N° RG 24/01741 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JVAF
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 3 SEPTEMBRE 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Décision rendue par le batonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Eure en date du 11 avril 2024
DEMANDERESSE AU RECOURS :
Madame [E] [S]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Caroline Roth de la SELARL NOMOS AVOCATS, avocat au barreau de Dieppe, plaidant par Me Menou
DÉFENDEUR AU RECOURS :
Maître [I] [M]
SCP BARON COSSE ANDRE
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Pauline Cosse, avocat au barreau de l'Eure
DEBATS :
A l'audience publique du 2 juillet 2024, devant Mme Marie-Christine LEPRINCE, première présidente de la cour d'appel de Rouen, assisté de Mme Catherine CHEVALIER, greffier et en présence de Mme [F] [P] greffier stagiaire ; après avoir entendu les observations des parties présentes, la première présidente a mis l'affaire en délibéré au 3 septembre 2024.
DECISION :
contradictoire
Prononcée publiquement le 3 septembre 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signée par Mme LEPRINCE première présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
Exposé du litige,
Par requête adressée à l'ordre des avocats du barreau de l'Eure le 2 novembre 2023, Me [I] [M] a saisi le bâtonnier en taxation des honoraires qui lui sont dus par Mme [E] [S] à la somme de 1 213 euros.
Par décision du 11 avril 2024, la délégataire du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Eure a fixé à la somme de 1 213 euros, le montant des honoraires dus par Mme [E] [S] à Me [M], ordonnant le versement de cette somme outre celle de 40 euros au titre des frais d'ouverture de dossier.
Malgré la demande faite à l'ordre des avocats, il n'a pas été justifié de la notification de cette ordonnance de taxation à Mme [E] [S].
Mme [E] [S] a déposé un recours contre cette décision par lettre reçue à la cour d'appel le 15 mai 2024, courrier recommandé posté le 13 mai. Le dossier a été enregistré sous le numéro 24/1741.
L'audience a été fixée au 4 juin 2024. Les parties ont été régulièrement convoquées par lettre recommandée avec avis de réception en date du 21 mai 2024. Un renvoi a été ordonné à l'audience du 2 juillet 2024.
A l'appui de son recours, Mme [S] sollicite la réformation de la décision du bâtonnier considérant que le résultat de la procédure est plus que décevant et qu'elle a été mal représentée par son conseil. Elle pointe les manquements professionnels de Me [M] et fait état d'une situation familiale et financière ne lui permettant pas de solder le reliquat des honoraires. A l'audience, elle insiste sur le fait qu'elle a déjà versé 600 euros et que son avocat était d'accord pour lui octroyer des délais de paiement.
Me [M] demande la confirmation de l'ordonnance de taxe en toutes ses dispositions. Il rappelle qu'il a effectivement accordé un échéancier que Mme [S] a cessé de respecter lorsqu'elle a eu connaissance de la décision défavorable du tribunal de commerce d'Evreux.
Il rappelle que trois factures sont restées impayées et qu'il a bien imputé la somme de 600 euros qui a été versée par Mme [S] sous forme de virements.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 tel qu'il résulte de la modification de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 prévoit que :
'Les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci'.
Il ressort des écritures des parties que Me [M] a été chargé par Mme [S] d'assurer la défense de ses intérêts devant le tribunal de commerce d'Evreux dans un litige l'opposant à la Sa Bred Banque Populaire au titre de son acte de caution solidaire des engagements de la société Aceger.
Par jugement en date du 23 mars 2023, le tribunal de commerce d'Evreux a débouté Mme [S] de ses prétentions et l'a condamnée à payer à la Sa Bred Banque Populaire la somme de 25'200 euros a au titre de son engagement de caution.
Il avait été préalablement conclu entre Me [M] et Mme [S] une convention d'honoraires signée le 18 octobre 2021 prévoyant un honoraire au temps passé au taux horaire de 250 euros HT. L'article 5 de la convention prévoyait un budget prévisionnel à hauteur de 1 500 euros HT soit 1 800 euros TTC pour la réalisation des prestations suivantes :
' préparation des actes de procédure
' rendez-vous et recherches
' préparation du dossier de plaidoirie
' intervention aux audiences
Quatre factures ont été été émises par la Scp Baron Cosse André :
' une facture numéro 2021 1804 émise le 22 novembre 2021 pour un montant de
500 euros HT soit 600 euros TTC
' une facture numéro 2022 1781 émise le 19 octobre 2022 pour un montant de
500 euros HT soit 600 euros TTC
' une facture numéro 2023 0483 émise le 14 mars 2023 pour un montant de
500 euros HT soit 600 euros TTC
' une facture numéro 2023 0484 émise le le 14 mars 2023 pour un montant de
13 euros TTC (droit de plaidoirie)
soit un montant total de 1 813 euros.
Il n'est pas contesté que Mme [S] s'est acquittée de la somme de 600 euros en quatre versement de 150 euros.
Sur la responsabilité de l'avocat
La procédure de contestation en matière d'honoraires et débours d'avocat, fondée sur les articles'174 et suivants du décret du 27 novembre 1991, concerne les seules contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires, de sorte que le juge de l'honoraire n'a pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l'avocat à l'égard de son client résultant d'un manquement à son devoir de conseil et d'information, laquelle obéit au droit commun de la responsabilité.
Le juge de l'honoraire n'étant pas le juge de la responsabilité civile professionnelle de l'avocat, l'argumentation de Mme [S] tenant aux manquements de Me [M] à l'origine selon elle de la décision défavorable du tribunal de commerce d'Evreux est hors débats et ne peut qu'être écartée.
Sur le montant des honoraires
Il sera rappelé que la convention prévoyait un honoraire au temps passé sur un taux horaire de 250 euros et une estimation des honoraires à la somme de 1 800 euros TTC avait été prévue.
Les diligences de Me [M] ne sont pas contestées par Mme [S] et le montant réclamé correspondant aux termes de la convention doit être considéré comme raisonnable compte tenu des diligences effectuées et du temps passé.
Il convient de déduire de cette somme celle de 600 euros qui a été versée par Mme [S].
La décision du bâtonnier sera confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme la décision du 11 avril 2024 rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Eure en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
Condamne Mme [E] [S] aux entiers dépens de l'instance d'appel.
Le greffier, La première présidente,