La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/12/2021 | FRANCE | N°18/010371

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 28 décembre 2021, 18/010371


ARRÊT No
IO

No RG 18/01037 - No Portalis DBWB-V-B7C-FBA3

[I]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I] ÉPOUSE [A]
[I]
[I] EPOUSE [IS]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I]

C/

[I]
[Adresse 46]
S.A. PREDICA - PREVOYANCE DIALOGUE DU CREDIT AGRICOLE

[I]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 28 DECEMBRE 2021

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT DENIS en date du 02 MAI 2018 suivant déclaration d'appel en date du 04 JUILLET 2018 RG n

o 17/01779

APPELANTS :

Madame [DA] [Z] [D] [I] épouse [GC]
[Adresse 23]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, ...

ARRÊT No
IO

No RG 18/01037 - No Portalis DBWB-V-B7C-FBA3

[I]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I] ÉPOUSE [A]
[I]
[I] EPOUSE [IS]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I]

C/

[I]
[Adresse 46]
S.A. PREDICA - PREVOYANCE DIALOGUE DU CREDIT AGRICOLE

[I]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I]
[I]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 28 DECEMBRE 2021

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT DENIS en date du 02 MAI 2018 suivant déclaration d'appel en date du 04 JUILLET 2018 RG no 17/01779

APPELANTS :

Madame [DA] [Z] [D] [I] épouse [GC]
[Adresse 23]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [DA] [O] [I] épouse [YP]
DECEDEE
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [P] [TN] [I]
DECEDE
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [YY] [SA] [I]
[Adresse 9]
[Localité 41]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [T] [N] [I]
[Adresse 1]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [NU] [I] épouse [A]
[Adresse 12]
[Localité 33]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [MS] [SU] [I]
[Adresse 15]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [DA] [K] [I] épouse [IS]
[Adresse 7]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [MS] [BY] [I]
[Adresse 4]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [LY] [NA] [I]
[Adresse 2]
[Localité 11]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [DA] [PP] [I]
[Adresse 30]
[Localité 39]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [DA] [S] [I]
[Adresse 27]
[Localité 42]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [P] [J] [I]
[Adresse 34]
[Localité 21]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉS :

Monsieur [R] [JA] [I]
[Adresse 13]
[Localité 45]
Ni comparant ni représenté

Monsieur [U] [E]
[Adresse 13]
[Localité 45]
Ni comparant ni représenté

S.A. PREDICA - PREVOYANCE DIALOGUE DU CREDIT AGRICOLE
[Adresse 29]
[Localité 35]
Représentant : Me Audrey ROBERT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

PARTIES INTERVENANTES :

Madame [DA] [M] [I] divorcée [FU]
[Adresse 17]
[Localité 38]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTERVENTIONS VOLONTAIRES EN QUALITE D'AYANT DROIT DE M. [I] [P] [TN]

Monsieur [P] [W] [I]
[Adresse 20]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [OW] [P] [RS] [I]
[Adresse 32]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [C] [I]
[Adresse 28]
La Confiance
[Localité 44]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [DA] [G] [I] épouse [TW]
[Adresse 36]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [X] [I]
[Adresse 8]
[Localité 40]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [DA] [HY] [I] épouse [UP]
[Adresse 24]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [FA] [P] [L] [I]
[Adresse 25]
[Localité 43]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTERVENTIONS VOLONTAIRES EN QUALITE D'AYANT DROIT DE MME [I] [DA] [O] épouse [YP] décédée le [Date décès 6]/19

Monsieur [YP] [KW]
[Adresse 19]
[Localité 43]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [YP] [B] [V]
[Adresse 19]
[Localité 43]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [YP] [KC] [P]
[Adresse 3]
[Localité 31]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTERVENTIONS VOLONTAIRES EN QUALITE D'AYANT DROIT DE M. [YP] [MS] [UY] ( décédé l e [Date décès 37]/1995) fils de MME [I] [DA] [O] épouse [YP] décédée le [Date décès 6]/19

Madame [DE] [GW] née [YP]
[Adresse 22]
[Localité 45]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [YP] [P] [ZS]
[Adresse 10]
[Localité 26]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 27 Mai 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Août 2021 devant Madame OPSAHL Isabelle, Vice-présidente placée, qui en a fait un rapport, assistée de Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 12 Novembre 2021 puis le délibéré a été prorogé au 28 Décembre 2021.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Isabelle OPSAHL, Vice-présidente placée
Qui en ont délibéré

Greffier : Mme Nathalie TORSIELLO
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 28 Décembre 2021.

* * *

LA COUR :

Exposé du litige

Mme [DA] [VS] [S] [IS] [S] [I] ([S] [I]) est décédée le [Date décès 16] 2015 à [Localité 47] laissant venir à sa succession, ouverte devant notaire, ses quinze enfants.

Par acte des 19 et 21 avril 2017, douze de ses quinze enfants, soit Marie [Z] [T] [I] épouse [GC], [JU] [I] épouse [YP], [P] [TN] [I], [YY] [SA] [I], [T] [N] [I], [NU] [I] épouse [A], [MS] [SU] [I], [DA] [K] [I] épouse [IS], [MS] [BY] [I], [LY] [NA] [I], [DA] [PP] [I], [BB] [I], sous la dénomination « consort [I] » ont assigné leur frère, [R] [JA] [I] et leur neveu [U] [E] ainsi que la SA Predica après avoir découvert, après le décès de leur mère, que celle-ci avait souscrit auprès de cette compagnie, via le crédit Agricole, deux contrats d'assurance-vie et désigné comme bénéficiaires son fils [R] [I], et à défaut, son petit-fils, [U] [E].

Il s'agissait des contrats d'assurance vie :

Predissime 9 (no 900114083086) souscrit le 14 décembre 2006 avec un montant de primes versé de 50.000 euros ;

Predige (no 90012526838) souscrit le 20 mars 2006 avec un montant de primes versé de 200.000 euros ;

Cités à personne devant le tribunal, [R] [I], [U] [E] n'ont ni conclu ni constitué avocat. Seule la société Predica était présente en défense devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis qui, par jugement du 2 mai 2018, a débouté les demandeurs de leurs prétentions, dit n'y avoir lieu à exécution provisoire et à application de l'article 700 du Code de procédure civile et a condamné les demandeurs aux entiers dépens.

Par déclaration au greffe en date du 4 juillet 2018, Marie [Z] [T] [I] épouse [GC], [JU] [I] épouse [YP], [P] [TN] [I], [YY] [SA] [I], [T] [N] [I], [NU] [I] épouse [A], [MS] [SU] [I], [DA] [K] [I] épouse [IS], [MS] [BY] [I], [LY] [NA] [I], [DA] [PP] [I], [BB] [I], ont interjeté appel de ce jugement ainsi que [Y] [I].

Par arrêt avant dire droit du 18 septembre 2020, la cour d'appel a invité les parties à :

-mettre en cause [DA] [F] [I] divorcée [FU], fille de [DA] [VS] [S] [IS] veuve [I] ;

-s'expliquer sur la recevabilité de l'appel interjeté par [Y] [I] le 4 juillet 2018 alors qu'il n'était pas partie en première instance ;
Selon dernières conclusions, déposées au RPVA le 10 décembre 2020 :
En qualité d'appelants : Marie [Z] [T] [I] épouse [GC], [JU] [I] épouse [YP], [P] [TN] [I], [YY] [SA] [I], [T] [N] [I], [NU] [I] épouse [A], [MS] [SU] [I], [DA] [K] [I] épouse [IS], [MS] [BY] [I], [LY] [NA] [I], [DA] [PP] [I], [BB] [I],

En qualité d'intervenants volontaires en tant qu'ayant-droit de [P] [TN] [I] décédé le [Date décès 18] 2018 : [P] [W] [I], [OW], [P] [RS] [I], [C] [I], [DA] [G] [I] épouse [TW], [X] [I], [DA] [HY] [I] épouse [XW] [PY], [FA] [P] [L] [I] ;
En qualité d'intervenants volontaires en tant qu'ayant-droit de [JU] [I] épouse [YP] décédée le [Date décès 5] 2019 [KW] [YP], [B] [V] [YP], [KC] [P] [YP] ;
En qualité d'ayant droit de leur père [MS] [UY] [YP] décédé, fils de [JU] [I] épouse [YP] décédée le [Date décès 5] 2019 : [GW] [DE] née [YP], [P] [ZS] [YP], ;
En qualité d'intervenants volontaires : [DA] [F] [I] divorcée [FU] et [Y] [I] ;

demandent à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé leur appel ;

- dire et juger recevables et bien fondées les interventions volontaires ;

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Saint-Denis en date du 2 mai 2018 ;

- dire et juger que la souscription du contrat d'assurance-vie réalisée par Mme [S] [I] n'a été opérée que dans le but de contourner les règles successorales et de la réserve, et de faire donation à Monsieur [I] [JA] [R] de la somme de 250.000 euros ;

- dire et juger que les primes versées par Mme [S] [I] sur les contrats d'assurance vie Predige et Predissime constituent des primes excessives au sens de l'article L 132-13, alinéa 2 du code des assurances, au regard de l'âge ainsi que de la situation patrimoniale et familiale de l'assurée décédée ;

- dire et juger que M. [R] [I] a reçu dans la succession de Mme [S] [I] une part qui excède sa réserve héréditaire ;

- dire et juger que M. [R] [I] doit recueillir une part de patrimoine familial égale à celle de ses frères et soeurs ;

- dire et juger que M. [U] [E] devra rapporter à la succession de Mme [S] [I] les sommes qu'il a reçues au titre des contrats d'assurance-vie Predige et Predissime ;

- dire et juger que les primes versées et le capital payable au décès de Mme [S] [I] sur les contrats d'assurance-vie Predige et Predissime doivent être réintégrés à la masse successorale ;

- condamner in solidum les intimés à réunir à la masse successorale toutes les sommes versées par Mme [I], capital et intérêts compris ;

- débouter les intimés de toutes leurs demandes et prétentions ;

- dire et juger que la compagnie Predica doit transmettre à maître [H] [XN] les fonds détenus au titre des contrats d'assurance-vie, en primes et capital, afin qu'une évaluation complète de l'ensemble des biens dépendant de la succession de Mme [S] [I] soit réalisée ;

-condamner les intimés et Predica à payer in solidum la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.
Pour répondre à l'arrêt avant dire droit de la cour du 18 septembre 2020, ils font valoir que :

-[DA] [F] [I] divorcée [FU], fille de [DA] [VS] [S] [IS] [S] [I], intervient volontairement à la procédure afin de la régulariser ;

-l'appel de [Y] [I] relève d'une erreur matérielle, et qu'il intervient à présent volontairement à la procédure ;

-la cour devra les recevoir dans leur intervention volontaire.

Au fond, ils soutiennent que les primes des contrats d'assurance vie, versées par [S] [I] pour un total de 250.000 euros, excèdent la part disponible dont pouvait bénéficier [R] [I] dans la succession, et constituant, en réalité, une donation déguisée, elles devront être rapportées à la succession afin de parvenir à un partage équitable.
Ils font valoir que la somme de 250.000 euros, provenant de la vente d'une parcelle, placée sur les contrats d'assurance vie était manifestement exagérée, au vu des 1.000 euros de retraite de Mme [S] [I], du montant de sa succession qui ne comprenait qu'une propriété bâtie sise au [Adresse 14] d'une valeur de 300.000 euros et du solde de ses deux comptes bancaires ouverts à la Banque Postale et au Crédit Agricole d'un montant respectif de 35.571 euros et 13.463 euros. Ils soutiennent que le montant du versement démontre la volonté irrévocable de la défunte de se dépouiller et que les contrats d'assurance vie doivent dès lors être requalifiés en donation, rapportable à la succession.

Ils soutiennent que ces assurances sur la vie ne comportaient aucun aléa compte tenu du grand âge de Mme [S] [I] au moment de la souscription, laquelle n'avait théoriquement plus d'espérance de vie, au vu des évaluations de l'INSEE. Le placement n'était donc d'aucune utilité pour elle comme n'étant pas destiné à lui apporter un complément de retraite ni à une prévoyance compte tenu du caractère illusoire de la faculté de rachat, fortement imposable avant 8 ans, et sans intérêt pour une personne de 85 ans, qui sur les 9 ans de la durée de l'épargne, n'a effectué qu'un seul retrait partiel de 10.000 euros. Cette souscription n'avait en réalité d'autre but que de gratifier discrètement son fils [JA] [R], assuré de bénéficier du capital place dès la souscription du contrat.

Ils demandent donc que les intimés soient condamnés in solidum à réunir dans la masse successorale toutes les sommes comprenant le capital et les intérêts de ces contrats d'assurance vie en vue de leur répartition entre les héritiers réservataires.

*****

Par dernières conclusions, déposées au RPVA le 8 mars 2019, la société Predica demande à la cour de :

-rejeter toute demande de requalification en donations indirectes ou en contrat de capitalisation des deux contrats d'assurance vie de Mme [DA] « [S] » [IS] [S] [I], souscrits 9 années avant son décès, rachetables à tout moment en tout ou partie, faculté dont elle a usé sur chacun de ses contrats ;

-prendre acte de ce que la société Predica s'en remet à la décision à intervenir quant à l'éventuel caractère manifestement exagéré des primes versées par Mme [I] sur ses deux contrats d'assurance vie Predige (souscrit au profit de M. [R] [I]) et Predessime 9 (souscrit au profit de M. [U] [E]) et au rapport et/ou à la réduction de la partie jugée manifestement exagérée à la succession par les bénéficiaires des contrats ;
S'agissant du contrat Predige souscrit au profit de M. [R] [I], bloqué dans l'attente d'une décision dé nitive à intervenir, la Société PREDICA s'en rapporte à la décision et règlera l'éventuel excès qui serait retenu par la Cour entre les mains du notaire chargé de la succession et le solde éventuel ou l'entier capital décès du contrat à M. [R] [I] conformément au code général des Impôts (article 757 cB 806 III 292B Annexe II CGI) ;

S'agissant du contrat Predissime 9, rejeter toute demande qui serait dirigée contre elle dès lors qu'elle a réglé le capital décès au bénéficiaire désigné, [U] [E], conformément à ses obligations légales et contractuelles et qu'elle ne détient plus aucun fonds au titre de son contrat (l'action pévue à l'article L.132-13 du Code des assurances étant une action ouverte aux héritiers qui s'estiment lésés contre les bénéficiaires du contrat, titulaire d'un droit propre et direct sur le capital décès assuré) ;

-rejeter toute demande complémentaire qui serait dirigée contre elle, qui n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité, les appelants ne produisant en tout état de cause, aucune pièce justificative d'un préjudice imputable à elle-même ;

-condamner toute partie perdante aux entiers dépens dont distraction au profit de maître Audrey Robert, avocat au barreau de Saint-Denis, en application de l`article 699 du Code de procédure civile.

En réplique, la société Predica indique que les contrats comportaient intrinsèquement un aléa, qu'il n'y a eu aucune volonté de se dépouiller de la part de Mme [I] en ce qu'elle avait gardé la maîtrise sur son épargne, et procédé d'ailleurs à deux rachats partiels grâce à un régime fiscal favorable et sans frais ni pénalités, contrairement à ce que les appelants allèguent. Même si elle était âgée au moment de souscrire lesdits contrats d'assurance vie, son décès n'était pas prévisible d'autant qu'il n'est survenu que 9 années plus tard.

Elle ajoute que la requalification en donation indirecte est inutile dès lors que le législateur a prévu un dispositif spécifique permettant aux héritiers lésés d'obtenir la réintégration à la succession des primes versées par le souscripteur s'ils établissent le caractère manifestement exagéré de ces primes.

*****

Par acte du 25 septembre 2018, la déclaration d'appel et les conclusions des appelants ont été régulièrement signifiées à étude à [R] [I] et [U] [E], lesquels n'ont ni conclu ni constitué avocat devant la cour d'appel.

A l'audience du 20 août 2021, la décision a été mise en délibéré au 12 novembre 2021 par mise à disposition au greffe, délibéré qui a été prorogé au 28 décembre 2021.

Par avis du 11 novembre 2021, la cour a appelé les parties à présenter leurs observations, jusqu'au 6 décembre 2021, sur :

-Les conséquences du caractère indivisible du litige en cas d'irrecevabilité de l'appel de [Y] [I], co-indivisaire ;

-La recevabilité de son intervention volontaire au regard de sa qualité de tiers à la procédure.

Le 6 décembre 2021, les appelants et intervenants font valoir, en réponse, que l'appel de [Y] [I] est recevable en raison de l'indivisibilité du litige ; l'appel de ses frères et s?urs produisant effet à son égard, même s'il était absent de la procédure de première instance et même après l'expiration du délai d'appel. Ils indiquent que si, par extraordinaire, son appel était irrégulier, il ne pourrait entraîner l'irrecevabilité de celui des autres appelants.

A titre subsidiaire, ils indiquent que l'intervention de [Y] [I] a régularisé la procédure. Son intervention volontaire est, en effet, recevable puisqu'il est tiers à la procédure de première instance, où il n'a ni comparu ni été représenté, et dans la mesure où il est membre à part entière de la succession et que le jugement lui porte préjudice. En revanche, son intervention ne porte pas préjudice aux appelants eu égard à l'article 324 du code civil, l'indivisibilité du litige n'étant pas l'indivisibilité de l'acte d'appel où chaque partie est indépendante dans ses droits.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel de M. [Y] [I] et son intervention volontaire

Vu les article 546, 552, 553 et 554 du Code de procédure civile,

Il convient de relever que [Y] [I] n'a pas été partie devant les premiers juges. Son appel est irrecevable.

Considérant que l'appel de [Y] [I] était une erreur matérielle, les appelants et intervenants sollicitent qu'il intervienne volontairement à la procédure.

Si aux termes de l'article 554 du même code, peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, il convient de dire que ces dispositions ne peuvent s'appliquer qu'aux tiers qui n'ont été ni parties, ni représentés en première instance ou qui y ont figuré sous une autre qualité. Il ne saurait, en revanche, concerner et être invoqué par un coindivisaire qui a omis, volontairement ou non, d'agir en première instance dans la mesure où il n'a manifestement pas la qualité de tiers exigée.

Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 554 et 555 du code de procédure civile que peuvent être appelées devant la cour les personnes qui n'ont pas été parties en première instance, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause. L'évolution doit être caractérisée par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit née du jugement ou postérieure, modifiant les données juridiques du litige.

Toutefois, en raison du caractère indivisible du litige concernant des héritiers coindivisaires, l'appel de ces derniers et les interventions volontaires ne peuvent être déclarés recevables.

Les appelants et intervenants volontaires supporteront in solidum les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par défaut en dernier ressort,

Déclare irrecevables l'appel et l'intervention volontaire formés par [Y] [I] ;

Déclare, par voie de conséquence, irrecevable l'appel de Marie [Z] [T] [I] épouse [GC], [JU] [I] épouse [YP], [P] [TN] [I], [YY] [SA] [I], [T] [N] [I], [NU] [I] épouse [A], [MS] [SU] [I], [DA] [K] [I] épouse [IS], [MS] [BY] [I], [LY] [NA] [I], [DA] [PP] [I], [BB] [I] ;

Déclare, par voie de conséquence, irrecevables les interventions volontaires de [P] [W] [I], [OW], [P] [RS] [I], [C] [I], [DA] [G] [I] épouse [TW], [X] [I], [DA] [HY] [I] épouse [XW] [PY], [FA] [P] [L] [I] en qualité d'ayant-droit de [P] [TN] [I] décédé le [Date décès 18] 2018, [KW] [YP], [B] [V] [YP], [KC] [P] [YP] en leur qualité d'ayant-droit de [JU] [I] épouse [YP] décédée le [Date décès 5] 2019, [GW] [DE] née [YP], [P] [ZS] [YP] en leur qualité d'ayant-droit de [MS] [UY] [YP] décédé, fils de [JU] [I] épouse [YP] décédée le [Date décès 5] 2019, [DA] [F] [I] divorcée [FU] venant aux droits de [DA] [P] [S] [IS] [S] [I] ;

Condamne in solidum les appelants et les intervenants volontaires aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Nathalie TORSIELLO, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT
Signe


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 18/010371
Date de la décision : 28/12/2021
Sens de l'arrêt : Déclare la demande ou le recours irrecevable

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2021-12-28;18.010371 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award