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14/01/2022 | FRANCE | N°19/024611

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 14 janvier 2022, 19/024611


ARRÊT No
OC

R.G : No RG 19/02461 - No Portalis DBWB-V-B7D-FIEM

[F]

C/

[F]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 14 JANVIER 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-[Z] DE LA REUNION en date du 21 JUIN 2019 suivant déclaration d'appel en date du 12 SEPTEMBRE 2019 RG no 17/00699

APPELANTE :

Madame [W] [F] veuve [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Roberto OVA, avocat au barreau de SAINT-[Z]-DE-LA-RÉUNION
(bénéficie d'une aide juridictionn

elle Totale numéro 2019/005546 du 29/08/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMÉ :

Monsieur [Y]...

ARRÊT No
OC

R.G : No RG 19/02461 - No Portalis DBWB-V-B7D-FIEM

[F]

C/

[F]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 14 JANVIER 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-[Z] DE LA REUNION en date du 21 JUIN 2019 suivant déclaration d'appel en date du 12 SEPTEMBRE 2019 RG no 17/00699

APPELANTE :

Madame [W] [F] veuve [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Roberto OVA, avocat au barreau de SAINT-[Z]-DE-LA-RÉUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/005546 du 29/08/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMÉ :

Monsieur [Y] [V] [F]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Brigitte MAURO de la SELARL BRIGITTE MAURO - BÉATRICE FONTAINE, avocat au barreau de SAINT-[Z]-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 8 avril 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Octobre 2021 devant Monsieur OZOUX Cyril, Président de chambre, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre
Conseiller : Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre
Conseiller : Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 14 Janvier 2022.

LA COUR :

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant déclaration enregistrée au greffe de la cour le 12 septembre 2019, [W] [F] épouse [D] a interjeté appel d'un jugement rendu le 21 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Saint-Pierre qui, statuant sur son assignation aux fins de se voir déclarer propriétaire d'une portion de terrain à [Localité 3], lieu-dit "[Adresse 9]", l'a débouté de ses demandes, a déclaré la partie défenderesse, [Y]-[V] [F], propriétaire par prescription trentenaire et lui a alloué la somme de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par RPVA le 27 janvier 2021, [W] [F] épouse [D] demande à la cour de :

- DIRE ET JUGER recevables et bien fondées les demandes, fins et conclusions de Madame [W] [F] Epouse [D] ;

- RÉFORMER dans son entier dispositif le jugement en date du 21 juin 2019;

Par conséquent,

- DÉBOUTER Monsieur [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Dès lors, il est demandé à la Cour de statuer à nouveau et de :

- DIRE ET JUGER que Madame [W] [D] est propriétaire par titre de la portion de terrain matérialisé par les points DEFBM sur le plan annexe no2 du rapport d'expertise de Monsieur [S] ;

EN TOUT ÉTAT DE CAUSE,

- CONDAMNER Monsieur [F] à payer à Madame [D] [W] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

***

L'appelante fait valoir que la preuve de son droit de propriété sur la portion de terrain litigieuse est rapportée par un acte de donation des 23 mars et 24 août 1971 et un acte de partage du 13 mai 1953.

Elle soutient qu'elle s'est toujours comportée comme la propriétaire du fonds ainsi que plusieurs témoins viennent en attester.

Elle ajoute enfin que [Y] [V] [F] ne justifie pas d'une possession trentenaire non équivoque sur la portion de terrain litigieuse en sorte qu'il n'est pas fondé à se prévaloir d'une prescription acquisitive.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par RPVA le 2 mars 2021, [Y] [V] [F] demande à la cour de :

- CONFIRMER le jugement du tribunal de Grande Instance de SAINT-[Z] du 21/06/2019 en toutes ses dispositions ;

- CONDAMNER Madame [W] [D] à payer la somme de 3 500 euros en application de I'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER Madame [W] [D] aux entiers dépens.

***

[Y] [V] [F] conteste la portée des titres dont l'appelante se prévaut pour rapporter la preuve de son droit de propriété.

Il fait également observer que [W] [F] épouse [D] ne justifie d'aucun acte matériel de possession sur le fonds litigieux.

Par contre, l'intimé soutient qu'il a occupé la portion litigieuse de la parcelle cadastrée [Cadastre 7] qu'il cultivait, jusqu'à ce que [W] [F] épouse [D] s'y oppose.

***

La procédure a été clôturée par une ordonnance du 08 avril 2021.

L'audience de plaidoirie s'est tenue le 15 octobre 2021.

MOTIFS

Sur le droit de propriété allégué par [W] [D] :

La preuve de la propriété immobilière se rapporte par des présomptions de fait qui viennent rendre vraisemblable le droit allégué.

Sur le titre de [W] [D] :

En l'espèce, le titre de propriété de [W] [D] (donation des 29 mars et 24 août 1971) lui attribue la nue propriété d'une portion de terrain d'une largeur de 21 mètres, bornée au couchant par un chemin communal.

L'expert géomètre [S], commis par le juge d'instance de Saint-[Z] dans le cadre d'une action en bornage, a constaté, en avril 2008, que la ligne BM accordait à [W] [D], depuis le chemin communal, une largeur comprise entre 28 et 32 mètres, soit une largeur plus importante que celle spécifiée à l'acte.

L'expert en a conclu que rien ne justifiait dés lors que le terrain de [W] [D] s'étende à l'est de la ligne BM, c'est-à-dire sur tout ou partie de la portion de terrain litigieuse.

Le titre de propriété de [W] [D] ne lui permet donc pas de rapporter la preuve du droit de propriété qu'elle allègue.

Pour sa part, l'acte de donation partage du 13 mai 1953 permet de retracer les conditions dans lesquelles le fonds donné en 1971 à [W] [D] est devenu la propriété du donateur.

Il ne comporte en lui même aucune indication qui soit de nature à rendre vraisemblable un droit de propriété de [W] [D] sur la portion de terrain litigieuse.

Sur la possession alléguée :

La possession constitue une présomption de propriété en ce sens qu'elle coïncide le plus souvent avec la situation de droit.

En l'espèce, il est établi par les constatations de l'expert [S] qu'en avril 2008 la portion de terrain litigieuse se trouvait inoccupée et en friches, l'expert précisant que la portion concernée n'avait jamais été occupée précédemment par les parties.

Les pièces versées aux débats ne permettent pas de caractériser de la part de [W] [D] des actes de possession survenus depuis le passage de l'expert [S]

Enfin, la possession doit être utile, c'est à dire se matérialiser par des actes de détention et de jouissance. La circonstance que selon plusieurs témoins [W] [D] ait pu penser se trouver propriétaire de la portion de terrain litigieuse, à supposer l'état d'esprit établi, ne saurait par conséquent suffire.

Il apparaît ainsi que [W] [D] n'a pas rapporté la preuve d'une possession de sa part qui permette de tenir pour vraisemblable le droit de propriété qu'elle allègue.

Sur le cadastre :

Les documents cadastraux ne sont que des documents administratifs et fiscaux qui ne constituent ni un titre ni une preuve de propriété.

Le fait que la portion de terrain litigieuse puisse être représentée comme constituant une partie de la parcelle [Cadastre 8], propriété de [W] [D] et par conséquent figurer dans l'assiette de l'impôt foncier acquitté par celle-ci, ne suffit donc pas à rapporter la preuve du droit de propriété allégué.

***

Au total, il apparaît que [W] [D] n'a pas rapporté la preuve de son droit de propriété sur la portion de terrain comprise entre les points DEFBM du plan dressé par le géomètre [G] en juillet 2003 et mis à jour par [Z] [S] en avril 2008.

Il convient par conséquent de confirmer sur ce point le jugement rendu le 21 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Saint-[Z].

Sur l'usucapion de [Y] [V] [F] :

Aux termes des dispositions de l'article 2258 du code civil en sa rédaction applicable au présent litige, la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue ne soit obligé d'en rapporter un titre ou que l'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.

Pour justifier de la possession qu'il invoque, [Y] [V] [F] a produit des témoignages, un constat d'huissier, des avis d'imposition et des photographies.

La valeur probante des témoignages versés par l'intimé est incertaine.

La possession continue et ancienne qu'ils attribuent à [Y] [V] [F] est formellement contredite par les constatations de l'expert [S], lequel en avril 2008, après avoir recueilli les propres déclarations des parties, souligne en son rapport que celles-ci n'ont jamais occupé la portion de terrain litigieuse.

Il est constant d'autre part que l'intimé est devenu propriétaire en février 2005 des deux parcelles immédiatement voisines, cadastrées [Cadastre 5] et [Cadastre 6], après avoir réalisé une usucapion.

Il n'est pas certain que les témoins ayant attesté aient eu une connaissance suffisamment précise du cadastre et de sa numérotation pour faire la distinction entre les deux parcelles susvisées et la portion de terrain comprise entre les points DEFBM de la parcelle [Cadastre 8].

L'huissier intervenu le 4 octobre 2005 à la demande de [Y] [V] [F] a constaté la présence de quelques piquets métalliques supportant des résidus de fil de fer dans l'alignement entre les points B et M de la portion de terrain litigieuse, susceptibles de correspondre aux vestiges de la clôture figurant sur le plan [G] de juillet 2003.

Il n'est pas contesté cependant que ces ouvrages ont été réalisés par [W] [D].

Outre que les éléments du dossier ne permettent pas de situer dans le temps leur réalisation ni de déterminer la finalité poursuivie, ils n'émanent pas de [Y] [V] [F], de sorte qu'ils ne sont pas susceptibles de caractériser un acte de possession de la part de celui-ci.

Les photographies versées aux débats ne sont pour leur part d'aucune utilité dans la mesure où elles ne peuvent pas être précisément datées.

Enfin, les avis d'imposition à la taxe foncière ne présentent pas d'intérêt pour la solution du litige dans la mesure où il est évident que [Y] [V] [F] n'a pas réglé l'impôt afférent à la portion de terrain litigieuse que le cadastre rattache à la propriété de [W] [D].

Au total, il apparaît que [Y] [V] [F] n'a pas rapporté la preuve d'une occupation trentenaire de la portion de terrain comprise entre les points DEFBM.

En l'absence de possession trentenaire, le mécanisme de la prescription acquisitive ne peut par conséquent trouver application.

C'est donc à tort que le premier juge, dont la décision sera sur ce point infirmée, a cru pouvoir lui attribuer la propriété du fonds litigieux.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

C'est à bon droit que le premier juge a mis les dépens de première instance à la charge de [W] [D], partie perdante au principal et a alloué à [Y] [V] [F] une indemnité pour frais irrépétibles.

[W] [D] qui de nouveau succombe en appel sur l'essentiel de ses prétentions, supportera également les dépens de l'appel.

Il sera alloué à [Y] [V] [F] une nouvelle indemnité pour frais irrépétibles d'un montant de 1500 €.

[W] [D] qui supporte les dépens n'est pas fondée enfin à se prévaloir de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt de défaut mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Statuant par arrêt contradictoire, remise au greffe,

Confirme le jugement rendu le 21 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Saint-[Z] sauf en ce qu'il a dit que [Y]-[V] [F] a acquis par prescription la portion de terrain matérialisée par les points DEFBM au plan dressé par le géomètre [G] en juillet 2003 et mis à jour par l'expert [Z] [S] en avril 2008 ;

Statuant de nouveau de ce chef,

Déboute [Y] [V] [F] de sa demande visant à constater l'existence d'une possession trentenaire sur la portion de terrain comprise entre les points DEFBM du plan dressé par le géomètre [G] en juillet 2003 et mis à jour par l'expert [Z] [S] en avril 2008 figurant en annexe du rapport d'expertise en date du 02 avril 2008 de [Z] [S] ;

Déboute [Y] [V] [F] de sa demande visant à voir constater sur sa personne la réalisation d'une usucapion sur la parcelle sus-visée ;

Condamne [W] [D] à verser à [Y] [V] [F] la somme de 1500 € au titre de ses frais irrépétibles en appel ;

Dit que [W] [D] aura la charge des dépens exposés en cause d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 19/024611
Date de la décision : 14/01/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-01-14;19.024611 ?
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