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27/05/2008 | FRANCE | N°07/00442

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Ct0173, 27 mai 2008, 07/00442


AFFAIRE : N RG 07 / 00442
Code Aff. : JLR / LE
ARRÊT N

ORIGINE : JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes de ST DENIS en date du 20 Mars 2007

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS
DE LA RÉUNION

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 27 MAI 2008

APPELANTE :

Madame Nadine X...
...
...
97400 SAINT DENIS
Représentant : Me Michèle FOURMILLIER (avocat au barreau de SAINT- DENIS)

INTIMÉE :

Société HLMR, venant aux droits de la société d'économie mixte de promotion (SEMPRO ADMINISTRATION)
...
...
97400 SAINT DENIS
Repré

sentant : SCP CANALE GAUTHIER ANTELME (avocats au barreau de SAINT- DENIS)

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 ...

AFFAIRE : N RG 07 / 00442
Code Aff. : JLR / LE
ARRÊT N

ORIGINE : JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes de ST DENIS en date du 20 Mars 2007

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS
DE LA RÉUNION

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 27 MAI 2008

APPELANTE :

Madame Nadine X...
...
...
97400 SAINT DENIS
Représentant : Me Michèle FOURMILLIER (avocat au barreau de SAINT- DENIS)

INTIMÉE :

Société HLMR, venant aux droits de la société d'économie mixte de promotion (SEMPRO ADMINISTRATION)
...
...
97400 SAINT DENIS
Représentant : SCP CANALE GAUTHIER ANTELME (avocats au barreau de SAINT- DENIS)

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mai 2008, en audience publique devant Jean- Luc RAYNAUD, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, assisté d'Eric LEPINAY, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 27 MAI 2008 ;

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Hervé PROTIN,
Conseiller : Jean Luc RAYNAUD,
Conseiller : Christian FABRE,

Qui en ont délibéré

ARRÊT : mise à disposition des parties le 27 MAI 2008

* *
*

LA COUR :

FAITS ET PROCÉDURE- PRÉTENTIONS DES PARTIES :

1- Mme Nadine X..., que la SEMPRO avait engagée le 2 novembre 1994 en qualité d'assistante de direction (statut cadre), est devenue directrice de la gestion locative le 01 janvier 1998 sans qu'aucun avenant ne soit établi ;

Elle a également été déléguée syndicale CFDT du 01 septembre 1999 au 30 avril 2003, membre du comité d'entreprise et représentante de ce dernier au conseil d'administration ;

Au vu du rapport de la commission d'enquête instituée à la demande de l'ensemble des représentants du personnel sur les " agissements " de Mme X..., la SEMPRO a convoqué cette dernière, par lettre du 26 novembre 2003 signifiée par huissier, à un entretien préalable pour le 1 décembre 2003, avant de solliciter, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 10 décembre 2003, l'autorisation de la licencier, mesure à laquelle le comité d'entreprise avait donné un avis favorable unanime lors de sa réunion du 8 décembre ;

En date du 18 février 2004, l'inspecteur du travail a toutefois refusé son autorisation, décision annulée le 4 mai 2005 par le tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion ;

Dans l'intervalle, et en dépit des réticences du personnel dont la moitié avait menacé de se mettre en grève si Mme X...reprenait son poste- ce qu'elle a fait le 25 février 2004-, la direction de la SEMPRO lui a confié, par courrier du 3 mars 2004, une mission qualifiée de " prioritaire " dont l'intéressée a considéré qu'elle entrait dans les attributions d'un autre agent ;

Par lettre du 24 mars 2004, Nadine X...a présenté sa démission avec effet immédiat, ce dont l'employeur a pris acte le 01 avril ;

2- Par jugement du 20 mars 2007, le Conseil des prud'hommes de Saint Denis, section Encadrement, a dit que la démission de Mme X...s'analysait en un licenciement et condamné la SEMPRO au paiement des sommes de

-5. 940 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement

-26. 903, 28 euros d'indemnité de congés payés

-59. 540 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-1. 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile

la salariée étant déboutée du surplus de ses demandes

3- Par déclaration faite au greffe le 27 mars 2007, Mme Nadine X...a relevé appel de cette décision, dont elle n'avait pas encore reçu notification ;

Elle sollicite la condamnation de son ancien employeur au paiement de

-412. 140 euros, soit l'équivalent de 5 ans de salaire, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-11. 448, 34 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

-26. 903, 58 euros à celui d'indemnité compensatrice de congés payés

-500. 000 euros de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral

Ces sommes devant produire intérêt au taux légal à compter du 20 mars 2007, lesdits intérêts étant capitalisés dans les conditions prescrites par l'article 1154 du Code civil

Elle estime que le jugement aurait du être assorti de l'exécution provisoire et réclame enfin 5. 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile (2. 500 euros pour la procédure de première instance, 2. 500 euros pour l'instance d'appel) et la condamnation de son adversaire aux dépens, dont distraction au profit de l'avocat qui la représente ;

4- La SHLMR, qui a repris la SEMPRO le 28 décembre 2006, conclut au mal fondé des demandes adverses et à l'allocation à son profit d'une somme de 5. 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient que les premiers juges ont violé le principe du contradictoire en ne se prononçant pas sur sa demande de sursis et en examinant le fond du litige sans l'avoir préalablement mise en demeure de conclure sur le bien fondé des demandes adverses ;

Vu les écritures déposées le 24 août 2007 par l'appelante et le 17 mars 2008 par l'intimée, qui ont été reprises et développées oralement et auxquelles la Cour renvoie pour plus ample exposé des demandes et moyens ;

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'intimée ne sollicite pas l'annulation du jugement, dont elle estime pourtant, à tort, qu'il a été rendu au mépris d'un principe fondamental de procédure ;

La demande de sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale n'a plus lieu d'être, une ordonnance de non lieu ayant été rendue le 6 septembre 2007 par un des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Saint Denis ; de ce fait, l'omission initiale de statuer sur ce point ne peut être accueillie ;

Il appartenait à l'appelante de saisir en temps utile le premier président de la Cour d'appel (article 525 du Code de procédure civile) d'une demande d'exécution provisoire ; la Cour ne peut décider rétroactivement qu'une telle mesure était opportune au cas d'espèce ;

* *
*

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de la relation de travail en raison de faits qu'il impute à son employeur, cette prise d'acte produit les effets d'un licenciement si les faits reprochés le justifient, d'une démission dans le cas contraire ;

L'appelante, qui se plaint d'avoir été victime de harcèlement moral, fait d'abord état de " mesures vexatoires " auxquelles elle serait " soumise en permanence " de la part du directeur général délégué de la SEMPRO et d'une partie du personnel de celle ci, " les grèves, manifestations, insultes, menaces et calomnies la visant personnellement étant devenues monnaie courante " sans que l'employeur intervienne pour y mettre fin ; elle fait ensuite valoir que son bureau a été, en son absence, attribué à deux autres salariées et que les serrures en ont été changées, ses affaires personnelles étant placées dans un carton, sans qu'elle en soit préalablement informée, et qu'elle s'est trouvée reléguée depuis le 5 mars 2004 dans un bureau sans équipement fonctionnel ; qu'à plusieurs reprises, on a voulu lui supprimer son véhicule de fonction et que sa carte essence a également été invalidée ; enfin que l'employeur lui a fait signifier par huissier, le 5 mars 2004, une sommation de réintégrer immédiatement son poste alors même qu'elle avait été (lettre du 24 février) dispensée de se présenter à son lieu de travail jusqu'au 30 mars ;

Il n'est pas établi que cette dernière mesure ait eu pour but de l'humilier et la demande de restitution du véhicule de service Citroën Xsara (dont elle a eu à nouveau l'usage lorsqu'elle a repris son travail, à l'exception des week end) était motivée par la durée de son arrêt maladie, et pas davantage que le personnel (qui lui était en grande majorité hostile) ait été manipulé par un directeur général délégué aux décisions duquel Mme X...s'était, il est vrai, opposé dès le mois d'avril 2003 ou par une de ses collègues, déléguée syndicale d'une autre organisation ; le fait que le personnel soit, comme elle l'écrivait le 24 mars 2004, " extrêmement agressif à son égard " s'explique essentiellement par son propre comportement ; le fait qu'une mission lui ait été confiée, qu'elle estimait ne pas être de son niveau, s'explique parfaitement par le souci de l'employeur de préserver la paix sociale tout en lui conservant une activité effective dans l'entreprise ;

Au demeurant, le juge d'instruction a retenu que l'infraction de harcèlement moral pour laquelle plainte avait été déposée, avec constitution de partie civile, le 22 mars 2004 n'était " pas caractérisée ", le seul changement de bureau opéré en mars 2004 étant insuffisant pour ce faire ; le tribunal administratif et la Cour administrative d'appel de Bordeaux (qui a rendu un arrêt confirmatif le 5 février 2008) ont par ailleurs tous deux estimé que le comportement de Mme X...était largement à l'origine de la dégradation des relations au sein du service qu'elle dirigeait et, au delà, de l'entreprise, et qu'il rendait impossible la poursuite de la relation de travail ; qu'ils ont relevé que plus de la moitié du personnel s'était mis en grève à l'annonce du retour de l'intéressée (à l'issue de ses RTT et congé annuel) le 27 octobre 2003 puis à nouveau le 23 février 2004, à l'annonce de son maintien dans l'entreprise du fait du refus d'autorisation de l'inspecteur du travail (compte tenu du caractère non suspensif du recours contentieux de l'employeur) et une troisième fois le 8 mars 2004, ce dont ils ont conclu que les faits invoqués par l'employeur à l'appui de sa demande d'autorisation étaient fondés ;

Ce n'est enfin que le 01 avril 2004 que l'employeur a pris acte d'une démission dont il a considéré, compte tenu du temps écoulé depuis la lettre de l'appelante et des connaissances professionnelles de cette dernière, qu'elle avait été donné de manière consciente, définitive (pas sous le seul effet de la colère) et non équivoque ;

C'est à tort, dans ces conditions, que les premiers juges ont estimé d'une part que la rupture du contrat de travail était imputable à l'employeur qu'ils ont condamné au paiement des sommes indiquées plus haut, d'autre part que Nadine X...avait été victime de harcèlement moral ;

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Les circonstances de la rupture n'ayant pas été vexatoires, et le harcèlement moral qui aurait finalement conduit l'appelante à présenter sa démission n'étant pas caractérisé (v. supra), le jugement mérite en revanche confirmation en ce qu'il a rejetée la demande de dommages intérêts de ce chef ;

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L'intimée ne conteste pas avoir contraint Mme X...à prendre, pour apaiser les salariés qui voulaient son départ, 93, 5 jours de congés auxquels l'intéressée ajoute 24 jours de réduction de temps de travail, soit un total de 117, 5 jours mais estime que la demande d'indemnité compensatrice de congés payés n'est pas fondée, les fortes tensions existant dans l'entreprise étant imputables à cette collaboratrice ;

L'intéressée, qui a été normalement rémunérée pendant la période au cours de laquelle elle est restée éloignée de l'entreprise, ne peut prétendre, de ce fait, à une indemnité compensatrice ;

Le nombre de jours de congés acquis est par ailleurs sujet à caution, l'article 21 de la convention collective applicable stipulant d'une part que " les congés sont acquis sur la base de 2, 5 jours ouvrables par mois de travail effectif pendant la période de référence fixée à la Réunion... du 01 janvier au 31 décembre ", d'autre part " il ne peut y avoir de report de congés au delà du 31 mai de l'année N + 1, N étant l'année justifiant les droits acquis " ;

Il y a donc lieu à confirmation sur ce point ;

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Les prétentions de la salariée étant mal fondées, il convient de la condamner aux dépens, conformément à l'article 696 du Code de procédure civile, ce qui interdit de faire application à son profit des dispositions de l'article 700 du même Code ;

Il n'est pas inéquitable, pour autant, de laisser à la charge de la SHLMR l'intégralité des frais irrépétibles (honoraires d'avocat notamment) qu'elle a du exposer pour la défense de ses intérêts ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort :

Constate que les demandes de sursis à statuer et de complément de jugement n'ont plus d'objet ;

Déclare la demande d'exécution provisoire irrecevable ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Nadine X...de ses demandes de dommages intérêts pour préjudice moral et d'indemnité compensatrice de congés payés ;

L'INFIRME pour le surplus et

Statuant à nouveau :

Déboute l'appelante de ses demandes ;

La condamne aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Hervé PROTIN, Président de chambre, et par Monsieur Eric LÉPINAY, adjoint administratif faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 07/00442
Date de la décision : 27/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion, 20 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2008-05-27;07.00442 ?
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