aucune attestation du fermier des eaux pour le territoire du Tampon, aujourd'hui SUDEAU, n'établit que la maison de Monsieur [L] n'est pas desservie en eau potable.

L'intimée souligne qu'aucune preuve n'atteste que le système d'assainissement non collectif bénéficiant à sa propriété se trouverait sans droit sur une parcelle voisine cadastrée [Cadastre 9].

La SCP certifie que la garantie du notaire à l'égard de l'acheteur ne peut être recherchée que si une faute, cause directe du préjudice reconnu, existe et si l'insolvabilité du vendeur est avérée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Elle considère que, sur les divers préjudices allégués par Monsieur [L], le seul responsable en serait le vendeur puisqu'il a caché des informations au notaire.

* * * * *

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'action en nullité de la vente :

Il résulte de l'article 28-4o-c du Décret No 55-22 du 4 janvier 1955, dans sa rédaction issue de la loi No 2016-1087 du 8 août 2016, que sont obligatoirement publiés au service chargé de la publicité foncière de la situation des immeubles : 1o Tous actes, même assortis d'une condition suspensive, et toutes décisions judiciaires, portant ou constatant entre vifs : (?.)
c) Les demandes en justice tendant à obtenir, et les actes et décisions constatant, la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort.

Aux termes de l'article 114 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

L'article 115 du même code prescrit que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

Monsieur [L] verse aux débats la preuve de la régularisation de son action par la production de l'assignation assortie du récépissé du dépôt enregistré et publié le 20 octobre 2020 par le service de la publicité foncière

En conséquence, le jugement querellé doit être infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action en nullité de la vente immobilière intentée par Monsieur [P] [L].

Sur la nullité du contrat de vente :

L'article 1137 du Code civil dispose que le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.

Selon l'article 1139 du même code, l'erreur qui résulte d'un dol est toujours excusable ; elle est une cause de nullité alors même qu'elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat.

A titre liminaire, il convient de rappeler que la partie qui se dit victime d'un dol doit démontrer l'existence de manoeuvres dolosives imputables à son cocontractant.

La SCP LEGOFF, OMARJEE et Associés fait valoir que le seul responsable du dol ne peut être que le vendeur s'il a caché des informations à l'acheteur mais aussi au notaire.

Monsieur [P] [L] soutient que le vendeur et le notaire lui ont caché intentionnellement certains éléments de l'immeuble déterminant de son consentement.

Il reproche au vendeur trois faits de dissimulation :
1/ D'avoir dissimulé le fait que la maison a été édifiée sans permis de construire ;
2/ Que la construction était dépourvue de compteur électrique et de raccordement, situé sur la parcelle anciennement cadastrée [Cadastre 10] et divisée en [Cadastre 12] et [Cadastre 3] ;
3/ Que la fosse septique est située sur le terrain du voisin en indivision, alors que l'accord des propriétaires n'est pas démontré et qu'elle est à l'usage de tous les propriétaires.

Il résulte des pièces versées aux débats que la construction a été édifiée en 1990, par l'auteur de Monsieur [X].

1/ Sur l'absence de permis de construire :

Selon l'acte de vente dressé le 3 juin 2016, Monsieur [P] [L] a acquis une villa de 110 M² environ située sur la parcelle cadastrée [Cadastre 12] au Tampon. Même s'il n'est pas très lisible en raison de surlignage (pièces No 3 et 4 de l'appelant), le plan cadastral présente une construction située sur les parcelles [Cadastre 12] et [Cadastre 2].

Cependant, le plan annexé au certificat d'urbanisme, délivré le 9 juin 2016 par le Maire de la commune, figurant au dossier complet du notaire (Annexe A2 du titre), indique bien une construction édifiée seulement sur la parcelle cadastrée [Cadastre 12], n'empiétant pas sur la parcelle [Cadastre 2].

Monsieur [L] soutient que, lors de la vente, il lui a été remis un permis de construire correspondant à une autre parcelle cadastrée [Cadastre 11] (pièce No 7).

Pourtant, la déclaration d'intention d'aliéner le bien, reçue le 24 juin 2016 par la mairie du [Localité 14] aux fins de respecter son droit de préemption (Annexe A 8 du dossier de la vente) mentionne bien que le terrain est affecté d'une propriété bâtie.

Ainsi, le silence gardé par le vendeur sur la régularité de ces constructions au regard des règles d'urbanisme est insuffisant à lui seul à caractériser une attitude dolosive au regard des pièces produites en annexe de l'acte de vente, dont a eu connaissance Monsieur [L] avant la régularisation de celle-ci alors qu'il aurait pu s'assurer lui-même de ce point puisque la plupart des documents annexés évoquent une construction sans préciser de date du permis de construire.

En conséquence, Monsieur [L] ne démontre pas l'intention de tromper dont le vendeur aurait fait preuve à son égard.

2/ Sur l'absence de compteur électrique et le raccordement à une autre parcelle :

Selon Monsieur [L], l'acte mentionne à sa page 15, que le bien dispose d'une installation intérieure électrique de plus de quinze ans et que le diagnostic annexé à l'acte et daté du 17 février 2014. Ce diagnostic révèle que l'installation intérieure d'électricité comporte des anomalies pour lesquelles il est vivement recommandé d'agir. Cependant, il n'est pas mentionné que la construction était dépourvue de compteur électrique tandis que le raccordement au réseau public passe par une autre parcelle.

Ainsi, sans établir encore la réalité de manoeuvres frauduleuses destinées à cacher le problème du système électrique du bien immobilier, Monsieur [L] admet qu'il avait les moyens de procéder à des vérifications sur ce système puisqu'il était alerté de problèmes anciens de plus de quinze années. Ces éléments militent pour écarter toute idée de manoeuvre frauduleuse ou de réticence dolosive de la part du vendeur.

3/ Sur la fosse septique située sur le terrain du voisin en indivision :

Comme l'a justement relevé le premier juge, la situation d'une fosse septique constitue un élément apparent dont l'acquéreur peut aisément se convaincre.

Selon Monsieur [L], aucune indication n'est donnée sur son emplacement.

Pourtant, le titre authentique stipule clairement la constitution d'une servitude de passage pour la fosse septique commune en précisant exactement l'identification du fonds servant.

Ainsi, Monsieur [L] est mal fondé à soutenir que son ignorance sur l'emplacement de la fosse septique résulte d'un dol du vendeur.

En conséquence, en l'absence de dol, les prétentions en nullité de la vente de Monsieur [L] doivent être rejetées.

Sur le défaut de conformité :

En vertu de l'article 1603 du code civil, le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.

Subsidiairement, Monsieur [L] invoque le défaut de conformité du bien immobilier acquis considérant que le vendeur a une obligation de délivrance conforme et que c'est au moment de la livraison que se pose la question de la conformité de la chose livrée à la chose vendue.

Il affirme que l'acte de vente ne fait pas état de l'absence d'une installation électrique, mais précise que « le bien dispose d'une installation intérieure électrique de plus de quinze ans ?? et que le compromis mentionne également l'existence d'un compteur, et de ce que le vendeur devait laisser les fils électriques d'éclairage suffisamment longs, prétendant que l'immeuble est dépourvu de compteur.

Il reprend les griefs de l'absence de permis de construire et de la fosse septique.

Toutefois, il est incontestable que le compromis de la vente qui a été soumis à l'acquéreur et que ce dernier a disposé du diagnostic du système électrique réalisé par la société RL DETECTION. (Annexe A 11 de l'acte de vente du 19 décembre 2016 -Pièce notaire no 1)

Ainsi, il n'existe pas de différence entre le bien acquis par Monsieur [L] et celui promis par le vendeur.

Selon le même raisonnement, Monsieur [L] pouvait aisément se convaincre de l'état du système d'assainissement, de l'existence de la servitude de passage pour atteindre une fosse septique commune située sur une autre parcelle.

Enfin, la maison achetée en 2016 par Monsieur [L], édifiée et occupée depuis 1990 n'a jamais fait l'objet de la moindre action en démolition ni d'une action en illégalité de la construction trente ans après.

Ainsi, aucun manquement à l'obligation de délivrance conforme ne peut être reproché au vendeur.

La prétention de ce chef de Monsieur [L] doit être rejetée.

Sur la responsabilité délictuelle du notaire :

Vu l'article 1240 du code civil,

Les obligations du notaire, lorsque, tenant à sa seule qualité d'officier public, elles ne tendent qu'à assurer l'efficacité d'un acte instrumenté par lui et ne constituent que le prolongement de sa mission de rédacteur d'acte, relèvent de sa responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle, sauf lorsque celui-ci a souscrit une obligation contractuelle à l'égard de son client.

Monsieur [P] [L] soutient que la SCP doit voir sa responsabilité délictuelle engagée du fait de son manquement à son obligation de conseil et notamment son manque d'information sur les caractéristiques du bien acheté (pas de permis de construire, pas de raccordement d'eau et manque d'information sur la fosse septique commune).

En l'absence de dol ou de manquement son obligation de délivrance conforme du vendeur, Monsieur [O] [X], les fautes alléguées à l'encontre de la SCP de notaires sont inexistantes puisque les trois griefs reprochés à tort au vendeur sont les mêmes reprochés au rédacteur de l'acte.

Enfin, le notaire n'était pas tenu de vérifier s'il avait existé un permis de construire régulier, compte tenu de l'âge de la construction, et en l'absence de tout élément laissant présumer l'irrégularité de la construction.

La demande de Monsieur [L] à l'encontre de la SCP LE GOFF – OMARJEE et ASSOCIES doit être rejetée.

Sur les autres demandes :

Monsieur [P] [L], succombant en toutes ses prétentions, supportera les dépens et les frais irrépétibles de la SCP LE GOFF – OMARJEE et ASSOCIES pour la procédure d'appel en plus de ceux alloués en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt réputé-contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action en nullité de la vente immobilière de Monsieur [P] [L] ;

Statuant à nouveau,

DECLARE RECEVABLE l'action en nullité de la vente immobilière de Monsieur [P] [L] ;

DEBOUTE Monsieur [P] [L] de sa demande de nullité de la vente pour dol ;

DEBOUTE Monsieur [P] [L] de sa demande subsidiaire de résolution de la vente pour manquement à l'obligation de délivrance conforme du vendeur ;

DEBOUTE Monsieur [P] [L] de ses demandes dirigées contre la SCP LE GOFF – OMARJEE et ASSOCIES ;

CONDAMNE Monsieur [P] [L] à payer à la SCP LE GOFF – OMARJEE et ASSOCIES une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [P] [L] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Alexandra BOCQUILLON, faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT SIGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/013141
Date de la décision : 13/05/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-05-13;20.013141 ?
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