N° RG 22/03556 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JGUR
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 20 JUIN 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 15 Septembre 2022
APPELANTE :
Madame [V] [C]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
assistée de Me Céline BART de la SELARL EMMANUELLE BOURDON- CÉLINE BART AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Delphine DIEPOIS, avocat au barreau de ROUEN
INTIMÉE :
S.C.I. [Localité 5] RONDEAUX
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Emmanuelle DUGUÉ-CHAUVIN de la SCP EMO AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 14 Mai 2024 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Madame ROYAL, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DUBUC, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 14 mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 juin 2024
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 20 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme DUBUC, Greffière.
Mme [V] [C] a été engagée en contrat à durée indéterminée à temps partiel par la société [Localité 5] Rondeaux le 9 avril 2008 en qualité d'employée d'immeuble spécialisée.
Les relations contractuelles des parties étaient régies par la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'immeubles du 11 décembre 1979.
Suite à des différends relatifs à l'exécution de son contrat de travail, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen le 2 janvier 2018 en paiement de rappel de salaires et indemnités, cette saisine ayant donné lieu à un arrêt de la cour d'appel de Rouen le 14 octobre 2021.
Convoquée le 27 janvier 2021 à un entretien préalable à sanction disciplinaire fixé le 8 février 2021, elle a été licenciée le 25 février 2021 dans les termes suivants :
'(...) Nous vous avons fait part de nos reproches concernant la qualité de votre travail. Malgré nos remarques orales, vous refusez d'exécuter convenablement votre prestation de travail.
En effet, le 11 janvier 2021, un occupant du bâtiment C3 s'est plaint de la qualité du nettoyage. Nous nous sommes déplacés pour constater que les escaliers et le hall du C3 étaient dans un état très sale. Le nettoyage, qui n'avait pas été fait dans les escaliers et seulement sur certains paliers, ressemblait à un barbouillage puisque les traces de serpillère étaient visibles. Cette constatation fait suite à plusieurs autres plaintes notamment dans le bâtiment C1, plaintes qui ont été notées sur le cahier de réclamations du bureau de la SCI.
Le 21 janvier 2021, vous étiez en charge de sortir les poubelles mais vous n'en avez sorti que 4 du bâtiment C. Le ramassage étant le dernier avant le week-end, toutes les poubelles débordaient le lundi matin.
Nous vous rappelons que les poubelles ont été changées à votre demande car vous les trouviez trop grandes et trop lourdes. Nous les avons remplacées par des plus petites mais vous vous plaignez qu'il faut faire davantage de trajets pour les sortir toutes. Nous vous avons rappelé que cette tâche était prévue dans votre contrat de travail.
Vous refusez de plus en plus fréquemment d'effectuer des tâches qui sont pourtant prévues dans votre contrat de travail.
Ainsi, vous refusez de sortir les encombrants ou de laver les dalles extérieures. Votre contrat prévoyait la mise en terre, plantation et arrosage des fleurs dans les jardinières, vous avez refusé de le faire et nous avons dû demander à notre jardinier de s'en occuper en plus des massifs.
S'agissant de la vidange des colonnes de chauffage, vous refusez depuis 2017 d'ouvrir les vannes TA et d'aider ponctuellement à la vidange alors que l'avenant du 2 janvier 2014 précisait que vous deviez effectuer une assistance et une collaboration dans les relations de vos employeurs avec les entreprises intervenantes. Lors de l'entretien préalable, vous avez prétendu avoir effectué la vidange en 2018, mais il s'avère que la prestation s'effectue en juin et que vous étiez en arrêt de travail. Votre refus nous a obligé à faire appel à une entreprise extérieure depuis.
Enfin, votre comportement ne permet pas de poursuivre notre relation de travail.
En effet, vous agressez verbalement toutes les personnes qui vous entourent : vous avez agressé certains occupants des logements, vous avez des relations conflictuelles avec tous vos collègues et avez agressé Mme [O], votre supérieure hiérarchique, au point qu'elle a déposé une main courante contre vous en juillet 2020 et a eu un arrêt de travail de 2 jours.
Nous avons été contraints de modifier les heures de repas en raison de votre comportement, pour éviter que vous mangiez en même temps que votre collègue.
En tant que gérants bénévoles de la SCI, nous subissons également vos propos agressifs et votre harcèlement quasi quotidien. Vous ne vous adressez plus à nous qu'au moyen de courriers recommandés, de recours devant la CPAM ou le conseil de prud'hommes pour des demandes dont vous reconnaissez à l'audience qu'elles n'ont plus lieu d'être. Vous refusez de nous signer et communiquer votre planning, vos dates de congés nous sont déposées dans la boîte aux lettres en dehors des délais.
Lors de l'entretien, M. [R] vous a d'ailleurs demandé de parler moins fort, ce qui dénote votre perpétuelle agressivité. Vous avez alors indiqué que vous n'aviez des difficultés avec la gestion que depuis février 2017 mais après avoir parlé de 'cette chère [J]...', vous avez longuement détaillé votre mauvaise relation de travail qui est antérieure. Il en a été de même concernant M. [D]. Vos difficultés relationnelles sont effectivement bien plus anciennes et ne font l'objet d'aucune amélioration.
Nous vous avons alors rappelé que votre comportement avait déjà suscité plusieurs courriers de reproches et avertissements dont le dernier en date du 4 novembre 2020.
Les explications que vous nous avez fournies ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation et dans ces conditions, nous sommes au regret de vous informer par la présente que nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse. (...)'.
Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen le 5 août 2021 en contestation de la rupture, ainsi qu'en paiement de rappel de salaires et indemnités.
Par jugement du 15 septembre 2022, le conseil de prud'hommes, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, a :
- débouté Mme [C] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des risques professionnels pour défaut d'enquête interne,
- condamné la société [Localité 5] Rondeaux à payer à Mme [C] les sommes suivantes :
- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 8 500 euros
- indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile : 1 300 euros
- débouté Mme [C] de ses autres demandes et condamné la société [Localité 5] Rondeaux aux entiers dépens.
Mme [C] a interjeté appel de cette décision le 31 octobre 2022.
Par conclusions remises le 24 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, Mme [C] demande à la cour de :
- infirmer le jugement sur le licenciement et les dommages et intérêts accordés, en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral, dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des risques professionnels, rappel d'indemnité de licenciement, communication du décompte des retenues opérées et, statuant à nouveau, de :
- dire qu'elle a été victime de harcèlement moral et que l'absence de mise en place d'une enquête interne après la révélation de ces faits lui a causé un préjudice distinct,
- prononcer la nullité du licenciement, et, à titre subsidiaire, confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la société [Localité 5] Rondeaux à lui payer les sommes suivantes :
- dommages et intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral : 35 000 euros
- dommages et intérêts en réparation du préjudice lié au manquement à l'obligation de prévention des risques professionnels pour défaut d'enquête interne : 20 000 euros
- dommages et intérêts pour licenciement nul : 35 000 euros, et à titre subsidiaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 25 000 euros
- rappel d'indemnité de licenciement : 366,34 euros,
- rappel de salaire au titre du maintien de salaires : 10 490,96 euros nets
- rappel d'indemnité compensatrice de congés payés : 1 544 euros
- en tout état de cause, condamner la société [Localité 5] Rondeaux à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 16 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, la société [Localité 5] Rondeaux demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [C] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et manquement à l'obligation de prévention des risques professionnels pour défaut d'enquête interne, et, à titre subsidiaire si la cour retenait l'existence d'un harcèlement moral, réduire le montant des dommages et intérêts à six mois de salaire, soit 11 579,88 euros et si la cour considérait qu'elle a commis un manquement à son obligation de prévention des risques, débouter Mme [C] de sa demande de dommages et intérêts à défaut de justifier d'un préjudice indépendant,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et débouter en conséquence Mme [C] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre et, à titre subsidiaire, si la cour devait considérer ce licenciement nul, limiter le montant des dommages et intérêts à six mois de salaire, soit 11 579,88 euros, et s'il devait être considéré sans cause réelle et sérieuse, limiter les dommages et intérêts à trois mois de salaire, soit 5 789,94 euros,
- débouter Mme [C] de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement ainsi que de sa demande de décompte de retenues,
- en tout état de cause, constater que Mme [C] a atteint l'âge de la retraite, la débouter de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner à lui payer la somme de 2 500 euros à ce titre, ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 25 avril 2024.
Lors de l'audience, il a été sollicité une note en délibéré afin que Mme [C] puisse apporter toutes explications utiles sur une éventuelle irrecevabilité de sa demande de rappel de maintien de salaire pour la période d'octobre 2017 à mars 2018, et ce, sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il convient de relever que s'il n'a pas été fait droit au report de l'ordonnance de clôture présentée par la société [Localité 5] Rondeaux alors que Mme [C] avait conclu la veille de l'ordonnance de clôture, cela ne l'autorise pas à transmettre une nouvelle argumentation en cours de délibéré non sollicitée par la cour dès lors qu'il lui appartenait de déposer, soit des conclusions de rabat de clôture, soit des conclusions tendant à demander à ce que les conclusions adverses ainsi déposées soient déclarées irrecevables si elle les estimaient tardives pour pouvoir y répondre utilement.
1. Sur la demande de rappel de salaire au titre du maintien de salaire.
Mme [C] indique que lorsque la subrogation est assurée, son salaire moyen s'établit à 1 472,86 euros nets comme en témoignent ses bulletins de salaire des mois d'avril à août 2018, aussi, réclame-t-elle le paiement d'un rappel de salaire de 4 357,43 euros nets pour les mois d'octobre 2017 à mars 2018 inclus, correspondant à la somme de 1 472,86 euros sur six mois à laquelle ont été soustraites les sommes perçues durant ces mois.
Par ailleurs, elle fait valoir qu'elle a également été privée de la subrogation pour les mois de juin, octobre et novembre 2020 et février et mars 2021 pour un montant de 6 133,53 euros nets au regard des sommes perçues alors que son salaire habituel était de 1 462,36 euros nets.
En réponse, la société [Localité 5] Rondeaux relève que, par ordonnance du 28 janvier 2021, alors que Mme [C] sollicitait un justificatif des indemnités complémentaires reçues de la l'organisme de prévoyance, le conseil de prud'hommes a constaté qu'elle avait versé les indemnités correspondant à l'arrêt-maladie du 15 octobre au 9 décembre 2020, qu'elle n'avait commis aucun manquement dans le versement des indemnités complémentaires de prévoyance et que Mme [C] n'avait aucune demande à formuler à son encontre, décision qui, à défaut, d'appel, est passée en force jugée.
Pour les demandes postérieures, elle note que Mme [C] a été absente les matins des 12 et 22 janvier 2021, du 25 janvier au 7 février 2021 et du 23 février au 25 avril 2021, sans plus pouvoir bénéficier du droit au maintien de salaire, ses droits étant épuisés, étant précisé que l'acompte de 600 euros qu'elle a perçu au mois de mars 2021 avait pour seul objectif d'éviter à Mme [C] d'être en difficulté financière en attendant de connaître le montant des prestations de prévoyance.
1.1 Sur le rappel de salaire pour la période d'octobre 2017 à mars 2018.
Selon l'article 910-4 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
En l'espèce, dans ses conclusions déposées le 17 juillet 2023, Mme [C] ne sollicitait aucune condamnation de la société [Localité 5] Rondeaux au titre du maintien de salaire, et seule une communication d'un décompte précis et détaillé des retenues auxquelles il avait été procédé sur ses salaires depuis le bulletin de salaire du mois de juin 2020 jusqu'à celui d'avril 2021 était sollicitée.
La cour ayant soulevé la question de l'irrecevabilité de la demande de maintien de salaire pour la période d'octobre 2017 à mars 2018 sur le fondement de l'article 910-4 précité, Mme [C] fait valoir qu'il ne peut lui être opposée aucune irrecevabilité sur ce fondement dès lors qu'elle n'a fait que répliquer aux conclusions adverses prises le 16 avril 2024 aux termes desquelles la société [Localité 5] Rondeaux écrivait qu'elle avait réglé une avance au titre de cette période mais que cela avait entraîné un trop perçu pour Mme [C] qui n'avait cessé de s'en plaindre.
Alors que la question du maintien du salaire pour la période d'octobre 2017 à mars 2018 était en débat dès la requête initiale de Mme [C] comme elle le rappelle d'ailleurs dans sa note en délibéré et qu'elle n'a pourtant jamais réclamé une quelconque somme à ce titre antérieurement aux conclusions déposées le 24 avril 2024, ni davantage la communication d'aucun décompte pour cette période, il ne peut être considéré que la petite phrase mentionnée dans les conclusions de la partie adverse le 16 avril 2024 serait de nature à justifier cette demande nouvelle, et ce, d'autant que dans le précédent contentieux ayant opposé les parties, il était déjà souligné par la société [Localité 5] Rondeaux qu'elle avait versé cet acompte et qu'il avait d'ailleurs été jugé que le grief lié à l'absence de subrogation sur cette période ne pouvait être retenu dans la mesure où des acomptes avaient été versés pour y pallier.
Il convient en conséquence de déclarer irrecevable la demande de rappel de salaire pour la période d'octobre 2017 à mars 2018.
En tout état de cause, et surabondamment, alors qu'en vertu de l'article 30.1 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'immeuble le maintien de salaire est prévu à hauteur de 90%, compte tenu de la rémunération perçue par Mme [C] telle qu'elle ressort des bulletins de salaire produits à la cour, elle aurait dû percevoir d'octobre 2017 à mars 2018, la somme de 9 013,81 euros nets correspondant à 90% de 10 015,34 euros nets, cette somme comprenant le 13ème mois auquel elle ouvrait droit.
Or, il ressort du relevé d'indemnités journalières produit par la société [Localité 5] Rondeaux et des bulletins de salaire que Mme [C] a perçu directement de la CPAM relativement à cette période la somme de 4 104,45 euros après déduction de la CSG-CRDS et celles de 5 219,99 euros nets de la société [Localité 5] Rondeaux en tenant compte des acomptes et sommes nettes versées en fin de mois.
Dès lors, ayant perçu 9 324,44 euros nets sur cette période, il n'était plus dû aucune somme à Mme [C] pour la période d'octobre 2017 à mars 2018.
1.2 Sur la demande relative aux mois de juin, octobre et novembre 2020 et février et mars 2021.
Alors qu'en vertu de l'article 488 du code de procédure civile, l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, il n'existe aucune irrecevabilité de la demande de Mme [C] au titre de cette période sur le fondement de l'autorité de la chose jugée.
Sur le fond, il résulte de l'article 30.1 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'immeuble relatif au maintien de salaire qu'en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident, les salariés recevront 90 % de leur rémunération globale brute mensuelle contractuelle pendant 110 jours après 8 ans de présence dans l'entreprise et 120 jours après 13 ans de présence dans l'entreprise. L'ancienneté prise en compte pour la détermination du droit à l'indemnisation s'entend de celle acquise chez l'employeur concerné et s'apprécie au premier jour de l'absence. La rémunération à prendre en considération est celle que l'intéressé aurait perçue en restant en activité dans les conditions contractuelles précédant l'arrêt de travail.
Lors de chaque arrêt de travail, les délais d'indemnisation commenceront à courir à compter du premier jour d'absence. Dans tous les cas de figure, une fiche de paie devra être établie. Pour le calcul des indemnités dues au titre d'une période de paie, il sera tenu compte des indemnités déjà perçues par l'intéressé durant les 12 mois antérieurs de telle sorte que si plusieurs absences pour maladie ou accident ont été indemnisées au cours de ces 12 mois, la durée totale d'indemnisation ne dépasse pas celle applicable en vertu des alinéas précédents.
En cas d'accident du travail, le complément de salaire se fera dans les mêmes conditions que pour la maladie, sans toutefois que l'ancienneté de 1 an soit requise. Les périodes d'arrêt consécutives à un accident du travail n'entrent pas en ligne de compte pour l'appréciation des droits aux indemnités complémentaires de maladie.
Les garanties précisées aux paragraphes a, b et c ci-dessus s'entendent déduction faite des allocations que l'intéressé perçoit de la sécurité sociale et des régimes complémentaires de prévoyance alimentés par les cotisations patronales, l'employeur étant subrogé dans les droits du salarié auprès de ces organismes. Lorsque les indemnités de la sécurité sociale sont réduites du fait, par exemple, de l'hospitalisation ou d'une sanction de la caisse pour non-respect de son règlement intérieur par le salarié, elles sont réputées être servies intégralement.
A titre liminaire, il convient de relever que pour les périodes durant lesquelles Mme [C] sollicite un rappel de salaire au titre du maintien de salaire, elle avait une ancienneté comprise entre plus de huit ans et moins de treize ans au jour du début du dernier arrêt de travail, soit le 23 février 2021, aussi pouvait-elle prétendre à 110 jours de maintien de salaire.
Alors que Mme [C] sollicite un rappel de salaire sur la base du maintien de salaire, pour les mois de juin, octobre et novembre 2020, il apparaît qu'au cours des douze mois précédant, elle avait déjà perçu le maintien de salaire auquel elle pouvait prétendre conformément à la convention collective, à savoir pour la période du 22 novembre au 6 décembre 2019, du 21 au 24 janvier 2020, du 12 au 29 février 2020 et du 1er mars au 31 mai 2020, soit durant plus de 110 jours.
En ce qui concerne les mois de février et mars 2021 pour lequel elle pouvait à nouveau prétendre au maintien de salaire, il résulte de son solde de tout compte explicité par le service comptable de la société qu'elle a bénéficié de l'intégralité des sommes auxquelles elle pouvait prétendre, étant noté que Mme [C] ne tient pas compte des indemnités journalières qu'elle a, pour partie, directement perçues de la CPAM à hauteur de 36,33 euros par jour, ni de ce que le maintien de salaire est limité à 90%, aussi, il apparaît qu'elle a en réalité bénéficié de l'intégralité des sommes auxquelles elle pouvait prétendre.
Il convient en conséquence de débouter Mme [C] de sa demande de rappel de salaire au titre du maintien de salaire pour les mois de juin, octobre et novembre 2020 et février et mars 2021.
2. Sur la demande de nullité du licenciement.
Mme [C] soutient que la société [Localité 5] Rondeaux l'a licenciée à défaut d'avoir obtenu sa démission malgré une longue pratique de harcèlement moral, ce qui le rend nul, tout comme le reproche qui lui est fait d'avoir exercé des recours devant la CPAM et le conseil de prud'hommes le rend également intrinsèquement nul pour être une atteinte à sa liberté fondamentale d'ester en justice. En tout état de cause, elle note qu'aucun des griefs n'est fondé, rendant le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En réponse, la société [Localité 5] Rondeaux soutient que ce n'est pas parce qu'elle vise dans la lettre de licenciement les recours formés devant la CPAM ou le conseil de prud'hommes qu'elle motive son licenciement sur cette base, cette mention n'étant que l'illustration des moyens divers et variés utilisés par Mme [C] pour obtenir l'attention de son employeur, sachant que le 28 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a pris acte que Mme [C] n'avait pas de demande à formuler à son encontre s'agissant des indemnités complémentaires de prévoyance.
Elle explique au contraire motiver son licenciement en raison de la mauvaise exécution du contrat de travail comme en témoignent les différents griefs évoqués dans la lettre de licenciement, ce qui ressort du cahier d'observations des copropriétaires qui témoigne des multiples plaintes quant à un travail mal fait, mais aussi des attestations qu'elle produit et qui démontrent qu'elle refusait d'exécuter des tâches pourtant comprises dans son contrat de travail, ce qui l'a obligée à recourir à une entreprise extérieure en 2019 pour le nettoyage des dalles ou pour la vidange des colonnes. Elle note encore qu'elle s'opposait systématiquement à toutes directives, et ce, encore après l'avertissement de novembre 2020, effectuant ainsi les tâches qu'elle voulait malgré les plannings remis.
Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice du droit d'agir en justice, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
En l'espèce, en écrivant 'En tant que gérants bénévoles de la SCI, nous subissons également vos propos agressifs et votre harcèlement quasi quotidien. Vous ne vous adressez plus à nous qu'au moyen de courriers recommandés, de recours devant la CPAM ou le conseil de prud'hommes pour des demandes dont vous reconnaissez à l'audience qu'elles n'ont plus lieu d'être. Vous refusez de nous signer et communiquer votre planning, vos dates de congés nous sont déposées dans la boîte aux lettres en dehors des délais.', il en résulte suffisamment que, quand bien même le reproche tendant à s'adresser au conseil de prud'hommes est inclus dans une attitude plus générale d'agressivité, d'obstruction à l'exercice du pouvoir de direction de l'employeur ou encore de harcèlement lié à de multiples contestations sous des formes diverses, il est malgré tout expressément reproché à Mme [C] d'avoir exercé des actions prud'homales qui, contrairement à ce que soutient la société [Localité 5] Rondeaux, se sont avérées pour partie fondées, ce qui en soi rend le licenciement nul.
Il convient en conséquence d'infirmer le jugement et de prononcer la nullité du licenciement.
Il doit en outre être relevé que Mme [C] ayant fait l'objet d'un avertissement le 4 novembre 2020 pour s'être montrée injurieuse envers M. [Z] et avoir agressé Mme [O], sa coordinatrice, ces faits ne peuvent non seulement plus être sanctionnés, mais il ne peut davantage être sanctionnés des faits antérieurs à cette date dès lors que par cette sanction, la société [Localité 5] Rondeaux a épuisé son pouvoir disciplinaire.
Or, en ce qui concerne l'agressivité reprochée à Mme [C], au-delà des faits déjà sanctionnés, il n'est pas justifié du moindre fait de cette nature postérieurement au 4 novembre 2020, étant noté que l'attestation de Mme [N] du 1er mars 2021 n'évoque aucun fait daté.
En ce qui concerne les jardinières, le nettoyage des dalles ou la vidange des colonnes, il résulte des conclusions mêmes de la société [Localité 5] Rondeaux que des sociétés extérieures ont été mandatées depuis 2017 ou 2019 pour pallier les refus de Mme [C], ce qui permet de s'assurer qu'aucun refus postérieur au mois de novembre 2020 ne peut lui être reproché, étant encore noté qu'il est paradoxal de lui reprocher de ne pas avoir procédé à la vidange d'une colonne en 2018 tout en notant qu'elle était en arrêt-maladie à l'époque où cette intervention devait être réalisée.
Ainsi, il résulte de la lettre de licenciement qu'il ne lui est reproché que deux faits postérieurs à cette date, à savoir, le fait de ne pas avoir sorti toutes les poubelles le 21 janvier 2021 et le fait de ne pas avoir nettoyé correctement les escaliers et le hall du bâtiment C3 le 11 janvier, faits auxquels, au regard des pièces produites, peut être ajouté une plainte du mois de décembre 2020 d'une locataire dès lors que la lettre de licenciement vise plus généralement 'd'autres plaintes de copropriétaires'.
En ce qui concerne les faits du 21 janvier 2021, il est produit pour seule pièce pour en justifier une photo d'une poubelle pleine, mais qui ne déborde pas, sans qu'il ne soit possible ni de la dater, ni de la situer, et ce, sans aucune attestation complémentaire permettant de conforter la réalité de ce grief.
Quant au fait du 11 janvier 2021, il est produit un simple extrait de ce qui serait le cahier d'observations dans lequel M. [X] indique qu'à cette date le ménage est très mal fait dans le hall d'entrée C3, cette observation n'étant ni signée, ni accompagnée de la moindre attestation, ni davantage du moindre constat dressé par Mme [Y] alors qu'il est indiqué qu'elle s'est déplacée sur les lieux et a pu relever la réalité de cette observation, sachant que Mme [C] explique qu'en raison de travaux en cours chez un des copropriétaires du bâtiment C3, ce sont les ouvriers qui ont nettoyé en fin de journée.
Enfin, alors qu'il est produit un mail de Mme [W] du 11 décembre 2020 qui se plaint que Mme [C] balaye au grenier alors qu'elle avait demandé à ce qu'on la prévienne pour qu'elle retire son linge et se plaint en conséquence que cette personne fait ce qu'elle veut quand elle veut et fait l'imbécile afin qu'on lui fiche la paix, il ne peut qu'être relevé que c'est la même personne qui, la veille, demandait à ce que le balai soit passé au grenier car il y avait des moutons, ce qui démontre la nécessité de rester prudent sur la teneur des remarques formulées dans le cahier d'observations.
Il n'est ainsi établi l'existence d'aucun fait fautif intervenu postérieurement au 4 novembre 2020, ni dans le délai de deux mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement.
Au vu de ces éléments, alors que Mme [C] avait 61 ans et une ancienneté de 13 ans au moment du licenciement, qu'elle justifie avoir été placée en arrêt de travail le 22 février 2021 en raison de la découverte d'un cancer pulmonaire en octobre 2020 et s'être vue attribuée la qualité de travailleur handicapé le 24 janvier 2022, et alors qu'il résulte du dossier de surendettement qu'elle a déposé en février 2024 que ses allocations chômage s'élevaient alors à 1 222 euros, il convient de condamner la société [Localité 5] Rondeaux à lui payer la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.
3. Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
Mme [C] fait valoir que ses conditions de travail n'ont cessé de se dégrader depuis janvier 2017 lors du changement de gérants, ceux-ci multipliant les avertissements, lui refusant ses congés sur de faux motifs mais aussi l'attribution du coefficient 275 dont bénéficiait pourtant sa collègue qui exerçait les mêmes tâches qu'elle ou encore la subrogation lors de son arrêt de travail d'octobre 2017, et ce, jusqu'à l'audience de conciliation devant le conseil de prud'hommes en février 2018, ce qui l'a mise dans une situation financière très difficile.
A cet égard, elle relève qu'à cette même période, alors qu'elle avait saisi le conseil de prud'hommes, l'ordre du jour d'une réunion a été affiché à la vu de l'ensemble des sociétaires de la résidence en y mentionnant la procédure prud'homale engagée, sachant que lors de ladite réunion, Mme [Y], gérante, a mis en cause sa responsabilité dans la survenue de son accident du travail mais aussi la qualité et le sérieux de son travail.
Elle indique encore qu'à son retour d'arrêt maladie, tout en refusant qu'elle note quotidiennement les tâches effectuées, elle s'est vu attribuer un planning hebdomadaire alors qu'elle organisait auparavant seule son travail, il ne lui a pas été redonné les clés dont elle disposait préalablement lui permettant d'avoir accès à l'ensemble des locaux et services, il lui a été interdit de rentrer son véhicule au sein de la résidence, des tâches lui ont été retirées tout en lui attribuant des tâches pénibles, telles que laver les entrées à la brosse alors qu'il y avait un kärcher ou encore sortir les encombrants, ce qui ne pouvait pourtant faire partie de ses missions au vu de la convention collective.
Enfin, malgré ses nombreuses alertes, elle relève qu'aucune enquête interne n'a été diligentée pour évaluer sa situation et ce, alors qu'elle a présenté un état anxio-dépressif, et qu'au contraire, n'ayant pas réussi à obtenir sa démission, la société [Localité 5] Rondeaux l'a licenciée le 25 février 2021 sur la base de griefs infondés et en raison de l'action en justice qu'elle avait intentée mais aussi du harcèlement moral qu'elle avait dénoncé.
En réponse, la société [Localité 5] Rondeaux met en avant les difficultés rencontrées avec Mme [C] dès l'origine de son contrat en raison des multiples courriers qu'elle a pu transmettre pour mettre en cause ses collègues ou les gérants, percevant toute interaction négativement, mais aussi pour porter de manière péremptoire de multiples réclamations, les considérant comme lui étant dues et ce, alors qu'il n'en était rien. Elle note encore qu'elle a pu faire preuve d'agressivité à l'égard de résidents et de collègues, ce qui a d'ailleurs justifié l'avertissement du 4 novembre 2020 dans la mesure où elle avait injurié publiquement un collègue et même agressé sa coordinatrice, Mme [O].
En ce qui concerne plus particulièrement le harcèlement moral qui lui est reproché, elle relève qu'elle n'a jamais modifié son attitude envers Mme [C] lorsqu'elle a sollicité un coefficient supérieur qu'elle n'estimait pas fondé, seule cette dernière ayant commencé à délaisser certaines tâches confiées, de même qu'elle n'a jamais voulu lui causer difficulté lors de son accident du travail, le retard n'étant dû qu'à une erreur de son comptable qui a coché la case retirant la subrogation, ce qui a immédiatement été régularisé dès l'erreur connue. Elle relève encore que l'affichage de la réunion du 14 avril 2018 ne comportait pas l'ordre du jour et qu'il n'a pas été tenu à cette occasion de propos dénigrants Mme [C], pas plus qu'elle n'a été victime d'une inégalité de traitement avec ses collègues, tous étant soumis aux mêmes tâches, y compris la sortie des encombrants, mais aussi au respect de plannings ou de transmission des demandes de congés payés.
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L'article L. 1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, par arrêt du 14 octobre 2021, désormais définitif, la cour d'appel de [Localité 5] a d'ores et déjà jugé que l'avertissement dont avait été l'objet Mme [C] le 6 mars 2017 était valable mais qu'au contraire, les avertissements des 30 mai 2017 et 19 mars 2019 devaient être annulés à défaut pour la société [Localité 5] Rondeaux de justifier du bien-fondé des griefs invoqués.
Il résulte par ailleurs de ce même arrêt qu'il a été accordé à Mme [C] la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral en lien avec la dégradation de ses conditions de travail, la cour ayant considéré que ce préjudice résultait de l'annulation des deux avertissements précités mais aussi du retrait de certaines de ses fonctions pour éviter l'application d'un coefficient plus favorable à compter de juin 2017 et inversement, de l'attribution de tâches pénibles à exécuter seule ou encore au fait de conditionner la prise de jours de récupération et de congés en avril 2017 à l'exécution de tâches pourtant réalisées.
Il a au contraire été retenu que si des difficultés liées à la subrogation étaient apparues lors de l'arrêt de travail de Mme [C], la société [Localité 5] Rondeaux avait néanmoins mis en oeuvre des mesures tendant à lui éviter tout préjudice, notamment par le biais de versement d'acomptes, de même qu'il n'a pas été retenu qu'elle pouvait prétendre au coefficient 275 applicable antérieurement à juin 2017.
Il doit encore être noté que si Mme [C] justifie qu'il n'a pas été fait droit aux dates de congés payés qu'elle souhaitait pour l'été 2019, il est néanmoins établi qu'elle a présenté cette demande très tardivement et que ces dates n'ont été refusées qu'en raison de celles accordées à ses collègues qui avaient présenté leur demande dans les temps impartis.
Au-delà de ces faits, Mme [C] produit l'attestation de deux personnes évoquant les propos dénigrants dont elle aurait été l'objet lors d'une réunion de copropriétaires du 14 avril 2018.
Ainsi, Mme [L] relate que le 14 avril 2018, l'ensemble des copropriétaires ont été convoqués à une réunion d'information pour évoquer deux sujets, l'un relatif à un audit et l'autre à l'accident du travail de Mme [C], et qu'à cette occasion, elle a assisté à un lynchage collectif orchestré par la gérante, Mme [Y], à l'encontre de Mme [C] avec un discours choquant, à savoir qu'elle était paresseuse, ne faisait pas ses heures, que le travail d'une femme de ménage n'était pas fatiguant et qu'elle avait fait exprès de tomber, sachant qu'elle-même a pu constater le professionnalisme de Mme [C].
La teneur de cette réunion est confirmée par l'attestation de M. [D], ancien cogérant de la société [Localité 5] Rondeaux, qui reprend les propos de Mme [Y], à savoir que M. [Z] en faisait plus en cinq heures qu'en sept heures pour Mme [C], que si Mme [C] avait regardé devant elle au lieu de regarder sa collègue dans les escaliers, elle aurait vu l'arceau et ne serait pas tombée, d'autant qu'elle n'avait pas à se trouver là, ajoutant qu'il est facile de dire qu'elle est tombée parce qu'elle était épuisée et qu'enfin, elle a abordé l'action prud'homale engagée par Mme [C] en disant que si elle avait obtenu 1 000 euros lors de la conciliation, c'est parce qu'elle avait pleuré, et que le juge avait été ému.
Face à ces attestations, la société [Localité 5] Rondeaux produit les attestations de deux autres sociétaires, Mme [G] et M. [A], dont la force probante reste néanmoins limitée en ce qu'ils sont indirectement les employeurs de Mme [C], lesquels démentent formellement les propos relatés par Mme [L] et M. [D], Mme [G] précisant que M. [D] a peut-être rédigé une telle attestation en raison de sa mise en cause dans le cadre de l'audit et des demandes d'explications qui lui ont donc été demandées à l'occasion de cette réunion sur des factures raturées ou des usages illicites de la réserve 'gros travaux'.
Pourtant, tout en contestant que de tels propos auraient été tenus de manière collective à l'occasion de cette réunion, il ne peut qu'être relevé que Mme [G], dans une autre attestation de novembre 2021, explique que Mme [C] est fainéante, que ses nombreux arrêts-maladie ne sont pas valables, qu'elle perd l'entrain à vouloir travailler ce qui a fait qu'elle a enchaîné les arrêts de travail, teneur de l'attestation qui corrobore le lynchage collectif évoqué par Mme [L].
Il convient en conséquence de retenir que s'il n'est pas établi l'affichage public de l'ordre du jour, il est au contraire suffisamment démontré que cette réunion a été l'occasion de tenir des propos déplacés à l'encontre de Mme [C].
Il est encore établi qu'il lui a été soumis des plannings à compter de 2019 sans que l'unique planning de Mme [K] daté du 25 octobre 2021, soit postérieurement à l'arrêt de la cour d'appel de Rouen qui faisait état de cette difficulté, ne soit de nature à justifier que Mme [C] n'aurait pas été la seule à qui des plannings étaient soumis.
Il est également justifié que Mme [C] avait en août 2017 le droit de se garer au sein de la résidence et disposait pour ce faire d'un émetteur comme cela résulte du courrier envoyé par la société [Localité 5] Rondeaux à l'AMSN le 4 août 2017, de même qu'il est établi par le mail envoyé le 12 février 2020 par la société [Localité 5] Rondeaux qu'il ne lui a effectivement pas été remis d'émetteur au moment du changement de barrière en 2019, sans que cette dernière ne puisse utilement invoquer une 'volonté implicite de Mme [C] de vouloir mettre fin à cet avantage' en se garant à l'extérieur depuis son retour d'arrêt maladie en septembre 2018, sachant que dans son mail, elle se contentait de demander quelles démarches faire pour obtenir le même droit que ses collègues de se garer à l'intérieur et qu'il n'est, à aucun moment, dans la réponse apportée, indiqué à Mme [C] dans quelles conditions le badge pourrait lui être remis à l'avenir.
Enfin, il résulte des précédents développements que le licenciement est non seulement nul, mais en outre infondé.
Aussi, Mme [C] présente des faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral et il appartient à la société [Localité 5] Rondeaux de prouver que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
Or, si ce n'est de produire des courriers de Mme [C] qui démontrent une certaine tendance aux récriminations ou des attestations de propriétaires faisant état de leur mécontentement quant à la qualité de son travail, souvent dans des termes généraux, en se plaignant de son temps passé au téléphone ou de son agressivité, outre qu'elle-même produit inversement des attestations de propriétaires très satisfaits de ses prestations, en tout état de cause, ces éléments ne sont pas de nature à justifier les faits qui ont été retenus comme étant de nature à laisser supposer un harcèlement moral, étant rappelé que deux des quatre avertissements ont été définitivement annulés pour être infondés, que le licenciement a été jugé nul et non fondé, et qu'aucun élément objectif ne permet de justifier qu'il ne lui ait pas été remis d'émetteur au moment où elle l'a sollicité pour pouvoir se garer dans la résidence.
Ainsi, seule la demande de remise de plannings signée est objectivement justifiée par les tensions pouvant exister sur les tâches à effectuer et par le mécontentement de propriétaires quant à des prestations réalisées de manière aléatoire, ce qui est cependant insuffisant pour écarter la réalité d'un harcèlement moral au regard des autres faits non justifiés.
Alors que ce harcèlement moral s'est prolongé sur plusieurs années et que, sans faire un lien entre celui-ci et le cancer pulmonaire découvert en octobre 2020, il doit néanmoins être tenu compte de l'impact d'un tel comportement quand il est parallèlement nécessaire de faire face à l'annonce d'une maladie grave, il convient de condamner la société [Localité 5] Rondeaux à payer à Mme [C] la somme de 11 579,88 euros, étant au surplus relevé que, sauf à statuer infra petita, la cour est tenue d'accorder a minima cette somme au regard du dispositif des conclusions de la société [Localité 5] Rondeaux.
Par ailleurs, au vu de ces éléments, et alors qu'il en résulte que la nullité du licenciement était également encourue pour avoir participé aux faits de harcèlement moral, il convient sur le fondement de l'article L. 1235-4 du code du travail, d'ordonner à la société [Localité 5] Rondeaux de rembourser à France travail les indemnités chômage versées à Mme [C] du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite d'un mois.
4. Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des risques professionnels pour défaut d'enquête interne.
Si la société [Localité 5] Rondeaux ne justifie pas avoir mis en oeuvre les mesures de nature à prévenir les risques professionnels dénoncés par Mme [C] tant auprès de la société qu'auprès de l'inspection du travail ou du médecin du travail, pour autant, et alors que le harcèlement moral retenu émanait de la direction elle-même, il n'existe pas de préjudice distinct de celui déjà indemnisé et il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [C] de cette demande.
5. Sur la demande de rappel d'indemnité de licenciement.
Evaluant son salaire de référence à 1 929,98 euros et soutenant qu'elle bénéficiait d'une ancienneté de 13 ans, préavis compris, Mme [C] réclame un rappel d'indemnité de licenciement légale de 366,34 euros dès lors qu'elle n'a perçu que 6 388,59 euros alors qu'elle aurait dû percevoir 6 754,93 euros, ce que conteste la société [Localité 5] Rondeaux en faisant valoir que les périodes d'arrêt maladie d'origine non professionnelle ne doivent pas être prises en compte dans le calcul de l'ancienneté.
En l'espèce, Mme [C], embauchée le 9 avril 2008, a été licenciée le 25 février 2021 et son préavis a pris fin le 25 avril 2021.
Néanmoins, c'est à juste titre que la société [Localité 5] Rondeaux déduit de son ancienneté les périodes au cours desquelles elle a été en arrêt maladie d'origine non professionnelle, soit, pour les périodes justifiées, du 2 au 31 mai 2018, du 1er au 2 décembre 2018, le 31 décembre 2018, du 11 au 15 février 2019, du 13 au 20 mars 2019, du 1er avril au 17 juin 2019, le 23 juillet 2019, le 27 septembre 2019, du 22 novembre au 6 décembre 2019, du 21 au 24 janvier 2020, du 12 février au 19 juillet 2020, du 15 octobre au 8 décembre 2020, le 12 janvier 2021, du 25 janvier au 7 février 2021 et du 23 février au 25 avril 2021, ce qui représente plus d'un an d'arrêt de travail pour arrêt-maladie d'origine non professionnelle, et il apparaît donc que Mme [C] a perçu une indemnité de licenciement sur la base du salaire de référence qu'elle revendique plus importante que celle à laquelle elle pouvait prétendre.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement.
6. Sur la demande de rappel de congés payés.
Lors de l'audience, la société [Localité 5] Rondeaux a expressément indiqué reconnaître devoir les sommes sollicitées par Mme [C] au titre des congés payés acquis au cours des arrêts-maladie d'origine non professionnelle et il convient en conséquence, au regard de l'évolution législative et jurisprudentielle, de condamner la société [Localité 5] Rondeaux à payer à Mme [C] la somme de 1 544 euros au titre des congés payés acquis au cours de ses arrêts-maladie.
7. Sur les dépens et frais irrépétibles.
En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la société [Localité 5] Rondeaux aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de la débouter de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à Mme [C] la somme de 700 euros sur ce même fondement, en plus de la somme allouée en première instance.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant contradictoirement et publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Déclare irrecevable la demande de rappel de salaire au titre du maintien de salaire sur la période d'octobre 2017 à mars 2018 ;
Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf celles relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a débouté Mme [V] [C] de ses demandes de rappel d'indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des risques professionnels pour défaut d'enquête interne ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Prononce la nullité du licenciement ;
Condamne la SCI [Localité 5] Rondeaux à payer à Mme [V] [C] les sommes suivantes:
- dommages et intérêts pour harcèlement moral : 11 579,88 euros
- dommages et intérêts pour licenciement nul : 12 000 euros
Ordonne à la SCI [Localité 5] Rondeaux de rembourser à France travail les indemnités chômage versées à Mme [V] [C] du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite d'un mois ;
Y ajoutant,
Condamne la SCI [Localité 5] Rondeaux à payer à Mme [V] [C] la somme de 1 544 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés ;
Déboute Mme [V] [C] de sa demande de rappel de salaire au titre du maintien de salaire pour les mois de juin, octobre et novembre 2020 et février et mars 2021 ;
Condamne la SCI [Localité 5] Rondeaux aux entiers dépens ;
Condamne la SCI [Localité 5] Rondeaux à payer à Mme [V] [C] la somme de 700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la SCI [Localité 5] Rondeaux de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE