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20/06/2024 | FRANCE | N°23/01408

France | France, Cour d'appel de Rouen, Ch. civile et commerciale, 20 juin 2024, 23/01408


N° RG 23/01408 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLCE







COUR D'APPEL DE ROUEN



CH. CIVILE ET COMMERCIALE



ARRET DU 20 JUIN 2024









DÉCISION DÉFÉRÉE :



2021008118

Tribunal de commerce de Rouen du 16 janvier 2023





APPELANT :



Monsieur [N] [O]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 8] (76)

[Adresse 2]

[Localité 5]



représenté et assisté par Me Xavier GARCON de la SELARL ELOGE AVOCATS, avocat au barreau de RO

UEN







INTIMEE :



S.A. BANQUE CIC NORD OUEST

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée et assistée par Me Philippe FOURDRIN de la SELARL PATRICE LEMIEGRE PHILIPPE FOURDRIN SUNA GUNEY ASSOCIÉS, avocat au barreau...

N° RG 23/01408 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLCE

COUR D'APPEL DE ROUEN

CH. CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 20 JUIN 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

2021008118

Tribunal de commerce de Rouen du 16 janvier 2023

APPELANT :

Monsieur [N] [O]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 8] (76)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté et assisté par Me Xavier GARCON de la SELARL ELOGE AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

S.A. BANQUE CIC NORD OUEST

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée et assistée par Me Philippe FOURDRIN de la SELARL PATRICE LEMIEGRE PHILIPPE FOURDRIN SUNA GUNEY ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 11 avril 2024 sans opposition des avocats devant Mme MENARD-GOGIBU, conseillère, rapporteur.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme FOUCHER-GROS, présidente

M. URBANO, conseiller

Mme MENARD-GOGIBU, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme RIFFAULT, greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 11 avril 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024 puis prorogé à ce jour.

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 20 juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme FOUCHER-GROS, présidente et par Mme RIFFAULT, greffière.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Monsieur [N] [O] a constitué une société par actions simplifiée dénommée AEA, ayant pour enseigne et nom commercial, Bel Air MSA, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 3 avril 2018.

Cette société a pour activité l'exploitation d'un garage automobile situé [Adresse 6].

Par acte sous seing privé du 5 février 2018, aux fins de procéder à l'acquisition d'un fonds de commerce, la SAS AEA a souscrit un prêt professionnel n°00020771203 auprès de la banque CIC Nord-Ouest d'un montant de 73.000 euros.

Par acte séparé du 13 février 2018, Monsieur [O] s'est porté caution solidaire de ce crédit à hauteur de 36 000 euros.

Par acte sous seing privé du 28 décembre 2018, la SA Banque CIC Nord-Ouest a consenti à la SAS AEA un prêt professionnel n°00020771204 d'un montant de 19.700 euros.

Aux termes du même acte, Monsieur [O] s'est porté caution solidaire de ce crédit à hauteur de 23 640 euros.

Par jugement du 14 septembre 2021, le tribunal de commerce de Rouen a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire de la société AEA et a désigné Maître [L] en qualité de mandataire judiciaire.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 6 octobre 2021, la SA Banque CIC Nord-Ouest a déclaré sa créance entre les mains de Maître [L] pour un montant de 43.120,25 euros à titre privilégié et 11.461,50 euros à titre chirographaire au titre des soldes des deux prêts souscrits.

Par lettre recommandée du même jour, la SA Banque CIC Nord-Ouest a invité Monsieur [O] à se substituer à la société AEA pour le règlement des échéances futures des prêts souscrits, ainsi que pour les échéances impayées du mois de septembre 2021.

Le 17 décembre 2021, la SA Banque CIC Nord-Ouest a assigné Monsieur [O] devant le tribunal de commerce de Rouen en paiement de la somme de 33.021,64 euros.

Le 15 mars 2022, le tribunal de commerce de Rouen a prononcé la liquidation judiciaire de la société AEA.

Par jugement du 16 janvier 2023, le tribunal de commerce de Rouen a :

- débouté Monsieur [O] de l'intégralité de ses demandes.

- condamné Monsieur [O], ès qualités de caution de la société AEA, à payer à la banque CIC Nord-Ouest les sommes suivantes :

*au titre de l'engagement de caution d'un montant de 36 000 euros en date du 13 février 2018, la somme de 21 560,13 euros, outre les intérêts au taux contractuels de 1,36 % l'an à compter du 16 septembre 2021, tenant compte de la garantie la société Bpifrance à hauteur de 50 % de l'en-cours de crédit,

*au titre de l'engagement de caution d'un montant de 23 640 euros, en date du 28 décembre 2018, la somme de 11 461,51 euros, outre les intérêts au taux contractuels de 1,80% l'an à compter du 16 septembre 2021,

- condamné Monsieur [O] au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [O] aux dépens, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 70,91 euros.

Monsieur [O] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 20 avril 2023.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 avril 2024.

EXPOSE DES PRETENTIONS

Vu les conclusions du 2 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de Monsieur [N] [O] qui demande à la cour de :

- recevoir Monsieur [N] [O] en son appel et le déclarer bien fondé,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Rouen du 16 janvier 2023,

Statuer à nouveau,

- dire et juger que les engagements de caution souscrits par Monsieur [N] [O] les 13 février et 28 décembre 2018 sont manifestement disproportionnés,

- prononcer la déchéance de la banque CIC Nord-Ouest du droit de se prévaloir des cautionnements de Monsieur [N] [O] des 13 février et 28 décembre 2018,

- débouter la banque CIC Nord-Ouest de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- accorder à Monsieur [N] [O] la faculté de s'acquitter de sa dette à raison de 23 échéances mensuelles et consécutives de 100 euros chacune, la 24ème et dernière devant solder la dette,

Dans tous les cas,

- condamner la banque CIC Nord-Ouest au paiement de la somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance.

Vu les conclusions du 10 octobre 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la banque CIC Nord-Ouest qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Rouen du 16 janvier 2023 en toutes ses dispositions,

- débouter Monsieur [N] [O] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Monsieur [N] [O] en cause d'appel au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [N] [O] aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le caractère disproportionné des engagements de caution lors de leur souscription :

Moyens des parties

Monsieur [O] soutient que :

* ses revenus mensuels s'élevaient à la somme de 1.650 euros en février et décembre 2018 ; il détenait pour seul actif immobilier sa résidence principale acquise en indivision avec sa concubine d'une valeur nette vénale de 93.000 euros ce qui est signalé par la fiche patrimoniale ; la répartition est de 7/12ème des parts pour Monsieur [O] soit 54 250 euros en février 2018 et 56 000 euros en décembre 2018 ;

* il est d'usage bancaire en matière de taux d'endettement des particuliers de retenir un taux de 33 % ; sa charge d'endettement en février 2018 représentait 90 % de ses revenus ; en décembre 2018 la charge de remboursement des trois prêts représentait 111 % de sa rémunération mensuelle.

La banque CIC Nord-Ouest réplique que :

* Monsieur [O] a renseigné, pour chaque engagement, une fiche de situation patrimoniale ; l'actif net déclaré s'élevait à 93.000 euros en février 2018 et à 96 000 euros en décembre 2018 ; Monsieur [O] a affirmé percevoir un revenu mensuel de 1.650 euros ; il n'a pas déclaré un autre passif ; la fiche de situation patrimoniale ne révèle aucune anomalie apparente ;

*le montant cumulé de ses deux engagements était parfaitement proportionné à son actif immobilier déclaré ;

* Monsieur [O] fait preuve de mauvaise foi en intégrant dans ses charges mensuelles le crédit cautionné.

Réponse de la cour

Il résulte de l'article L 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 applicable en la cause, ''Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.''

Ces dispositions s'appliquent à toute caution personne physique qui s'est engagée au profit d'un créancier professionnel.

Il appartient à la caution de rapporter la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement au jour de la signature par rapport à ses biens et revenus. Lorsque le créancier professionnel fait établir par celui qui entend s'engager en qualité de caution une fiche de renseignements sur son patrimoine, il appartient à ce dernier de déclarer loyalement ses biens, ses revenus, ses charges et ses dettes. En signant la fiche de renseignements, la caution en approuve le contenu. Elle ne pourra pas se prévaloir de l'inexactitude de ses propres déclarations ou de ses omissions. Le créancier professionnel n'a pas à vérifier l'exhaustivité et l'exactitude des informations fournies par la caution dans la fiche de renseignements en l'absence d'anomalies apparentes sauf s'il avait connaissance ou ne pouvait pas ignorer l'existence d'autres charges pesant sur la caution, non déclarées dans cette fiche.

Pour apprécier la disproportion d'un engagement, le juge tient compte de l'ensemble des obligations ou engagements incombant au débiteur au jour du cautionnement contesté.

Sur l'engagement de caution souscrit le 13 février 2018 :

Par acte du 13 février 2018, Monsieur [O] s'est porté caution solidaire de SAS AEA dans la limite de la somme de 36.000 euros au titre du prêt consenti le 5 février 2018 à ladite société par la banque CIC Nord-Ouest d'un montant de 73.000 euros.

Au titre des renseignements de caution, Monsieur [O] qui a certifié exacts et sincères les renseignements le concernant et signé la fiche patrimoniale le 13 février 2018, a indiqué vivre en concubinage ; exposer le remboursement d'un prêt souscrit avec [V] [T] auprès de la banque LCL au titre de la résidence principale, le capital restant dû s'élevant à 87 000 euros, la charge annuelle du remboursement étant de 10 476 euros ; être propriétaire en indivision de la résidence principale située [Adresse 2] évaluée à 180 000 euros, la valeur nette déduction faite du passif s'élevant à 93 000 euros ; percevoir 1 650 euros par mois au titre de la rémunération de gérance ; avoir deux enfants à charge.

Dès lors que Monsieur [O] a indiqué que le bien immobilier était acquis en indivision, la banque devait l'interroger sur la part qu'il détenait de sorte que Monsieur [O] justifiant par l'acte de vente à titre de licitation du 27 mars 2020 que ses droits indivis étaient lors de son engagement de caution de 7/12ème, c'est un actif net de

54 250 euros qui doit être retenu le concernant (93 000 euros X 7/12).

Monsieur [O] déclare que sa part de remboursement du prêt immobilier s'élevait à 509,25 euros (10.476 euros x 7/12/ 12 mois) et qu'il percevait des revenus mensuels de 1 650 euros comme indiqué dans la fiche de renseignements au titre de sa rémunération.

Il exposait avec sa concubine les charges de la vie courante avec deux enfants à charge.

Contrairement à ce que soutient Monsieur [O] il n'y a pas lieu de tenir compte du remboursement du prêt garanti dès lors que la charge en incombait à la société AEA.

Le caractère disproportionné de l'engagement de caution s'appréciant non seulement par rapport aux revenus mais aussi aux biens de la caution, il résulte de ce qui précède et plus particulièrement de l'actif net de 54 250 euros que l'engagement pris le 13 février 2018 par Monsieur [O] à hauteur de 36 000 euros n'était pas manifestement disproportionné. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Le cautionnement n'étant pas disproportionné au jour de sa souscription, il n'y a pas lieu d'examiner s'il l'est au jour où la caution est appelée en paiement.

Sur l'engagement de caution souscrit le 28 décembre 2018 :

Par acte du 28 décembre 2018, Monsieur [O] s'est porté caution solidaire de SAS AEA dans la limite de la somme de 23.640 euros au titre du prêt consenti le même jour à ladite société par la banque CIC Nord-Ouest d'un montant de 19.700 euros.

Les renseignements portés sur la fiche signée par Monsieur [O] le 28 décembre 2018 sont identiques à ceux mentionnés en février 2018 à l'exception du capital restant dû au titre du prêt immobilier et du montant de l'actif net en résultant de sorte que compte tenu de ce qui a été jugé plus haut, les droits indivis de Monsieur [O] étaient lors de cet engagement de caution de 7/12ème, soit un actif net de 56 000 euros.

Il n'y a pas lieu de tenir compte du remboursement des prêts garantis dès lors que la charge en incombait à la société AEA.

Au titre du passif, il convient de prendre en considération le précédent engagement de caution de 36 500 euros.

Le 28 décembre 2018, le patrimoine immobilier de Monsieur [O] était d'une valeur de 56 000 euros. Il était engagé comme caution à hauteur de 36 500 euros au bénéfice de la banque le CIC Nord-Ouest de sorte que la valeur de l'actif net déduction faite du premier engagement de caution était de 19 500 euros.

Avec un revenu mensuel de 1 650 euros, il exposait le remboursement du prêt immobilier soit pour sa part la somme de 509,25 euros par mois outre les charges de la vie courante partagées avec sa concubine, le couple ayant deux enfants à charge.

Il s'ensuit que le deuxième engagement de caution d'un montant de 23 640 euros était manifestement disproportionné aux biens et revenus de Monsieur [O] lors de sa souscription le 28 décembre 2018.

Sur l'engagement de caution du 28 décembre 2018 lorsque Monsieur [O] est appelé le 17 décembre 2021 :

Moyens des parties

La banque CIC Nord-Ouest soutient que :

* Monsieur [O] indique avoir cédé ses parts et portions détenues sur le bien immobilier ; il a perçu la somme de 57.342 euros et ne justifie pas avoir apporté cette somme à sa société AEA ;

* il est l'associé unique et le gérant de deux autres sociétés, R.P.E.A Sarl et Popobby Sarl ; outre le patrimoine issu de la détention de la totalité du capital de ces deux sociétés, il perçoit une rémunération.

Monsieur [O] réplique que :

* le produit de la licitation de 57.342 euros lui a permis de renflouer les comptes de la SAS AEA avant que celle-ci fasse l'objet de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ;

* cette somme lui a également permis de vivre et de subvenir au besoin de ses deux enfants puisqu'il ne percevait à titre de salaire qu'une somme mensuelle de 527,81 euros ;

* la société Popobby ayant débuté son activité le 11 mars 2022, il n'y a pas lieu de prendre en considération cet événement ;

* la société RPEA a fait l'objet d'une cessation totale d'activité à compter du 16 juillet 2020.

Réponse de la cour

Il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, d'établir qu'au moment où il l'appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.

La capacité de la caution à faire face à son obligation lorsqu'elle est appelée s'apprécie au regard de l'ensemble des éléments d'actif et de passif composant son patrimoine et par conséquent en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d'autres engagements de caution.

La banque CIC Nord-Ouest doit démontrer qu'au jour où elle a assigné Monsieur [O] le 17 décembre 2021, son patrimoine lui permettait de faire face à son obligation qui s'élevait à la somme de 11 461,51 euros au titre de l'engagement de caution du 28 décembre 2013.

Le 17 décembre 2021, l'obligation de Monsieur [O] au titre du premier engagement de caution était de 21 560,12 euros et il convient de le prendre en considération comme élément de passif du patrimoine de Monsieur [O].

Il ressort des bulletins de salaire produits que Monsieur [O] percevait en fin d'année 2021 un revenu mensuel de 627 euros.

Il n'y a pas lieu de tenir compte de la création de la Sarl Popobby au capital social de 3 000 euros puisque son activité a débuté le 11 mars 2022 et que Monsieur [O] produit le témoignage de madame [P] [Y] qui atteste le 27 avril 2022 avoir prêté la somme de 5 000 euros à Monsieur [O] pour la création de cette société. De surcroît, les comptes annuels clos le 31 décembre 2022, mentionnent un résultat net comptable déficitaire de 1 496 euros.

Quant à la société RPEA, il ressort de l'extrait '' Pappers du registre national des entreprises'' que cette société immatriculée le 18 novembre 2015 a fait l'objet d'une cessation totale d'activité à compter du 16 juillet 2020, cette mention ayant été portée le 14 septembre 2020.

Monsieur [O] est toutefois le seul détenteur des 100 parts sociales de la société RPEA au capital social de 8 000 euros et cette société n'était pas dissoute lorsque Monsieur [O] a été appelé de sorte qu'il convient de prendre en compte le montant de ce capital social comme élément d'actif du patrimoine de Monsieur [O].

Si Monsieur [O] ne détenait plus de parts indivises dans le bien immobilier acquis avec sa concubine dans la suite de la vente desdites parts à cette dernière le 27 mars 2020, il a perçu à ce titre la somme de 57 342 euros et il ne justifie pas avoir investi cette somme dans la société cautionnée.

Et en outre la banque produit un relevé du compte courant privé de Monsieur [O] ouvert dans les livres du CIC à [Localité 7] qui fait ressortir un solde créditeur de 33 256,14 euros le 7 octobre 2021 soit à une date proche de celle de la délivrance de l'assignation le 17 décembre 2021 de sorte qu'il convient de retenir cette somme pour apprécier la consistance du patrimoine de Monsieur [O].

Il résulte de ce qui précède que lorsque Monsieur [O] est appelé le 17 décembre 2021, il dispose à tout le moins d'un actif net de 19 696,02 euros (33 256,14 + 8000 = 41 256,14 - 21 560,12 ) lui permettant de faire face à son obligation d'un montant de 11 461,51 euros.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande tendant à voir déclarer ce cautionnement manifestement disproportionné et à ce qu'il en soit tiré la conséquence.

Sur la créance de la banque CIC Nord-Ouest

Il ressort des décomptes produits arrêtés au 15 septembre 2021 et qui ne sont pas contestés par Monsieur [O], qu'il doit au titre de l'engagement de caution du 13 février 2018 la somme de 21 560,13 euros en principal et au titre de l'engagement de caution du 28 décembre 2018, la somme de 11 461,51 euros en principal de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [O] à payer ces sommes à la banque CIC Nord-Ouest.

Les mises en demeure du 6 octobre 2021 portent sur le seul règlement des échéances de prêts et non sur les sommes ci-dessus indiquées au titre des engagements de caution de sorte que les intérêts au taux contractuel seront dus à compter du 17 décembre 2021, date à laquelle la caution a été assignée en paiement. Dès lors le jugement sera infirmé en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts au 16 septembre 2021.

Par conséquent, il convient de condamner Monsieur [O] à payer à la banque CIC Nord-Ouest :

- au titre de l'engagement de caution du 13 février 2018, la somme de 21 560,13 euros, outre les intérêts au taux contractuels de 1,36 % l'an à compter du 17 décembre 2021,

- au titre de l'engagement de caution du 28 décembre 2018, la somme de 11 461,51 euros, outre les intérêts au taux contractuels de 1,80 % l'an à compter du 17 décembre 2021.

Sur la demande de délais de paiement

Monsieur [O] soutient que :

* il doit subvenir aux besoins de ses deux enfants et il ne perçoit que le revenu de solidarité actif ; il a déjà commencé à apurer sa dette à raison de 100 euros par mois et pour la première fois le 5 mai 2023 ;

* il ne s'agit pas d'une demande nouvelle, la demande de délais de paiement est recevable en cause d'appel car les mesures de grâce peuvent être sollicitées en tout état de cause.

La banque CIC Nord-Ouest réplique :

* cette demande nouvelle en cause d'appel est irrecevable ;

* elle n'est pas fondée ; Monsieur [O] a déjà bénéficié des plus larges délais de paiement depuis la mise en demeure qui lui a été adressée le 6 octobre 2021.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, ''le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.''

Outre qu'aucune fin de non-recevoir n'est reprise au dispositif des conclusions de la société CIC Nord-Ouest, les mesures de grâce peuvent être sollicitées en tout état de cause.

Il ressort du courrier de la caisse d'allocations familiales du 7 avril 2023 et de l'attestation de paiement du 13 février 2024, que Monsieur [O] perçoit le revenu de solidarité active.

Il n'a pas produit d'autre élément sur sa situation financière que le bilan 2022 de la société Popobby créée le 11 mars 2022, dont l'activité était déficitaire en décembre 2022.

Compte tenu de l'importance de la dette au regard des revenus de Monsieur [O], sa capacité à s'en acquitter dans le délai de l'article 1343-5 précité n'est pas démontrée de sorte qu'il convient de le débouter de sa demande de délais de paiement.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts contractuels au 16 septembre 2021,

Statuant à nouveau,

Dit que les intérêts contractuels sur les sommes de 21 560,13 euros et 11 461,51 euros, dues par Monsieur [N] [O] au titre des engagements de caution des 13 février et 28 décembre 2018 courent à compter du 17 décembre 2021 ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [N] [O] de sa demande de délais de paiement,

Condamne Monsieur [N] [O] aux dépens de l'appel,

Condamne Monsieur [N] [O] à payer à la banque CIC Nord-Ouest la somme de 1000 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Ch. civile et commerciale
Numéro d'arrêt : 23/01408
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.01408 ?
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