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03/12/2021 | FRANCE | N°20/005831

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 04, 03 décembre 2021, 20/005831


ARRÊT No
PC

No RG 20/00583 - No Portalis DBWB-V-B7E-FLHX

[X]

C/

[B]
S.A. [E] BANQUE POPULAIRE

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2021

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 18 DECEMBRE 2019 suivant déclaration d'appel en date du 21 MARS 2020 RG no 19/00076

APPELANTE :

Madame [T], [H] [X] épouse [B]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Florence CHANE-TUNE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNIO

N

INTIMÉS :

Monsieur [R] [B]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Xavier BELLIARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA...

ARRÊT No
PC

No RG 20/00583 - No Portalis DBWB-V-B7E-FLHX

[X]

C/

[B]
S.A. [E] BANQUE POPULAIRE

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2021

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 18 DECEMBRE 2019 suivant déclaration d'appel en date du 21 MARS 2020 RG no 19/00076

APPELANTE :

Madame [T], [H] [X] épouse [B]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Florence CHANE-TUNE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉS :

Monsieur [R] [B]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Xavier BELLIARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

S.A. [E] BANQUE POPULAIRE
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Marie françoise LAW YEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 24 Juin 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Octobre 2021 devant Monsieur CHEVRIER Patrick, Président de chambre, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2021.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Mme Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré
Greffier : Mme Nathalie TORSIELLO

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 03 Décembre 2021.

* * *

LA COUR :

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte sous seing privé, en date du 08/05/2003, Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] ont solidairement souscrit, auprès de la [E] BANQUE POPULAIRE, un prêt immobilier de 114.000,00 euros devant être remboursé en 144 mensualités de 1.062,19 euros au taux de 4,40 % à compter du 04/07/2003.

Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] ont sollicité des délais de paiement invoquant des difficultés passagères. Un avenant a été signé entre les parties le 09/05/2007 modifiant le montant initial de l'échéance du prêt la ramenant à la somme de 757 euros au lieu de 1062,19 euros, portant ainsi la durée à courir à 152 mois. Le prêt a également fait l'objet d'un plan de rattrapage en date du 26/12/2015 pour le report de sept échéances (30/01/2016 au 30/07/2016).

Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] ont déposé un dossier de surendettement auprès de la Commission de surendettement de la REUNION le 12 mai 2016. Leur demande a été déclarée recevable le 30 juin 2016. La [E] BANQUE POPULAIRE a déclaré sa créance le 11 juillet 2016. Un plan définitif d'apurement est intervenu le 27 octobre 2016.

Monsieur [R] [B] a redéposé seul un dossier de surendettement auprès de la Commission de surendettement de la REUNION le 19/09/2017, déclaré recevable le 26 octobre 2017. La [E] BANQUE POPULAIRE a déclaré ses créances le 6 novembre 2017.

L'ouverture des mesures recommandées est intervenue en date du 22 février 2018. La validation desdites mesures a été notifiée à la [E] le 03 avril 2018. Le plan a été établi sur 73 mois, en reprenant les différentes créances de la [E]. Les règlements devaient débuter le 31 mai 2018.

Alléguant la défaillance de Madame [H] [B] dans le respect de ses obligations de remboursement du prêt, conformément au plan d'apurement, la [E] BANQUE POPULAIRE s'est prévalu de la déchéance du terme le 23 avril 2018, rendant exigible le solde de la créance.

Puis, par acte des 7 et 11 décembre 2018, la [E] BANQUE POPULAIRE a saisi le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion aux fins d'obtenir la condamnation solidaire de Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à lui payer diverses sommes.

Par jugement en date du 18 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Saint-Denis a statué en ces termes :

-CONDAMNE solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à payer à la [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 3.977,90 euros, outre intérêts au taux contractuel de 4,40 % à compter du 23/04/2018 ;

-CONDAMNE solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à payer à la [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 25.758,98 euros, outre intérêts au taux contractuel de 4,40 % à compter du 23/04/2018 ;

-CONDAMNE solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à payer à la [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

-ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement ;

-CONDAMNE solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] aux dépens dont distraction pour ceux dont il n'a pas reçu provision au profit de Maître Françoise LAW-YEN, avocats aux offres de droit, conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Par déclaration déposée au greffe de la cour par voie électronique le 21 mars 2020, Madame [T] [H] [X], épouse [B], a relevé appel de cette décision.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état par ordonnance en date du 3 avril 2020.

L'appelante a déposé ses premières conclusions au greffe de la cour par RPVA le 19 juin 2020.

Puis, l'appelante a signifié la déclaration d'appel, le jugement et ses conclusions d'appelante à Monsieur [R] [B] par acte d'huissier délivré le 18 juin 2020.

La société [E] BANQUE POPULAIRE, a déposé ses conclusions par RPVA le 17 septembre 2020.

Monsieur [R] [B] a déposé ses conclusions par RPVA le 18 septembre 2020.

Les parties ont été invitées à conclure pour la cour sur l'effet dévolutif de la déclaration d'appel par un message RPVA du conseiller de la mise en état en date du 11 mars 2021.

La clôture est intervenue le 24 juin 2021.

Par dernières conclusions d'appel No 3, déposées par RPVA le 6 mars 2021, Madame [B] demande à la cour de :

-INFIRMER le jugement dans sa totalité,

Statuant à nouveau :
-DIRE ET JUGER que :

* la [E] a octroyé un crédit immobilier à Madame [T] [H] [X] épouse [B] et Monsieur [R] [B] le 8 mai 2003 ;
*les parties ont signé un avenant portant diminution des échéances et allongement de la durée du crédit par acte du 9 mai 2007 ;
* les parties ont signé un plan de rattrapage le 26 décembre 2015.

A titre principal, sur la déchéance du droit aux intérêts de la [E]
-DIRE ET JUGER que la [E] n'a pas respecté le formalisme du contrat de crédit litigieux car ne sont notamment pas mentionnés les éléments suivants :
- nature, objet ou modalités du prêt, notamment celles relatives aux dates et conditions de mise à disposition des fonds,

- fractions périodiquement disponibles du crédit,

- assurances et les sûretés réelles ou personnelles exigées et qui conditionnent la conclusion du prêt,

- la totalité des dispositions de l'article L. 312-10 du Code de la consommation

A titre subsidiaire, sur la substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel :
DIRE ET JUGER que :
- la [E] n'a communiqué ni la durée de période du TEG ni le taux de période du TEG ;
- le second plan de surendettement établi au profit de Monsieur [R] [B] ne comprend aucun taux d'intérêt contractuel au profit de la [E];

Par conséquent,
-PRONONCER la déchéance de la totalité du droit aux intérêts sollicités par la [E] à savoir les intérêts au taux contractuel de 4,40% à compter de la signature du contrat de prêt du 8 mai 2003, les indemnités contractuelles ou intérêts légaux quels qu`ils soient ;

-ENJOINDRE la [E] de verser aux débats un décompte comprenant les sommes payées Madame [T] [H] [B] et Monsieur [R] [B] jusqu'à ce jour, afin que la Cour de céans soit en mesure d'évaluer précisément la créance due par Monsieur [R] [B] et prononcer la condamnation de la [E] à rembourser les intérêts conventionnels éventuellement versés ;

A défaut.
-DIRE ET JUGER que le taux d'intérêt légal se substituera au taux d'intérêt conventionnel initialement prévu depuis la signature du contrat ;

A titre très subsidiaire, sur l'absence de respect de formalisme de l''avenant au contrat de prêt :
-DIRE ET JUGER que l'avenant signé le 9 mai 2007 entre les parties ne respecte pas le formalisme prévu par loi puisqu'aucune nouvelle offre préalable ni aucun nouvel échéancier n'ont été remis aux co-emprunteurs solidaires ;

-DIRE ET JUGER que la [E] n'a pas édité une nouvelle offre de prêt au moment de la signature de l'avenant du 9 mai 2007 ;

-DIRE ET JUGER que la [E] n'a pas respecté son devoir de mise en garde envers Madame [T] [H] [X] épouse [B] ;

Par conséquent,
-CONDAMNER la [E] à payer à Madame [T] [H] [X], épouse [B], des dommages-intérêts, au titre de la perte de chance de ne pas contracter, pour une somme qui ne saurait être inférieure à celles prétendument dues et réclamées par la [E] à ce dernier, au titre du présent litige, en raison de l'absence d'émission d'une nouvelle offre de prêt au moment de la signature de l'avenant du 9 mai 2007 ;

-PRONONCER la compensation entre les sommes dues par la [E] au titre de ces dommages-intérêts avec les sommes auxquelles Madame [T] [H] [X] épouse [B] serait éventuellement condamnée ;

A titre très très subsidiaire, sur la prise en compte des mesures imposées par la Commission de surendettement :
DIRE ET JUGER que :
- Monsieur [R] [B] a payé régulièrement les échéances de prêt de la [E] conformément aux mesures imposées par la Commission de surendettement depuis son entrée en vigueur ;
- au 18 septembre 2020, la créance de la [E] envers les époux [B], et particulièrement envers Monsieur [B], était limité aux sommes de 2.268,67 euros et 17.037,94 euros ;

-DIRE ET JUGER que les échéances payées par Monsieur [R] [B] à la [E], depuis l'entrée en vigueur du plan de surendettement, doivent être déduites des sommes réclamées par la [E] (sommes à parfaire au jour de la décision à intervenir) ;

Si par extraordinaire, Madame [T] [H] [B] est condamnée par la Cour de céans,
-DIRE que la décision à intervenir ne se substitue pas au plan de surendettement en cours à l'encontre de Monsieur [R] [B] ;

-DIRE que la présente décision ne pourra être mise à exécution qu'après demande de caducité dudit plan, consécutive à un éventuel défaut d'exécution du plan par Monsieur [R] [B] ;

-DIRE que dans cette hypothèse, le solde à recouvrer correspondra à la différence entre les sommes de 24.135,38 euros et 3.317,42 euros mentionnés aux plans de surendettement et les règlements effectués par Monsieur [R] [B] en exécution du plan de surendettement en cours ;

-DIRE qu`au cas où l'action en recouvrement serait engagée contre Madame [T] [H] [X], épouse [B], il devra lui être octroyé les plus larges délais de paiement ;

En tout état de cause,
-DEBOUTER la [E] de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires ;

-DIRE ET JUGER que la [E] est de mauvaise foi ;

-CONDAMNER la [E] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance et d'appel.

Par conclusions d'intimé déposées par RPVA le 18 septembre 2020, Monsieur [R] [B] demande à la cour de :

-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur [B] à payer les intérêts au taux contractuel de 4,40 % à compter du 23/4/2018, et en ce qu'il a fixé la créance principale de la banque aux sommes de 3 977,90 Euros et 25 924,66 Euros ;

STATUANT A NOUVEAU
-Débouter la société [E] BANQUE POPULAIRE de sa demande de condamnation aux intérêts au taux contractuel de 4,40 % à compter du 23 avril 2018, en ce qu'elle est dirigée à l'endroit de Monsieur [B] ;

-Déduire des sommes dues par Monsieur [B] les règlements qu'il opère au profit de la société [E] BANQUE POPULAIRE dans le cadre de son plan de surendettement ;

-Limiter aux sommes de 2 268,67 Euros et 17 037,94 Euros, montants arrêtés au 18/9/2020, les condamnations ayant vocation à intervenir à l'endroit de Monsieur [B] ;

-Débouter la société [E] BANQUE de sa demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'elle est dirigée à l'endroit de Monsieur [B] ;

-Condamner la société [E] BANQUE à payer à Monsieur [R] [B] la somme de 1 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Statuer comme de droit sur les dépens.

Par conclusions d'intimée No 5, déposées par RPVA le 28 mai 2021, la société [E] BANQUE POPULAIRE demande à la cour de :

-Confirmer purement et simplement le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Saint-Denis de la Réunion, le 18/12/2019 et pour cela de :

-Juger Madame [T] [H] [B] et Monsieur [R] [B] prescrits et irrecevables en leurs demandes de déchéance du droit aux intérêts, de nullité et de substitution du taux d'intérêt, ainsi que de dommages-intérêts ;

-Dire l'appel mal fondé ;

-Débouter Madame [B] et Monsieur [R] [B] de l'ensemble de leurs demandes, ou à tout le moins, les ramener à de plus justes proportions ;

En conséquence :

-CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à payer à la [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 3.977,90 euros, outre intérêts au taux contractuel de 4,40 % à compter du 23/04/2018 ; Sous déduction des acomptes réglés qui s'imputent en priorité sur les frais et intérêts, soit 1.740,77 euros (arrêté au 09/03/21) ;

-CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à payer à la [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 25.758,98 euros, outre intérêts au taux contractuel de 4,40 % à compter du 23/04/2018 ; Sous déduction des acomptes réglés qui s'imputent en priorité sur les frais et intérêts, soit 10.350,56 euros (arrêté au 09/03/21) ;

-CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] à payer à la [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] aux dépens dont distraction pour ceux dont il n'a pas reçu provision au profit de Maître Françoise LAW-YEN, avocats aux offres de droit, conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Y ajoutant :
Dans le cas où des délais seraient accordés, juger qu'à défaut de paiement d'une seule échéance à sa date exacte, sans mise en demeure préalable, l'échelonnement de la dette sera caduc et la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible,

-Condamner Madame [T] [H] [B] à payer à [E] BANQUE POPULAIRE la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Condamner solidairement Monsieur [R] [B] et Madame [T] [H] [B] en tous les dépens de première instance et d'appel, et dont distraction pour ceux dont il n'a pas reçu provision au profit de Maître Françoise LAW-YEN, avocats aux offres de droit, conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile.

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La cour a adressé aux parties un avis par message RPVA le 25 octobre 2021, afin de recueillir leurs observations sur l'éventuelle absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel nonobstant la demande du conseiller de la mise en état de mettre leurs conclusions en forme sur ce point.

L'appelante a répondu par conclusions No 3 déposées par RPVA le 25 octobre 2021.

Elle soutient que son appel est recevable et régulier.

Pour faire valoir la régularité de la déclaration d'appel, Madame [X] [B] invoque les termes de la circulaire du 4 août 2017 prise en application du décret du 6 mai 2017, modifié par le décret 11o 2017-1227 du 2 août 2017, prévoyant qu'en cas de difficulté technique, on puisse développer sa motivation par le biais d'une pièce jointe. Il n'est pas prévu, à l'occasion de cette circulaire, que les chefs de jugement critiqués doivent être récapitulés en partie dans le corps de la déclaration d`appel et, en cas d'insuffisance de caractères, poursuivis dans un fichier joint.

En outre, l'intimée ne subit aucun grief en raison de cette éventuelle irrégularité car le cadre dédié à la motivation de l'appel n`est pas vide mais précise : « pièce jointe. ??

Au demeurant, la [E] a constitué ministère d`avocat le 16 avril 2020 et a réceptionné les conclusions et pièces de la concluante le 19 juin 2020. Monsieur [R] [B] a été assigné devant la chambre civile par acte du 18 juin 2020 avec signification de déclaration d'appel, de jugement, de conclusions et de pièces, de sorte que ce dernier était parfaitement au courant des chefs de jugement critiqués, outre le fait qu'il a constitué ministère d'avocat le 24 juillet 2020, ce dernier ayant eu connaissance de toute l'argumentation du dossier.

Quant à la Cour, elle est nécessairement saisie par la déclaration d'appel et les fichiers joints à ladite déclaration d`appel. Considérer que la Cour d'appel ne serait pas saisie reviendrait à nier l'existence même du RPVA.

Selon l'appelante, dans le cadre d'une bonne administration de la Justice, cela paraît étonnant que la chambre civile de la Cour d'appel soulève ce moyen alors que cela n`a jamais posé de difficulté depuis l`entrée en vigueur de la réforme et de la circulaire de l'année 2017. Ce type de décision engendrerait des conséquences dramatiques eu égard à l'enjeu du dossier et aux conséquences car il va de soi qu'une personne qui bénéficie d'un surendettement ne pourra raisonnablement envisager un recours, et ce, pour des raisons d'exécution de droit et financières.

La [E] a déposé de nouvelles conclusions par RPVA le 29 octobre 2021, s'en rapportant sur l'éventuelle absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel.

MOTIFS

Sur l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel :

Le Conseiller de la mise en état, faisant application des prescriptions de l'article 913 du code de procédure civile, a invité les parties à conclure pour la cour sur l'éventuelle absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel.

Seule l'appelante a répondu par message en date du 12 avril 2021 sans intégrer ses réponses à des conclusions pour la cour.

Aussi, suite à un nouveau message adressé par la cour, il convient de rappeler que l'article 562 du code de procédure civile dispose que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Il résulte en effet du texte précité que seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Aussi, lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.

L'appelante affirme que l'énoncé de la motivation de la déclaration d'appel dans le document annexé suffit à préciser la saisine de la cour d'appel. Cette annexe est autorisée dans la mesure où le RPVA, dans le corps de la déclaration d'appel ne permet pas un nombre de lignes suffisant pour détailler les motifs de l'appel comme la loi l'exige. Invoquant la circulaire du 4 août 2017 présentant les dispositions du décret No 2017-891 du 6 mai 2017, l'appelante rappelle qu'une pièce jointe détaillant les motifs de l'appel peut être jointe à la déclaration d'appel, le RPVA ne permettant l'envoi que de 4080 caractères. En outre, Madame [B] considère que cette situation ne cause aucun grief aux parties puisque celle-ci ont pu se constituer et répondre aux moyens soulevés par l'appelante.

Ceci étant exposé, la case prévue dans la déclaration d'appel, relative à l'objet ou la portée de l'appel, mentionne : « Objet/Portée de l'appel : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués (cf documents détaillant les motifs de l'appel, ci-joint). Il sera également joint ; La copie du jugement querellé, un timbre dématérialisé et la liste des pièces jointes sur laquelle la demande est fondée, et figurant dans un bordereau de communication de pièces. »

Ainsi, cet acte ne contient aucune précision sur les chefs de jugement critiqués.

En outre, l'annexe joint à la déclaration d'appel est ainsi rédigée :
« MOTIFS DE L'APPEL INTERJETE LE 21 MARS 2020
Sur un jugement du TGI DE Saint-Denis en date du 18 décembre 2019 (RG No 10 :00076)
Devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
(Dossier [T] [H] [B] / [E] et [R] [B])
Vu le code de l'organisation judiciaire, spécialement l'article L. 221-4 ;
Vu le code de procédure civile, spécialement les articles 96 alinéa 2 et 1343-5 ;
Vu le code de la consommation, spécialement les articles L. 330-1 et suivants et R. 334-3 et suivants ;
Vu les pièces versées aux débats ;
Dire et juger recevable l'action formée par Madame [T] [H] [B] et dire ses demandes bien fondées ;
A titre principal sur le risque d'enrichissement sans cause
Prendre acte que :
? un plan de surendettement englobant la dette réclamée est toujours en cours est valable au profit de Monsieur [B] ;
? Qu'aucune lettre de mise en demeure restée faite pendant 15 jours n'a été adressée à Monsieur [B] préalablement à la présente action ;
?? le dernier plan de surendettement profitant exclusivement à Monsieur [B] pour la totalité de la dette de la [E] en date du 26 octobre 2017 n'est pas résilié ;
Dire et juger que la [E] n'est recevable à formuler aucune demande financière à l'égard de Madame [B] en raison du plan de surendettement en cours au profit de Monsieur [B] et qu'à défaut, il existerait un enrichissement sans cause ;
Par conséquent,
Infirmer le jugement querellé dans toutes ses dispositions ;
Débouter la [E] et Monsieur [R] [B] de leurs demandes, fins et conclusions;
A titre subsidiaire, dans le cas où le tribunal de céans condamnerait tout de même Madame [T] [L] [B],
Accorder les plus larges délais de paiement à Madame [T] [H] [B] ;
Condamner Monsieur [R] [B] à relever et garantir Madame [T] [H] [B] de toute condamnation ;
Reconventionnellement,
DIRE ETJUGER :
?certaines dispositions de l'article L. 312–10 du code de la consommation ne figuraient pas dans le contrat de prêt litigieux ;

?que la [E] n'a pas respecté son devoir de mise en garde envers l'emprunteur ;
?que la [E] ne fait mention ni de la durée de la période du taux effectif global ni du taux de période du TEG ;
En conséquence,
Prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la [E];
Ordonner la substitution du taux d'intérêt conventionnel au taux d'intérêt légal;
Condamner la [E] à payer à Madame [T] [H] [B] des dommages et intérêts en raison de son manquement à son devoir de mise en garde dont le montant ne saurait être inférieur à la somme réclamée par la [E] aux époux [B] ;
En tout état de cause,
Débouter la [E] et Monsieur [R] [B] de toute demande, cinq et conclusions à l'égard de Madame [T] [H] [B] ;
Condamner solidairement la [E] et Monsieur [R] [B] à payer à Madame [T] [H] [B] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d'instance et d'appel. »

La simple lecture de ce document établit qu'il contient exactement 3.000 caractères, espaces compris.

Ainsi, le cadre destiné à recueillir les chefs de jugement critiqué dans la déclaration d'appel permettait à l'appelante de saisir valablement la cour, sans préjudice d'un examen de l'annexe.

A cet égard, la circulaire du Ministère de la justice du 04 août 2017 no 2017-891 précise dans son annexe 1 que, dans la mesure où le RPVA ne permet l'envoi que de 4080 caractères, il pourra être annexé à la déclaration d'appel une pièce jointe la complétant afin de lister l'ensemble des points critiqués du jugement. Cette pièce jointe, établie sous forme de copie numérique, fera ainsi corps avec la déclaration d'appel.

Or, la déclaration d'appel ne contient même pas le début des chefs de jugement critiqués.

L'annexe à la déclaration d'appel n'est pas la déclaration d'appel prévue par l'article 901-4o du code de procédure civile puisqu'elle ne pourrait être autorisée que dans la mesure où elle compléterait la déclaration d'appel.

Dès lors, s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel devait dépasser la taille maximale de 4080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel et qui ne pourrait en être que le complément indispensable.

A défaut, aucun effet dévolutif ne peut être attaché à cette annexe, le caractère indivisible des dispositions du jugement critiqué n'ayant aucun effet sur le nombre de caractères disponibles dans la déclaration d'appel.

Enfin, contrairement à ce que soutient l'appelante, la jurisprudence de la chambre civile de la cour d'appel est nettement fixée depuis plus d'une année sur ce point.

En conséquence, il convient de constater qu'en l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel, la cour n'est pas saisie des chefs de jugement critiqués.

Sur les autres demandes :

L'appelante supportera les dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en matière civile et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

CONSTATE l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel formée le 21 mars 2020 par Madame [T] [H] [X], épouse [B] ;

DIT que la cour n'est saisie d'aucune demande de la part de l'appelante ;

CONDAMNE Madame [T] [H] [X], épouse [B], à payer à la [E] la somme de 1.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [T] [H] [X], épouse [B], aux dépens dont distraction au profit de Maître Françoise LAW-YEN, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Nathalie TORSIELLO, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/005831
Date de la décision : 03/12/2021
Sens de l'arrêt : Dit n'y avoir lieu à prendre une mesure en raison du défaut de pouvoir

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2021-12-03;20.005831 ?
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