La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2024 | FRANCE | N°24/00024

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 15 mai 2024, 24/00024


N° RG 24/00024 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JT47





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



DU 15 MAI 2024











DÉCISION CONCERNÉE :



Décision rendue par le tribunal de commerce d'Evreux en date du 16 novembre 2023





DEMANDERESSE :



SAS PROJET X EUROPE

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau

de Rouen et assistée de Me Jean-Pierre REYNAUD, avocat au barreau de Perpignan, plaidant par Me Karine VICENTINI











DÉFENDERESSES :



SELARL MONTRAVERS YANG-TING

[Adresse 6]

[Localité 4]



représentée pa...

N° RG 24/00024 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JT47

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 15 MAI 2024

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le tribunal de commerce d'Evreux en date du 16 novembre 2023

DEMANDERESSE :

SAS PROJET X EUROPE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me Jean-Pierre REYNAUD, avocat au barreau de Perpignan, plaidant par Me Karine VICENTINI

DÉFENDERESSES :

SELARL MONTRAVERS YANG-TING

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me François DELACROIX de la SELARL DELACROIX, avocat au barreau de l'Eure et assistée de Me Svetlana ROMANOVICH, avocat au barreau d'Ajaccio, substituée par Me DELACROIX

SAS LSP BATIMENT

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me François DELACROIX de la SELARL DELACROIX, avocat au barreau de l'Eure et assistée de Me Svetlana ROMANOVICH, avocat au barreau d'Ajaccio, substituée par Me DELACROIX

DÉBATS  :

En salle des référés, à l'audience publique du 17 avril 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 15 mai 2024, devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier lors des débats,

DÉCISION :

Contradictoire

Prononcée publiquement le 15 mai 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme WITTRANT, présidente et par Mme DUPONT, greffier présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par jugement réputé contradictoire du 16 novembre 2023, le tribunal de commerce d'Evreux a :

- prononcé la réception judiciaire des chantiers réalisés dans les magasins Hugo Boss, [Localité 7], Emilio Pucci, Twinset, Momoni situés dans le centre commercial [Adresse 8],

- condamné la Sas Projet X Europe à payer à la Sas Lsp Bâtiment les sommes suivantes :

. 122 554,59 euros correspondant au solde des travaux réalisés,

. 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-exécution de l'obligation contractuelle,

. 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'ya avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision,

- condamné la Sas Projet X Europe aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 27 novembre 2023, la Sas Projet X Europe a formé appel de la décision.

Par assignation en référé délivrée le 11 décembre 2023 à la Sas Lsp Bâtiment, elle demande à la juridiction, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile, de :

- arrêter l'exécution provisoire du jugement entrepris,

à titre subsidiaire,

- ordonner à la Sas Lsp Bâtiments de constituer une garantie suffisante pour répondre des restitutions une consignation auprès de la Caisse des dépôts et de consignations de la somme de 130 000 euros ou toute autre garantie d'un montant équivalent à celui qui serait versé au titre de l'exécution provisoire jusqu'au caractère définitif de la décision à intervenir,

à titre infiniment subsidiaire,

- autoriser la Sas Projet X Europe à consigner à la Caisse des dépôts et consignations ou de tout autre séquestre la somme de 134 054,59 euros jusqu'à ce que la cour ait statué sur son appel.

La Sas Lsp Bâtiment a conclu le 12 février 2024.

Par jugement du 23 février 2024, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de cette société et désigné la Selarl Montravers Yang-Ting, mandataire judiciaire, en qualité de liquidateur judiciaire

Par ordonnance du 13 mars 2024, l'affaire a été radiée en l'absence de mise en cause régulière du liquidateur judiciaire de la Sas Lsp Bâtiment.

L'affaire a de nouveau été enrôlée le 2 avril 2024, la Sas Projet X Europe produisant l'assignation délivrée à la Selarl Montravers Yang-Ting, à personne habilitée le 11 mars 2024.

A l'audience du 17 avril 2024, bien que n'ayant notifié des écritures pour la Sas Lsp Bâtiment, le conseil de cette dernière a déclaré défendre également les intérêts du liquidateur judiciaire.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 8 mars 2024, la sas Projet X Europe demande à la juridiction de :

- débouter la Sas Lsp Bâtiment de ses demandes de nullité,

- dire que la Sas Lsp ne subit aucun grief,

- arrêter l'exécution provisoire du jugement entrepris,

à titre subsidiaire,

- ordonner à la Sas Lsp Bâtiments de constituer une garantie suffisante pour répondre des restitutions une consignation auprès de la Caisse des dépôts et de consignations de la somme de 130 000 euros ou toute autre garantie d'un montant équivalent à celui qui serait versé au titre de l'exécution provisoire jusqu'au caractère définitif de la décision à intervenir,

à titre infiniment subsidiaire,

- autoriser la Sas Projet X Europe à consigner à la Caisse des dépôts et consignations ou de tout autre séquestre la somme de 134 054,59 euros jusqu'à ce que la cour ait statué sur son appel.

en tout état de cause,

- débouter la Sas Lsp Bâtiment de toutes ses demandes,

- condamner la Sas Lsp Bâtiment à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 16 avril 2024, la Sas Lsp Bâtiment et la Selarl Montravers Yang-Ting demandent à la juridiction de :

in limine litis

- prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision sur la révocation du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire,

à défaut d'avoir prononcé le sursis à statuer,

- juger que l'assignation est nulle pour absence d'appel au fond interjeté par la Sas Projet X Europe, pour absence de capacité à ester en justice de la demanderesse, pour défaut de mentions obligatoires, en causant un grief à la Sas Lsp Bâtiment en désorganisant sa défense par la confusion entretenue entre les sociétés Projet X Sas et Projet X Europe Sas situées l'une et l'autre au [Adresse 1] à [Localité 3],

à titre principal,

- débouter la Sas Projet X Europe de toutes ses demandes, de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire, de constitution de garantie à la charge de la Sas Lsp Bâtiment pour défaut d'application de l'article 517-1 du code de procédure civile au cas d'espèce,

à titre subsidiaire,

- accorder la consignation de la somme de 135 000 euros entre les mains de la Caisse des dépôts et de consignations,

en tout état de cause,

- condamner la sas Projet X Europe à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sas Projet X Europe aux dépens.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 17 avril 2024.

MOTIFS

Sur le sursis à statuer

La Sas Lsp Bâtiment et la Selarl Montravers Yang-Ting soutiennent, au visa des articles 73 et 74 du code de procédure civile, que :

- la dette envers l'organisme ayant assigné la société étant presque apurée, cette dernière a formé appel du jugement et l'audience est fixée au 25 juin 2024 devant la Cour d'appel de Paris ;

- l'expert-comptable de la société a formé une tierce opposition au jugement de liquidation judiciaire en sa qualité de créancier au visa de l'article 582 du code de procédure civile, l'audience étant fixée au 22 avril 2024 ;

- la Sas Projet X Europe qui refuse le principe d'un sursis à statuer s'en prévaut s'agissant de l'instance introduite devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Béziers devant statuer sur la validité ou la mainlevée de la saisie-attribution sur son compte bancaire à hauteur de 101 000 euros, l'affaire étant rappelée à l'audience du 30 avril 2024 ;

- la probable révocation de la liquidation judiciaire justifie qu'un sursis à statuer soit ordonné dans l'attente des décisions à venir.

A l'audience, la Sas Projet X Europe s'oppose à la demande de sursis à statuer en soutenant que les procédures évoquées sont sans incidence dans l'appréciation de l'arrêt de l'exécution provisoire qu'elle sollicite.

En application de l'article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.

Il ressort de la décision d'ouverture de la liquidation judiciaire que le dirigeant de la sas Lsp Bâtiment ne s'est pas présenté à l'audience et que le seul élément connu de la juridiction était l'existence d'une créance de l'Urssaf Ile de France ancienne et exigible à hauteur de 24 539,70 euros pour la période du 1er septembre 2021 au 31 août 2023. Compte tenu de ces seules données, une réformation du jugement est possible.

Toutefois, si la procédure collective change l'organisation de la représentation de la société, et reste évidemment essentiel pour l'activité de la Sas Lsp Bâtiment, le sort de la créancière ne modifie pas l'appréciation devant être faite en référé des conditions d'obtention de l'arrêt de l'exécution provisoire pour la débitrice.

En conséquence, la demande de sursis à statuer est rejetée.

Sur la nullité de l'assignation délivrée le 11 décembre 2023

In limine litis, la Sas Lsp Bâtiment et la Selarl Montravers Yang-Ting font valoir que :

- la Sas Projet X Europe dispose d'une structure quasiment identique, la Sas Projet X immatriculée à la même adresse soit [Adresse 1], sous le numéro 813 048 485 et comprenant les mêmes associés et représentant ; cette seconde société a fait l'objet d'une procédure collective ; la déclaration d'appel a été enregistrée au nom de la société projet X Europe immatriculée sous le numéro

813 464 897 alors que l'assignation devant le premier président a été établie pour la Sas Projet X Europe mais sous le numéro RCS 813 048 485 ; l'assignation est nulle car aucun appel au fond n'a été interjeté par la même partie ;

- au vu de l'article 117 du code de procédure civile, le défaut de capacité d'ester en justice constitue une nullité de fond de l'acte ; la Sas Projet X étant placée en liquidation judiciaire, seule le liquidateur peut agir en justice ; à défaut, l'assignation en référé est nulle ;

- au visa de l'article 753 du code de procédure civile, l'assignation ne comporte pas les dispositions de l'article 832 du code de procédure civile ;

- les conditions de délivrance de l'acte désorganisent la défense et fait grief compte tenu de la confusion entretenue entre les deux sociétés.

En réponse, la Sas Projet X Europe rappelle les termes des articles 54, 648 et 901 du code de procédure civile pour souligner que le numéro d'immatriculation d'une société au registre du commerce et des sociétés n'est pas une mention obligatoire ; que le moyen soulevé procède uniquement d'une erreur matérielle ; que la confusion alléguée est infondée ; qu'en conséquence, il n'existe aucune difficulté tant en ce qui concerne l'auteur de la déclaration d'appel que celui de l'assignation en référé ; qu'elle bénéficie sans réserve de la capacité à agir en justice. Elle ajoute que les dispositions de l'article 832 du code de procédure civile relatives à la demande incidente de délai de paiement sont sans objet.

- Sur la confusion alléguée entre les sociétés concernées

L'article 54 du code de procédure civile dispose qu'à peine de nullité, la demande initiale mentionne en 3° b pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement.

L'article 648 du même code précise que tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs en 2 b si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement. Ces mentions sont prescrites à peine de nullité.

L'article 901 du même code ajoute que la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité, des informations non discutées en l'espèce.

Qu'il s'agisse de l'acte introductif d'instance ou de la déclaration d'appel, aucun texte n'exige à peine de nullité la précision du numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

En l'espèce, le jugement critiqué en cause d'appel concerne :

'la Sas PROJET-X EUROPE

Ayant son siège social sis [Adresse 1]

Prise en la personne de son représentant légal...'.

La déclaration d'appel a été libellée au nom de la Sas Projet X Europe dont l'adresse est le [Adresse 1] à [Localité 3] avec le visa à peine de nullité de la décision critiquée soit le jugement du tribunal de commerce d'Evreux du 16 novembre 2023.

Il n'existe dès lors aucune confusion entre la partie défenderesse en première instance et la partie appelante sans qu'aucun numéro d'immatriculation n'ait été visé.

L'assignation devant notre juridiction a été délivrée à la demande de la Sas Projet X Europe dont le siège social est situé au [Adresse 1] à [Localité 3], partie appelante comme ci-dessus rappelée.

Si la production de l'extrait K Bis du 7 février 2024 de la Sas Projet X Europe démontre l'existence d'une erreur matérielle, cette erreur n'entache aucunement l'assignation la supportant puisque la partie est parfaitement identifiée, conformément au libellé tant du jugement critiqué qu'à la déclaration d'appel sans être susceptible de créer une confusion entre cocontractants. L'erreur de numéro d'immatriculation, mention non obligatoire, est sans conséquence sans effet sur la validité de l'assignation.

En toute hypothèse, même en présence d'un vice de forme, l'erreur alléguée n'a pas causé grief et désorganisé la défense de la Sas Lsp Bâtiment qui sur la période contemporaine a, après signification du jugement, fait délivrer un commandement aux fins de saisie-vente le 12 décembre 2023, un procès-verbal de saisie conservatoire de créances le 19 décembre 2023 au Cic Sud-Ouest signifié à la Sas Projet X Europe puis un acte de conversion de saisie conservatoire avec demande de paiement le 26 décembre 2023 sans la moindre difficulté quant au numéro exact d'immatriculation de la société débitrice. La difficulté d'identification de la société demanderesse à l'arrêt de l'exécution provisoire est infondée.

- Sur la demande incidente de délai de paiement

L'article 753 du code de procédure civile précise que l'acte introductif d'instance rappelle en outre les dispositions de l'article 832 et mentionne les conditions dans lesquelles le défendeur peut se faire assister ou représenter, ainsi que, s'il y a lieu, le nom du représentant du demandeur.

L'article 832 du code de procédure civile dispose que sans préjudice des dispositions de l'article 68, la demande incidente tendant à l'octroi d'un délai de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l'appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l'audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

L'auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s'il les estime régulières, recevables et bien fondées.

Le visa de ses dispositions par la Sas Lsp Bâtiment est sans objet puisqu'en l'espèce, les conditions d'application de ce dernier texte ne sont pas réunies, l'action étant entreprise par le débiteur du montant des condamnations.

En conséquence, les moyens soulevés sont écartés, la demande d'annulation de l'assignation rejetée.

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

La Sas Projet X Europe invoque au titre des moyens sérieux de réformation du jugement son absence de défense face à une décision qui a retenu la réception judiciaire des travaux malgré l'existence de malfaçons, de désordres, de motifs de contester l'obligation de paiement obtenue par la Lsp Bâtiment. Elle indique que sa situation financière est fragile et ne lui permet pas d'exécuter le jugement critiqué au regard des conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire au regard des risques de réformation. Elle souligne que la Sas Lsp Bâtiment a déjà obtenu la somme de 101 401,11 euros en mesure d'exécution forcée et ne peut sérieusement se prévaloir d'un risque de ne pas recouvrer sa créance.

La Sas Lsp Bâtiment et la Selarl Montravers Yang-Ting conteste tout motif sérieux de réformation en critiquant l'abandon de chantier allégué par le cocontractant, les défaillances qui lui sont reprochées alors qu'aucun procès-verbal de réception n'a été formalisée par les parties et qu'aucune mise en demeure ne lui a été adressée. Le procès-verbal de constat du 27 avril 2023 démontre que les cinq boutiques du centre commercial ont été louées et qu'ainsi, les travaux ont été exécutés. Même s'il vise des travaux en cours et des équipements non posés, aucun acte contradictoire n'a été réalisé entre les parties, aucune preuve n'est apportée pour caractériser ses insuffisances, les pièces versées par la partie adverse n'étant pas probantes. Elle ajoute que la Sas Projet X Europe ne démontre pas les conséquences manifestement excessives, et postérieurement au jugement ; en revanche, elle craint l'insolvabilité de la débitrice précisément en raison de l'existence d'un siège social fictif, des difficultés financières des sociétés Projet X liquidée et Projet X Europe.

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Les conditions d'obtention de l'arrêt de l'exécution sont cumulatives. La Sas Projet X Europe n'ayant pas comparu en première instance, la condition de recevabilité posée par l'alinéa 2 soit des conséquences qui se seraient révélées postérieurement au jugement critiqué ne s'applique pas.

Le jugement comporte en principal et indemnité procédurale, hors intérêts et frais une somme totale de 122 554,59 euros + 10 000 euros + 1 500 euros soit un total de

134 054,59 euros.

Par l'effet de la saisie ci-dessus évoquée, la Sas Lsp Bâtiment a obtenu paiement de la somme de 101 401,11 euros selon relevé de l'organisme bancaire, le Cic Sud- Ouest, du 101 401,11 euros.

La Sas Projet X Europe ne verse aux débats aucun document comptable, même partiel sur l'année 2023, aucune pièce relative à sa trésorerie récente et notamment tenant compte des conséquences de la saisie démontrant des disponibilités financières importantes.

Même si la décision est remise en cause dans le cadre des recours engagés, l'état de la procédure collective entreprise à l'encontre de la Sas Lsp Bâtiment laisse craindre des difficultés de recouvrement pour la Sas Projet X Bâtiment en cas d'infirmation de la décision. L'attestation de l'expert-comptable établie le 24 janvier 2024 portant sur les exercices 2020 à 2022 ne constitue pas une garantie au regard d'un résultat net modeste et de capitaux propres susceptibles d'être rapidement absorbés en cas de difficultés : aucun document ne porte sur l'exercice comptable, la trésorerie en 2023.

Toutefois, en l'absence des pièces utiles concernant l'assiette financière de la Sas Projet X Europe, la juridiction n'est pas en mesure d'apprécier la portée de ce risque. En l'absence de conséquences manifestement excessives établies, la demande d'arrêt de l'exécution provisoire est vouée à l'échec l'une des deux conditions n'étant pas remplie. La Sas Projet X Europe sera déboutée de sa demande.

Sur les frais de procédure

La Sas Projet X Europe succombe à l'instance et en supportera les dépens.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la Sas Lsp Bâtiment et son liquidateur judiciaire.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,

Rejette la demande de sursis à statuer de la Sas Lsp Bâtiment et de la Selarl Montravers Yang-Ting, ès qualités ;

Rejette la demande d'annulation de l'assignation en référé délivrée le 11 décembre 2023 formée par la Sas Lsp Bâtiment et de la Selarl Montravers Yang-Ting, ès qualités ;

Rejette la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement prononcé le 16 novembre 2023 par le tribunal de commerce d'Evreux formée par la Sas Projet X Europe ;

Déboute la Sas Lsp Bâtiment et de la Selarl Montravers Yang-Ting, ès qualités de sa demande fondée sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Sas Projet X Europe aux dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 24/00024
Date de la décision : 15/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-15;24.00024 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award