N° RG 22/02476 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JEK3
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 18 AVRIL 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE LOUVIERS du 28 Juin 2022
APPELANTE :
S.A.S. LA P'TITE DIEPPOISE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Samia MSADAK, avocat au barreau de PARIS
INTIME :
Monsieur [E] [L]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Delphine HUAN-PINCON, avocat au barreau de l'EURE substitué par Me Oriane STURBOIS, avocat au barreau de l'EURE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 07 Mars 2024 sans opposition des parties devant Madame BIDEAULT, Présidente, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ALVARADE, Présidente
Madame POUGET, Conseillère, rédactrice
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DUBUC, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 07 mars 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 avril 2024
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 18 Avril 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 1er juin 2019, M. [E] [L] (le salarié) a été engagé par la Sas La P'tite dieppoise (la société) en qualité de vendeur par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (24 heures), régi par la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.
A compter du 1er novembre 2019, par avenant à son contrat de travail, la durée hebdomadaire a été portée à 35 heures hebdomadaires.
La société a pour objet l'achat et la vente de poissons, crustacés et produits dérivés de la mer. Elle est dirigée par M. [S] [T] et Mme [N] [F], sa concubine, qui en est directrice générale.
Par lettre notifiée le 22 juin 2020, M. [E] [L] a été convoqué en vue d'une rupture conventionnelle.
M. [L] a indiqué, le 25 juin suivant, qu'il ne souhaitait pas donner suite à la proposition de rupture conventionnelle.
Par courrier daté du 1er juillet 2020, la société l'a convoqué à un entretien préalable fixé au 13 juillet 2020.
Par lettre notifiée le 21 juillet 2020, le salarié a été licencié pour faute grave.
Par requête du 7 juillet 2021, il a saisi le conseil de prud'hommes de Louviers qui, par jugement du 28 juin 2022, a :
- dit que son action était recevable,
- dit que son licenciement pour faute grave était nul,
- condamné la Sas La P'tite dieppoise à lui payer les sommes suivantes :
indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 12 300 euros net,
rappel de salaire pour non-respect de la durée minimale conventionnelle de travail à temps partiel : 347,40 euros brut,
congés payés afférents : 34,74 euros brut,
indemnité de licenciement : 640,63 euros brut,
indemnité compensatrice de préavis : 2 050 euros brut,
indemnité au titre des congés payés afférents : 205 euros brut,
indemnité au titre de l'indemnité pour licenciement nul : 14 350 euros brut,
indemnité au titre de dommages et intérêts pour non remise de l'attestation de salaire correspondant au congé paternité : 751,65 euros net,
- ordonné à la Sas La P'tite dieppoise de régulariser la situation de M. [E] [L] auprès des organismes de retraite pour la période travaillée au sein de la société, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement,
- condamné la Sas La P'tite dieppoise à remettre à M. [E] [L] les documents sociaux rectifiés et un dernier bulletin de paie sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 30 ème jour suivant la notification du jugement,
- condamné la Sas La P'tite dieppoise aux intérêts au taux légal sur toutes les condamnations,
- débouté M. [E] [L] de ses demandes de rappel de salaire pour non-paiement du temps de pause mensuel et au titre des congés imposés,
- condamné la Sas La P'tite dieppoise à payer à M. [E] [L] la somme de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, y compris les frais éventuels d'exécution forcée,
- débouté la Sas La P'tite dieppoise de l'ensemble de ses demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision en vertu des dispositions de l'article R1454-28 du code du travail.
Le 22 juillet 2022, la Sas La P'tite dieppoise a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions signifiées le 13 avril 2023, la société demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
y faisant droit,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
dit que l'action engagée par M. [E] [L] était recevable,
dit et jugé que le licenciement pour faute grave de M. [E] [L] était nul,
condamné la société à payer les diverses sommes ci-dessus rappelées, mis à sa charge des obligations sous astreinte et l'a déboutée de ses demandes,
- le confirmer en ce qu'il a débouté M. [E] [L] de sa demande de rappel de salaire au titre des congés imposés et de celle de rappel de salaire au titre du temps de pause,
statuant à nouveau,
- débouter M. [E] [L] de l'intégralité de ses demandes et de celle reconventionnelle en paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [E] [L] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des frais en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions signifiées le 13 juin 2023, le salarié demande à la cour de :
- déclarer recevable son appel incident,
- confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de rappel de salaire pour non-paiement du temps de pause mensuel et de celle de rappel de salaire sur congés imposés,
statuant à nouveau,
- condamner la société à lui payer la somme de 819,62 euros brut à titre de rappel de salaire pour non-paiement du temps de pause mensuel, outre 81,96 euros brut au titre des congés payés afférents, ainsi que celle de 2 364,75 euros brut à titre de rappel sur congés payés imposés du 26 Juin au 31 juillet 2020,
- condamner la société à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société aux entiers dépens d'appel, y compris les frais éventuels d'exécution forcée,
- la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 février 2024.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé détaillé de leurs moyens et arguments.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le licenciement
A titre liminaire, la cour entend rappeler que l'existence de pourparlers concernant une possible rupture conventionnelle, antérieure à l'engagement d'une procédure disciplinaire par la convocation du salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement, n'emporte pas renonciation par l'employeur à l'exercice de son pouvoir disciplinaire et ce, peu important la partie à l'origine de la procédure de rupture conventionnelle.
Aussi, il n'y a pas lieu d'examiner ce point sans incidence sur le litige bien que les parties l'évoquent dans leurs conclusions.
L'article L. 1225-4-1 du code du travail dispose qu'aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant les dix semaines suivant la naissance de son enfant.
Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'arrivée de l'enfant.
Il n'est pas discuté que la rupture du contrat de travail de l'intimé est intervenue dans la période légale de protection ci-dessus rappelée puisque son enfant est né le 2 juillet 2020.
La preuve des faits constitutifs de la faute grave incombe à l'employeur et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits reprochés au salarié aux termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige sont établis, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.
Aux termes de la lettre de licenciement, le salarié a été licencié pour faute grave pour les faits suivants :
« (') depuis octobre 2019 et essentiellement les jours de marché les plus forts du vendredi et samedi, vous avez multiplié les erreurs de saisie TPE avec des montants importants sans procéder à leur rectification.
Vous avez également fait des saisies de clients « fantômes » et qui ne correspondent pas à des ventes réelles.
Sous l'effet conjugué de ces deux facteurs, nous n'avons plus la capacité de vérifier les différentiels de caisse et de recouper les flux d'encaissement (')
Vous avez fait valoir que les différentiels de caisse relèvent d'une responsabilité collective avec les autres vendeurs et qu'elle doit être partagée.
Or, le traçage de votre code vendeur TPE démontre le contraire et que c'était une stratégie délibérée de votre part de brouiller les pistes avec des erreurs en série les deux jours de marché les plus importants afin de couvrir les insuffisances en caisse.
Depuis votre mise en congé le 26 juin, les caisses sont parfaitement ordonnées et sans aucun désajustement entre les liquidités et les tickets de caisse (') ».
Il convient de rappeler que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et qu'il résulte de sa lecture que l'employeur reproche à son salarié des erreurs de saisie TPE et des saisies de clients « fantômes » qui ne correspondent pas à des ventes réelles, ces prétendus manquements étant source de différentiels de caisse.
Pour autant, les termes employés ne peuvent être assimilés, comme le soutient la société, à des faits de vols d'espèces commis par le salarié. En effet, si elle fait valoir que compte tenu du poste occupé par le salarié, les « erreurs de saisie reprochées dans la lettre de licenciement faisaient référence au vol d'espèces dont il était à l'origine », il convient de rappeler qu'un vol est un délit intentionnel qui ne relève pas du registre de l'erreur, laquelle peut avoir de multiples causes.
Par ailleurs, outre le fait que seuls deux tickets de caisse (pièce n° 20) portent la mention « Momo » laissant à penser qu'il s'agit du surnom du salarié prénommé [E], ces pièces ne permettent pas de lui imputer les erreurs de saisie visées par la lettre de licenciement.
En outre, le document dactylographié intitulé « erreur de caisse 2020 » précisant pour certains jours, un montant de caisse prétendument manquant, est dénué de valeur probante en ce que les chiffres qu'il précise ne sont corroborés par aucune pièce comptable.
Dans ces conditions, aucune faute grave commise par l'intimé n'est établie, de sorte que c'est à raison que les premiers juges ont dit que son licenciement était nul par application des dispositions légales ci-dessus rappelées.
La décision déférée est confirmée sur ce chef et en ses dispositions relatives aux sommes allouées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés y afférents et à l'indemnité de licenciement, lesquelles ne sont pas discutés dans leur quantum.
En outre, il convient de rappeler qu'en cas de licenciement nul, les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, rappelées par la société, n'ont pas lieu à s'appliquer puisqu'il convient, dans ce cas, de faire application de l'article L. 1235-3-1, lequel texte prévoit l'octroi d'une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Dans ces conditions et compte tenu des circonstances de l'espèce, il convient d'allouer à l'intimé la somme de 12 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.
Enfin, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés et ce, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette remise d'une astreinte.
Sur le travail dissimulé
Aux termes de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait, notamment, pour tout employeur :
- soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
- soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
En l'espèce, il s'infère des SMS échangés entre les parties sur la période de janvier au 20 mai 2019, soit antérieurement à la signature du contrat de travail, que M. [T], gérant de la société, a adressé à M. [L] dès le 24 janvier 2019, le plan de la [Adresse 3] où l'appelante disposait d'une place de marché depuis le 15 décembre 2018, étant observé que le début de son activité est le 3 janvier 2019, contrairement à ce qu'elle allègue. De plus, dans deux autres messages du mois d'avril 2019, ledit gérant indique à l'intimé : « demain matin viens comme d'habitude » et « excuse Momo pas de marché pour demain ».
Ces éléments établissent en suffisance que M. [L] a travaillé, sans être déclaré aux organismes sociaux, dès le mois de janvier 2019. Le caractère illégal de cette situation ne pouvait bien évidemment pas être ignoré de l'employeur puisque ce dernier a, au mois de juin 2019, procédé à l'embauche régulière du salarié.
Par conséquent, la preuve du caractère intentionnel de l'infraction reprochée est établie et c'est à raison que les premiers juges ont fait droit à la demande d'indemnité formée sur ce point, la décision déférée doit être confirmée.
Enfin, pour la bonne compréhension des autres prétentions formées par le salarié, la cour entend observer que ce dernier ne tire aucune conséquence juridique, autre que sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, de l'existence d'une relation de travail antérieure à la signature de son contrat de travail.
Sur le rappel de salaire durant la période de travail à temps partiel
Se fondant sur les dispositions de l'article 6.1.1 de la convention collective applicable, M. [L] fait valoir que la durée conventionnelle minimale de travail est de 26 heures alors qu'il a été engagé sur la base de 24 heures et forme une demande de rappel de salaire pour la période de juin à septembre 2019.
En réplique, l'employeur se prévaut de l'article 6.1.2 de ladite convention qui prévoit des exceptions à la durée minimale conventionnelle.
Pour autant, il ne rapporte pas la preuve d'une demande individuelle du salarié d'un temps choisi inférieur à 26 heures, seule exception applicable à l'espèce.
En effet, ladite disposition prévoit que les demandes individuelles d'un contrat de travail établi sur une base inférieure à 26 heures sont nécessairement écrites et doivent être motivées, soit par des raisons d'ordre professionnel, qui doivent alors être explicitées (cumul avec un autre emploi en particulier), soit par des raisons d'ordre personnel (obligations familiales, restrictions médicales, activités associatives, poursuites d'études au-delà de 26 ans...), qui relèvent le plus souvent de la vie privée du salarié et dont le détail n'a pas nécessairement à être communiqué à l'employeur.
Aussi, la seule signature du contrat de travail par le salarié ne répond pas au formalisme ci-dessus requis. De même, l'absence ultérieure de demande d'ajustement de sa durée de travail ne saurait ni pallier à la carence constatée, ni valoir renonciation à une demande de rappel de salaire à ce titre.
Par conséquent, la décision déférée est également confirmée sur ce chef.
Sur la demande de rappel de salaire au titre des pauses
L'article 5.2.1 de la convention collective applicable dispose qu'on entend par « pause » un temps de repos-payé ou non-compris dans le temps de présence journalier dans l'entreprise pendant lequel l'exécution du travail est suspendue.
Une pause payée est attribuée à raison de 5 % du temps de travail effectif.
Les conditions de prise des pauses sont fixées au niveau de chaque entreprise ou établissement.
À défaut d'entente sur ce point, tout travail consécutif d'au moins 4 heures doit être coupé par une pause payée prise avant la réalisation de la 5e heure. Il est, en outre, rappelé qu'en application de l'article L. 220-2 du code du travail aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre 6 heures sans que le salarié bénéficie d'une pause d'une durée minimale de 20 minutes.
La durée des pauses et le paiement correspondant doivent figurer sur une ligne distincte du bulletin de paie.
Même à supposer établi que le salarié ait personnellement bénéficié d'un temps de pause, il n'est pas discuté que ce temps n'a pas été rémunéré dans les conditions de l'alinéa 2 du texte ci-dessus, les bulletins de salaire ne portant aucune mention sur ce point.
Aussi, il convient d'infirmer la décision déférée sur ce point et de condamner l'appelante à payer la somme de 819,62 euros correspondant à la période de novembre 2019 à juin 2020, eu égard à la demande formée à ce titre, outre les congés payés afférents.
Sur le rappel de congés payés
A supposer établi le fait que l'employeur ait imposé au salarié ses dates de congés, seule une demande de dommages et intérêts peut être formée par ce dernier à charge pour lui de rapporter la preuve d'un préjudice.
Or, la cour constate que l'intimé forme une demande en paiement de jours de congés payés alors même qu'il ne conteste pas en avoir bénéficié.
Par conséquent, c'est à juste titre qu'il a été débouté de cette prétention, la décision déférée est confirmée sur ce chef.
Sur la remise de l'attestation de salaire au titre du congé de paternité
En application des dispositions des articles L. 331-8 et R. 323-10 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige, le salarié qui exerce son droit à congé de paternité reçoit, pendant une durée maximale de 11 jours consécutifs, une indemnité journalière, laquelle est déterminée dans son montant en fonction de l'attestation établie par l'employeur.
S'il est exact que le salarié a formé avec retard sa demande de congé paternité, puisqu'il l'a fait par courrier du 6 juillet 2020 pour la période du 2 au 12 juillet 2020, cet élément ne permet aucunement à l'employeur de justifier de sa propre carence à établir l'attestation de salaire considérée, étant observé que son manquement perdure encore à hauteur d'appel. En effet, ce dernier ne démontre toujours pas avoir rempli son obligation à ce titre, se limitant à produire des échanges de mails avec son prestataire de paie.
Dans ces conditions, le salarié qui a été privé de revenus durant cette période, a effectivement subi un préjudice financier qui a été justement réparé par les dommages et intérêts alloués par les premiers juges.
La décision déférée est confirmée sur ce chef.
Sur la demande de régularisation des cotisations de retraite
A ce titre, si la société reconnaît que le versement des cotisations de retraite a été omis par son ancien comptable et que depuis, la situation aurait été régularisée, il convient d'observer que le relevé de carrière produit par l'intimé, daté du 11 janvier 2023, ne fait toujours pas apparaître les périodes travaillées par ce dernier au sein de la société pour l'année 2019 et pour une partie de l'année 2020 (1er janvier au 31 mars 2020).
Dans ces conditions, c'est à raison que les premiers juges ont ordonné la régularisation auprès des organismes de retraite de cette situation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, sauf à préciser, que le point de départ sera fixé à compter du 30 ème jour suivant la notification de l'arrêt, que l'astreinte provisoire aura une durée de 6 mois et que le conseil de prud'hommes de Louviers sera compétent pour la liquider.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, la société est condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour la même raison, elle est condamnée à payer à M. [L] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement et en dernier ressort ;
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Louviers du 28 juin 2022, sauf en ses dispositions relatives au rappel de salaire pour non-paiement du temps de pause mensuel, au montant des dommages et intérêts pour licenciement nul, à la remise sous astreinte des documents de fin de contrat et à la régularisation des cotisations de retraite,
Statuant dans cette limite et y ajoutant,
Condamne la société La P'tite dieppoise à payer à M. [E] [L] les sommes suivantes :
12 300 euros à titre de de dommages et intérêts pour licenciement nul,
819,62 euros à titre de rappel de salaire au titre des pauses rémunérées, outre 81,96 euros à titre de congés payés afférents,
1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ordonne à la société La P'tite dieppoise de régulariser la situation de M. [L] auprès des organismes de retraite pour la période travaillée au sein de la société, sous astreinte de 50 euros par jour de retard durant 6 mois, ce à compter du 30 ème jour suivant la notification de l'arrêt ;
Dit que le conseil de prud'hommes de Louviers sera compétent pour liquider l'astreinte provisoire prononcée ;
Ordonne à la société de remettre au salarié les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt ;
Dit qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette remise d'une astreinte ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société La P'tite dieppoise aux dépens d'appel.
La greffière La présidente