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14/01/2022 | FRANCE | N°20/010201

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 14 janvier 2022, 20/010201


ARRÊT No
OC

R.G : No RG 20/01020 - No Portalis DBWB-V-B7E-FMHR

S.A. BANQUE POSTALE FINANCEMENT

C/

[E]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 14 JANVIER 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le PRESIDENT DU TJ DE SAINT PIERRE en date du 22 JUIN 2020 suivant déclaration d'appel en date du 13 JUILLET 2020 RG no 1119000859

APPELANTE :

S.A. BANQUE POSTALE FINANCEMENT
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉ :

Monsieur [D] [E]
[Adresse 1]
[Localité 4]

DATE DE CLÔTURE : 22 avril 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 8...

ARRÊT No
OC

R.G : No RG 20/01020 - No Portalis DBWB-V-B7E-FMHR

S.A. BANQUE POSTALE FINANCEMENT

C/

[E]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 14 JANVIER 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le PRESIDENT DU TJ DE SAINT PIERRE en date du 22 JUIN 2020 suivant déclaration d'appel en date du 13 JUILLET 2020 RG no 1119000859

APPELANTE :

S.A. BANQUE POSTALE FINANCEMENT
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉ :

Monsieur [D] [E]
[Adresse 1]
[Localité 4]

DATE DE CLÔTURE : 22 avril 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Octobre 2021 devant Monsieur OZOUX Cyril, Président de chambre, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre
Conseiller : Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre
Conseiller : Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 14 Janvier 2022.

* * *

LA COUR :

EXPOSÉ DU LITIGE

Par un jugement contradictoire en date du 22 juin 2020, le tribunal d'instance de Saint-Pierre, statuant sur assignation de la SA BANQUE POSTALE délivrée le 09/ 10/ 2019 à [D] [E], pour paiement d'une somme de 30 859,84€ en principal outre les intérêts et 2500 € de frais irrépétibles, a déclaré forclose son action en paiement.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel en date du 13 juillet 2020, la SA BANQUE POSTALE a interjeté appel du dit jugement.

***

Aux termes de ses dernières écritures communiquées par un envoi sur le RPVA en date du 26 octobre 2020, la SA BANQUE POSTALE demande à la cour de :

I - Juger parfaitement recevable l'appel formé par la Banque Postale Financement le13/ 07/ 2020 ;

II - Vu les articles L 311-1 et suivants du code de la consommation,

Vu les pièces versées aux débats,

Dire et juger que le réaménagement intervenu dans le délai biennal initial, n'a entraîné
aucune novation et n'avait pas à être précédé d`une nouvelle information précontractuelle ;

Dire et juger qu'aucune forclusion ne saurait être invoquée en l'espèce, l'assignation du 09/ 10/ 2019 ayant été délivrée largement dans le délai biennal;

Dire et juger que les éléments produits aux débats mettent en évidence que le contrat de prêt dont l'exécution est réclamée respecte toutes les obligations du code de la consommation ;

Dire et juger que le créancier ne saurait encourir en l'espèce aucune déchéance de son droit aux intérêts contractuels ;

En conséquence,

Infirmer le jugement du 22/ 06/ 2020 en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau,

Dire et juger parfaitement recevable la présente action en paiement ;

Condamner Monsieur [E] [D] au paiement de la somme en principal de 30 859, 84 €, augmentée des intérêts de droit ;

Condamner le même au paiement de la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu`aux entiers dépens.

***

La SA BANQUE POSTALE expose que par contrat du 5 février 2016 elle a consenti un prêt d'un montant de 32408 € à [D] [E], remboursable par 60 mensualités de 671, 61 €.

Elle ajoute que par avenant du 27 avril 2017 il a été convenu d'allonger la durée d'amortissement, les échéances se trouvant réduites à la somme mensuelle de 412, 49 €.

Elle fait valoir que l'emprunteur a été défaillant dans le remboursement de son emprunt, le premier incident de paiement non régularisé étant en date du 10 août 2018.

Elle soutient que son assignation a bien été délivrée dans le délai de 2 ans en sorte qu'il ne peut lui être opposé une quelconque forclusion.

Elle précise qu'elle a en tous points respecté les obligations que lui impose le code de la consommation de sorte qu'il ne peut lui être opposé une quelconque déchéance du droit aux intérêts.

***

L'intimé n'a pas constitué avocat.

La société la SA BANQUE POSTALE a fait signifier à [D] [E] sa déclaration d'appel et ses conclusions par acte d'huissier du 4 novembe 2021 remis à domicile.

***

La procédure a été clôturée par une ordonnance du 22 avril 2021.

L'audience de plaidoirie s'est tenue le 15 octobre 2021.

MOTIFS

Sur la forclusion :

Aux termes des dispositions de l'article L 311.52 du code de la consommation en sa rédaction applicable au présent litige, le délai de forclusion biennal dans lequel le prêteur doit engager son action en paiement à rencontre des emprunteurs défaillants court à compter du premier impayé non régularisé.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés.

En l'espèce, il est constant que par offre de prêt acceptée le 05/ 02/ 2016 la banque postale a consenti à [D] [E] un crédit d'un montant de 32 408 € remboursable sous la forme de 60 échéances mensuelles de 638, 66 € chacune.

Il est établi que les modalités de règlement de ce prêt ont fait l'objet d'un réaménagement par un avenant du 27 avril 2017 prévoyant l'amortissement sur 104 mensualités des sommes restant dues à cette date, au titre du capital à échoir, des échéances restées impayées et des intérêts et indemnités sur les dits impayés pour un total de 29 959, 01 €.

L'historique du compte versé aux débats révèle que le premier impayé non régularisé intervenu après l'accord du 27 avril 2017 conclu entre les parties est survenu à la date du 10 août 2018.

La forclusion biennale n'était donc pas acquise lorsque l'acte introductif d'instance a été délivré le 09 octobre 2019.

Elle ne l'était pas davantage lorsque l'accord de réaménagement est intervenu moins de deux années s'étant écoulées entre la convention de prêt initiale et son avenant.

C'est par conséquent à tort que le premier juge a déclaré forclose l'action en paiement de la banque postale.

Sur la régularité de l'offre de prêt acceptée le 05/ 02/ 2016 :

La novation ne se présume pas et une simple modification des modalités de remboursement d'un prêt ne suffit pas à entraîner novation.

C'est à bon droit dés lors que le premier juge s'est autorisé à mettre dans le débat la question de la validité de l'offre de prêt initiale acceptée le 05/ 02/ 2016.

En ce qui concerne la fiche d'informations précontractuelle

Aux termes des dispositions de l'article L 311- 6 du code de la consommation en sa version applicable au présent litige, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Cette information est remise à l'emprunteur sous la forme d'un document intitulé fiche d'information pré-contractuelle européenne normalisée (FIPEN).

Il appartient au prêteur de rapporter la preuve qu'il a satisfait aux obligations de l'article L 311- 6 du code de la consommation.

En l'espèce, le contrat de prêt signé par [D] [E] comporte une mention selon laquelle l'emprunteur a pris connaissance de la fiche d'informations précontractuelle et de son annexe.

Cependant, la fiche que la Banque postale verse aux débats n'est pas revêtue de la signature de l'emprunteur.

Aucun autre indice ne vient corroborer le commencement de preuve par écrit résultant de la mention figurant au contrat.

Dans ces conditions, il ne peut être tenu pour acquis que le prêteur a satisfait à l'obligation de l'article L 311- 6 du code de la consommation.

En ce qui concerne le formulaire de rétractation

Aux termes des dispositions de l'article L 311- 12 du code de la consommation en sa version applicable au présent litige, l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l'article L. 311-18. Afin de permettre l'exercice de ce droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.

L'article Réponse : 311- 4 du même code prévoit que le formulaire détachable de rétractation prévu à l'article L. 311-12 est établi conformément au (à un) modèle type joint en annexe. Il ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l'adresse du prêteur.

Il appartient au prêteur de rapporter la preuve qu'il a satisfait aux obligations de l'article L 311- 12 du code de la consommation.

En l'espèce, l'offre de contrat de crédit signée le 05/ 02/ 2016 par [D] [E] contient une clause type par laquelle celui-ci reconnaît rester en possession d'un exemplaire de l'offre doté d'un formulaire détachable de rétractation.

Cependant l'offre signée par [D] [E] que la banque postale verse aux débats ne comporte pas de bordereau de rétractation.

Le formulaire emprunteur vierge que la banque produit ne suffit pas à compléter le commencement de preuve par écrit que constitue la mention figurant au contrat, qu'aucun autre indice ne vient par ailleurs corroborer.

Dans ces conditions, il ne peut être tenu pour acquis que le prêteur a satisfait à l'obligation de l'article L 311- 12 du code de la consommation.

En ce qui concerne la déchéance du droit aux intérêts

Selon les dispositions de l'article L 341- 8 aliéna 1 du code de la consommation, en sa version applicable au présent litige, le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l'emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 ou L. 311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l'article L. 311-10, ou sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l'article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts.

La banque postale qui ne justifie pas s'être conformée aux obligations résultant des dispositions des articles L 311- 6 et L 311- 12 du code de la consommation sera par conséquent déchue du droit aux intérêts.

En outre, compte tenu du montant de l'intérêt légal (0, 76 % pour le premier semestre 2022), il convient de dire, afin d'assurer l'effectivité de la sanction, que la banque postale ne pourra se prévaloir de la majoration de 5 points de l'article L 313- 3 du code monétaire et financier.

Sur les sommes réclamées par la banque postale :

La banque postale réclame le paiement d'une somme de 30 859, 84 € se décomposant comme suit :

Echéances de crédit impayées.........................................................2531, 71 €
Capital restant dû non échu.............................................................25935,52 €
Pénalité légale...................................................................................2189,73 €
Intérêts au 30/ 09/ 2019 ..................................................................... 767,03 €
Intérêts posterieurs............................................................................Mémoire
Frais de procédure.................................................................................30,34 €
Frais de sommation de payer.................................................................105,51€
Versements effectués par le débiteur.....................................................(800 €)

Lorsque la déchéance est prononcée, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu.

En l'espèce, il est établi par les pièces versées aux débats que le capital que [D] [E] devait rembourser à la banque postale se montait à l'origine à la somme de 29 959, 01 € et que la première mensualité est intervenue en mai 2017.

Lorsqu'est survenu en août 2018 le premier impayé non régularisé, [D] [E] s'était par conséquent acquitté de 15 mensualités.

Le tableau d'amortissement que la banque postale produit permet de déterminer que le montant du capital restant dû, au terme des15 premières échéances mensuelles que [D] [E] a normalement réglées, s'élevait à la somme de 26 645 €.

[D] [E] ayant entre-temps versé une somme de 800 €, selon le propre décompte de la banque, celle-ci est par conséquent fondée à obtenir sa condamnation à lui verser la somme de 25 845 €.

Indépendamment de la déchéance du droit aux intérêts, le prêteur conserve la possibilité de réclamer le paiement de l'indemnité contractuelle sauf la faculté pour le juge de la réduire si elle est manifestement excessive.

Compte tenu de l'importance du crédit initial et de l'intérêt dont la banque se trouve privée par suite de la défaillance de l'emprunteur, l'indemnité de 8 % du capital restant dû stipulée au contrat sera limitée à la somme de 500 €.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

[D] [E], partie succombante, supportera les dépens de première instance et d'appel.

Aucune considération tirée de l'équité ne justifie qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement contradictoire du tribunal d'instance de Saint-Pierre en date du 22 juin 2020 ;

Dit que l'action en paiement de la SA BANQUE POSTALE à l'encontre de [D] [E] au titre du prêt no 50360656396 n'est pas forclose ;

Dit que la preuve n'est pas rapportée de ce que la banque s'est conformée aux obligations résultant des dispositions des articles L 311- 6 et L 311- 12 du code de la consommation ;

Dit que la SA BANQUE POSTALE est déchue du droit aux intérêts ;

Dit que la banque postale ne pourra se prévaloir de la majoration de 5 points de l'article L 313- 3 du code monétaire et financier ;

Condamne [D] [E] à verser à la SA BANQUE POSTALE la somme de 26345 € se décomposant comme suit :

- 25 845 € au titre du capital restant dû ;
- 500 € au titre de l'indemnité contractuelle ;

Déboute la SA BANQUE POSTALE de sa demande de frais irrépétibles ;

Dit que les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de la sommation de payer délivrée le 13/ 07/ 2019, seront supportés par [D] [E].

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/010201
Date de la décision : 14/01/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-01-14;20.010201 ?
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