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26/11/2021 | FRANCE | N°19/024921

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 05, 26 novembre 2021, 19/024921


ARRÊT No
MI

No RG 19/02492 - No Portalis DBWB-V-B7D-FIGL

[I]
[I]

C/

Société SOCIETE IMMOBILIERE DU DEPARTEMENT DE LA REUNION (S.I.D.R.)

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRET DU 26 NOVEMBRE 2021

Chambre civile TI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 11 JUILLET 2019 suivant déclaration d'appel en date du 19 SEPTEMBRE 2019 rg no 19 000625

APPELANTS :

Monsieur [F] [I]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Jean patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS AS

SOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/7636 du 23/10/20...

ARRÊT No
MI

No RG 19/02492 - No Portalis DBWB-V-B7D-FIGL

[I]
[I]

C/

Société SOCIETE IMMOBILIERE DU DEPARTEMENT DE LA REUNION (S.I.D.R.)

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRET DU 26 NOVEMBRE 2021

Chambre civile TI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 11 JUILLET 2019 suivant déclaration d'appel en date du 19 SEPTEMBRE 2019 rg no 19 000625

APPELANTS :

Monsieur [F] [I]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Jean patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/7636 du 23/10/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

Madame [R] [T] [I]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Jean patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/7635 du 23/10/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMÉE :

SOCIETE IMMOBILIERE DU DEPARTEMENT DE LA REUNION (S.I.D.R.)
Société Anonyme d'Economie Mixte créée en application de l'article 2 de la loi du 30 avril 1946, inscrite au Registre du Commerce sous le no 74 B 118, au capital de 125.000.000 € et représentée par son Directeur Général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Marie françoise LAW YEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

CLOTURE 11 Mars 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Septembre 2021 devant Mme Magali ISSAD, conseillère qui en a fait un rapport, assistée de Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2021.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président :Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Mme Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré

Greffier: Mme Nathalie TORSIELLO

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 26 Novembre 2021.

* * *
LA COUR

Exposé du litige

Suivant contrat de bail en date du 25 novembre 2015, la société immobilière du Département de la Réunion(SIDR) a donné en location un appartement de type T5 au sein du groupement d'habitations dénommé « [Localité 6] » sis [Adresse 7]) à Monsieur [F] [I] et à Madame [R] [T] [I] moyennant un loyer mensuel fixé à la somme de 580,78 euros dont 128,40 euros de provision pour charges, payable d'avance et exigible le 1er de chaque mois.

Un état des lieux d'entrée a été dressé contradictoirement entre les parties le 26 novembre 2015 et a fait état d'un logement neuf.

Les preneurs ont été défaillants dans l'exécution de leur obligation en paiement, en ne s'acquittant pas dès les premiers mois suivant la signature du bail, de leurs loyers à leur terme, accumulant ainsi des impayés de loyers.

Le 18 juin 2018 un courrier de mise en demeure a été adressé par la SIDR aux époux [I] .

Le 24 août 2018, la SIDR a fait délivrer un commandement de payer les loyers aux époux [I] pour un montant de 5.613,72 euros en principal, outre les frais (215,06 euros), visant de surcroît la clause résolutoire du contrat de bail.

Par courrier en date du 14 janvier 2019, la SIDR a saisi la CCAPEX. Le commandement étant resté sans effet, la SIDR a saisi le 25 mars 2019 le tribunal d'instance de Saint-Denis aux fins de résiliation du bail conclu avec les époux [I] et de recouvrement des sommes dues.
La SIDR a notifié par courrier en date du 26 mars 2019 l'assignation au Préfet.

Bien que régulièrement convoqués, Monsieur et Madame [I] ne se sont ni présentés ni faits représenter à l'audience du tribunal qui s'est tenue le 17 juin 2019.

Par jugement réputé contradictoire en date du 11 juillet 2019, le tribunal d'instance de Saint Denis de la Réunion a :

-constaté la résiliation du bail à compter du 24 octobre 2018 ;

-condamné Monsieur et Madame [I] solidairement à payer à la société immobilière du Département de la Réunion (SIDR) une somme de 7964,99 euros au titre des loyers, charges et indemnités d‘occupation échus et impayés au 6 juin 2019 pour l'occupation du bien situé [Adresse 1], et ce avec intérêt au taux légal à compter de la date du présent jugement ;

-condamné Monsieur et Madame [I] in solidum à payer à la société immobilière du Département de la Réunion (SIDR) une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de non résiliation du bail jusqu'à la libération effective des lieux ;

-dit qu'à défaut pour Monsieur et Madame [I] d'avoir libéré les lieux situés [Adresse 1] deux mois après la signification du commandement d'avoir à quitter les lieux, il sera procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l'assistance de la force publique et le recours à un serrurier, si besoin est;

-rappelé qu'en cas d'expulsion, les meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux suivront le sort prévu par l'article 65 de la loi du 09 juillet 1991 ;

-rappelé que les opérations d'expulsion ne pourront pas être mises en oeuvre suivant les dates prévues sur l'île de la Réunion

-rappelé que le bailleur doit également faire preuve de bonne foi et de loyauté dans l'exécution de ses obligations ;

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné Monsieur et Madame [I] in solidum aux dépens, qui comprendront le coût du commandement de payer.

Par actes d'huissier du 5 septembre 2019, la SIDR a fait délivrer aux consorts [I] un commandement de quitter les lieux et un commandement de saisie vente.

Par déclaration au greffe du 19 septembre 2019, Monsieur et Madame [I] ont relevé appel du jugement du 11 juillet 2019.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 mars 2021.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans leurs conclusions notifiées par RPVA le 23 novembre 2020, Monsieur et Madame [I] demandent à la cour, au visa de la loi du 6 juillet 1989 et des articles 1719 et suivants du code civil de :

-dire et juger les époux [I] recevables en leur appel et les y déclarer bien fondés ;

En conséquence,
-reformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

Statuant à nouveau :

-débouter la SIDR de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

-condamner la SIDR au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du trouble de jouissance subi par Monsieur et Madame [I] ;

-ordonner, le cas échéant, la compensation des obligations réciproques entre la SIDR et Monsieur et Madame [I] ;

En tout état de cause
-condamner la SIDR à payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

-condamner la SIDR aux entiers dépens.

Monsieur et Madame [I] sollicitent la réformation du jugement entrepris, la condamnation à titre reconventionnel de la SIDR à réparer le trouble de jouissance dont ils ont été victime et la compensation entre la dette locative et leur créance sur la SIDR.
Ils rappellent que le bailleur est tenu de délivrer au preneur un logement décent, qu'il doit y faire pendant la durée du bail toutes les réparations et qu'il doit assurer la jouissance paisible du logement.
Ils exposent avoir subi de nombreux désordres dès 2016, consistant en des infiltrations qui n'ont été réparées qu'au bout de plusieurs mois conduisant ainsi la SIDR à leur accorder une réduction du loyer. Ils font état de nouveaux désordres en 2018 et de la lenteur dans la mise en oeuvre des travaux qui ont eu des conséquences non négligeables sur leur santé et sur celles de leurs enfants.
Ils font observer que l'importance de ces désordres a conduit la CAF à constater la non décence du logement le 09 avril 2020.
Ils réclament au titre du préjudice de jouissance une somme de 10.000 euros et sa compensation avec la dette de loyer.

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 04 mars 2021, la SIDR demande à la cour au visa des articles 1719, 1728 et 1103 du Code Civil, des articles 7 et 24 de la loi du 6 juillet 1989 et du décret no 2002-120 du 30 janvier 2002 de :

-juger l'appel interjeté par Monsieur et Madame [I] infondé et le rejeter ;

-les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
-prendre acte que Monsieur et Madame [I] ont restitué les locaux loués à la SIDR le 17 juin 2020 ;

-confirmer le jugement rendu par le Tribunal d'instance de SAINT-DENIS en date du 11 juillet 2019 en toutes ses dispositions, sauf à accorder la révision du montant de l'indemnité d'occupation, à actualiser la créance de la SIDR, et à donner acte à la SIDR que la mesure d'expulsion n'est plus nécessaire en raison du départ effectif des époux [I] ;

-juger par conséquent que l'indemnité d'occupation augmentée des charges locatives telle que fixée par le jugement entrepris sera révisable dans les mêmes conditions stipulées au contrat de bail pour les loyers et charges ;

- condamner solidairement Monsieur et Madame [I] à payer à la SIDR les sommes suivantes :

*10.830,93 euros euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation échus et impayés, augmentés des intérêts aux taux légal à compter de la date du jugement du 11 juillet 2019 ;

*3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-condamner solidairement Monsieur et Madame [I] à supporter les entiers dépens ;

-confirmer pour le surplus le jugement entrepris ;

Subsidiairement, si par extraordinaire, la Cour de céans faisait droit à la demande des époux [I] et entendait leur octroyer une indemnité au titre du préjudice de jouissance, ramener le montant des dommages et intérêts à de plus justes proportions compte tenu du caractère excessif du montant sollicité par les époux [I] et ordonner la compensation à due concurrence entre les sommes à régler entre les parties.

La société SIDR sollicite la confirmation de la résiliation du bail pour non-paiement des loyers par les époux [I]'H.
Le bailleur expose qu'aux termes de la loi et du bail, les locataires sont tenus de payer le loyer et les charges au terme convenu et qu'à défaut de paiement, il doit être fait application de la clause résolutoire.
Il rappelle que les époux n'ont effectué aucun règlement depuis le début de l'année 2016, qu'il leur a été délivré un commandement de payer visant la clause résolutoire qui a produit ses effets le 24 octobre 2018 et qu'en dépit de cette résiliation, les consorts [I] ont continué à occuper le logement sans droit ni titre.
Le bailleur sollicite la condamnation des preneurs après actualisation, au paiement de la somme de 10 830,93 euros au titre des loyers et charges impayés ainsi que de l'indemnité d'occupation révisée dans les mêmes conditions que celles stipulées au contrat de bail pour le loyer et des charges.

La société SIDR déclare renoncer à la mesure d'expulsion dès lors que les époux ont quitté les lieux le 17 juin 2020.
La société SIDR soutient que la demande formée par les époux en réparation du préjudice au titre du trouble de jouissance pour indécence du logement et de compensation avec la dette locative est irrecevable car nouvelle en cause d'appel.
Le bailleur sollicite le rejet de la demande en réparation d'un prétendu trouble de jouissance et conteste toute indécence du logement relevant que les époux [I] n'en rapportent pas la preuve pas plus qu'ils ne caractérisent ni ne démontrent l'existence et l'étendue du trouble de jouissance dont ils se prévalent.

La société SIDR fait observer que :

-aucun des désordres relevés en 2016 ne sont pas de nature à empêcher une utilisation paisible du logement et qu'elle est intervenue lorsque des désordres ont été portés à sa connaissance ;

- le courrier de la CAF du 09 avril 2020 constatant l'indécence du logement ne précise aucunement les désordres.

La SIDR remarque que la demande formulée au titre du préjudice de jouissance est prescrite s'agissant des désordres survenus en 2016 et que s'agissant de l'indécence du logement relevée par la CAF en 2020, les locataires qui sont occupants sans droit ni titre ne sauraient se prévaloir d'un quelconque manquement du bailleur à leur égard.

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande reconventionnelle de réparation du trouble de jouissance

La société SIDR ne reprend pas dans le dispositif de ses conclusions l'argument selon lequel la demande formée par les époux en réparation du préjudice au titre du trouble de jouissance pour indécence du logement et de compensation avec la dette locative serait irrecevable car nouvelle en cause d'appel. La cour n'a pas à statuer sur ce point puisqu'elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions, en application de l'article 954 du code de procédure civile.

La cour est uniquement tenue par la demande de la SIDR de :

-confirmation du jugement du tribunal d'instance de Saint Denis, sauf à accorder la révision du montant de l'indemnité d'occupation, à actualiser de la créance de la SIDR et à lui donner acte de ce que la mesure d'expulsion n'est plus nécessaire en raison du départ effectif des époux [I] ;

-rejet de la demande en réparation du trouble de jouissance.

Sur la prescription :

La société SIDR qui invoque la prescription de la demande en réparation du préjudice de jouissance dans le corps de ses conclusions ne reprend pas dans le dispositif de ses conclusions cette fin de non-recevoir.
Tenant les dispositions de l'article 2247 du code civil, le juge ne peut suppléer d'office le moyen résultant de la prescription.

Sur la demande de réparation au titre du trouble de jouissance occasionné par l'indécence du logement :

En application de l'article 6 de la loi du 06 juillet 1989 dans sa version applicable, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Le bailleur est notamment obligé de :
a)délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées ; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas ;
b) assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus ;

c)entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.

Aux termes de l'article 2 du décret no 2002-120 du 30 janvier 2002, le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires :

-Il assure le clos et le couvert. Le gros oeuvre du logement et de ses accès est en bon état d'entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation. Pour les logements situés dans les départements d'outre-mer, il peut être tenu compte, pour l'appréciation des conditions relatives à la protection contre les infiltrations d'eau, des conditions climatiques spécifiques à ces départements ;

-Les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons, sont dans un état conforme à leur usage ;

-La nature et l'état de conservation et d'entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne présentent pas de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires ;

-Les réseaux et branchements d'électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d'eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d'usage et de fonctionnement ;

-Les dispositifs d'ouverture et de ventilation des logements permettent un renouvellement de l'air adapté aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements ;

-Les pièces principales, au sens du troisième alinéa de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation, bénéficient d'un éclairement naturel suffisant et d'un ouvrant donnant à l'air libre ou sur un volume vitré donnant à l'air libre.

Le locataire occupant un logement indécent peut en application des dispositions de l'article 20-1 de la loi du 06 juillet 1989 exiger du bailleur sa mise en conformité ou agir en dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance causé.

La charge de la preuve du caractère indécent du logement incombe aux locataires.

En l'espèce, l'article 8 du bail d'habitation conclu entre les parties dispose s'agissant des obligations des parties que le bailleur a l'obligation de :
-délivrer au locataire un logement en bon état de réparations de toute espèce et les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement.
-assurer la jouissance paisible du logement ;
-entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations nécessaires autres que locatives.

Les époux [I] soutiennent que le logement qui a été mis à leur disposition par la SIDR et qu'ils ont occupé du 30 novembre 2015 au 16 juin 2020 était indécent et ils invoquent un trouble de jouissance dont ils demandent réparation.
Ils produisent trois courriers adressés par le bailleur en 2016 relatifs à des désordres affectant le clôt et le couvert du logement ainsi que la retenue des personnes.

Le premier courrier est relatif à l'avancement des travaux de réparation (04 avril 2016), un deuxième concerne la mise en conformité de l'appartement (28 octobre 2016) et un troisième (26 février 2016) les informe d'une réduction du loyer à la suite des désagréments occasionnés par les désordres.

Les locataires communiquent pour l'année 2017, un courrier du 13 mars 2017 du bailleur leur demandant un libre accès au logement.

Les époux [I] justifient avoir adressé le 09 janvier 2018, un courrier au bailleur mentionnant de nouvelles infiltrations et ils produisent deux certificats médicaux établis le 27 juin 2018 et le 11 septembre 2018 par le Dr [Z] mentionnant que l'état de santé des enfants semble incompatible avec la nature du logement occupé et rapportant des consultations répétées pour symptomatologie respiratoire, rhinobronchite aiguë nécessitant l'utilisation fréquente d'antibiotiques
Ils produisent les courriers que leur a adressés la SIDR et qui ont trait à des expertises à leur domicile le 23 avril 2018, le 29 mai 2018 et le 14 août 2018.

Les locataires communiquent, s'agissant de l'année 2019, un certificat médical établi le 12 juin 2019 par le Dr [Y] relatif à l'état de santé des enfants qui présentent sans cesse des infections virales récurrentes qui seraient selon les dires des parents imputables à l'humidité de la maison et à une température très variable d'une pièce à l'autre.

Enfin, les époux [I] versent au dossier un constat de non décence du logement dressé par la CAF le 09 avril 2020.

L'état des lieux d'entrée du logement, établi le 26 novembre 2015, préalablement à l'entrée dans les lieux mentionne une fissure dans le dégagement en face SDB, « manivelle » dans le WC et une fissure dans la chambre 4 .
Il est établi que le logement occupé par les époux [I] a connu en 2016 des infiltrations en toiture, des micro fissures et un problème sur le garde-corps du balcon qui n'est pas toutefois explicité.
Le bailleur justifie pour sa part d'une expertise, des travaux engagés en 2016 afin de remédier aux infiltrations en toiture, aux micro fissures et pour aménager le garde-corps, ainsi qu'une réception partielle des travaux le 18 juin 2016 et de l'achèvement définitif des travaux le 28 octobre 2016 selon courrier du 28 octobre 2016.

Ces désordres ont occasionné, selon les termes retenus par le bailleur dans son courrier, des désagréments aux locataires et ils ont donné lieu à une réduction des loyers. La consultation de l'état de compte des locataires permet d'établir que cette réduction de loyer a pris effet dès le mois de février 2016 et s'est prolongée jusqu'en juillet 2017 alors même que la mise en conformité du logement a été constatée le 12 décembre 2016 par la CAF.

Les époux [I] ne justifient pas que le logement ait été affecté de nouveaux désordres en 2017. Le courrier du 13 mars 2017 du bailleur qui sollicite un libre accès au logement ne mentionne ni les motifs de cette requête, ni d'éventuels désordres.

Il est établi qu'en 2018, le logement des époux [I] a subi de nouvelles infiltrations et que des visites d'expertise ont eu lieu.
Toutefois, aucun élément ne permet de déterminer l'étendue des désordres et d 'établir s'ils étaient de nature à rendre le logement indécent.
Si les certificats médicaux produits permettent d'objectiver que les enfants ont présenté des pathologies, ils ne permettent pas toutefois d'établir un lien de causalité, entre les pathologies relevées et les désordres allégués par les époux [I]'H.
Enfin, il sera fait observer que la résiliation du bail est survenue le 24 octobre 2018 à la suite du non-paiement des loyers et des charges.

Le certificat médical établi par le Dr [Y] le 12 juin 2019 ne permet ni de démontrer la survenance de nouveaux désordres, ni d'établir un lien de causalité avec les pathologies constatées et les désordres allégués par les époux [I] qui se maintenaient dans le logement alors même que la clause résolutoire était acquise.

Le constat de non-conformité du logement dressé par la CAF 09 avril 2020 établit l'indécence du logement sans pour autant décrire les non conformités affectant le logement occupé sans droit ni titre par les époux [I]'H.

Il ressort des pièces communiquées que pour la période antérieure à la résiliation du bail, des désordres ont affecté le logement occupé par les époux [I] en 2016 et 2018, que des mesures ont été mises en oeuvre par le bailleur afin de procéder à leur réparation et pallier aux désagréments subis par les locataires par une réduction du loyer sans qu'il ne soit pour autant démontré que ces désordres aient rendu le logement indécent.

Les pièces ainsi produites sont insuffisantes pour caractériser le manquement du bailleur à ses obligations de délivrer aux locataires un logement en bon état d'usage, de procéder aux réparations nécessaires et de leur assurer une jouissance paisible des lieux dès lors qu'il a été établi que le bailleur a diligenté des investigations techniques pour déterminer l'origine des désordres et pour y remédier et que des travaux ont été engagés et que les désagréments subis par les locataires ont donné lieu à une réduction du loyer.

En l'état, les époux [I] ne démontrent pas l'existence d'un manquement du bailleur à ses obligations contractuelles.

Le constat d'indécence du logement dressé par la CAF le 09 avril 2020, soit deux mois avant la signature d'un état des lieux de sortie sans observation et sans mention de désordre , établit l'indécence du logement sans pour autant ouvrir droit à indemnisation d'un quelconque trouble de jouissance dès lors que le bail avait cessé de produire ses effets depuis le 24 octobre 2018 , que les consorts [I] étaient occupants sans droit ni titre et que le bailleur se trouvait ainsi délié de ses obligations contractuelles à l'égard de ses locataires.

La demande de réparation du trouble de jouissance des époux [I] au titre de l'indécence du logement est rejetée.

Sur la résiliation judiciaire du bail

L'article 1728 du code civil dispose que le preneur est tenu d'user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail et de payer le prix du bail aux termes convenus.

Selon l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus et en cas de défaut de paiement, le bailleur peut obtenir la résiliation judiciaire du contrat de bail en application de l'article 1741 du code civil.

Une clause résolutoire de plein droit à défaut de versement du loyer ou de souscription d'une assurance risques locatifs, ce après commandement de régulariser, demeuré infructueux, figure à l'article 7 du bail.

Un commandement de payer les loyers et visant la clause résolutoire a été délivré le 24 août 2018 par huissier de justice.

Il est constaté que les locataires ne justifient d'aucun règlement sur cette somme.

Eu égard à l'importance et l'ancienneté de la dette locative, au fait que les époux [I] n'ont plus rien versé depuis le 17 février 2016, il y a lieu de considérer que ces derniers ont gravement manqué à leur obligation contractuelle de régler le loyer à chaque échéance et il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail.

Les consorts [I] ayant quitté les lieux le 17 juin 2020, la SIDR renonce à sa demande d'expulsion.

En conséquence, il n'y a plus lieu d' ordonner l'expulsion des époux [I].

Sur la demande d'actualisation de la créance de la SIDR et sur la révision de l'indemnité d'occupation

En vertu des articles 1193 et 1194 du code civil, les contrats obligent les parties signataires et ne peuvent être modifiés que de leur consentement ou pour les causes que la loi autorise.

La location concerne un logement T5 de 98,77 m2 pour un montant de 580,78 euros dont 128,40 euros de charges par mois

Un commandement de payer les loyers portant sur une somme de 5613,72 euros, selon décompte arrêté à août 2018, a été délivré le 24 août 2018 par huissier de justice.
Il est établi qu'aucun paiement de régularisation n'est intervenu et que les impayés se sont régulièrement aggravés puisqu'il était dû la somme de 6084,21 euros au mois d'octobre 2018.

Cet état de compte n'est pas discuté en tant que tel par les appelants.

En cas de non-exécution de l'obligation de restituer le logement, l'occupation sans droit ni titre donne lieu au paiement, au profit du bailleur d'une indemnité d'occupation.
Cette indemnité est due de plein droit dès lors qu'un occupant se maintient dans les lieux après l'expiration de son titre d'occupation.
Elle représente non seulement la contrepartie de la jouissance des locaux mais également la compensation du préjudice résultant pour le bailleur du fait qu'il est privé de la libre disposition des lieux. Elle est donc de nature mixte, compensatoire et indemnitaire.

Les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour évaluer le montant d'une indemnité due par un occupant sans droit ni titre et peuvent, conformément au principe de la réparation intégrale, ordonner sa revalorisation ou son indexation telle qu'applicable au loyer.

Il est établi que Monsieur et Madame [I] se sont maintenus dans les lieux depuis le 24 octobre 2018 sans droit ni titre.

Le bailleur fait état d'un préjudice correspondant au montant des loyers et des charges qui auraient été dus en cas de non résiliation du bail et il sollicite la condamnation des époux [I] au paiement de l'indemnité d'occupation dont le montant correspond au montant du loyer et des charges prévues contractuellement ainsi que la révision jusqu'à la libération effective des lieux.

L'indemnité d'occupation telle que sollicitée par le bailleur correspond à la valeur équitable des lieux et assure en outre la réparation du préjudice résultant d'une occupation sans bail.

En conséquence, il convient de condamner les époux [I] au paiement de l'indemnité d'occupation telle que sollicitée.

Pour remplir parfaitement sa fonction et son but, l'indemnité d'occupation sera révisable dans les mêmes conditions que celles stipulées à l'article 4 du bail pour le loyer et les charges.

Tenant la libération volontaire des lieux le 16 juin 2020, il convient en conséquence de réactualiser à cette date la créance de la société SIDR.

Selon un décompte arrêté au 04 mars 2021, précis, détaillé mois par mois, les époux [I] restent devoir au titre des loyers/indemnités d'occupation impayés, la somme de 10 830,93 euros.

La créance du bailleur qui est certaine et exigible, n'est pas contestée par les locataires ;

En conséquence, les époux [I] sont solidairement condamnés à payer à la SDIR la somme de 10 830,93 euros au titre des loyers/indemnités d'occupation impayés, selon le décompte arrêté au 04 mars 2021.

Le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a condamné les époux [I] au paiement des loyers échus et à une indemnité d'occupation avec intérêt au taux légal à compter du jugement du tribunal d'instance du 11 juillet 2019 , infirmé en ce qui concerne le montant de la créance du bailleur du fait de la réactualisation.
Y ajoutant, il sera fait droit à la demande de révision de l'indemnité d'occupation conformément aux conditions prévues contractuellement pour le loyer et les charges.

Sur les autres demandes :

Les dispositions du premier jugement relatives aux dépens seront confirmées.
Les époux [I] succombant, ils seront déboutés de leur demande formée sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et ils seront condamnés solidairement à supporter les dépens d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
En outre, il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais irrépétibles exposés à l'occasion de la présente instance.
Ainsi, les époux [I] seront condamnés à lui verser la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en matière civile et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail, condamné les époux [I] au paiement de la dette locative, à une indemnité d'occupation et aux dépens en ce compris le coût du commandement de payer;

INFIRME le jugement déféré sur le montant de la dette locative et sur l'expulsion ordonnée ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

ORDONNE l'actualisation de la créance de la société SIDR ;

CONDAMNE solidairement les époux [I] à payer au titre des loyers échus et impayés et de l'indemnité d'occupation la somme de 10 830,93 euros ;

DIT que l'indemnité d'occupation est révisable selon les modalités prévues au bail ;

DIT n'y avoir lieu à expulsion ;

Y ajoutant

DEBOUTE les époux [I] de leur demande d'indemnisation au titre du trouble de jouissance ;

DIT n'y avoir lieu à compensation entre la dette locative et la créance au titre du préjudice de jouissance ;

DÉBOUTE les époux [I] de leur demande sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 199 ;

CONDAMNE solidairement les époux [I] à payer à la SIDR la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE solidairement les époux [I] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Nathalie TORSIELLO, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT
SIGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 05
Numéro d'arrêt : 19/024921
Date de la décision : 26/11/2021
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2021-11-26;19.024921 ?
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