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13/06/2024 | FRANCE | N°23/01963

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre de la proximité, 13 juin 2024, 23/01963


N° RG 23/01963 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JMIQ





COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITE



ARRET DU 13 JUIN 2024









DÉCISION DÉFÉRÉE :



20/01117

Jugement du tribunal judiciaire de Rouen rendu par le juge des contentieux de la protection en date du 22 mai 2023







APPELANTE :



Madame [X] [K]

née le 07 juin 1945 à [Localité 7] (95)

[Adresse 2]

[Localité 5]



représentée et assistée par Me Jean-sébastien VAYS

SE, avocat au barreau de ROUEN







INTIMES :



Société AREAS DOMMAGES

Immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 775 670 466

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me Yves MAHIU de la SELARL DE BEZENAC ...

N° RG 23/01963 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JMIQ

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITE

ARRET DU 13 JUIN 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

20/01117

Jugement du tribunal judiciaire de Rouen rendu par le juge des contentieux de la protection en date du 22 mai 2023

APPELANTE :

Madame [X] [K]

née le 07 juin 1945 à [Localité 7] (95)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée et assistée par Me Jean-sébastien VAYSSE, avocat au barreau de ROUEN

INTIMES :

Société AREAS DOMMAGES

Immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 775 670 466

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Yves MAHIU de la SELARL DE BEZENAC ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me François MUTA, avocat au barreau de ROUEN

S.A.M.C.V. SMABTP - SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS représentée par son Président du conseil d'administration.

Immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 775 684 764

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me Valérie GRAY de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN, postulant

assistée par Me Laure VALLET, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 11 avril 2024 sans opposition des avocats devant Madame TILLIEZ, Conseillère, rapporteur.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Madame GOUARIN, Présidente

Madame TILLIEZ, Conseillère

Monsieur MELLET, Conseiller

DEBATS :

Madame DUPONT greffière

A l'audience publique du 11 avril 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement le 13 juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame GOUARIN, Présidente et par Madame DUPONT, greffière lors de la mise à disposition.

Exposé des faits et de la procédure

Suivant devis du 04 mai 2010, accepté le 07 mai 2010, la société Gautier, spécialisée dans la rénovation énergétique, a consenti à M. [R] [K] et à Mme [X] [L] épouse [K] la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques, fabriqués par l'entreprise Francewatts, moyennant la somme de 22 254,46 euros.

A la suite d'une plainte des époux [K] relative à une baisse de productivité des dits panneaux, la société Gautier est intervenue le 07 août 2015 afin de remplacer un onduleur, puis le 06 octobre 2017 pour remplacer toutes les diodes sous les panneaux.

La société Gautier a été placée en liquidation judiciaire.

A la suite d'une expertise amiable et contradictoire confiée au cabinet Eurexo, mandaté par la MAIF, assureur protection juridique de M. et Mme [K], un rapport a été déposé le 10 mai 2019.

A la suite d'une expertise amiable confiée au cabinet !Xi, mandaté par la société Gautier, un rapport a été établi le 30 juillet 2019.

Par acte d'huissier du 28 février 2020, M. et Mme [K] ont assigné la société Areas Dommages, ainsi que la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), toutes deux assureurs de l'entreprise Gautier, la SMABTP étant également l'assureur de la société Francewatts, afin d'obtenir réparation de leur préjudice de perte de rendement énergétique.

[R] [K] est décédé le 21 juin 2022, laissant pour lui succéder son épouse, Mme [K] et son fils, M. [H] [K], ce dernier étant intervenu en première instance en qualité d'ayant-droit de son père.

Suivant ordonnance d'incident du 16 août 2022, le juge de la mise en état a notamment déclaré prescrite l'action des époux [K] à l'encontre de la société Francewatts, fondée sur la non-conformité contractuelle.

Suivant jugement contradictoire du 22 mai 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rouen a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de M. [H] [K] en qualité d'ayant-droit de [R] [K] ;

- rejeté toutes les demandes de Mme [K] et de M. [H] [K] ;

- condamné Mme [K] et M. [H] [K] aux entiers dépens ;

- admis les avocats qui en faisaient la demande et qui pouvaient y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [K] et M. [H] [K] à payer à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics la somme de

1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [K] et M. [H] [K] à payer à la société Areas Dommages la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les autres demandes, les demandes contraires ou plus amples ;

- rappelé que la décision était de droit exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration électronique du 07 juin 2023, Mme [X] [K] a interjeté appel de cette décision.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024.

.

Exposé des prétentions des parties

Dans leurs conclusions communiquées le 24 août 2023, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des motifs, les consorts [K] demandent à la cour, au visa des articles 1792 du code civil, 325 et suivants du code de procédure civile de :

- déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire de M. [H] [K] en sa qualité d'héritier de [R] [K] décédé le 21 juin 2022 ;

- débouter la société Areas Dommages et la SMABTP de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

- infirmer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

- condamner solidairement la SMABTP et Areas assurances à les indemniser comme suit :

6 974 euros au titre du remplacement des panneaux photovoltaïques ;

6 242,28 euros, sauf à parfaire, au titre de la perte de production subie;

2 000 euros à titre de résistance abusive ; soit au total 15 216,28 euros ;

- condamner solidairement la SMABTP, Areas assurances à leur verser la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement la SMABTP, Areas Assurances aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Jean-Sébastien Vaysse, avocat au barreau de Rouen, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions communiquées le 26 octobre 2023, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des motifs, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), demande à la cour, au visa de l'article 1792 du code civil de :

- débouter les consorts [K] de l'intégralité de leurs demandes ;

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- condamner les consorts [K] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les consorts [K] au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Gray et Scolan, pour ceux la concernant, sur le fondement des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions communiquées le 17 novembre 2023, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des motifs, la société Areas Dommages demande à la cour, au visa de l'article 1792 du code civil, de :

- débouter les consorts [K] de l'intégralité de leurs demandes ;

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Subsidiairement,

- juger que la condamnation à son encontre devra être réduite du montant de la franchise prévue au contrat, soit 1 800 euros,

- condamner les consorts [K] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [K] au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de recevabilité de l'intervention volontaire en appel

En cours de première instance, [R] [K] est décédé et Monsieur [H] [K] est intervenu volontairement à la procédure en sa qualité d'ayant-droit.

Dans le dispositif du jugement entrepris, cette intervention volontaire a été déclarée recevable.

En appel, les consorts [K] demandent  à nouveau de déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire de M. [H] [K] en sa qualité d'héritier de [R] [K] décédé le 21 juin 2022.

L'intervention volontaire de M. [H] [K], déclarée recevable par le premier juge lui a donné qualité de partie à l'instance, susceptible d'interjeter appel de la décision rendue, ce qu'il n'a pas fait.

Il sera donc débouté de sa demande.

Sur la garantie décennale

Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité

de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Pour débouter les consorts [K] de leurs demandes indemnitaires, le premier juge a conclu à l'absence de mise en cause possible de la responsabilité décennale des deux entreprises Gautier et Francewatts et donc de mise en cause de leurs assureurs respectifs.

Le premier juge a en effet considéré que si les panneaux photovoltaïques, intégrés à la toiture, représentaient à ce titre, un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, en ce qu'ils participaient au clos et au couvert de l'habitation, l'impropriété à destination exigée par le texte susvisé n'était pas établie en l'espèce, dès lors qu'étaient seulement constatées une diminution de production d'électricité destinée à la revente et non une absence totale de production, ainsi que la présence de désordres non susceptibles de mettre en péril le clos, le couvert ou la sécurité des personnes.

Si l'appelante adhère à la qualification d'ouvrage retenue par le premier juge pour les panneaux solaires intégrés à la toiture, elle considère en revanche, au visa de l'article 1792 du code civil, que le premier juge a estimé à tort que les désordres affectant les panneaux photovoltaïques ne rendaient pas l'ouvrage impropre à sa destination, alors que la baisse de production énergétique caractérise l'impropriété à destination de l'ouvrage, lui permettant d'engager la responsabilité du constructeur et de son assureur au titre de la garantie décennale. L'appelante cite deux décisions de deux cours d'appel en ce sens.

En réplique, les sociétés SMABTP et Areas Dommages sollicitent la confirmation de la décision entreprise, acquiesçant à l'analyse du premier juge et insistant sur le fait qu'un défaut ou une perte de performance énergétique dans l'objectif d'une revente d'électricité ne saurait être couvert au titre de la garantie décennale, alors que l'ouvrage est étanche à l'air et à l'eau.

Il ressort des débats que ni la qualification d'ouvrage justement appliquée par le premier juge aux panneaux photovoltaïques intégrés dans la toiture de l'habitation des époux [K], ni le constat d'une étanchéité à l'air et à l'eau de l'ensemble couverture-panneaux, ni l'absence de risque de sécurité pour les personnes (risque incendie) ne sont contestés en appel.

C'est en outre par des motifs pertinents que le premier juge a retenu qu'en l'espèce la diminution de production d'électricité destinée à la revente et imputable à un défaut électronique sur l'installation des panneaux photovoltaïques, selon les deux experts amiables mandatés sur l'affaire, ne constituait pas un dommage compromettant la destination de l'ouvrage, dès lors qu'il n'y avait pas de perte totale de production, que l'étanchéité de l'ouvrage était assurée et qu'il ne mettait pas en péril la sécurité des personnes.

Mme [K] produit en appel le contrat de revente d'électricité, signé avec EDF les 21 et 26 septembre 2011, ainsi que des factures de revente d'électricité établies entre 2012 et 2023 présentant une baisse de production d'électricité chaque année, fixée en production nette de kWh livrés à

2 681 kWh en 2012, à 356 kWh en 2022 et à 197 kWh en 2023, démontrant au fur et à mesure des années une perte de production, devenue aujourd'hui significative.

La cour estime pour autant que les conditions de mobilisation de la garantie décennale ne sont pas remplies, la seule perte de performance énergétique significative ne rendant pas l'ouvrage impropre à sa destination.

La décision entreprise sera donc confirmée tant sur l'absence de mobilisation de la garantie décennale que sur le rejet de la mise en cause des assureurs et sur les demandes indemnitaires afférentes.

Le débouté de la demande indemnitaire formulée par les consorts [K] au titre de la résistance abusive des intimés sera également confirmé, le

premier juge ayant estimé, par de justes motifs que la cour adopte, que les demandes de paiement des consorts [K] avaient été rejetées et qu'aucun abus n'était constitué en l'espèce.

Sur les demandes accessoires

Mme [K], succombant en son appel, sera condamnée aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats en ayant fait la demande, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle sera en outre condamnée à verser à chacun des intimés la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande présentée à ce titre.

Enfin, les dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR ,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ,

Y ajoutant ,

Condamne Mme [X] [L] veuve [K] aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats en ayant fait la demande, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ,

Condamne Mme [X] [L] veuve [K] à verser aux société Areas Dommages et Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics la somme de 2 000 euros, chacune, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande présentée à ce titre.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre de la proximité
Numéro d'arrêt : 23/01963
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.01963 ?
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