La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2008 | FRANCE | N°07/01702

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Ct0193, 08 juillet 2008, 07/01702


AFFAIRE : N RG 07 / 01702 Code Aff. : JLR / LE ARRÊT N ORIGINE : JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes de SAINT-PIERRE en date du 14 Septembre 2007

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 08 JUILLET 2008

APPELANTE :
société SAPHIR... 97410 SAINT-PIERRE Représentant : Selarl GANGATE-DE BOISVILLIERS-RAPADY (avocats au barreau de SAINT PIERRE)

INTIMÉ :
Monsieur Jean Louis X...... 97460 SAINT-PAUL Représentant : Me Laurent PAYEN (avocat au barreau de SAINT DENIS)

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1

du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Juin 2008, en audience publi...

AFFAIRE : N RG 07 / 01702 Code Aff. : JLR / LE ARRÊT N ORIGINE : JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes de SAINT-PIERRE en date du 14 Septembre 2007

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 08 JUILLET 2008

APPELANTE :
société SAPHIR... 97410 SAINT-PIERRE Représentant : Selarl GANGATE-DE BOISVILLIERS-RAPADY (avocats au barreau de SAINT PIERRE)

INTIMÉ :
Monsieur Jean Louis X...... 97460 SAINT-PAUL Représentant : Me Laurent PAYEN (avocat au barreau de SAINT DENIS)

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Juin 2008, en audience publique devant Jean-Luc RAYNAUD, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, assisté de Jeanne BOURDAIS-MASSENET, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 08 JUILLET 2008 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Hervé PROTIN, Conseiller : Jean Luc RAYNAUD, Conseiller : Christian FABRE, Qui en ont délibéré

ARRÊT : mise à disposition des parties le 08 JUILLET 2008

* * *

LA COUR :

FAITS ET PROCÉDURE-PRÉTENTIONS DES PARTIES :

1- Jean Louis X..., que la société d'aménagement de périmètres hydro agricoles de l'île de la Réunion (S. A. P. H. I. R) avait embauché le 6 décembre 1996, pour une durée de 3 mois, en qualité de responsable de sa cellule travaux (statut ETAM, catégorie 5, échelon 1, indice 500), a été embauché définitivement le 01 janvier 1997 en la même qualité ; il est devenu responsable de magasin (catégorie 5, 2ème échelon, indice 535) le 01 septembre 2001 puis, aux mêmes conditions, responsable de la cellule distribution à partir du 19 janvier 2004 ;
En date du 20 juillet 2006, il a saisi le Conseil des prud'hommes de Saint Pierre de demandes tendant à la reconnaissance de son statut de cadre (avec délivrance de bulletin de salaire conforme depuis le mois de janvier 2004) et en paiement de dommages intérêts ;
2- Par jugement du 14 septembre 2007, le Conseil a condamné la société SAPHIR " à (lui) reconnaître sa qualité de cadre moyen-catégorie 6 et à inscrire cette qualité sur ses bulletins de paye ", mais l'a débouté de ses autres demandes la SAPHIR l'étant également de sa demande reconventionnelle ;
3- Par déclaration faite au greffe le 15 octobre 2007, cette société a relevé appel, dans les formes et délai réglementaires, de cette décision, qui lui avait été notifiée à personne le 19 / 09 ;
Contestant l'application " mécanique " faite par les premiers juges de l'accord d'entreprise du 14 août 1998, elle conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a reconnu à M. X... la qualité ci dessus, au mal fondé des demandes du salarié et à la condamnation de ce dernier au paiement d'une somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
4- M. X... conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il lui a reconnu la qualité litigieuse mais demande à la Cour, en outre
-d'ordonner à son employeur de régulariser sa situation à l'égard de la caisse de retraite complémentaire des cadres et de la caisse nationale d'assurance maladie à compter du 1er janvier 2004, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à dater de la signification de l'arrêt ;
- de condamner la SAPHIR au paiement de 15. 000 euros en réparation du préjudice consécutif à ses agissements ;
- de la condamner encore au paiement de 2. 170 euros sur le fondement de l'article 700 précité ;
Il soutient que le comportement de l'employeur a changé après sa désignation comme délégué syndical CGTR le 24 juin 2003 et qu'il a été victime de discriminations, voire de tentatives de déstabilisation ayant parfois nécessité l'intervention de l'inspecteur du travail ;
Vu les écritures déposées les 19 février 2008 par l'appelante et 10 avril 2008 par l'intimé, qui ont été reprises et développées oralement et auxquelles la Cour renvoie pour plus ample exposé des demandes et moyens ;
MOTIFS DE LA DÉCISION :
I-Sur le classement revendiqué :
Il n'y a pas lieu de prendre en considération la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement (dont l'article 3-4 définit la notion de cadre), qui n'est pas applicable de plein droit dans les départements d'outre mer (cf article 1er de l'arrêté d'extension du 28 décembre 2000) et dont ne font mention ni le contrat de travail de M. X... ni aucun des avenants ni l'unique bulletin de paye versé aux débats ; son annexe II du 12 avril 2000 relatif à la classification ds emplois est également dépourvu d'utilité ;
1 / Il est constant que la rémunération de M. X... est, depuis le 01 janvier 2004, déterminée sur la base de l'indice 614 qui correspond, selon l'article III. 3 de l'accord d'entreprise du 14 août 1998, à un emploi de cadre moyen (6ème catégorie) : selon la grille indiciaire applicable à l'entreprise, l'indice minimum des salariés relevant de cette catégorie est de 532 pour ceux appartenant au premier échelon, de 622 pour ceux appartenant au second, alors que la fourchette indiciaire des ETAM du 2ème échelon est 510-600 ;
L'article IV-2 de l'accord précité stipule toutefois que " chaque agent est affecté d'un indice en principe choisi à l'intérieur de la fourchette indiciaire de l'emploi qu'il occupe ", le traitement de base résultant de la multiplication de l'indice par la valeur du point ;
Au demeurant, des augmentations générales, non seulement de la valeur du point mais aussi des indices eux mêmes, sont intervenues les 20 avril 2002, 20 mai 2003, 17 décembre 2003, 1er juillet 2004 (avec effet rétroactif au 01 janvier), 25 avril 2005 et 12 juin 2006, qui ont eu pour effet de faire passer à 529 l'indice minimal des ETAM 2ème échelon et à 619 leur indice maximal ;
L'indice ne constitue toutefois qu'un des éléments d'appréciation ;
2 / Selon l'accord d'entreprise, les cadres moyens ne se distinguent des ETAM que par " la nécessité de mener à bien des programmes par exemple annuels et pluriannuels " et par le fait que le sens des responsabilités leur est particulièrement nécessaire ; l'intimé, qui a dirigé en 2006 la mise en place des contrats d'avenir dans l'entreprise et fait des propositions précises d'amélioration sur des points relevant de sa compétence, est apte à mener à bien de tels programmes ;
3 / Il convient de retenir que Jean Louis X... assurait, dès avant le 13 janvier 2000, le remplacement du chef des services généraux, ce qui l'amenait à dépasser la durée normale de travail (normalement applicable aux cadres intégrés), considération par laquelle l'avenant conclu à cette date a justifié l'attribution d'une indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires (I. F. T. S) ;
La longueur (18 mois) de la période d'essai prévue par l'avenant no 3 du 10 août 2001avant que l'intimé n'atteigne l'indice 600 témoigne de l'importance de ce poste, auquel il avait postulé le 21 mai 2001 et dans lequel il n'est nullement établi qu'il ait échoué ; sa candidature au poste de responsable de la distribution, après que la réorganisation du magasin ait été menée à bien (une prime temporaire de réorganisation équivalente à 30 points d'indice du 01 / 09 / 2001 au 01 / 09 / 2002, puis à 50 points d'indice jusqu'au 01 / 03 / 2003, a été ensuite intégrée à son traitement), se situe dans une évolution normale de carrière ;
En sa qualité de responsable de la cellule distribution, sous l'autorité directe du responsable du service exploitation, l'intimé dirigeait une équipe de 13 personnes, menait les entretiens annuels d'évaluation et proposait des sanctions ; il animait et coordonnait les moyens et les effectifs dédiés à l'exploitation des ouvrages permettant la distribution de l'eau sur l'ensemble des périmètres gérés par la SAPHIR et accomplissait des tâches techniques, administratives, commerciales et relationnelles ; il exerçait de la sorte un commandement par délégation de l'employeur, peu important que celui ci ne lui ait pas délégué par écrit ses pouvoirs en matière d'hygiène ou de sécurité, et dirigeait la cellule de façon autonome ;
Le fait qu'il ne soit titulaire que d'un diplôme de niveau III, en l'occurrence un brevet de technicien supérieur, est d'une importance limitée, l'accord d'entreprise ne mentionnant le niveau d'études atteint (sans autre précision) que pour déterminer l'échelon auquel un salarié peut prétendre dans chacune des catégories de cadres (moyens, principaux, supérieurs) ; plusieurs salariés titulaires de diplômes de même niveau (Y... et Z...) ont au demeurant été promus dans la catégorie 6 avec effet au 01 juillet 2006 ;
il avait enfin une ancienneté de prés de 10 ans comme ETAM au moment de la saisine du conseil des prud'hommes
C'est à juste titre, dans ces conditions, que celui ci a fait droit à sa demande de classement dans la catégorie supérieure ;
II-Sur la demande de dommages intérêts :
Jean-Louis X... fait d'abord valoir que la direction a refusé, sous des prétextes fallacieux, de tenir l'engagement qu'elle avait pris dans l'avenant no 3 du 10 août 2001, lequel stipulait notamment qu'après 18 mois, soit le 01 mars 2003, il passerait à l'indice 600, et qu'il a fallu l'intervention de l'inspecteur du travail pour la contraindre à respecter sa parole, ce qui est exact (cf lettre du 3 janvier 2006) ;
Il n'est nullement établi, comme le soutient l'employeur, qu'il ait échoué dans les fonctions de responsable de magasin auxquelles il s'était porté candidat : il résulte des pièces produites que les moyens nécessaires au bon fonctionnement de ce service lui ont été refusés pour des raisons discutables, ce qui l'a conduit à postuler au poste de responsable de la cellule distribution ;
Sa convocation, le 11 février 2004, à un entretien préalable au terme duquel l'employeur n'a pas cru devoir prendre de sanction à son égard (cf lettre du 2 mars 2004) pour une faute avérée (indication erronée du nombre de vannes présentes dans le stock physique lors de l'inventaire de fin d'exercice 2003) peut être interprétée aussi bien comme un acte d'intimidation que comme l'exercice normal du pouvoir disciplinaire et on ne saurait faire grief à l'employeur, dans cette seconde hypothèse, de la mansuétude dont il aurait fait preuve ;
Le refus qui a été opposé à sa demande de prêt du 14 juin 2006 n'est que la stricte application de l'article VII-3 de l'accord d'entreprise qui prévoit notamment un délai d'un an " entre la fin d'un prêt et le début du suivant " ; plusieurs prêts avaient été accordés antérieurement, dont un le 17 novembre 2003 dont le remboursement était en cours, et l'employeur a accepté le jour même la demande d'avance sur prime que X... avait formulée le 16 juin 2006 ;
L'appréciation de sa contribution (insuffisante) à l'activité de son unité de travail (note du 28 novembre 2007), prise en compte pour l'attribution d'une prime exceptionnelle de fin d'exercice doit être en revanche considérée, en l'absence de la moindre explication, comme discriminatoire ;
* * *
Ces discriminations diverses, manifestement liées à l'activité syndicale du salarié victime, justifient l'allocation d'une somme de 8. 000 euros à titre de dommages intérêts, peu important que la rémunération de M. X... ait été conforme au classement qu'il revendiquait, comme l'ont retenu les premiers juges ;
Il convient enfin d'ordonner la régularisation de la situation de l'intéressé envers la caisse de retraite complémentaire des cadres et la caisse nationale d'assurance maladie à partir du 01 janvier 2004 ; le prononcé d'une astreinte n'est pas nécessaire en l'état ;
- Sur les dépens et les frais irrépétibles :
L'appelante, qui succombe, devra supporter les dépens, conformément à l'article 696 du Code de procédure civile, ce qui interdit de faire application à son profit des dispositions de l'article 700 du même Code ;
Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimé l'intégralité des frais irrépétibles (honoraires d'avocat notamment) qu'il a du exposer pour faire valoir ses droits ; il convient de lui allouer 2. 000 euros sur le fondement du texte précité ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a ordonné le classement de Jean Louis X... en catégorie 6, 1er échelon, avec effet au 01 janvier 2004 ;

L'INFIRME pour le surplus et
Statuant à nouveau :
Ordonne la régularisation de la situation de ce salarié à l'égard de la caisse de retraite complémentaire des cadres et à celui de l'assurance maladie avec effet au 01 janvier 2004 ;
Condamne la SAPHIR à payer à l'intimé 8. 000 euros à titre de dommages intérêts et 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Rejette les demandes plus amples ou contaires ;
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Hervé PROTIN, président de chambre, et par Monsieur Eric LÉPINAY, adjoint administratif faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
signature


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : Ct0193
Numéro d'arrêt : 07/01702
Date de la décision : 08/07/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Pierre, 14 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2008-07-08;07.01702 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award