N° RG 23/04135 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JQ4N
COUR D'APPEL DE ROUEN
CH. CIVILE ET COMMERCIALE
ORDONNANCE DU 20 JUIN 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
22/04248
Tribunal judiciaire de Rouen du 20 novembre 2023
DEMANDEUR A L'INCIDENT :
S.A. ACM IARD SA
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée et assistée par Me Géraldine DE PELLISSIER, avocat au barreau de ROUEN
DEFENDEUR A L'INCIDENT :
Monsieur [Z] [P]-[D]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté et assisté par Me François BOULO, avocat au barreau de ROUEN
Nous, M. URBANO, conseiller de la mise en état, à la chambre civile et commerciale, assisté de Mme RIFFAULT, greffière,
Après avoir entendu les parties en leurs observations lors de l'audience en publique du 29 mai 2024, l'affaire a été mise en délibéré, pour décision être rendue ce jour.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [P]-[D] est assuré auprès de la SA ACM IARD au titre d'une protection juridique.
Un délai de carence de six mois du 25 mars au 25 septembre 2019 a été stipulé s'agissant des litiges relevant du droit du travail.
Le 13 octobre 2020, M. [P]-[D] a été licencié pour inaptitude, ses conditions de travail s'étant dégradées en mars et avril 2019 et M. [P]-[D] ayant été en arrêt de travail à compter du 2 août 2019.
La SA ACM IARD ayant refusé de mobiliser sa garantie au motif que le fait dommageable s'était produit au cours de la période de carence, M. [P]-[D] a fait assigner SA ACM IARD devant le tribunal judiciaire de Rouen par acte de commissaire de justice du 11 octobre 2022.
Par jugement du 20 novembre 2023, le tribunal judiciaire de Rouen a :
- débouté Monsieur [Z] [P]-[D] de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions,
- condamné Monsieur [Z] [P]-[D] à payer à la SA ACM IARD la somme de la somme de 2 280 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire,
- condamné Monsieur [Z] [P]-[D] aux dépens.
Monsieur [Z] [P]-[D] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 14 décembre 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Vu les conclusions d'incident du 27 mai 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la société ACM IARD qui demande à la cour de :
Ordonner la radiation de l'appel interjeté par Monsieur [Z] [P]-[D] de l'affaire inscrite au répertoire général des affaires de la cour d'appel sous le numéro RG 23/04135 ;
Juger que l'affaire pourra être rétablie, mais seulement après la production des justificatifs de l'exécution du jugement déféré ;
Condamner Monsieur [Z] [P] [D] à une indemnité de 840 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'incident ;
Débouter Monsieur [Z] [P]-[D] de toutes ses demandes contraires.
La SA ACM IARD soutient que :
- le jugement entrepris n'a pas été exécuté par M. [P]-[D] qui n'a pas réglé la somme de 2280 euros ;
- l'argumentation de M. [P]-[D] tend à faire apprécier par le conseiller de la mise le fond de l'affaire ;
- M. [P]-[D] a perçu diverses sommes à la suite d'un jugement prud'homal, il a créé une EURL AS Métallurgie le 1er janvier 2021 et est désormais domicilié à [Localité 4] ; il ne justifie pas de l'impossibilité d'exécuter qu'il invoque ;
Vu les conclusions d'incident du 23 mai 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de M. [P]-[D] qui demande à la cour de :
Rejeter la demande de radiation du rôle de l'affaire enregistrée sous le n° RG 23/04135 ;
Débouter la société ACM IARD SA de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
Condamner la société ACM IARD SA en paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner la société ACM IARD SA aux entiers dépens de l'instance.
M. [P]-[D] soutient que :
- la SA ACM IARD n'a jamais sollicité l'exécution du jugement entrepris ;
- l'exécution emporterait des conséquences manifestement excessives alors que l'assureur a refusé sa garantie à un moment où M. [P]-[D] était licencié, qu'il assurait sa défense devant les prud'hommes, qu'il devait engager en outre des frais pour la procédure diligentée contre son assureur et qu'il a été condamné à payer des frais irrépétibles à son assureur ;
- il lui est impossible d'exécuter la décision : il perçoit le revenu de solidarité active à hauteur de 534,82 euros par mois et les sommes perçues à l'issue de la procédure prud'homale ont servi à apurer ses dettes.
MOTIFS DE LA DECISION
Vu l'article 524 du code de procédure civile ainsi rédigé : « Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.
La demande de l'intimé doit, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, être présentée avant l'expiration des délais prescrits aux articles 905-2, 909, 910 et 911.
La décision de radiation est notifiée par le greffe aux parties ainsi qu'à leurs représentants par lettre simple. Elle est une mesure d'administration judiciaire.
La demande de radiation suspend les délais impartis à l'intimé par les articles 905-2, 909, 910 et 911.
Ces délais recommencent à courir à compter de la notification de la décision autorisant la réinscription de l'affaire au rôle de la cour ou de la décision rejetant la demande de radiation.
La décision de radiation n'emporte pas suspension des délais impartis à l'appelant par les articles 905-2, 908 et 911. Elle interdit l'examen des appels principaux et incidents ou provoqués.
Le délai de péremption court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation. Il est interrompu par un acte manifestant sans équivoque la volonté d'exécuter. Le premier président ou le conseiller de la mise en état peut, soit à la demande des parties, soit d'office, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, constater la péremption.
Le premier président ou le conseiller de la mise en état autorise, sauf s'il constate la péremption, la réinscription de l'affaire au rôle de la cour sur justification de l'exécution de la décision attaquée. ».
Il ressort de ce texte que, pour s'opposer à une demande de radiation formée par l'intimée, l'appelant doit justifier soit de l'impossibilité d'exécuter la décision, soit de ce que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives.
La charge de la preuve repose exclusivement sur l'appelant.
L'impossibilité d'exécuter la décision entreprise doit s'entendre de façon stricte et cette impossibilité n'est pas caractérisée dès lors que le débiteur s'avère bénéficier d'une capacité financière lui permettant de s'acquitter au moins partiellement du montant des condamnations pécuniaires.
Par ailleurs, s'il appartient à l'appelant de verser l'ensemble des pièces propres à établir l'existence de conséquences manifestement excessives qu'aurait pour lui le paiement des sommes, il ne peut être tenu compte de l'importance de la créance en cause.
Enfin, la condition tenant à l'existence de conséquences manifestement excessives n'est pas remplie lorsque celui qui s'oppose à la demande de radiation ne justifie pas de l'impossibilité de recourir à un prêt.
Le jugement entrepris, rendu sur assignation délivrée le 11 octobre 2022, bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.
Si des pièces produites par M. [P]-[D], il résulte que ce dernier a perçu le revenu de solidarité active en décembre 2023 et janvier 2024, il résulte également des ses relevés bancaires du 1er avril 2024 qu'il a reçu une somme de 16 479,31 euros provenant du compte CARPAR de son avocat ainsi que des virements de 3 000, 1 000 et 1 000 euros provenant d'un autre compte ouvert au nom de M. [P]-[D].
S'il est exact qu'il a remis une importante somme à une créancière (Mme [M]) au mois de mars 2024, il n'indique pas d'où provenaient les sommes de 3 000, 1 000 et
1 000 euros qui ont été virés au crédit de son compte bancaire et n'a pas produit de justificatif du ou des comptes ouverts à son nom à partir desquels ces trois virements ont été effectués.
Au vu des ces éléments, et alors que M. [P]-[D] n'a réglé aucune somme depuis que le jugement entrepris a été rendu et qu'il ne justifie pas de l'impossibilité d'emprunter pour commencer à payer ces sommes, les preuves de l'impossibilité totale d'exécuter la décision entreprise ni celle de l'existence de conséquences manifestement excessives qui découleraient de cette exécution ne sont pas rapportées par M. [P]-[D].
Il convient dès lors de prononcer la radiation du rôle de l'affaire.
La présente décision étant une mesure d'administration judiciaire, elle ne saurait entraîner aucune condamnation aux dépens ni à des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Le conseiller de la mise en état statuant par mesure d'administration judiciaire ;
Ordonne la radiation de l'affaire n° RG 23/04135 qui emportera son retrait du rôle des affaires en cours;
Dit que l'affaire ne sera réinscrite au rôle de la cour que sur justification de l'exécution de la décision attaquée ;
Dit que la présente décision ne peut entraîner aucune condamnation aux dépens ni à des frais irrépétibles.
La greffière, Le conseiller,