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13/05/2022 | FRANCE | N°20/009361

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 13 mai 2022, 20/009361


ARRÊT No22/
PC

No RG 20/00936 - No Portalis DBWB-V-B7E-FMCD

[D]

C/

[V]

RG 1èRE INSTANCE : 19/01883

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 13 MAI 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT PIERRE en date du 24 avril 2020 RG no: 19/01883 suivant déclaration d'appel en date du 26 juin 2020

APPELANTE :

Madame [O] [M] [Z] [D]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Caroline BOBTCHEFF de la SELARL CAROLINE BOBTCHEFF, plaidan

t, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Madame [I] [V] épouse [N]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : Me Mik...

ARRÊT No22/
PC

No RG 20/00936 - No Portalis DBWB-V-B7E-FMCD

[D]

C/

[V]

RG 1èRE INSTANCE : 19/01883

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 13 MAI 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT PIERRE en date du 24 avril 2020 RG no: 19/01883 suivant déclaration d'appel en date du 26 juin 2020

APPELANTE :

Madame [O] [M] [Z] [D]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Caroline BOBTCHEFF de la SELARL CAROLINE BOBTCHEFF, plaidant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Madame [I] [V] épouse [N]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : Me Mikaël YACOUBI de la SELARL GAELLE JAFFRE ET MIKAEL YACOUBI, plaidant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

CLÔTURE LE : 08 juillet 2021

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Février 2022 devant la Cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 08 avril 2022 puis prorogée au 13 Mai 2022.

Greffier : Madame Alexandra BOCQUILLON, ff.

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 13 Mai 2022.

* * * * *

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié en date du 9 octobre 2017, Madame [O] [M] [Z] [D] a acquis de Madame [I] [V], épouse [N] (ci-après Madame [V]), au sein d'un ensemble immobilier sis à Saint Leu (Réunion), [Adresse 1], le lot no 2 de ladite copropriété, cadastrée section CX no [Cadastre 2] et [Cadastre 3], composé d'une maison individuelle jumelée de type F4 et la jouissance privative d'un jardin d'une superficie de 355 m2 ainsi que les 500 millièmes des parties communes, ce pour un montant de 325.000 €.

Par ordonnance en date du 8 août 2018, sur assignation de Madame [D], le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Pierre a ordonné une expertise aux fins de déterminer les désordres affectant l'immeuble et les moyens d'y remédier, cette mesure étant confiée à Monsieur [Y] [X].

Ce dernier a rendu son rapport définitif le 26 décembre 2018 et a constaté trois désordres:
-le désordre D1: des infiltrations concernant un volume sous la maison accessible par un escalier intérieur en rez-de-jardin
-le désordre D2: des infiltrations en linteau de l'escalier à cette partie sous habitation et le palier en rez-de-chaussée en angle de cloison avec la cuisine.
-le désordre D3: des infiltrations en façade au droit d'une cloison séparant la salle de bains, de la chambre sud-ouest, en étage.

Par acte d'huissier du 28 juin 2019, Madame [D] a fait assigner Madame [V] devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre.

Par jugement du 24 avril 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Pierre a statué en ces termes :
-Déboute Madame [O] [M] [Z] [D] de l'intégralité de ses demandes;
-Condamne Madame [O] [M] [Z] [D] à payer à Madame [I] [V] épouse [N] la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile;
-La condamne aux dépens de l'instance, qui comprendront les frais d'expertise, avec distraction, le cas échéant, au profit de la SELARL Gaëlle JAFFRE- Mikael YACOUBI, société d'avocats inscrite au Barreau de Saint-Pierre (Réunion).

Par déclaration du 26 juin 2020, Madame [O] [M] [Z] [D] a interjeté appel du jugement précité.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état suivant ordonnance en date du 8 avril 2021.

Madame [O] [M] [Z] [D] a déposé ses premières conclusions le 23 septembre 2020.

Madame [I] [V] a déposé ses conclusions d'intimés le 14 décembre 2020.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 juillet 2021.

* * * * *

PRETENTIONS ET MOYENS

Aux termes de ses dernières conclusions No 3, déposées le 31 mai 2021, Madame [O] [M] [Z] [D] demande à la Cour de :
- Infirmer le Jugement du Tribunal judiciaire de SAINT-PIERRE DE LA REUNION en date du 24 avril 2020 en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
À titre principal,
- Juger que Madame [V] a manqué à ses obligations d'information et de loyauté dans les pourparlers,
À titre subsidiaire,
- Juger Madame [D] recevable et bien fondée à exciper à l'encontre de Madame [V] les dispositions des articles 1602 et 1603 du Code civil en ce que celle-ci a méconnu à son obligation de délivrance conforme de la chose vendue,
- Juger Madame [D] recevable et bien fondée à exciper à l'encontre de Madame [V] les dispositions des articles 1130, 1133 et 1137 du Code civil en ce que celle-ci a sciemment induite en erreur l'acquéreur outre avoir procédé à des manoeuvres dolosives pour obtenir la réalisation d'une vente dans des conditions que si elles avaient été connues par l'acquéreuse la vente n'aurait pas été régularisée ou à tout le moins à des conditions financières moindres.
À titre infiniment subsidiaire,
Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du Code Civil,
- Juger que Madame [V] ne pouvait ignorer les vices affectant l'immeuble,
- Juger que Madame [V] a engagé à l'égard de Madame [D] sa responsabilité, au titre de la garantie légale des vices cachés,
En tout état de cause,
- Condamner Madame [V] à réparer par le versement de dommages et intérêts le préjudice causé à Madame [D],
- Condamner Madame [V] au paiement de la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts,
- Condamner Madame [V] à payer à Madame [D] la somme de 10.000 € en vertu de l'article 700 du Code de Procédure Civile s'agissant des frais exposés dans le cadre de la procédure en référé, durant la mesure expertale, lors de la procédure devant le Tribunal de Grande Instance outre dans le cadre de la présente procédure d'appel,
- Condamner la même à supporter les entiers dépens de l'instance en référé y compris le coût de l'expertise judiciaire, les dépens de première instance et l'instance d'appel.

Madame [O] [M] [Z] [D] fait valoir que l'action engagée contre Madame [V] est une action en responsabilité contractuelle, par un acheteur d'immeuble contre le vendeur.

Elle soutient qu'il ressort des dispositions 1104,1112-1,1602 et 1603 du Code civil que deux obligations principales pèsent sur le vendeur :
-une obligation d'information
-une obligation de délivrance conforme.

Elle indique qu'il est de jurisprudence constante d'admettre le cumul des fondements :
-sur le défaut de conformité de la chose vendue et d'autre part sur l'erreur commise sur une qualité substantielle de cette chose
-ainsi que sur le défaut de conformité de la chose vendue et le dol.

L'appelante expose que Madame [V] détenait des informations importantes voire déterminantes non seulement, eu égard à l'usage normal de l'immeuble qu'elle vendait mais également eu égard aux caractéristiques précises qu'en attendait l'acheteuse, et dont elle avait connaissance. Elle précise avoir informé la venderesse de son projet d'aménagement du sous-sol en pièce d'habitation.

L'appelante estime alors que Madame [V] en omettant de mentionner les infiltrations de son bien immeuble a manqué à ses obligations de venderesse de loyauté ou encore d'information prévue à l'article 1112-1 du code civil.

Subsidiairement, Madame [D] certifie que Madame [V] peut voir sa responsabilité engagée sur le fondement de la garantie des vices cachés puisque les vices sont de nature à rendre impropre l'usage attendu du bien immeuble.

Aux termes de ses dernières conclusions No 2, déposées le 7 avril 2021, Madame [I] [V], épouse [N], demande à la Cour de :
A titre principal,
A/. Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement contradictoire et en premier ressort en date du 24 avril 2020 (RG no 19/01883), rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Pierre (Réunion).
En conséquence,
-Débouter Madame [O] [M] [Z] [D] de toutes ses demandes, fins et prétentions car non fondées.
B/. Sur le rejet des moyens nouveaux en cause d'appel de Madame [D] :
1/. Sur le caractère non fondé de la demande de condamnation de Madame [V] épouse [N] au titre d'une prétendue inexécution de son obligation de délivrance conforme :
-Débouter Madame [O] [M] [Z] [D] de ses demandes de condamnation à l'encontre de Madame [I] [V] épouse [N] pour un prétendu manquement de cette dernière à son obligation de délivrance-conforme.
2/. Sur le caractère non fondé de la demande de condamnation au titre de l'erreur vice du consentement
-Débouter Madame [O] [M] [Z] [D] de ses demandes de condamnation à l'encontre de Madame [I] [V] épouse [N], en de preuve d'une erreur déterminante du consentement de Mme [D] et portant sur une qualité substantielle, c'est-à-dire convenue, du bien vendu.
3/. Sur le caractère non fondé de la demande de condamnation de Mme [V] épouse [N] pour un prétendu dol vice du consentement,
-Débouter Madame [O] [M] [Z] [D] de ses demandes de condamnation à l'encontre de Madame [I] [V] épouse [N], pour une prétendue réticence dolosive commise lors de la conclusion de la vente immobilière.
-Condamner Madame [O] [M] [Z] [D] à payer à Madame [I] [V] épouse [N] une somme de 3.000,00€ au titre des frais irrépétibles exposés en appel ainsi que les entiers dépens.

Madame [V] fait valoir que Madame [D] ne rapporte pas la preuve qu'elle serait créancière d'une quelconque obligation précontractuelle d'information.

Elle soutient qu'elle n'était pas tenue de délivrer d'informations sur les infiltrations puisqu'elle n'en n'avait pas connaissance.

Elle souligne que l'expert a considéré que les désordres d'infiltration d'humidité dans le logement n'étaient pas décelables pour une personne non sachante.

Elle estime qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir expressément informé Madame [D] de la présence d'humidité dans le sous-sol alors même qu'il s'agit d'une caractéristique normale d'une telle pièce et que cette dernière a porté son attention sur cette pièce lors de nombreuses visites effectuées avant la conclusion de la vente.

Madame [V] certifie que Madame [D] avait connaissance que le sous-sol était humide et avait même pu constater la présence d'auréoles sur une des façades.

L'intimée avance également que le projet d'aménagement du sous-sol ne peut être considéré comme déterminant à l'acte d'achat puisque cette qualité n'a pas été stipulée dans l'acte authentique de vente et n'est donc pas entrée implicitement dans le champ contractuel.

Madame [V] ajoute que sa responsabilité ne peut être engagée pour un prétendu manquement à son obligation de bonne foi précontractuelle puisqu'elle n'avait pas connaissance des infiltrations dans son habitation. Elle indique avoir informé l'acquéreuse, lors des infiltrations de 2017 et avoir effectué des travaux pour les réparer.

L'intimée prétend que la demande de dommages et intérêt de l'appelante ne tend qu'à faire acquérir une plus-value à la maison et ce à moindre frais.

Elle relève que sa responsabilité pour garantie des vices cachés ne peut pas être mise en oeuvre puisque Madame [D] ne rapporte pas la preuve que :
-le vice est rédhibitoire
-le vice est caché c'est à dire que madame [V] avait connaissance des désordres D1, D2 et D3
-le vice est antérieur à la vente.

Madame [V] affirme qu'elle ne peut pas être condamnée pour défaut de délivrance conforme puisque la présence d'humidité dans une pièce non prévue à l'acte de vente ne peut constituer un défaut à cette obligation.

Elle estime qu'il n'y a pas de vice de consentement puisque :
-qu'il n'y a pas d'erreur: la jurisprudence considère que l'erreur ne peut être invoquée lorsque les acquéreurs ont pu lors des visites des lieux constater la situation du sous-sol, l'insuffisance de luminosité et l'éventuelle humidité;
-qu'il n'y a pas de dol : Madame [V] n'a dissimulé aucune information de manière intentionnelle.

* * * * *

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Sur les vices affectant l'immeuble :

Le rapport d'expertise judiciaire déposé par Monsieur [X], en date du 26 décembre 2018, établit l'existence de trois désordres ainsi qualifiés :
- Désordre D 1 : infiltration mur enterré du vide sanitaire / cave sous l'habitation, en façade Est ;
- Désordres D 2 : infiltrations en linteau de l'escalier d'accès au vide sanitaire et sur le palier RDC en angle cloison / cuisine ;
- Désordres D 3 : infiltrations en façade au droit de la cloison salle de bains / chambre SO, côté Sud-Ouest.

Sur le désordre D1 : L'Expert indique que « les désordres sont constatés humides sans endommagement préjudiciables » s'agissant de traces et auréoles en doublage placo, avec efflorescence de salpêtre, et de traces et auréoles sur mur maçonné de blocs )page 10/25 du rapport(.

Selon l'expert, les causes des désordres naissent d'une étanchéité défectueuse du mur enterré en soubassement de la maison.

Il précise qu'un changement de programme en cours de travaux initiaux (2001 – 2002) a supprimé le garage projeté alors qu'une partie du gros-oeuvre était réalisée, pour in fine fermer l'ouverture par un remplissage de maçonnerie de blocs et créer un abri voiture en extérieur (page 11/25 du rapport).

Sur le désordre D2 : Le rapport d'expertise relève des « désordres secs » malgré des pluies significatives tombées la veille )page 14 / 25 du rapport(. A titre principal, l'Expert considère que ces désordres sont causés par une imperméabilisation de la façade défectueuse )page 14/25 du rapport(.

Sur les désordres D3 : L'Expert qualifie de nouveau ces désordres de « secs » alors que des pluies consistantes sont tombées la veille de son constat. Il impute encore ces désordres à une imperméabilisation insuffisante de la façade au regard des pluies extrêmes en saison cyclonique et de l'exposition de la façade aux vents dominants )page 14/25 du rapport(.

Selon les conclusions du rapport d'expertise, les désordres D1 et D2 sont consécutifs aux travaux de construction initiaux réceptionnés en 2001, sauf preuve contraire pour le désordre D3.

Ces désordres ne sont techniquement pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination puisqu'ils affectent un volume non habitable, au demeurant non détaillé dans l'acte de vente et la composition détaillée du bien acquis.

En ce qui concerne les désordres D3, ceux-ci sont, selon l'expert, de nature à rendre à la marge et très ponctuellement, l'ouvrage impropre à sa destination puisqu'ils affectent des volumes habitables.

Au vu de ces éléments techniques, il convient d'analyser les prétentions de l'appelante.

Sur le manquement à une obligation d'information et de loyauté de la venderesse dans les pourparlers :

L'appelante fonde son action sur les dispositions de l'article 1112-1 du code civil qui prévoit que celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

Madame [D] affirme qu'en matière de ventes immobilières, il incombe au vendeur une obligation d'information renforcée.

Cependant, il lui appartient de prouver que Madame [V] lui devait une information particulière en ce qui concerne le sous-sol de la maison alors que l'acte de vente dressé le 9 octobre 2017, comme l'a relevé l'Expert, ne porte aucune mention d'un sous-sol habitable puisqu'il désigne le bien comme une maison individuelle de type F4 composée au rez-de-chaussée d'une entrée, d'un séjour et d'une cuisine puis à l'étage de deux chambres, d'une salle de bains, d'un coin douche et d'un dégagement (Page 4 de l'acte de vente).

A cet égard, Madame [D] ne produit aucun élément concomitant avec la date de formation de la vente pour établir que Madame [V] aurait été astreinte à une obligation particulière d'information à propos du sous-sol de l'immeuble.

Sur le désordre D3, la cour observe comme le premier juge que Madame [D] a réalisé plusieurs visites du bien immobilier, y résidant même quelques jours tout en étant conseillé par son père plusieurs mois avant la régularisation de la vente. Elle a pu se rendre compte par elle-même des problèmes affectant la façade par des infiltrations.

Ainsi, Madame [D] échoue à démontrer un manquement à une obligation d'information incombant à Madame [V] en ce qui concerne les trois désordres susvisés.

Sur le manquement à l'obligation de délivrance conforme :

Aux termes des articles 1614 et 1616 du code civil, la chose doit être délivrée en l'état où elle se trouve au moment de la vente.

Le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu'elle est portée au contrat, sous les modifications ci-après exprimées.

En l'espèce, Madame [D] plaide que le bien immobilier ne lui a pas été délivré conformément à la vente car l'immeuble ne présente pas les qualités expressément convenues.

Cependant, Madame [D] ne précise pas en quoi les caractéristiques du bien litigieux étaient différentes de celles prévues au contrat lorsqu'elle en a pris possession, alors que le sous-sol ne figure pas dans le périmètre de l'acte de la vente et que les désordres constatés par l'Expert apparaissent secondaires.

Sur les vices du consentement :

L'appelante évoque dans ses conclusions d'appel l'erreur et le dol.

Toutefois, Madame [D] n'articule pas sa prétention relative à l'erreur avec des faits vérifiables, celle-ci se limitant à conclure sa démonstration par une affirmation limitée à « c'est le cas en l'espèce ».

S'agissant du dol, l'appelante procède selon la même méthode en invoquant une réticence dolosive de la part de la venderesse sans établir les manoeuvres alléguées de Madame [V] alors qu'il est certain que Madame [D] a pu, librement et à plusieurs reprises, visiter les lieux, s'assurer de leur état et constater les problèmes d'infiltration affectant l'immeuble puisque celles-ci étaient visibles tandis que le sous-sol n'entrait même pas dans le périmètre de la vente lors de la régularisation.

Sur la garantie des vices cachés :

Aux termes des articles 1641 et 1642 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

En l'espèce, le rapport d'expertise signale clairement que les trois désordres étaient apparents s'agissant de problèmes d'infiltrations et d'humidité.

A cet égard, le constat d'huissier que l'appelante a fait dresser le 11 décembre 2017, deux mois après la régularisation de la vente le 9 octobre 2017, permet de remarquer aisément la présence d'humidité en sous-sol et confirmer ainsi que ces traces d'humidité étaient visibles avant la vente tandis que leur ampleur ne permet pas d'établir qu'ils rendent l'immeuble impropre à l'usage auquel il est destiné.

Outre le fait que les deux premiers désordres n'affectent pas la solidité de l'ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination, le désordre D 3, ne rend qu'à la marge l'immeuble impropre à sa destination selon l'Expert judiciaire.

Enfin, les multiples visites de Madame [D] sur les lieux, ainsi qu'une présence pendant un hébergement et l'assistance de son père pendant les visites des lieux, ne permettent pas de considérer que l'acquéreuse était ignorante des désordres allégués lorsqu'elle a décidé de conclure la vente.

En conséquence, il convient de débouter Madame [D] de toutes ses prétentions en confirmant le jugement querellé en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes :

Madame [D] supportera les dépens et les frais irréptibles de l'intimée en cause d'appel en plus de ceux déjà alloués en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE Madame [O] [D] à payer à Madame [I] [V], épouse [N], une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [O] [D] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Alexandra BOCQUILLON, faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT SIGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/009361
Date de la décision : 13/05/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-05-13;20.009361 ?
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