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13/06/2024 | FRANCE | N°23/03299

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre de la proximité, 13 juin 2024, 23/03299


N° RG 23/03299 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JPDN





COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITE



ARRET DU 13 JUIN 2024







DÉCISION DÉFÉRÉE :



23-000152

Jugement du juge des contentieux de la protection de Louviers du 29 Août 2023





APPELANTE :



Madame [K] [Y] épouse [E]

née le 29 Septembre 1948 à [Localité 4] (Eure)

[Adresse 2]

[Localité 3]



Ayant pour avocat constitué Me Emmanuelle MENOU de la SCP RSD AVOCATS, avocat au barr

eau de l'EURE





INTIMEE :



S.A.R.L. [P] [R]

[Adresse 5]

[Localité 1]



représentée par Me Jean-Jérôme TOUZE de la SELARL AVOCATS NORMANDS, avocat au barreau de l'EURE





COMPOSITION DE LA ...

N° RG 23/03299 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JPDN

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITE

ARRET DU 13 JUIN 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

23-000152

Jugement du juge des contentieux de la protection de Louviers du 29 Août 2023

APPELANTE :

Madame [K] [Y] épouse [E]

née le 29 Septembre 1948 à [Localité 4] (Eure)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Ayant pour avocat constitué Me Emmanuelle MENOU de la SCP RSD AVOCATS, avocat au barreau de l'EURE

INTIMEE :

S.A.R.L. [P] [R]

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentée par Me Jean-Jérôme TOUZE de la SELARL AVOCATS NORMANDS, avocat au barreau de l'EURE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 11 avril 2024 sans opposition des avocats devant Madame TILLIEZ, Conseillère, rapporteur.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Madame GOUARIN, Présidente

Madame TILLIEZ, Conseillère

Monsieur MELLET, Conseiller

DEBATS :

Madame DUPONT greffière

A l'audience publique du 11 avril 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement le 13 juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame GOUARIN, Présidente et par Madame DUPONT, greffière lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Suivant devis du 11 juin 2021, accepté le 14 juin 2021, la Sarl [P] [R], spécialisée dans la pose de menuiseries extérieures et fermetures s'est engagée auprès de Mme [K] [Y] épouse [E] à poser onze fenêtres, porte-fenêtres et porte d'entrée, sur son habitation située [Localité 3], pour un montant de 12 789,75 euros TTC.

Mme [E] a versé un acompte de 3 836,93 euros.

Se plaignant de désordres affectant les travaux réalisés par la Sarl [P] [R], Mme [E] n'a pas réglé le solde de la facture.

La société [R] a établi un avoir sur facture de 479,59 euros TTC le 02 septembre 2022, afin de se mettre en conformité avec le devis initial accepté, la facture établie le 02 novembre 2021 mentionnant de façon erronée un coût total de la prestation de 13 269,35 euros TTC.

Les différentes mises en demeure de paiement du solde étant restées infructueuses, sur assignation délivrée le 22 février 2023 par la Sarl [P] [R] à Mme [E], le juge des contentieux de la protection de la chambre de proximité de Louviers a, suivant jugement contradictoire du 29 août 2023 :

- condamné Mme [E] à verser à la Sarl [P] [R] la somme de 8 952,83 euros avec intérêts au taux légal à compter de la première lettre de mise en demeure du 16 avril 2022 ;

- condamné Mme [E] aux entiers dépens ;

- condamné Mme [E] à verser la somme de 1 000 euros à la Sarl [P] [R] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que la décision était exécutoire de droit à titre provisoire ;

- débouté la Sarl [P] [R], d'une part, et Mme [K] [E] d'autre part, de toute autres demandes différentes, plus amples ou contraires au dispositif de la décision.

Par déclaration électronique du 05 octobre 2023, Mme [E] a interjeté appel de cette décision.

Par courrier du 23 février 2024, Maître Emmanuelle Menou, représentant les intérêts de Mme [E], a indiqué à la cour, avoir dégagé toute responsabilité dans l'affaire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 avril 2024.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions communiquées le 29 décembre 2023, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des motifs, Mme [E] demande à la cour, au visa notamment des articles 1231-1 et 1240 du code civil de :

- la déclarer recevable et bien-fondé en son appel et réformer en son intégralité le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

- condamner la Sarl [R] à lui régler la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de sa responsabilité contractuelle ;

- condamner la Sarl [R] au paiement d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de sa responsabilité délictuelle, en réparation de son préjudice moral ;

- ordonner compensation entre les sommes dues par les parties ;

- condamner la Sarl [R] à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement au profit de la SCP RSD Avocats.

Dans ses conclusions communiquées le 06 mars 2024, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des motifs, la Sarl [P] [R] demande à la cour, au visa des articles 1219, 1220 et 1231 et suivants du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris et débouter en conséquence Mme [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- y ajoutant, condamner Mme [E] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêt au titre de sa résistance abusive ;

- en tout état de cause, condamner Mme [E] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance y compris les frais d'exécution forcée de la décision de première instance et de la décision en appel à intervenir.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur les demandes indemnitaires formulées par Mme [E]

L'appelante met en cause la responsabilité contractuelle de l'intimée, qu'elle estime tenue d'une obligation de résultat au visa des dispositions de l'article 1231-1 du code civil et liste les malfaçons affectant les travaux de pose des onze menuiseries, critiquant la décision du premier juge qui s'est contenté d'examiner la question du paiement de la facture, sans examiner les moyens de défense exposés par l'époux de Mme [E], venant en représentation de celle-ci en première instance.

Elle fait ainsi état du mauvais fonctionnement du barillet de la porte-fenêtre du séjour, de ponts thermiques, de joints jaunis et de frottements des fenêtres.

Elle sollicite en conséquence la condamnation de la Sarl [P] [R] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance causé par l'ensemble des désordres affectant les travaux commandés, estimant que les reprises de travaux effectuées par la société ne sont pas satisfaisantes et qu'en outre, en intervenant en octobre 2022 à son domicile, l'intimée a causé des dégradations sur sa porte d'entrée, qui présente désormais une trace de choc, une auréole figurant en outre sur la fenêtre de la cuisine.

La société intimée soulève en réplique l'irrecevabilité des demandes de condamnations formulées par l'appelante qui se plaint de désordres en les fondant à la fois sur la responsabilité contractuelle et sur la responsabilité délictuelle, heurtant ainsi le principe du non cumul des responsabilités.

La demande d'irrecevabilité formulée à ce titre par la société [R] ne saisit cependant pas la cour, dès lors qu'elle n'est développée que dans sa motivation, sans être reprise dans le dispositif de ses conclusions.

La société [R] conteste au fond l'existence de désordres qui lui serait imputable alors que l'entreprise déclare être intervenue à trois reprises au domicile de Mme [E], au titre du service après-vente, qu'aucune réserve n'a été émise après la dernière intervention de la société et que l'intimée s'est conformée au prix prévu au devis en établissant un avoir.

La société [P] [R] sollicite en conséquence, au visa des articles 1103, 1104 et 1353 du code civil, la condamnation de Mme [E] à lui payer la somme de 8 952,83 euros, solde dû au titre des travaux contractuellement effectués.

A- Sur la demande indemnitaire formulée au titre de la responsabilité contractuelle

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Mme [E] choisit légitimement d'engager la responsabilité contractuelle de la société [P] [R] dans ses conclusions, dès lors que sa première demande indemnitaire est liée à l'exécution défectueuse du contrat validé le 11 juin 2021.

Si l'entreprise a bien une obligation de résultat dans la bonne exécution du contrat, au visa de l'article 1231-1 du code civil, la preuve des désordres et donc de la mauvaise exécution du contrat et de leur imputabilité à l'entreprise pèsent cependant sur Mme [E].

Or, celle-ci se contente de produire une liste de désordres qu'elle énumère dans des courriers et dans ses conclusions, sans les justifier par un constat d'huissier, un procès-verbal de réserves ou autre document.

Si l'entreprise reconnaît être intervenue à trois reprises à la demande de Mme [E] pour effectuer des réglages et autres petites travaux de reprise, elle conteste les désordres persistants que Mme [E] se contente d'alléguer en appel comme en première instance.

Elle sera donc déboutée de sa demande indemnitaire au titre d'un préjudice de jouissance, la condition première, requise pour engager la responsabilité contractuelle de la société et consistant en une mauvaise exécution du contrat, n'étant même pas remplie.

B- Sur la demande indemnitaire formulée au titre du préjudice moral

L'appelante sollicite, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de la société, au visa de l'article 1240 du code civil, la condamnation de la Sarl [R] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice moral résultant de l'inexécution des obligations contractuelles de cette dernière, ayant occasionné de lourds désagréments tant sur le plan physique que psychique : angoisse de risques d'effraction, sensation de froid, dégradation de son habitat, nombreuses démarches à réaliser à l'amiable comme au judiciaire.

Il y a cependant erreur manifeste sur le choix du fondement de cette demande indemnitaire alors que, liée par un contrat avec la société [R], elle devait invoquer le même fondement que précédemment et donc mettre en cause la responsabilité contractuelle de la société et non sa responsabilité délictuelle, l'intimée faisant justement état du principe du non-cumul des responsabilités.

Mme [E] sera déboutée de sa demande.

II- Sur la demande de paiement de la société [R]

Mme [E] n'a effectué aucun paiement depuis sa condamnation.

Par de justes motifs que la cour adopte, le premier juge a exactement relevé que les pièces communiquées démontraient que restait due par Mme [E] à la société [R] la somme de 8 952,83 euros et qu'il y avait lieu de la condamner à verser cette somme, assortie des intérêts au taux légal.

Les dispositions relatives à la date de point de départ des intérêts retenue par le premier juge doivent néanmoins être infirmées, le courrier du 16 avril 2022 ne correspondant pas à une réelle mise en demeure au sens juridique du terme.

Les intérêts au taux légal courront à compter du courrier du 31 mai 2022, valant mise en demeure de payer.

III- Sur la demande de compensation

L'appelante sollicite la compensation entre les sommes dues à la Sarl [P] [R] au titre des travaux effectués et les dommages et intérêts octroyés par la cour de céans.

Elle sera déboutée de cette demande de compensation, échouant dans ses demandes indemnitaires.

IV- Sur la demande indemnitaire reconventionnelle pour résistance abusive

La Sarl [R] formule une demande reconventionnelle à l'encontre de Mme [E] pour résistance abusive à hauteur de 5 000 euros.

Il ne ressort cependant pas de l'affaire que l'opposition de Mme [E] à payer l'intégralité des travaux exécutés ait dégénéré en abus.

La société intimée sera donc déboutée de sa demande indemnitaire reconventionnelle.

V- Sur les demandes accessoires

Mme [E], succombant en ses demandes, sera condamnée aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement au profit des avocats en ayant fait la demande.

La société [R] sera, quant à elle déboutée de ses demandes de frais d'exécution forcée des décisions de première instance et d'appel de cette affaire, qu'elle inclut à tort dans les dépens, le recouvrement forcé de tels frais étant susceptible de relever ensuite du juge de l'exécution.

Mme [E] sera en outre condamnée à régler à la société [R] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel et déboutée de sa propre demande formulée à ce titre.

Enfin, les dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme la décision entreprise en ses dispositions, sauf en ce qu'elle a fixé le point de départ des intérêts légaux au 16 avril 2022,

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Condamne Mme [K] [Y] épouse [E] à verser à la Sarl [P] [R] la somme de 8 952,83 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2022,

Déboute Mme [K] [Y] épouse [E] de ses demandes indemnitaires et de sa demande de compensation,

Déboute la Sarl [P] [R] de sa demande indemnitaire formulée au titre de la résistance abusive opposée par Mme [K] [Y] épouse [E],

Condamne Mme [K] [Y] épouse [E] aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement au profit des avocats en ayant fait la demande,

Déboute la Sarl [P] [R] de sa demande de paiement des frais d'exécution forcée,

Condamne Mme [K] [Y] épouse [E] à verser à la Sarl [P] [R] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande formulée à ce titre.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre de la proximité
Numéro d'arrêt : 23/03299
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.03299 ?
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