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17/04/2024 | FRANCE | N°22/03617

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 17 avril 2024, 22/03617


N° RG 22/03617 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JGY6







COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 17 AVRIL 2024









DÉCISION DÉFÉRÉE :



19/03478

Tribunal judiciaire de Rouen du 17 octobre 2022





APPELANTE :



SAS EXTRACO CREATION

RCS de Rouen 352 122 063

[Adresse 4]

[Adresse 4]



représentée et assistée par Me Marc ABSIRE de la SELARL DAMC, avocat au barreau de Rouen substituée par Me MARECHAL

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INTIMES :



Monsieur [O] [E]

né le 22 novembre 1985 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Adresse 5]



représenté et assisté par Me Xavier GARCON de la SELARL ELOGE AVOCATS, avocat au barreau de Rouen





Madame [Z] [F]...

N° RG 22/03617 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JGY6

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 17 AVRIL 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

19/03478

Tribunal judiciaire de Rouen du 17 octobre 2022

APPELANTE :

SAS EXTRACO CREATION

RCS de Rouen 352 122 063

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée et assistée par Me Marc ABSIRE de la SELARL DAMC, avocat au barreau de Rouen substituée par Me MARECHAL

INTIMES :

Monsieur [O] [E]

né le 22 novembre 1985 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représenté et assisté par Me Xavier GARCON de la SELARL ELOGE AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

Madame [Z] [F] épouse [E]

née le 15 juin 1988 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée et assistée par Me Xavier GARCON de la SELARL ELOGE AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

Madame [W] [G] divorcée [N]

née le 16 septembre 1960 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

représentée et assistée par Me Xavier GARCON de la SELARL ELOGE AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

SA MMA IARD

venant aux droits de COVEA RISK

RCS Le Mans 440 048 882

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée et assistée par Me Micheline HUMMEL-DESANGLOIS de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

venant aux droits de COVEA RISK

RCS Le Mans 775 652 126

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée et assistée par Me Micheline HUMMEL-DESANGLOIS de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen

SARL ENTREPRISE CUMONT

RCS de Dieppe 016 580 110

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me Laure VALLET, avocat au barreau de Rouen

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 12 février 2024 sans opposition des avocats devant Mme BERGERE, conseillère, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre

Mme Magali DEGUETTE, conseillère

Mme Anne-Laure BERGERE, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER

DEBATS :

A l'audience publique du 12 février 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 avril 2024

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 17 avril 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 27 janvier 2014, la société Aucapi, assurée auprès de la société Covea Risk a conclu avec la Sas Extraco création deux contrats de construction de maisons individuelles mitoyennes sur un terrain situé [Adresse 6] divisé en deux lots A et B.

Suivant contrat de réservation du 15 juillet 2014 et acte authentique du 26 novembre 2014, Mme [W] [G] divorcée [N] a acquis le lot A auprès de la société Aucapi pour un prix de 220 000 euros.

Suivant contrat de réservation du 26 mai 2015 et acte authentique du 7 août 2015,

M. [O] [E] et Mme [Z] [F] épouse [E] ont acquis le lot B auprès de la société Aucapi pour un prix de 220 000 euros.

La réception de ces deux ouvrages a été prononcée le 17 juillet 2015.

Mme [G], M. [E] et Mme [F] se sont plaints de l'existence de désordres.

Suivant ordonnance de référé du 23 août 2016 rendue au contradictoire de Mme [G], Mme [F], M. [E], la société Aucapi, la société Extraco création, les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles venant aux droits de la société Covea Risk, une expertise judiciaire des désordres a été confiée à

M. [R].

Par ordonnance du 6 avril 2017, les opérations d'expertise ont été étendues à la société Entreprise Cumont, qui est intervenue pour la finition du chemin d'accès aux deux maisons.

Par ordonnance du 29 juin 2017, les opérations d'expertise ont été étendues à la société Tadj, sous-traitant de la société Extraco création, qui a réalisé les travaux de terrassement, d'assainissement et le raccordement à la voirie.

Suivant jugement du 13 novembre 2018, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Aucapi, en désignant Me [K] en qualité de liquidateur.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 28 décembre 2018.

Par actes d'huissier en date des 5 et 6 septembre 2019, Mme [G], Mme [F] et M. [E] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Rouen la société Extraco création, les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles et la société Entreprise Cumont aux fins de condamnation en paiement sur le fondement de la garantie décennale, ou à défaut, des désordres intermédiaires.

Par jugement du 17 octobre 2022, le tribunal judiciaire de Rouen a :

- retenu la qualité à agir de M. [E] et Mme [F],

- condamné la société Extraco création, au titre de la reprise des désordres 1, 2, 10 et 12 à verser à Mme [G] une somme de 1 443,20 euros et aux ex-époux [E] une somme de 1 360, 70 euros, soit un total de 2 803,90 euros,

- condamné la société Extraco création à verser à Mme [G] et aux ex-époux [E] une somme de 18 182,59 euros afin de leur permettre la reprise de la voirie, désordre n°3,

- débouté des demandes de surplus,

- débouté les demandeurs de leur demande de condamnation solidaire des Mma,

- débouté la société Extraco création de sa demande en garantie des Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles,

- condamné en garantie la société Extraco création et la société Cumont à hauteur de la moitié,

- condamné Mma Iard, Mma Iard Assurances Mutuelles, la société Extraco création et la société Cumont in solidum à verser aux ex-époux [E] et à Mme [G] une somme de 6 936,36 euros au titre du désordre n°4,

- condamné in solidum Mma Iard, Mma Iard Assurances Mutuelles, la société Extraco création et la société Cumont à verser une somme de 1 000 euros à Mme [G], une somme de 1 000 euros à Mme [F] et une somme de

1 000 euros à M. [E], soit une somme globale de 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

- condamné les sociétés Extraco création et entreprise Cumont et les Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles in solidum à verser aux demandeurs une somme de 3 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles,

- débouté Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles ainsi que la société Cumont et la société Extraco création de leurs demandes à ce titre,

- débouté la société Extraco création de ses demandes en recours en garantie autre que celle tendant à la mise en garantie de la société Cumont à hauteur de la moitié, pour la reprise du désordre n°3, représentant une somme de 18 182,59 euros,

- débouté les Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles de leurs demandes en recours et garanties,

- débouté les parties de toute autre demande non présentement satisfaite,

- condamné les sociétés Extraco création et entreprise Cumont et les Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles in solidum aux entiers dépens qui comprendront le coût de la mesure d'expertise ayant donné lieu au rapport de l'expert judiciaire

M. [H] [R], architecte, rapport du 28 décembre 2018,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration reçue au greffe le 8 novembre 2022, la Sas Extraco création a fait appel de cette décision.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 19 juillet 2023, la Sas Extraco création demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants, 1147 ancien et suivants, 1382 ancien et suivants du code civil, de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

à titre principal,

- débouter les consorts [E] et [N] de l'ensemble de leurs demandes,

- débouter les Mma de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre elle,

à titre subsidiaire,

- accorder recours et garantie pour l'ensemble des condamnations et paiements effectivement réalisés, à son bénéfice et à l'encontre de la société Cumont et des Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles pour le désordre n°3 et Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles pour le désordre n°4,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la somme de 18 182,59 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°3,

en tout état de cause,

- condamner in solidum les consorts [E] et [N] au paiement d'une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance, et 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'appelante reproche aux premiers juges d'avoir retenu la qualité à agir des ex-époux [E] sur le fondement de la garantie décennale alors qu'ils ne sont plus propriétaires de l'immeuble et qu'ils ne démontrent pas un réel intérêt direct et certain à agir.

Sur les désordres n°1 et 2, elle invoque leur caractère apparent à la réception, qui plus est réalisée par la société Aucapi, professionnel du bâtiment, de sorte que les acquéreurs sont dépourvus de recours à son encontre. De surcroît, pour le désordre n°2, elle fait observer qu'il s'agit d'un problème de peinture, prestation qu'elle n'a pas réalisée.

Sur le désordre n°10, elle indique qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire qu'il s'agit d'un désordre apparent à la réception, de nature purement esthétique et qui ne nécessite aucune intervention, puisqu'il s'agit d'un phénomène naturel de dilatation.

Sur le désordre n°12, elle rappelle que contrairement à ce qu'a mentionné l'expert judiciaire dans son rapport, elle a toujours contesté le lien entre la nécessité de faire réaliser les travaux de reprise et les désordres éventuellement existants. Il est fait état de problèmes d'évacuation des eaux usées en vide sanitaire qui n'ont pas été constatés, ni par les parties, ni par l'expert, de sorte que l'action ne peut prospérer.

Sur le désordre n°3, la société Extraco Création soutient que le tribunal a fait une appréciation erronée des éléments de droit et de fait pour retenir sa responsabilité contractuelle. Les aménagements extérieurs réalisés directement par la société Aucapi ne la concernent pas. En outre, elle reproche à l'expert d'avoir dépassé sa mission en soulevant une difficulté sur l'accessibilité PMR qui n'était pas incluse dans les désordres visés par l'ordonnance le désignant et qui, en tout état de cause, est un désordre apparent à la réception. Elle critique également l'expert en ce qu'il a considéré qu'elle avait une mission de supervision qui n'était pas dans son contrat et que la société Cumont était son sous-traitant. C'est donc à tort que le premier juge a avalisé les conclusions expertales sur ce point.

Sur le désordre n°4, elle rappelle que la société Tadj est sa sous-traitante et non celle de la société Aucapi comme l'a retenu l'expert. De plus, elle fait valoir que la société Aucapi s'étant réservée l'aménagement extérieur, en ce compris l'aménagement des voies de circulation, il ne peut être reproché à la société Extraco Création de ne pas avoir averti le maître de l'ouvrage, par ailleurs professionnel du bâtiment, des protections spécifiques à mettre en oeuvre sur les tampons et pompes de relevage pour la réalisation d'un aménagement dont elle ignorait les modalités concrètes.

Enfin, sur le préjudice de jouissance, l'appelante soutient qu'il est inexistant.

Par dernières conclusions notifiées le 30 mai 2023, Mme [F], M. [E] et Mme [G] demandent à la cour, au visa de l'article 31 du code de procédure civile, des articles 1147, 1646'1, 1792, 1792-1 du code civil, de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

. condamné la société Extraco création au paiement de la somme de 18 182,59 euros au titre de la reprise du désordre n°3,

. condamné solidairement les sociétés Extraco création, Entreprise Cumont, Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles au paiement de la somme de 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

statuant à nouveau,

- condamner la société Extraco création au paiement de la somme de 26 382,99 euros au titre de sa responsabilité décennale du désordre n°3 relevé dans le rapport d'expertise de M. [R],

- condamner solidairement les sociétés Extraco création, Entreprise Cumont, Mma Iard et Mma Iard Assurance Mutuelles au paiement de la somme de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

en tout état de cause,

- débouter les sociétés Extraco création, Entreprise Cumont, Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles de toutes leurs demandes,

- condamner solidairement les sociétés Mma Iard, Mma Iard Assurances Mutuelles, Extraco création et Entreprise Cumont au paiement de la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Sur la qualité à agir de Mme [F] et de M. [E], ils rappellent que la Cour de cassation a reconnu le bénéfice de l'action en responsabilité au vendeur qui s'est réservé, par une clause dans l'acte de vente, le droit d'agir contre les constructeurs au titre de dommages antérieurs à la vente.

Ils précisent que leur action, pour chaque désordre, est fondée à titre principal, sur la mise en oeuvre de la garantie décennale et à titre subsidiaire, sur la responsabilité contractuelle de droit commun.

Pour les désordres n°1 et 2, ils demandent la confirmation du jugement qui a avalisé les conclusions expertales.

Il en est de même pour le désordre n°3, rappelant que la réception sans réserve par le vendeur en l'état futur d'achèvement est sans effet sur son obligation de livraison d'un ouvrage conforme aux stipulations contractuelles. En revanche, ils contestent le montant retenu par le premier juge, estimant que le coût des travaux de reprise doit être fixé à 26 382,99 euros.

Pour le désordre n°4, 10 et 12, ils sollicitent la confirmation des conclusions expertales avalisées par le premier juge.

Enfin, concernant leur préjudice de jouissance, ils soutiennent qu'il est incontestable compte tenu de l'état fortement dégradé de la voirie, alors qu'ils empruntent quotidiennement cette voie d'accès.

Par dernières conclusions notifiées le 12 mai 2023, la société Entreprise Cumont demande à la cour de :

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle l'a condamnée au titre des désordres 3 et 4, au titre du préjudice de jouissance, frais irrépétibles et dépens,

statuant à nouveau,

à titre principal,

- déclarer irrecevables les demandes des ex-époux [E] et de Mme [G] divorcée [N] pour défaut d'intérêt à agir,

à titre subsidiaire,

- débouter les ex-époux [E] et Mme [G] divorcée [N] de toutes leurs demandes,

- débouter la société Extraco création de sa demande de recours et garantie contre elle,

- rejeter toutes prétentions émises à son encontre,

- confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a retenu la somme de 18 182,59 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°3,

en tout état de cause,

- condamner in solidum les ex-époux [E] et Mme [G] divorcée [N] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 2 500 euros au titre des frais exposés en cause d'appel, outre les entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la Selarl Gray Scolan.

Sur la qualité à agir de M. [E] et Mme [F], elle fait valoir qu'ils ne démontrent pas avoir conservé un intérêt à agir sur le fondement de la garantie décennale de sorte que leur action est irrecevable.

Concernant le désordre n°3 portant sur le revêtement de surface voirie, elle affirme qu'aucune responsabilité ne peut être recherchée contre elle, rappelant également qu'elle est intervenue après la réception de l'ouvrage, aux termes d'un contrat conclu directement avec la société Aucapi qui ne comprenait pas l'exécution de la prestation de la couche de gravelle noire. En outre, elle fait valoir que les conclusions expertales sont très critiquables sur ce point et qu'en tout état de cause, il s'agit d'un désordre apparent au moment de la réception.

Concernant le désordre n°4 portant sur les stations de relevage et leurs tampons, la société Entreprise Dumont critique le jugement entrepris qui se fonde uniquement sur le rapport d'expertise judiciaire qui a commis une erreur en lui imputant une faute d'alerte sur la non-conformité de la mise en oeuvre des stations de relevage. Elle rappelle qu'elle n'a pas participé à ces travaux qui ont été réalisés par la société Tadj, se contentant de réaliser les travaux de finition de la voirie et de mise en oeuvre d'un géotextile et qu'elle n'est pas sous-traitante, mais co-traitante de la société Aucapi. De plus, le défaut d'implantation étant nécessairement apparent lors de la réception, aucun défaut de devoir de conseil ne peut lui être reproché.

Enfin, l'intimée critique les demandes formulées au titre du préjudice de jouissance qu'elle estime inexistant et injustifié.

Par dernières conclusions notifiées le 16 février 2023, les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

. condamné la société Extraco création au titre de la reprise des désordres 1,2, 10 et 12 à verser à Mme [G] une somme de 1 443,20 euros et aux ex-poux [E] une somme de 1 360,70 euros, soit un total de 2 803,90 euros,

. condamné la société Extraco création à verser à Mme [G] et aux ex-époux [E] une somme de 18 182,59 euros afin de leur permettre la reprise de la voirie, désordre n°3,

. débouté des demandes de surplus,

. débouté les demandeurs de leur demande de condamnation solidaire des Mma,

. débouté la société Extraco création de sa demande en garantie contre Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles,

. condamné en garantie de la société Extraco création la société Cumont à hauteur de la moitié,

- débouter, ce faisant, la société Extraco création de ses demandes en appel tendant à voir condamner les Mma à la garantir des condamnations prononcées à son encontre du chef du désordre n°3 et 4,

- réformer le jugement en ce qu'il a :

. condamné Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles la société Extraco création et la société Cumont in solidum à verser à Mme [G] et aux ex-époux [E] une somme de 6 936,36 euros au titre du désordre n°4,

. condamné in solidum Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles, la société Extraco création et la société Cumont à verser une somme de 1 000 euros à Mme [G], une somme de 1 000 euros à Mme [F] et une somme de

1 000 euros à M. [E], soit une somme globale de 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

. condamné les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles, la société Extraco création et la société Cumont in solidum à verser aux demandeurs une somme de 3 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles,

. débouté Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles, ainsi que la société Extraco création et la société Cumont de leurs demandes à ce titre,

statuant à nouveau,

- dire que Mme [F] et M. [E] n'ont pas la qualité à agir et à percevoir au titre de la garantie décennale une indemnité de 6 936,36 euros en réparation du désordre n°4,

- en conséquence, les débouter,

- dire qu'elles ne pourront pas être tenues à indemnisation au titre de la privation de jouissance revendiquée par Mme [F], M. [E] et Mme [G],

- les débouter, en conséquence, de toute demande à ce titre,

subsidiairement et en tout état de cause, au visa des articles 1134 et 1147 anciens du code civil alors applicables,

- leur accorder recours et garantie solidairement contre les sociétés Extraco création et Entreprise Cumont pour les condamnations susceptibles d'être mises à leur charge au bénéfice des demandeurs pour les désordres n°3 et 4, et au titre de la privation de jouissance,

- condamner la partie perdante au paiement d'une indemnité de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Sur le désordre n°3, les intimées rappellent qu'elles interviennent en qualité d'assureur décennal de la société Aucapi, de sorte qu'elles ne peuvent répondre de ce désordre dont le caractère décennal n'a justement pas été retenu par le premier juge. En tout état de cause, elle soutiennent que c'est à tort que la société Extraco Création considère qu'elle ne peut être concernée par ce désordre affectant la voirie. À titre subsidiaire, les manquements contractuels des sociétés Extraco création et Entreprise Cumont étant établis, elles s'estiment bien fondées en leur recours en garantie.

Sur le désordre n°4, elles formulent les mêmes observations, à savoir qu'il ne s'agit pas d'une malfaçon de nature décennale, que leur assurée n'a commis aucune faute d'exécution et que leur garantie ne peut être recherchée en leur qualité d'assureur du sous-traitant la société Tadj, puisqu'elles n'ont pas été attraites à la procédure à ce titre.

Sur les condamnations prononcées au titre du désordre n°4 au bénéfice de Mme [F] et M. [E], les intimées soulèvent leur défaut de qualité à agir sur le fondement de la garantie décennale attachée à la propriété de l'ouvrage, puisqu'ils ne sont plus propriétaires de la maison d'habitation litigieuse depuis le 25 juillet 2017.

Enfin, elles rappellent que le préjudice de jouissance n'entre pas dans la définition du préjudice immatériel tel que prévu aux conditions générales, de sorte qu'elles ne doivent pas leur garantie à ce titre.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'action de M. [E] et Mme [F]

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité et/ou d'intérêt.

L'article 1792 du code civil déclare les constructeurs responsables de plein droit envers le seul acquéreur de l'ouvrage.

Néanmoins, le cédant ou vendeur de l'ouvrage ne perd pas le bénéfice des garanties légales des constructeurs, soit lorsqu'il démontre avoir un intérêt direct et certain à agir sur le fondement de la garantie décennale, soit lorsqu'il justifie de l'existence d'une clause dans l'acte de vente qui lui octroie la faculté d'agir en réparation contre les constructeurs à l'origine des désordres concernés.

En l'espèce, la présente instance porte sur les désordres suivants :

- désordre n°1 : escalier en bois de Mme [G],

- désordre n°2 : fissures cloisons de doublage faux plafond dans l'immeuble de Mme [G],

- désordre n°3 : revêtement de surface voirie des deux immeubles,

- désordre n°4 : tampons regard pompe de relevage des deux immeubles,

- désordre n°10 : garde-corps escalier bois de M. [E] et Mme [F]

- désordre n°12 : réseaux d'évacuation d'eaux usées en vide sanitaires des deux immeubles.

L'acte de vente du 25 juillet 2017 aux termes duquel M. [E] et Mme [F] ont cédé la propriété de leur immeuble contient, en page 18-19, une clause prévoyant que la procédure litigieuse ne sera pas transférée à l'acquéreur, étant précisé que l'ensemble des désordres sus-cités sont expressément visés.

En application du principe de la force obligatoire des contrats et sans qu'il n'y ait lieu de caractériser un intérêt personnel direct et certain des vendeurs à agir sur le fondement de la garantie décennale, cette clause fait échec à la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir soulevée par la société Entreprise Cumont, par les Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles et par la société Extraco Création.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la qualité et l'intérêt à agir de M. [E] et de Mme [F].

Sur la responsabilité des constructeurs

L'article 1646-1 du code civil dispose que le vendeur d'un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-3 du présent code. Ces garanties bénéficient aux propriétaires successifs de l'immeuble.

Aux termes de l'article 1792 du même code, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipements, le rendent impropre à sa destination.

Il convient de rappeler qu'à défaut de garantie décennale, il peut être fait application de la théorie des vices intermédiaires, qui permet, sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil, applicable en l'espèce, d'engager la responsabilité du constructeur pour faute prouvée dès lors que les désordres ne rendent pas l'immeuble impropre à sa destination et qu'ils ne relèvent pas des garanties de parfait achèvement et biennale, la responsabilité de droit commun étant subsidiaire aux garanties légales.

La mise en oeuvre de la responsabilité de plein droit due au titre de la garantie décennale suppose qu'il y ait eu réception de l'ouvrage.

Les défauts de conformité contractuels apparents sont, comme les vices de construction apparents, couverts par la réception sans réserve.

- Désordre n° 1 et 2 : l'escalier en bois et les fissures cloisons de doublage faux plafond dans l'immeuble de Mme [G]

Il ressort de l'expertise judiciaire que le désordre n°1 consiste en un jour existant entre le limon de l'escalier et le mur latéral ainsi qu'en un écartement de la lisse haute sur le pilier d'angle du garde-corps en retour de l'escalier. L'expert retient, sans être efficacement contredit sur ce point, que ce sont des désordres qui sont apparus lors de la première mise en chauffe de la maison, au cours de l'hiver 2015-2016 en raison de la dilatation de l'escalier en bois.

Il ne s'agit pas d'un désordre apparent à la réception comme tente de le soutenir la société Extraco création, puisqu'il est consécutif à la mise en chauffe de la maison qui n'a pu intervenir, au plus tôt, qu' à partir du mois de septembre 2015, soit postérieurement à la réception.

En outre, certes, ce n'est pas une malfaçon de nature décennale, de sorte que Mme [G] doit rapporter la preuve d'une faute commise par la société Extraco création. Toutefois, dans la mesure où cette dernière est tenue à une obligation de résultat d'exécuter un ouvrage ne présentant pas de défaut, la présence de ces écarts qui, de surcroît et ainsi que l'a retenu l'expert pour le désordre n°10 de nature similaire, étaient prévisibles et auraient dû être anticipés, est suffisante pour engager la responsabilité de l'entrepreneur, ce dernier ne rapportant pas la preuve d'une cause étrangère qui ne pourrait lui être imputée.

Le désordre n°2 consiste en des fissures sur les cloisons de doublage du faux plafond présentes dans les trois chambres de l'étage, la salle de bain et dans la cage d'escalier. L'expert indique que ce désordre généralisé est lié à la mise en peinture des ouvrages avant que le support ne soit totalement sec. En séchant, l'enduit s'est rétracté et a fait apparaître ces fissures et fait décoller les bandes supports.

Ainsi que le fait justement observer la société Extraco création, il ressort du contrat de construction de maison individuelle qu'elle a conclu avec la société Aucapi que les revêtements intérieurs, en ce compris la peinture, n'étaient pas inclus dans les prestations mises à sa charge. Il s'agissait d'un lot que le maître de l'ouvrage s'était réservé. Le désordre trouvant son origine dans une prestation qui n'a pas été exécutée par la société Extraco création, sa responsabilité ne saurait être recherchée.

Mme [G] a soumis à l'expert, qui l'a validé, un seul devis chiffrant de manière globale les travaux de reprises des désordres n°1 et 2, sans aucune ventilation ou distinction faite entre le coût de l'intervention minime nécessitée par la reprise du désordre n°1 consistant à resserrer le garde-corps et à réaliser un joint acrylique entre le limon et le mur latéral et le coût de la remise en peinture du plafond et des murs de l'étage liée à la reprise du désordre n°2. Ce devis ne peut donc être utilisé pour chiffrer le montant du préjudice subi au seul titre du désordre n°1.

La cour estime alors qu'il sera justement réparé par l'allocation d'une somme de

80 euros.

Par arrêt infirmatif, Mme [G] sera déboutée de sa demande au titre du désordre n°2 et la Sas Extraco création sera condamnée à lui payer la somme de 80 euros au titre du coût des travaux de reprise du désordre n°1.

- Désordre n°3 : revêtement de surface voirie des deux immeubles

L'expert décrit ce désordre, en page 28 de son rapport, en indiquant qu'il existe un défaut d'épaisseur de la gravelle noire, puisque sur certaines zones, ce revêtement manque ou est d'une épaisseur très faible, puisque le tout-venant présent en dessous est visible et remonte. Au demeurant, au cours des opérations d'expertise (page 73 du rapport), la société Aucapi a reconnu avoir manqué de gravelle pour parfaire l'ouvrage. Il retient également un défaut de compactage, constatant que le sol est très irrégulier et que de nombreux 'nids de poule' se sont créés.

L'expert précise que la société Tadj, sous-traitante de la société Extraco création, a réalisé les terrassements généraux et remblaiement autour des maisons conformément à son marché de travaux, en utilisant en partie de la terre végétale. Il indique que la société Entreprise Cumont, intervenue après la réception de l'ouvrage, ainsi que cela est établi par le procès-verbal de livraison régularisé entre Mme [G] et la société Aucapi, en semaine 31 (27 juillet-2 août 2015), a posé un géotextile et un tout-venant de 10 cm soit une couche de fondation de trop faible épaisseur sur un support probablement mal compacté et d'une nature ne permettant pas l'infiltration des eaux de pluie. Le revêtement de finition en gravelle noire réalisée par la société Aucapi est constaté de faible épaisseur et posé non uniformément. Il n'a pas été maintenu et a été absorbé par les granulats plus gros du tout-venant générant un aspect inesthétique et d'une surface irrégulière.

Ansi, l'expert conclut que de par la nature du fond de forme en terre végétale et la faible épaisseur du tout-venant, la voirie n'est pas correctement drainée et s'est déformée par la création de flashs et nids de poule. Enfin, il relève que la nature de cette voirie en gravelle, qui plus est mélangée avec les granulats du tout-venant n'est pas conforme à la réglementation PMR.

À titre liminaire, il convient de préciser qu'il importe peu que la non-conformité à la réglementation PMR n'ait pas été précisément spécifiée dans la mission expertale, puisqu'il ne s'agit pas d'un désordre distinct de celui affectant le défaut de compactage et d'épaisseur du tout-venant et de la gravelle, mais seulement d'une conséquence de ces deux désordres inclus dans la mission.

Sur la mise en jeu de la garantie décennale, il est constant que les travaux de terrassement à la charge de la société Extraco création, réalisés par son sous-traitant, la société Tadj, étaient parfaitement apparents lors de la réception du 17 juillet 2015, puisque la société Entreprise Cumont n'était pas encore intervenue, et qu'ils ont été acceptés sans réserves. En outre, leur nature n'est pas en cause dans le défaut d'accessibilité PMR relevé par l'expert, puisque le défaut de compactage qu'il retient est uniquement à l'origine du défaut de planéité du sol. Or, ce désordre n'est pas de nature décennale. La responsabilité décennale de la société Extraco création ne peut donc être retenue.

Il en est de même concernant la société Entreprise Cumont et la société Aucapi, puisqu'il est constant qu'aucune réception des travaux réalisés par ces deux sociétés postérieurement non seulement au procès-verbal de réception du 17 juillet 2015, mais au procès-verbal de livraison du même jour versé aux débats (pièce n°19), n'a été prononcée.

Seule une responsabilité pour faute prouvée est donc envisageable.

À ce titre, aucune faute d'exécution ne peut être retenue à la charge de la société Tadj et par suite à la charge de la Sas Extraco création, tenue de répondre des fautes de son sous-traitant, puisque l'expert évoque seulement 'un support probablement mal compacté' concernant les travaux réalisés par cette société Tadj.

De plus, c'est à tort que l'expert a mis à la charge de la Sas Extraco création une obligation de conseil, de suivi de l'exécution des travaux laissés à la charge du maître de l'ouvrage et de coordination des interventions de sous-traitant avec celle du maître de l'ouvrage ou ses cocontractants.

Le contrat de construction de maison individuelle conclu entre la Sas Extraco création et la société Aucapi ne contient aucune mission de maîtrise d'oeuvre imposant au constructeur notamment de s'assurer de la conformité des travaux que le maître de l'ouvrage s'est réservé ou de surveiller et de coordonner l'intervention des entrepreneurs concernant les lots dont il n'a pas la charge de l'exécution.

Aussi, c'est à juste titre que la société Extraco création critique le jugement déféré, sa responsabilité ne pouvant être engagée.

En revanche, c'est en vain que la société Entreprise Cumont tente de contester sa responsabilité. En effet, il ressort de la facture établie par cette dernière le 31 juillet 2017 qu'elle avait à sa charge la fourniture et pose d'un géotextile avec 10 cm de tout-venant sur 250 m². Or, il ressort des constatations faites pendant les opérations d'expertise (notamment page 72) que cette épaisseur de 10 cm de tout-venant fait défaut, les sondages réalisés mettant en lumière une épaisseur entre 5 et 7 cm de tout-venant.

Il s'agit d'un défaut d'exécution de la prestation dont elle doit répondre.

Le préjudice a été justement évalué par le premier juge à la somme de

18 182,59 euros, conformément à la proposition faite par l'expert.

En conséquence, par jugement infirmatif, la société Entreprise Cumont sera seule condamnée à payer à Mme [G], Mme [F], M. [E], unis d'intérêts, le chemin de voirie atteint de ce désordre étant soumis à un régime d'indivision, cette somme de 18 182,59 euros.

- Désordre n°4 : tampons regard pompe de relevage des deux immeubles

L'expert relève à cet égard que les tampons des regards contenant les pompes de relevage sont en matière PVC souple et situés dans une zone de voirie destinée à la circulation des véhicules. Il indique que ces regards ne sont pas appropriés en ce qu'ils ne sont pas destinés à être mis en oeuvre dans des zones de circulation de véhicule dont ils ne peuvent supporter le poids.

L'expert retient que ce 'désordre rend impropre à destination les tampons des stations de relevage'. Toutefois, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal judiciaire, cette mention ne permet pas de retenir la garantie décennale des sociétés Extraco création, Aucapi et Entreprise Cumont, puisque les tampons de la station de relevage ne sont pas un ouvrage. L'immeuble d'habitation est l'ouvrage et l'inadaptation de ces tampons en PVC qui ne sont pas correctement protégés n'affecte aucunement l'habitabilité des maisons de Mme [G], Mme [F] et M. [E].

Sur la mise en oeuvre de la garantie des désordres intermédiaires à l'égard de la société Extraco création, d'une part, il convient de préciser que le caractère apparent de ce désordre n'est pas avéré, puisque le seul fait que ces tampons en plastique soient visibles le jour de la réception ne permet pas d'affirmer que leur caractère inadapté à la circulation des véhicules sans protection était connu du maître de l'ouvrage. Il importe donc peu que ce désordre n'ait pas été réservé à la réception.

D'autre part, c'est de façon pertinente que l'expert retient que la Sas Extraco création, en exécution du contrat de construction de maison individuelle conclu avec la société Aucapi était tenue d'une obligation d'information sur les éléments techniques des stations de relevage installés et par suite sur les caractéristiques des tampons litigieux et les contraintes inhérentes à ces derniers, notamment en termes de protection en cas de circulation de véhicules.

Certes, la Sas Extraco création qui n'avait pas la charge des aménagements extérieurs dont la société Aucapi s'était réservée l'exécution, ne pouvait pas savoir que ces tampons se situeraient sur la voirie destinée au passage de véhicules et non sur une partie végétalisée comme le laissait penser le plan annexé au permis de construire.

Toutefois, cet élément est indifférent pour caractériser le manquement à son obligation d'information. Au contraire, ayant connaissance de ce que le maître de l'ouvrage s'était réservé l'ensemble de l'aménagement extérieur de la construction, elle se devait de lui communiquer toutes les informations techniques nécessaires et utiles pour garantir la préservation de l'efficacité des tampons des stations de relevage qu'elle avait installés.

La responsabilité de la Sas Extraco création est donc engagée.

En revanche, c'est à tort que l'expert a cru mettre à la charge de la société Entreprise Cumont, intervenue uniquement pour la fourniture et la pose d'un géotextile avec

10 cm de tout-venant sur 250 m², une obligation d'information sur le caractère inadapté de ces tampons eu égard à leur situation.

Aucune faute imputable à cette société n'est démontrée.

Le montant des travaux de reprise n'étant pas contesté, par arrêt partiellement infirmatif, il convient de condamner la Sas Extraco création seule à payer à ce titre à Mme [G], Mme [F], M. [E], unis d'intérêts la somme de

6 936,36 euros.

- Désordre n°10 : garde-corps escalier bois de M. [E] et Mme [F]

Il ressort de l'expertise judiciaire que le désordre n°10 est caractérisé par une déformation de la cloison de la chambre située à l'arrière du garde-corps de l'escalier, laissant apparaître les fixations dudit escalier. L'expert explique que ce désordre est apparu lors de la première mise en chauffe de la maison, au cours de l'hiver 2015-2016 en raison de la dilatation de l'escalier en bois.

Il ne s'agit pas d'un désordre apparent à la réception comme tente de le soutenir la Sas Extraco création, puisqu'il est consécutif à la mise en chauffe de la maison, qui est intervenue, au plus tôt, à partir du mois de septembre 2015.

En outre, certes, ce n'est pas une malfaçon de nature décennale, de sorte que

M. [E] et Mme [F] doivent rapporter la preuve d'une faute commise par la Sas Extraco création.

Toutefois, dans la mesure où la Sas Extraco création est tenue à une obligation de résultat d'exécuter un ouvrage ne présentant pas de défaut, cette dilatation du bois était prévisible et aurait dû être anticiper, est suffisante pour engager la responsabilité de l'entrepreneur, ce dernier ne rapportant pas la preuve d'une cause étrangère qui ne pourrait lui être imputée.

En l'absence de contestation sur le montant du coût des travaux de reprise, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Sas Extraco création à payer à ce titre la somme de 107,80 euros.

- Désordre n°12 : réseaux d'évacuation d'eaux usées en vide sanitaire des deux immeubles

A ce titre, les conclusions expertales sont les suivantes : ' les désordres affectant les réseaux d'évacuation d'eaux usées en vide sanitaire ont été débattus et l'ensemble des parties conviennent qu'il ne m'est pas nécessaire de les constater, les travaux de remise en état ayant été effectués et les désordres reconnus sous la responsabilité de la société Extraco.

De caractère apparent (en vide sanitaire), ces malfaçons sont résolues. Elles ne compromettent plus la solidité de l'ouvrage et ne rendent plus impropres la destination des ouvrages.'

C'est à tort que la Sas Extraco création soutient que la réalité des désordres n'est pas avérée, puisque Mme [G], Mme [F] et M. [E] versent aux débats les deux constats d'huissier qui ont été soumis à la contradiction dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire, à savoir les constats des 13 mars et 4 avril 2017, desquels il ressort de manière incontestable l'existence d'un défaut de raccordement des eaux usées des sanitaires des immeubles au réseau d'évacuation, ces eaux usées se déversant directement dans le vide sanitaire des maisons. Or, la Sas Extraco création ne conteste pas avoir réalisé ces travaux.

En outre, il convient de faire observer que si dans le cadre de la présente instance, elle soutient avoir toujours dénié sa responsabilité, ce n'est pas ce qui ressort du rapport d'expertise judiciaire. En effet, alors que les conclusions du pré-rapport de l'expert étaient rédigées sur ce point en des termes identiques et que le conseil de la Sas Extraco création a adressé à l'expert un dire pour critiquer plusieurs points de ce pré-rapport, ce dire ne fait aucune observation sur le désordre n°12.

Enfin, la nature décennale de ce désordre qui affecte incontestablement la destination de l'ouvrage n'est pas contestée.

Dès lors, la responsabilité décennale de la Sas Extraco création est engagée à ce titre.

En l'absence de contestation sur le coût des travaux de reprise, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à ce titre la somme de 308 euros à Mme [G] et la somme totale de 1 252,90 euros à M. [E] et Mme [F].

- Sur le préjudice de jouissance

Mme [G], Mme [F] et M. [D] invoquent à ce titre le caractère dégradé de la voirie leur occasionnant un préjudice de jouissance quotidien dans l'utilisation de cette voie d'accès, outre les dysfonctionnements du réseau d'évacuation.

Ils ne produisent aucun justificatif à cet égard. En outre, il ne ressort aucunement du rapport d'expertise judiciaire qu'ils aient subi un quelconque empêchement dans la jouissance de leur chemin d'accès, sa qualité dégradée ne les privant aucunement de son utilisation. De même, il n'est aucunement caractérisé l'existence d'un préjudice de jouissance résultant du défaut de raccordement des eaux usées.

En conséquence, par arrêt infirmatif, ils seront déboutés de leur demande à ce titre.

Sur la garantie des Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles

Les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles sont attraites à la présente procédure en qualité d'assureur décennal de la société Aucapi.

Or, il résulte des motifs retenus précédemment que la responsabilité décennale de leur assurée n'est pas mise en oeuvre.

En conséquence, par arrêt infirmatif, il convient de rejeter toute demande de condamnation en paiement et garantie présentée contre les Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dispositions de première instance relatives aux dépens et aux frais irrépétibles seront infirmées.

La Sas Extraco création et la société Entreprise Cumont succombant toutes les deux, il convient de faire masse des dépens et de les condamner chacune pour moitié à les supporter, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

En outre, l'équité et la nature du litige commandent de les condamner in solidum à payer à Mme [G], Mme [F] et M. [E], unis d'intérêts, la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel.

En revanche, l'équité et la nature du litige commandent de ne pas faire droit à la demande présentée par les Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la qualité à agir de M. [O] [E] et Mme [Z] [F],

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne la Sas Extraco création à payer à Mme [W] [G] les sommes suivantes :

- 80 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°1,

- 308 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°12,

Condamne la Sas Extraco création à payer à M. [O] [E] et Mme [Z] [F], unis d'intérêts, les sommes suivantes :

- 107, 80 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°10,

- 1 252,90 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°12,

Condamne la Sas Extraco création à payer à Mme [W] [G], M. [O] [E] et Mme [Z] [F], unis d'intérêts, la somme de 6 936,36 euros au titre des travaux de reprise du désordre n°4,

Condamne la Sarl Entreprise Cumont à payer à Mme [W] [G], M. [O] [E] et Mme [Z] [F], unis d'intérêts, la somme de 18 182,59 euros euros au titre des travaux de reprise du désordre n°3,

Déboute Mme [W] [G], M. [O] [E] et Mme [Z] [F] du surplus de leurs prétentions, en ce compris leurs demandes au titre du préjudice de jouissance,

Déboute les parties de toutes leurs demandes présentées contre les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles,

Condamne in solidum la Sas Extraco création et la Sarl Entreprise Cumont à payer à Mme [W] [G], M. [O] [E] et Mme [Z] [F], unis d'intérêts, la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les sociétés Mma Iard et Mma Iard Assurances Mutuelles de leur demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Fait masse des dépens et dit qu'ils seront supportés par moitié par la Sas Extraco création et Sarl Entreprise Cumont, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 22/03617
Date de la décision : 17/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-17;22.03617 ?
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