N° RG 24/01090 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JTTF
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 2 JUILLET 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Décision rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen en date du 17 février 2022
DEMANDERESSE AU RECOURS :
Madame [S] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparante en personne
DÉFENDEUR AU RECOURS :
Maître [B] [M]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Marie YSCHARD de la SELARL LBV AVOCATS, avocat au barreau de Rouen
DEBATS :
A l'audience publique du 7 mai 2024, devant Mme Marie-Christine LEPRINCE, première présidente de la cour d'appel de Rouen, assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier ; après avoir entendu les observations des parties présentes, la première présidente a mis l'affaire en délibéré au 2 juillet 2024.
DECISION :
contradictoire
Prononcée publiquement le 2 juillet 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signée par Mme LEPRINCE, première présidente et Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
Exposé du litige,
Par requête adressée à l'ordre des avocats de Rouen le 19 novembre 2021, Me [B] [M] a saisi le bâtonnier en fixation des honoraires qui lui sont dus par Mme [S] [Y] à la somme totale de 500 euros outre le remboursement de la participation aux frais de taxe de 40 euros.
Par décision du 17 février 2022, la délégataire du bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen a fixé à la somme de 500 euros, le montant des frais et honoraires dus par Mme [S] [Y] à Me [M], ordonnant le versement de cette somme outre celle de 40 euros au titre des frais d'ouverture de dossier.
Cette décision a été signifiée à Mme [S] [Y] par acte d'huissier délivré à son domicile en la personne de son conjoint le 14 mars 2024.
Mme [S] [Y] a déposé un recours contre cette décision par lettre reçue à la cour d'appel le 22 mars 2024.
L'audience a été fixée au 7 mai 2024. Les parties ont été régulièrement convoquées par lettre recommandée avec avis de réception en date du 25 mars 2024.
A l'appui de son recours, Mme [Y] sollicite l'annulation ou la diminution des honoraires fixés par le bâtonnier. Elle expose qu'elle a été reçue par Me [M] à son cabinet le 30 novembre 2020 dans le cadre d'un litige en droit du travail. Elle précise qu'à aucun moment, il n'a été question d'honoraires. Dans le cadre d'un rendez-vous téléphonique ultérieur, elle expose avoir eu affaire à l'épouse de l'avocat qui lui aurait conseillé d'adopter la solution envisagée par les représentants du personnel de son entreprise indiquant qu'elle ne pouvait l'accompagner. Mme [Y] affirme n'avoir reçu aucun mail ou correspondance de Me [M] à l'exception d'un projet de convention d'honoraires sur lequel son nom et son prénom auraient été erronés, elle en a demandé la rectification.
Elle affirme n'avoir reçu aucune réponse à l'exception d'un mail avec facturation d'honoraires le 15 octobre 2021.
Mme [Y] reprendra intégralement ses prétentions à l'audience.
Me [M] sollicite, dans ses écritures en date du 30 avril 2024, la confirmation de l'ordonnance de taxe en toutes ses dispositions. Il soutient que l'honoraire de
500 euros HT est justifié compte tenu des diligences accomplies (un rendez-vous, deux rendez-vous téléphonique, consultation des documents remis par le client ...). Il sollicite en outre la somme de 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de Mme [Y] au paiement des entiers dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 tel qu'il résulte de la modification de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 prévoit que :
'Les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci'.
En l'espèce, il n'est pas contesté que Me [M] recevra Mme [Y] à son cabinet le 30 novembre 2020 laquelle sollicitait un conseil dans le cadre d'une rupture de contrat travail avec la banque au sein de laquelle elle travaillait.
Il ressort des échanges de courriels produits aux débats par Me [M], que consécutivement à ce rendez-vous, Mme [Y] sollicitera ses conseils dès le
2 décembre. Me [M] lui répondra le soir même lui réclamant en outre des pièces complémentaires. Il lui proposait d'échanger dès le lendemain.
Quelques jours plus tard, un projet de convention d'honoraires été adressé à Mme [Y] par Me [M] proposant un honoraire de base fixé à la somme de
1 060 euros TTC et un honoraire de résultat d'une valeur de 15 % du total du montant touché par Mme [Y]. Il était précisé qu'en cas de dessaisissement de l'avocat par le client les diligences seront rémunérées par référence au taux horaire usuel de l'avocat soit 200 euros HT par heure passée.
Par courriel en date du 8 décembre 2020, Mme [Y] accusait réception de la convention sollicitant uniquement la correction de l'orthographe de son nom, précisait-elle avant signature. Elle poursuivit son courrier en sollicitant un conseil au sujet du versement de la prime de participation et d'intéressement au moment de quitter entreprise. Cette convention ne sera finalement pas signée par Mme [Y].
Par courrier daté du 14 décembre 2020, Me [M] et Me [I], avocate du même cabinet, ont adressé une consultation à Mme [Y]. Ce courrier a été adressé par mail accompagné de la facturation des honoraires à hauteur de 500 euros TTC comprenant le rendez-vous au cabinet du 30 novembre 2020, l'examen des pièces transmises par Mme [Y], deux entretiens téléphoniques en date des 3 et 9 décembre 2020 pour un montant total de 500 euros TTC.
Cette facture n'a jamais été payée par Mme [Y].
Il n'est pas contesté que le projet de convention d'honoraires transmis par Me [M] n'a pas été signé par Mme [Y]. Il sera toutefois relevé que Mme [Y] l'avait accepté puisqu'elle n'en sollicitera qu'une rectification matérielle (son nom). Quoi qu'il en soit, l'absence de convention d'honoraires ne prive pas l'avocat de la juste rémunération de son travail, laquelle sera appréciée en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.
Mme [Y] soutient ne pas avoir été informée par Me [M] lors du premier rendez-vous, du montant de ses honoraires. Il est toutefois quelque peu surprenant de constater que l'honoraire de base indiqué dans le projet de convention d'honoraires correspond au plafond maximum de prise en charge prévue aux conditions générales de la protection juridique de Mme [Y] en cas de transaction en matière prud'homale. Il en ressort que la rémunération de Me [M] a bien été évoquée dès ce premier rendez-vous puisque ce dernier a aligné ses honoraires sur la protection juridique de sa cliente.
La mission de Me [M] se terminant, il a adressé à sa cliente une facture de 500 euros TTC, contestée par cette dernière.
Il ressort des débats et de l'analyse des pièces qui ont été versées que Me [M] a bien effectué les diligences suivantes :
le premier rendez-vous du 30 novembre
l'analyse des pièces transmises par Mme [Y]
les deux rendez-vous téléphoniques des 3 et 9 décembre (d'une durée d'une heure chacun)
la consultation écrite
les échanges de mails
Au vu de l'ensemble de ces éléments, tenant compte des critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, notamment le temps passé, la somme facturée de
416,67 euros HT, soit 500 euros TTC apparaît tout à fait justifiée.
La décision du bâtonnier sera confirmée en toutes ses dispositions.
Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge de Me [M] la charge de cette procédure, Mme [Y], qui succombe, devra lui verser la somme de
500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sera par ailleurs tenue aux entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme la décision du 17 février 2022 rendue par M. le bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Mme [S] [Y] à payer à Me [B] [M], la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [S] [Y] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris la signification par voie d'huissier de la décision de M. le bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen.
Le greffier, La première présidente,