N° RG 22/04207 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JIBY
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 21 JUIN 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
22/00045
Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DU HAVRE du 21 Novembre 2022
APPELANT :
Monsieur [F] [R]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparant en personne,
assisté de Me Ghislaine VIRELIZIER de la SELARL KREIZEL VIRELIZIER, avocat au barreau du HAVRE substituée par Me Estelle LANGLOIS, avocat au barreau du HAVRE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/12219 du 19/06/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Rouen)
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Vincent BOURDON, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 14 Mai 2024 sans opposition des parties devant Madame BIDEAULT, Présidente, magistrat chargé d'instruire l'affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 14 mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 juin 2024
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 21 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
* * *
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 8 mars 2017, M. [R] s'est vu prescrire un arrêt de travail régulièrement prolongé au titre du risque maladie.
Après certificat d'aptitude rédigé par le docteur [U] le 29 août 2017, le médecin conseil a indiqué que l'arrêt de travail n'était plus médicalement justifié à compter du 5 septembre 2017.
Par courrier du 1er septembre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 3] (la caisse) a notifié à M. [R] l'impossibilité d'indemniser l'arrêt de travail à compter du 5 septembre 2017.
En contestation de cette décision, M. [R] a sollicité la mise en 'uvre d'une expertise médicale.
Le docteur [B], expert régulièrement désigné, a procédé à sa mission le 15 février 2018. Ce dernier a conclu que « Monsieur [R] était apte à une activité salariée adaptée à son état de santé le 05/09/2017 ».
La caisse a donc confirmé à M. [R] le refus d'indemniser son arrêt de travail à compter du 5 septembre 2017.
M. [R] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable qui, en sa séance du 7 mai 2018, a rejeté son recours.
M. [R] a poursuivi sa contestation devant le tribunal des affaires de sécurité sociale du Havre.
Par jugement du 21 novembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire du Havre a :
- rejeté le recours formé par M. [R] contre la décision de la commission de recours amiable de la caisse qui a rejeté une demande d'indemnisation d'un arrêt de travail à compter du 5 septembre 2017,
- condamné M. [R] aux dépens.
La décision a été notifiée à M. [R] le 1er décembre 2022, il en a relevé appel le 27 décembre 2022.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions remises le 30 août 2024, soutenues oralement, M. [R] demande à la cour de :
- infirmer la décision rendue par le tribunal judiciaire du Havre,
- déclarer son recours recevable,
- nommer un médecin expert qui aura pour mission, notamment, de déterminer s'il était apte à travailler au 5 septembre 2017,
- dire que l'expert déposera un pré-rapport qu'il soumettra aux parties puis un rapport définitif dans les délais fixés par le tribunal.
L'appelant considère que les conclusions des docteurs [U] et [B] sont contestables. Il précise que le médecin du travail, lors de la visite de pré-reprise du 30 août 2017 a indiqué qu'il aurait besoin d'une prolongation de son arrêt de travail et qu'à la suite de la visite de reprise du 5 octobre 2017, il l'a déclaré inapte à son poste de travail précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
Il soutient qu'il ne pouvait exercer une activité professionnelle quelconque le 5 septembre 2017, rappelle qu'il a été reconnu invalide catégorie 2. Il considère que son arrêt de travail aurait dû être prolongé.
Il verse aux débats des comptes rendus d'examens médicaux en date des 23 octobre 2017, 25 avril 2018, 23 février 2019.
Par conclusions remises le 17 avril 2024, soutenues oralement, la caisse demande à la cour de :
- confirmer la décision rendue par le tribunal judiciaire du Havre,
- débouter M. [R] de son recours en toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [R] aux entiers dépens.
La caisse rappelle qu'il est de jurisprudence constante que l'incapacité temporaire ouvrant droit au versement des prestations en espèces s'entend de l'impossibilité de se livrer à une activité professionnelle quelconque ; qu'en conséquence l'indemnité journalière cesse d'être due à la date à laquelle, selon l'avis de l'expert, l'assuré est reconnu apte à reprendre le travail et, ce, même si l'intéressé ne peut exercer qu'une activité adaptée à ses possibilités.
La caisse observe qu'en l'espèce, l'assuré ne justifie pas s'être fait prescrire des arrêts de travail au-delà du 4 septembre 2017, ce qui interroge sur l'intérêt de la contestation portée devant la juridiction.
Elle considère que l'appelant n'apporte aucun élément d'ordre médical à l'appui de sa contestation qui soit susceptible de contredire les conclusions de l'expertise réalisée, qu'aucun des médecins consultés n'atteste que son état de santé le rendait incapable de reprendre une activité professionnelle quelconque.
La caisse s'oppose à la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise en l'absence d'éléments nouveaux produits par l'assuré.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé détaillé de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le fondement des articles 4 et 5 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, et le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.
Selon les articles 9, 10 et 143 et suivants, hors article 145, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention mais le juge a le pouvoir d'ordonner d'office toutes les mesures d'instruction légalement admissibles, dès lors qu'il ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer et à condition que la partie qui allègue un fait ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.
Ainsi, hors le cas spécifique de l'expertise in futurum de l'article 145 du code de procédure civile, l'expertise judiciaire est une mesure d'instruction avant dire droit permettant la preuve d'un fait nécessaire au succès d'une prétention, mais non une prétention en elle-même.
En l'espèce, M. [R] sollicite l'infirmation du jugement sans formuler d'autre prétention.
Dans ces conditions, l'expertise n'est susceptible d'être qu'une mesure d'instruction avant dire droit mais en aucun cas une prétention.
En outre, la cour constate que M. [R] ne justifie pas s'être fait prescrire des arrêts de travail au-delà du 4 septembre 2017, de sorte que, s'il conteste avoir été apte à compter du 5 septembre 2017 à reprendre une activité professionnelle, il ne justifie pas de la portée de sa contestation devant la présente juridiction, ne forme aucune demande spécifique, ne justifie d'aucun préjudice.
La cour constate dès lors qu'elle n'est saisie d'aucune prétention et confirme en conséquence le jugement frappé d'appel, en toutes ses dispositions.
M. [R], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par jugement contradictoire rendu en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 21 novembre 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire du Havre,
Rejette toute autre demande ;
Condamne M. [F] [R] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE