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12/10/2007 | FRANCE | N°05/00871

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Ct0062, 12 octobre 2007, 05/00871


Arrêt No

R. G : 05 / 00871

X...

C /

Y... Z...

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2007

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 02 MAI 2005 suivant déclaration d'appel en date du 11 MAI 2005
rg no 05 / 530

APPELANTE :

Madame Denise Marie Danielle X...
aa...
97431 LA PLAINE DES PALMISTES

Représentant : Me Iqbal A... (avocat au barreau de SAINT DENIS)

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007

/ 005434 du 06 / 09 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIME :

Monsieur Jean Roger Y... Z...
.....

Arrêt No

R. G : 05 / 00871

X...

C /

Y... Z...

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2007

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 02 MAI 2005 suivant déclaration d'appel en date du 11 MAI 2005
rg no 05 / 530

APPELANTE :

Madame Denise Marie Danielle X...
aa...
97431 LA PLAINE DES PALMISTES

Représentant : Me Iqbal A... (avocat au barreau de SAINT DENIS)

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 005434 du 06 / 09 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIME :

Monsieur Jean Roger Y... Z...
...
97431 LA PLAINE DES PALMISTES

Représentant : Me Paul Henri B... (avocat au barreau de SAINT DENIS)

CLÔTURE LE : 7 septembre 2007

DÉBATS : en application des dispositions de l'article 779 alinéa 3 du nouveau code de procédure civile, le conseiller de la mise en état à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 14 Septembre 2007.

Par bulletin du 17 septembre 2007, le président a avisé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :

Président : Monsieur Olivier FROMENT,
Conseiller : Monsieur Gérard GROS,
Conseiller : Madame Anne JOUANARD,
qui en ont délibéré
et que l'arrêt serait rendu le 12 Octobre 2007 par mise à disposition au greffe.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 12 Octobre 2007.

Greffier : Dolène MAGAMOOTOO.

FAITS et PROCÉDURE :

Au terme d'un acte notarié du 17 juillet 2003, Denise X... a fait donation à Jean Roger Y... Z... de la pleine propriété d'une parcelle de terrain située rue Delmas Hoareau à la PLAINE DES PALMISTES cadastrée AO no236 d'une superficie de 22a 61 ca.

Affirmant que cette donation constituait en réalité la contrepartie d'une construction que le donataire s'était engagé à édifier pour elle sur un autre terrain sis... dans la même localité, obligation à laquelle il n'avait pas satisfait, Denise X... l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance de SAINT-DENIS pour faire dire et juger que les conventions conclues constituent en réalité un contrat d'échange, entendre prononcer la résolution de ce contrat et obtenir la condamnation sous astreinte de Jean Roger Y... Z... à lui restituer la parcelle donnée ainsi que son expulsion.

Par jugement du 2 mai 2005, le tribunal l'a déboutée de ses prétentions.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 11 mai 2005 Denise Marie Danielle GRONDIN a interjeté appel de cette décision.

Au terme d'un arrêt avant dire droit du 6 octobre 2006, la cour a ordonné la comparution personnelle des parties devant l'un de ses membres.

Cette mesure d'instruction a été diligentée le 8 novembre 2006 et consignée dans un procès-verbal.

Les parties ont à nouveau conclu avant que l'instruction ne soit déclarée close le 7 septembre 2007.

MOYENS et PRETENTIONS des PARTIES :

Vu les dernières conclusions déposées le 26 février 2007 par l'appelante tendant à l'infirmation du jugement querellé et demandant à la cour de :
-prononcer la résolution de la dation en paiement aux torts exclusifs de M. AMANY Z... en raison de l'inexécution de ses obligations contractuelles ;
condamner ce dernier à restituer sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt la parcelle cadastrée AO 236 située à la Plaine des Palmistes ;
-déclarer le même occupant sans droit ni titre à compter de l'arrêt et autoriser son expulsion au besoin avec la force publique ;
-Ordonner la publication de l'arrêt à la conservation des hypothèques aux frais de l'intimé ;
le condamner à lui payer la somme de 2. 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions déposées le 25 mai 2007 par l'intimé tendant à la confirmation du jugement entrepris, au débouté des prétentions adverses, à entendre déclarer bonne et parfaite la donation du 17 juillet 2003 ainsi qu'à faire constater qu'il n'existe aucune contrepartie à celle-ci ni contrat d'échange et à entendre l'appelante condamnée à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile outre les dépens.

MOTIFS DE LA DECISION :

Au terme de ses dernières conclusions, Denise X... appelante expose que la donation litigieuse ne repose sur aucune intention libérale de sa part et que le terrain qui en a été l'objet a en réalité été donné en paiement du coût de travaux de construction d'un bâtiment que Jean Roger Y... Z... s'était engagé à réaliser pour elle et qu'il n'a jamais livré en raison de sa non conformité aux règles d'urbanisme qui a entrainé sa démolition.

Elle sollicite en conséquence au visa de l'article 1184 du Code civil la résolution de la dation à laquelle elle a procédé en raison de l'inexécution par son co-contractant de l'obligation de délivrance qui lui incombait.

Une donation implique de la part de son auteur une intention libérale et il appartient au juge, en cas de contestation, de rechercher si l'acte juridique qui la formalise constitue une libéralité ou un acte à titre onéreux en interprétant la véritable volonté des parties.

En l'espèce, il ressort des pièces communiquées et produites au dossier ainsi que des déclarations effectuées par les parties lors de leur comparution personnelle que Jean Roger Y... Z... entrepreneur de travaux à l'enseigne « S. E. P. M » s'était engagé à édifier pour le compte de Denise X... un petit bâtiment d'une superficie de 18 m ² à usage de vente de produits du terroir pour un prix de 23. 358,08 € selon devis du 10 mars 2002 que l'appelante reconnaît avoir accepté bien qu'elle ne l'ait pas signé.

Il est d'autre part établi que cette construction a été entreprise par l'intimé sur la base de plans qu'il affirme avoir réalisés lui-même mais qu'elle n'a pas été achevée suite à l'interruption des travaux prescrite par l'autorité administrative le 10 décembre 2002 (pièce no 5) en raison de sa non conformité à l'autorisation dont elle avait fait l'objet et à la réglementation sur l'urbanisme.

Malgré les dénégations opposées par l'intimé qui conteste tout lien entre cette opération de construction et la donation dont il a bénéficié, il résulte cependant de l'ensemble des éléments du dossier que Denise X... avec laquelle il n'avait aucun lien personnel ni de parenté, n'a jamais manifesté l'intention de le gratifier d'une quelconque libéralité et que la cession à son profit du terrain dont elle était propriétaire, n'était en réalité que la contrepartie de la prestation qu'il s'était engagé à réaliser dans le cadre du contrat de louage d'ouvrage conclu entre eux.

En effet, il y a lieu d'observer qu'aux termes d'un document dactylographié daté du 1er janvier 2002 établi à l'initiative de l'intimé mais signé par l'appelante, celle-ci avait reconnu lui devoir une somme de 7. 622,45 € qu'elle s'était engagée à lui rembourser avant la fin 2002 (pièce no 22).

Jean-Roger C... a lors de sa comparution personnelle, déclaré que cette somme représentait le coût de travaux d'aménagement et de drainage réalisés pour le compte de Denise X... en paiement desquels elle lui avait consenti la donation litigieuse.

Mis face à la contradiction existant entre cette affirmation et le reçu manuscrit qu'il avait signé le 17 juillet 2003 (pièce no 27) au terme duquel il avait reconnu avoir reçu de Denise X... le remboursement de cette somme en espèces, il prétendait qu'en raison du nombre de documents qu'il avait signés, sa mémoire ne lui permettait pas de s'expliquer avant d'indiquer dans ses dernières conclusions qu'il était « sans objet pour la clarté des débats de s'intéresser aux raisons pour lesquelles cette dette a été contractée par Madame X..., puisqu'(il) reconnaît avoir été payé ».

L'appelante a quant à elle expliqué que la reconnaissance de dette signée par elle en début d'année 2002 constituait en réalité une garantie au profit de l'entrepreneur qui avait commencé les travaux de construction, d'obtenir la cession du terrain à son profit.

Cette explication se trouve confortée par les documents et les éléments du dossier puisqu'il apparaît en effet que la somme en question de 7. 622,45 € correspond exactement à celle à laquelle a été évalué fiscalement le terrain dans l'acte de donation établi le 17 juillet 2003 et qu'en outre c'est précisément à cette date lors de la signature de cet acte que l'intimé a établi et délivré la quittance précitée annulant la prétendue dette, ce qui démontre qu'il existait bien une corrélation entre cette dernière et la donation.

L'existence de ce lien est d'autre part corroborée par les correspondances échangées entre les parties (pièces no 6 et 7) dans lesquelles Denise X... rappelle expressément qu'elle a cédé son terrain en paiement de la construction qu'il devait édifier ce que ne conteste pas Jean Roger Y... Z... dans sa lettre en réponse du 6 mai 2004 (pièce no8) où il propose un arrangement « pour la différence de prix ».

A ce titre le document qu'il a établi et signé à une époque qu'il situe début 2004 (pièce no 21) démontre qu'il n'existait aucune ambiguïté sur leur volonté réelle de considérer la cession du terrain comme la contrepartie des travaux de construction puisqu'il proposait de rembourser la somme de 3. 181,71 € correspondant à la différence entre la valeur du terrain fixée à 29. 000 € et le montant des travaux déjà réalisés à hauteur de 18. 818,29 € majoré de la somme de 7. 000 € représentant les frais de l'acte notarié.

L'ensemble de ces éléments constitue la preuve de l'absence de toute intention libérale et démontre que la cession du terrain cadastré AO no 236 intervenue sous la forme d'une donation par acte authentique du 17 juillet 2003, constitue en réalité une dation en paiement destinée au règlement du prix des travaux que devait exécuter Jean Roger Y... Z... en vertu du contrat de louage d'ouvrage qui avait été conclu.

Or il est établi que celui-ci n'a pas satisfait à ses obligations contractuelles et c'est en vain qu'il impute l'échec de cette opération à sa co-contractante à laquelle il reproche de l'avoir entrainé « dans une fraude aux règles de l'urbanisme » alors qu'elle démontre avoir obtenu l'autorisation de construire au vu d'un dossier de déclaration préalable qu'elle avait régulièrement déposé en mairie (pièce no 26) et que l'interdiction de poursuivre les travaux prescrite par celle-ci en décembre 2002 (pièce no5) a été motivée non par l'absence de permis mais par la non conformité de l'ouvrage entrepris à celui figurant dans le projet.

Il ressort en effet d'un rapport d'expertise dressé le 15 mai 2004 par un technicien M. D... à la demande de Denise X... (pièce no 3), que la construction prévue sur les plans était un local de plain pied d'une superficie brute de 18 m ² tandis que celle qui a été commencée, présentait deux niveaux de plus de 15 m ² chacun et se trouvait en outre affectée de graves malfaçons la rendant inutilisable de sorte que l'intimé, professionnel du bâtiment auquel il incombait de veiller à réaliser un ouvrage conforme à celui qui avait été autorisé selon des plans qu'il a reconnu avoir lui-même dressés, est seul responsable de la situation qui a conduit à l'arrêt des travaux et subséquemment à la démolition de l'édifice entrepris et non achevé.

Dès lors Denise X... est bien fondée à solliciter la résolution du contrat pour inexécution par l'intimé de ses obligations et à obtenir la restitution du terrain qu'elle avait donné en paiement.

En conséquence l'acte de donation du 17 juillet 2003 sera annulé et l'intimé condamné à restituer l'immeuble sans qu'il y ait lieu toutefois d'assortir cette disposition d'une astreinte dans la mesure où à défaut de départ volontaire l'appelante pourra poursuivre son expulsion avec le besoin de la force publique si nécessaire.

Jean Roger C... qui succombe sera condamné à payer à l'appelante une somme de 1. 800 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort :

-Vu l'arrêt avant dire droit du 6 octobre 2006 et le procès-verbal de comparution personnelle des parties dressé le 8 novembre 2006.

-Infirme le jugement entrepris rendu le 2 mai 2005 par le tribunal de grande instance de Saint-Denis.

-Dit et juge que l'acte notarié dressé le 17 juillet 2003 par Maître E... HOK TIM, notaire associé de la SCP ZAMPIERO-LAI HOK TIM à Saint-Denis (Réunion) portant donation par Denise Marie Danielle X... au profit de Jean Roger C... d'une parcelle de terrain sise rue Delmas Hoareau à La Plaine des Palmistes, cadastrée AO no 236 publié le 03 / 09 / 2003 à la conservation des hypothèques de Saint-Denis (Réunion) sous la référence 2003D no9135 volume P no5268, constitue en réalité une dation en paiement.

-Constate que cette dation est intervenue en règlement du prix d'un marché de travaux portant sur la construction d'un ouvrage pour le prix de 25. 818,29 €.

-Constate que Jean Roger C... entrepreneur de bâtiment n'a pas exécuté les obligations lui incombant au titre de ce contrat.

-Prononce la résolution à ses torts de la convention conclue avec Denise X... avec toutes conséquences de droit.

-Annule en conséquence l'acte de donation précité devenu sans cause.

-Dit que Jean Roger C... devra libérer et restituer dans le mois de la signification du présent arrêt le bien immobilier susvisé qui en a été l'objet, faute de quoi son expulsion pourra être poursuivie par toute voie de droit et au besoin avec le concours de la force publique.

-Dit n'y avoir lieu de prescrire une astreinte.

-Dit qu'il sera procédé à la publication de la présente décision à la Conservation des hypothèques de Saint-Denis aux frais de l'intimé.

-Condamne ce dernier à payer à l'appelante une somme de 1. 800 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

-Le condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par, Monsieur Olivier FROMENT, Président, et par Dolène MAGAMOOTOO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : Ct0062
Numéro d'arrêt : 05/00871
Date de la décision : 12/10/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion, 02 mai 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2007-10-12;05.00871 ?
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