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17/04/2024 | FRANCE | N°22/02472

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 17 avril 2024, 22/02472


N° RG 22/02472 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JEKT





COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 17 AVRIL 2024







DÉCISION DÉFÉRÉE :



20/01922

Tribunal judiciaire d'Evreux du 28 juin 2022





APPELANTS :



Monsieur [F] [W]

né le 25 mars 1984 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 6]



représenté par Me Gwénaëlle LEGIGAN de la SELARL LEGLOAHEC LEGIGAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me FALGA de la Selarl FA

LGA-VENNETIER, avocat au barreau de Nantes substitué par Me CHAILLOU





Madame [H] [X] épouse [W]

née le 1er avril 1979 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 6]



représentée par Me Gwénaëlle LEGIGAN d...

N° RG 22/02472 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JEKT

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 17 AVRIL 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

20/01922

Tribunal judiciaire d'Evreux du 28 juin 2022

APPELANTS :

Monsieur [F] [W]

né le 25 mars 1984 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Gwénaëlle LEGIGAN de la SELARL LEGLOAHEC LEGIGAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me FALGA de la Selarl FALGA-VENNETIER, avocat au barreau de Nantes substitué par Me CHAILLOU

Madame [H] [X] épouse [W]

née le 1er avril 1979 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Gwénaëlle LEGIGAN de la SELARL LEGLOAHEC LEGIGAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me FALGA de la Selarl FALGA-VENNETIER, avocat au barreau de Nantes substitué par Me CHAILLOU

INTIMEES :

SAS DPLE

RCS de Lyon 402 308 985

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée et assistée par Me Dominique GAUTIER de la SCP VANDENBULCKE DUGARD GAUTIER, avocat au barreau de Rouen

SA COMPAGNIE EUROPEENE DE GARANTIES ET CAUTIONS

RCS de Paris 382 506 079

[Adresse 8]

[Localité 4]

représentée par Me Emilie HILLIARD de la SELARL EHMA AVOCATS, avocat au barreau de l'Eure et assistée de Me Erwan LAZENNEC de la l'Aarpi CLL Avocats, avocat au barreau de Paris plaidant par Me BOUVIGNIES

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 5 février 2024 sans opposition des avocats devant Mme BERGERE, conseillère, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre

Mme Magali DEGUETTE, conseillère

Mme Anne-Laure BERGERE, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme [Z] [G]

DEBATS :

A l'audience publique du 5 février 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 avril 2024

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 17 avril 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Suivant contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans en date du 4 novembre 2016, M. [F] [W] et Mme [H] [X], son épouse, ont confié à la société Dple, la construction de leur maison d'habitation sise [Adresse 1] à [Localité 6], moyennant un prix global de 171 800 euros dont 160'800 euros à la charge du constructeur et 11 000 euros à la charge des acquéreurs au titre des travaux dont ils se réservaient l'exécution.

La Compagnie Européenne de Garantie et de Caution (ci-après Cegc) s'est portée garante de la livraison à prix et délai convenus de cette opération de construction.

Par avenant du 4 novembre 2016, la durée d'exécution des travaux a été portée de 9 à 12 mois. Plusieurs avenants ont, par la suite, été signés.

La déclaration d'ouverture du chantier est intervenue le 9 novembre 2017 et M. et Mme [W] ont pris possession de leur maison d'habitation le 24 juillet 2019 avec réserves.

Se plaignant de ne pas avoir été réglée de l'intégralité du prix, la société Dple a assigné M. et Mme [W] devant le juge des référés du tribunal judiciaire d'Evreux.

Suivant ordonnance du 17 juin 2020, le juge des référés a ordonné la consignation de la somme de 8 264 euros, correspondant au solde du contrat, à la Caisse des Dépôts et Consignations par M. et Mme [W], et débouté la société Dple de l'ensemble de ses demandes de provision en raison de l'existence de contestations sérieuses.

Par exploit d'huissier en date du 20 juillet 2020, la société Dple a assigné M. et Mme [W] devant le tribunal judiciaire d'Evreux afin d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement du solde du prix du contrat de construction de maison individuelle.

Par exploit d'huissier en date du 4 mars 2021, M. et Mme [W] ont appelé à la cause la Cegc.

La jonction des procédures a été ordonnée par le juge de la mise en état le 19 avril 2021.

Par jugement du 28 juin 2022, le tribunal judiciaire d'Evreux, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- condamné solidairement M. et Mme [W] à payer à la Sas Dple :

. la somme de 19 226,41 euros avec intérêts au taux contractuels de 1 % par mois à compter de la mise en demeure du 29 juillet 2019,

. la somme de 4 485,02 euros au titre des intérêts de retard de paiement,

. la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement M. et Mme [W] à payer à la Cegc la somme de

5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. et Mme [W] de toutes leurs demandes et les autres parties du surplus de leurs demandes,

- condamné solidairement M. et Mme [W], aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 22 juillet 2022, M. et Mme [W] ont interjeté appel de cette décision.

Suivant ordonnance du 10 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a notamment:

- déclaré irrecevables les conclusions notifiées par M. et Mme [W], le 22 août 2023,

- écarté les pièces n°56 à 61 portées dans le bordereau notifié le 22 août 2023 par

M. et Mme [W],

- condamné solidairement M. et Mme [W], aux dépens de l'incident.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 22 août 2023, M. [F] [W] et Mme [H] [X], son épouse, demandent à la cour, de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- débouter la société Dple de toutes ses demandes,

- condamner la société Dple à réaliser les travaux nécessaires à la reprise des réserves suivantes :

. Réserve n°2 : Couvertines non conformes

. Réserve n°4 : Système de chauffage : absence de raccordement de la PAC (intérieur et extérieur)

. Réserve n°8 : Toiture : absence de la dalle sur plot

. Réserve n°34 : Présence d'une microfissure RDC fenêtre salle de bain et porte-fenêtre ouest

. Réserve n°35 : Fer à béton visible sur le porche

. Réserve n°36 : Porche dépourvu de finition

. Réserve n°47 : Poignée de la baie vitrée (côté poêle) cassée

. Réserve n°61 : Installation d'un garde-corps provisoire sans délai dans l'attente d'un définitif sur la partie accessible

. Réserve n°62 : Manque garde-corps définitif au pourtour du balcon

. Réserve n°67 : Fenêtre donnant sur escalier non conforme, manque soit un volet soit un verre anti-effraction

. Réserve n°69 : Ensemble du lot menuiserie est en réserve en attendant un nettoyage complet, en effet leur état de propreté ne permet pas de statuer sur l'absence de défaut et leur ouverture est gênée par les détritus s'y trouvant

. Réserve n°78 : Le dispositif de chauffage n'étant toujours pas fonctionnel, je mets en réserve l'ensemble du circuit de chauffage et des deux planchers chauffants

. Réserve n°88 : Sanitaire : absence

- condamner la société Cegc à garantir la levée des réserves,

- condamner la société Dple et la société Cegc, in solidum, à leur verser les sommes de :

. 28 726,04 euros, à parfaire, au titre des irrégularités du prix,

. 8 869,49 euros au titre des pénalités de retard,

.17 829,91 euros à titre d'indemnisation de leur préjudice matériel,

. 5 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral,

- débouter la société Cegc de l'ensemble de ses demandes à leur encontre,

- condamner la société Dple et la société Cegc, in solidum, à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Les appelants critiquent le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer l'appel de fonds des 95 % du prix du marché, alors qu'en application de l'article

R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation, les fonds n'étaient pas exigibles puisqu'au vu des réserves dressées à la livraison, l'immeuble n'était pas habitable. Ils visent plus spécifiquement à cet égard le fait que l'ensemble des branchements et raccordements des équipements d'eau n'était pas réalisé. Ils estiment également que le premier juge a renversé la charge de la preuve, rappelant à ce titre que c'est au constructeur d'établir la levée des réserves de livraison, conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil.

En tout état de cause, ils soutiennent qu'ils étaient bien fondés à chaque appel de fonds à opposer au constructeur des pénalités de retard et qu'en conséquence, la clause contractuelle prévoyant la prorogation du délai d'achèvement en cas de retard de paiement dans les appels de fonds, qui de surcroît, ne peut jouer de manière automatique, n'avait pas à recevoir application en l'espèce. S'agissant des appels de fonds n°2 et n°3, M. et Mme [W] entendent se prévaloir du rapport Dhexo pour établir le bien fondé de leur retenue.

Par ailleurs, quand bien même, ils n'auraient pas été fondés en leur retenue de paiement lors des appels de fonds, M. et Mme [W] affirment que c'est à tort que le tribunal a considéré que le délai de livraison était prorogé d'autant, puisque la société Dple n'a pas respecté la procédure prévue par les dispositions contractuelles et n'a pas interrompu le chantier.

Sur le délai d'achèvement, ils invoquent également le fait que l'avenant du 4 novembre 2016 augmentant le délai de livraison de 3 mois supplémentaires ne leur a jamais été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception, de sorte que leur délai de rétractation n'a jamais commencé à courir et que leur rétractation du 25 juillet 2019 est donc parfaitement recevable. Le délai contractuel de livraison était donc de 9 mois, soit pour une déclaration d'ouverture de chantier au 9 novembre 2017, une date butoir fixée au 9 août 2018.

L'immeuble ayant été livré le 24 juillet 2019, ils s'estiment bien fondés à solliciter 349 jours de pénalités de retard, soit une somme de 19 226,41 euros, de sorte qu'ils ne doivent pas cette somme à la société Dple.

Sur les intérêts de retard retenus par le premier juge, M. et Mme [W] font valoir, d'une part, que les dispositions contractuelles n'ont pas été correctement appliquées et qu'en outre, ils ont déjà démontré que les appels de fonds sur lesquels ces intérêts ont été calculés n'étaient pas exigibles, de sorte qu'il convient de réformer cette disposition de la décision critiquée.

Sur leurs demandes reconventionnelles, les appelants reprochent au premier juge d'avoir considéré que la réception entraînait la livraison du bien, que le retard de livraison et les réserves étaient imputables aux maîtres de l'ouvrage. Ils soutiennent qu'en l'absence de raccordement de la pompe à chaleur qui était à la charge du constructeur, la maison n'était pas habitable lors de la livraison, de sorte qu'ils s'estiment bien fondés en leur demande en paiement de pénalité de retard jusqu'au 1er janvier 2020.

En outre, ils affirment que les dispositions d'ordre public applicables aux suppléments de prix n'ont pas été respectées, puisque les travaux laissés à la charge des acquéreurs ont été chiffrés de manière globale et non poste par poste. De plus, ils reprochent à la société Dple de ne pas avoir supporté le coût des travaux d'enlèvement des terre, ni le coût des fluides et notamment de l'eau pendant la phase de construction.

Par ailleurs, ils font valoir qu'ils ne s'étaient pas réservés les travaux de revêtement muraux et de sol, de sorte que le constructeur aurait dû en assumer le coût. Ils s'estiment donc bien fondés à en solliciter la prise en charge pour un coût qu'ils ont fait chiffrer à 13 830 euros Ttc.

Ils estiment que l'avenant relatif à la sous-toiture est irrégulier puisque le constructeur aurait dû prévoir ces travaux indispensables à l'habitabilité de la maison dans le contrat initial. De même, le chiffrage global du coût des raccordements aux réseaux est irrégulier. Enfin, ils relèvent que le coût des travaux d'aménagement extérieurs n'a pas été précisé dans le contrat. Ces éléments justifient le remboursement des frais qu'ils ont engagés pour ces postes de dépenses.

Ils affirment que l'avenant n°5 est irrégulier, puisqu'il s'agit des postes de dépense indispensables à l'habitabilité de l'immeuble qui auraient donc dûs être intégrés dans le cadre initial. Quant à l'avenant n°6, ils affirment qu'il ne leur a jamais été notifié, de sorte qu'ils ont valablement exercé le droit de rétractation le 25 juillet 2019 et qu'ils ne sont donc pas tenus par cette modification contractuelle.

Sur la levée des réserves, M. et Mme [W] font observer que si le premier juge leur a reproché de ne pas justifier de la dénonciation régulière des réserves invoquées, ils produisent désormais les accusés de réception démontrant ce fait. Ils critiquent également la motivation du jugement qui a retenu que le procès-verbal de livraison n'était pas opposable à la société Dple, qui ne l'avait pas signé, alors qu'elle était présente et que ce document est parfaitement contradictoire. Aussi et rappelant que la charge de la preuve de la levée des réserves incombe au constructeur, ils estiment leurs demandes à ce titre bien fondées.

Enfin, les appelants font valoir que tous les manquements qu'ils reprochent à la société Dple sont suffisants pour caractériser une faute justifiant leur demande de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral, de leur préjudice financier causés par le coût du recours à un expert amiable, à un huissier, un serrurier et de leur préjudice de jouissance.

Sur la mise en oeuvre de la garantie de livraison, ils soutiennent que celle-ci doit être actionnée dès qu'il est constaté que le constructeur refuse de s'acquitter de ses obligations contractuelles. Or, ils estiment que c'est le cas en l'espèce, même si la société Dple est in bonis car elle refuse de régler les pénalités dues au titre du retard dans la livraison et de lever les réserves consignées à la réception. Ils affirment que la Cegc doit aussi garantir la levée des réserves ainsi que le surcoût des travaux dus aux irrégularités du contrat. Par ailleurs, ils indiquent que le garant est débiteur d'une obligation de surveillance de l'exécution du contrat et qu'à ce titre, la Cegc a commis une faute qui justifie qu'elle soit condamnée à leur payer des dommages et intérêts réparant leur préjudice moral, financier et de jouissance, sans qu'aucune franchise ne leur soit applicable.

Par dernières conclusions notifiées le 30 août 2023, la Sas Dple demande à la cour, au visa des articles 15 et 16 du code de procédure civile et 1231 du code civil, de :

- écarter les conclusions n°3 notifiées par M. et Mme [W] le 21 août 2023,

- écarter les pièces numérotées 56 à 61 notifiées par M. et Mme [W] le 21 août 2023,

- débouter M. et Mme [W] de toutes leurs demandes,

- confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

- condamner solidairement M. et Mme [W] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Sur sa demande en paiement du solde du marché, l'intimée fait valoir que dès la présentation de la première situation de paiement, M. et Mme [W] sont apparus comme étant de mauvais payeurs. Elle soutient qu'aujourd'hui, ils tentent de justifier les retards de paiement en indiquant que les travaux réalisés ne correspondaient pas aux appels de fonds présentés et qu'en sus, ils étaient atteints de malfaçons graves. Or, la société Dple fait observer que les éléments de faits et de preuve produits par les appelants à cet égard sont totalement inopérants, le rapport d'expertise amiable n'ayant aucune valeur probante et ce d'autant qu'il est contredit par le rapport de

M. [D], qu'elle a fait intervenir en dehors de tout contentieux mais dont elle rappelle la qualité d'expert judiciaire.

Sur sa demande au titre des pénalités de retard de paiement, elle fait observer que ces retards de paiement ne sont pas contestés par M. et Mme [W], que leurs arguments pour les justifier ont justement été écartés par le premier juge, en ce compris la régularité de la notification de l'avenant du 4 novembre 2016, et le fait qu'en tout état de cause, les retards de paiement cumulés des acquéreurs dépassent largement la durée de trois mois supplémentaires prévue par cette stipulation contractuelle.

Sur les demandes reconventionnelles M. et Mme [W], la société Dple conteste le calcul des pénalités de retard effectué par ces derniers, rappelant que l'immeuble a été livré le 24 juillet 2019, soit dans les temps contractuels, que la sanction de l'irrégularité éventuelle de l'avenant de prorogation du délai d'achèvement du 4 novembre 2016 n'est ni la nullité, ni l'inopposabilité, qu'en outre, il convient de prendre en compte la prorogation de délais occasionnée par les retards dans le paiement des situations de travaux et qu'enfin, elle n'a pas à assumer le choix personnel des acquéreurs d'emménager dans leur maison d'habitation le 1er janvier 2020, soit six mois après la livraison.

Sur les irrégularités de prix, elle ne conteste pas la législation d'ordre public qui lui impose, sous peine de gratuité au profit du client, de prévoir dans le contrat de construction tous les travaux nécessaires à l'utilisation et à l'implantation de l'immeuble mais affirment que les époux [W] détournent cette règle puisqu'ils sollicitent la gratuité d'éléments qui ne sont aucunement nécessairement à l'habitabilité de l'immeuble ou indispensable à sa construction. Elle rélève également un défaut de chiffrage et de preuve concernant plusieurs postes de préjudices réclamés à ce titre.

Enfin, sur la levée des réserves, l'intimée conteste leur bien fondé, en ce qu'elles correspondent à des éléments d'équipement laissés à la charge des acquéreurs ou en des désordres minimes entrant dans les tolérances des DTU, de sorte qu'elle estime qu'elle n'a pas à rapporter la preuve de leur levée.

Par dernières conclusions notifiées le 10 août 2023, la Cegc demande à la cour, au visa des articles L. 231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, des articles 2305 et 2309 du code civil, de l'article L. 443-1 du code des assurances, de :

à titre principal,

- déclarer M. et Mme [W] mal fondés en leur appel,

- confirmer, en conséquence, le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- débouter M. et Mme [W] de toutes leurs demandes dirigées contre la Cegc,

y ajoutant,

- condamner M. et Mme [W] à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'appel,

à titre subsidiaire,

- constater qu'il y a lieu de faire application de la franchise de 5 % du prix convenu, s'élevant à la somme de 8 040 euros Ttc,

- constater que M. et Mme [W] retiennent a minima la somme de 27 490,41 euros au détriment du constructeur,

- déduire en conséquence de toute éventuelle condamnation de la Cegc la somme globale de 35 530,41 euros,

- condamner la société Dple à la garantir des condamnations éventuellement prononcées à son encontre, conformément à la convention de cautionnement n°1394 du 21 novembre 1994,

- condamner la société Dple à la rembourser de toutes éventuelles condamnations en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens susceptibles d'être prononcées par l'arrêt à intervenir dans un délai de 8 jours à compter de la notification des justificatifs du paiement intervenu,

- assortir cette condamnation du taux d'intérêt légal majoré de six points à son profit, conformément à la convention de cautionnement précitée,

- débouter la société Dple de toutes ses demandes plus amples ou contraires.

L'intimée rappelle qu'en application de l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, elle ne doit sa garantie qu'en cas de défaillance du constructeur. Or, en l'espèce, elle fait observer que la société Dple est parfaitement en mesure de faire face à ses obligations, comme elle l'a fait tout au long du chantier, que les réclamations de M. et Mme [W] sont totalement infondées, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a considéré qu'il n'y avait aucune défaillance du constructeur.

En tout état de cause, sur les réserves, la Cegc estime que la demande ne peut prospérer puisque la preuve de l'existence desdites réserves n'est pas rapportée, soulignant à cet égard qu'un rapport d'expertise technique amiable n'a aucune valeur probante, pas plus, a fortiori, qu'un constat d'huissier. En outre, elle soutient que la réception n'a pas été prononcée contradictoirement.

Sur les demandes formulées au titre du coût de certains travaux, l'intimée dénie sa garantie au motif que celle-ci ne s'applique qu'aux seules réserves dénoncées lors de la réception ou dans les huit jours suivants. Elle rappelle également qu'il n'existe aucune obligation légale de vérification du contrat de construction à sa charge, à l'exception du contrôle de la faisabilité technique du projet, qui ne pose aucune difficulté en l'espèce. Enfin, conformément au droit commun du cautionnement, sa garantie est exclue pour l'ensemble des travaux hors contrat initial, tels que des améliorations ou travaux supplémentaires.

Sur les pénalités de retard, la Cegc critique la présentation de M. et Mme [W] qui tentent de soutenir que la réception intervenue le 24 juillet 2019 n'aurait pas emporté la livraison du bien, cette dernière ne correspondant pas aux éléments du dossier. Elle estime que cette livraison au 24 juillet 2019 est, en outre, intervenue dans le délai d'achèvement contractuel, de sorte qu'aucune pénalité de retard ne peut être due.

Enfin sur les demandes de dommages et intérêts, elle fait observer que cumuler un préjudice de jouissance avec des pénalités de retard conduit à une double indemnisation du même préjudice et qu'en outre, la preuve du préjudice n'est pas rapportée. Il en est de même pour le préjudice financier et le préjudice moral. En tout état de cause elle estime que la faute qu'elle aurait commise n'est pas démontrée par les appelants.

À titre subsidiaire, si tout ou partie des réclamations de M. et Mme [W] devait être accueillie, la Cegc demande que les sommes auxquelles elle serait condamnée se compensent avec la franchise de 5 % et les sommes retenues par les maîtres de l'ouvrage au détriment du constructeur. En outre, elle sollicite la garantie de la société Dple conformément à l'application des article 2305 du code civil et L. 443-1 du code des assurances.

Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, la cour s'en réfère expressément à leurs dernières conclusions récapitulatives, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2023.

MOTIFS

À titre liminaire, il convient de rappeler que l'incident de recevabilité des conclusions notifiées le 21 août 2023 et de communication de pièces a été purgé par l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 octobre 2023, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces demandes présentées également par la société Dple dans ses conclusions au fond.

Sur les demandes en paiement de la Sas Dple

La Sas Dple demande de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. et Mme [W], sur le fondement des articles 1231-1 et suivants du code civil, à lui payer le solde du prix du contrat de construction de maison individuelle à hauteur de 19'226,41 euros avec intérêts au taux contractuel de 12 % l'an à compter de la mise en demeure en date du 29 juillet 2019, outre la somme de 4 485,02 euros au titre des intérêts de retard de paiement.

Selon l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

En l'espèce, il résulte des conditions particulières du contrat conclu entre les parties que le prix forfaitaire convenu de la construction s'élevait à la somme de

171 800 euros dont 160 800 euros à la charge de la société Dple et 11 000 euros à la charge de M. et Mme [W]. Le prix devait être payé en application de l'article 3-3 a) des conditions générales. Le délai d'achèvement était fixé à 9 mois à compter de l'ouverture du chantier.

L'article 3-3 des conditions générales du contrat relatif aux modalités de règlement stipule que 'le prix convenu, conformément aux articles R. 231-7 et R. 231-8 du code de la construction et de l'habitation, sera payé suivant l'une des deux grilles d'appels de fonds reproduites ci-après. Les parties conviennent du choix de l'option aux conditions particulières.

a) le constructeur justifie de la garantie de remboursement prévue par l'article R. 2331-8 du code de la construction et de l'habitation.

Cette garantie fait l'objet d'une attestation annexée au présent contrat.

Conformément à l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation, le pourcentage maximum cumulé exigible aux différents stades de la construction d'après l'état d'avancement des travaux est fixé, par application du troisième alinéa de l'article L. 242-2 de la manière suivante:

- 5 % à la signature du contrat,

- 10 % à l'obtention du permis de construire,

- 15 % à l'ouverture du chantier,

- 25 % à l'achèvement des fondations,

- 40 % à l'achèvement des murs,

- 60 % à la mise hors d'eau,

- 75 % à l'achèvement des cloisons,

- 95 % à l'achèvement des travaux d'équipement, de plomberie, de menuiserie, de chauffage.

Le solde est payable conformément aux dispositions de l'article 2-7.' [...]

L'article 3-5 des conditions générales précise que 'les sommes non payées dans le délai de quinze jours à date de la présentation de l'appel de fonds produiront intérêt au profit du constructeur au taux de 1 % par mois sur les sommes non réglées. Si après mise en demeure, ces sommes (intérêts de retards compris) ne sont pas réglées dans le délai de huit jours, le constructeur est en droit d'interrompre les travaux et, conformément à l'article 1184 du code civil, pourra demander, un mois après cette mise en demeure, la résolution, du contrat avec dommages et intérêts.'

Enfin, aux termes de l'article 2-6 des conditions générales relatifs aux délais, 'les travaux commenceront dans le délai fixé aux conditions particulières à compter de la réalisation des conditions suspensives et formalités définies à l'article précédent.

La durée de construction à compter du commencement des travaux sera celle fixée aux conditions particulières.

Le délai de construction et la date de fin du délai contractuel de construction seront prorogés :

- de la durée des interruptions de chantier imputables au maître de l'ouvrage, notamment celles provoquées par des retards de paiement,

- en cas de modifications demandées par le maître de l'ouvrage, notamment par voie d'avenants ou imposées par l'administration,

- de la durée des travaux dont le maître de l'ouvrage s'est réservé l'exécution ainsi que des retards apportés dans leur exécution,

- de la durée des interruptions pour cas de force majeure ou cas fortuits,

- de la durée des intempéries définies à l'article L. 5424-8 du code du travail pendant lesquelles le travail est arrêté, signalées par lettre recommandée avec accusé de réception au maître de l'ouvrage ou par lettre remise en main propre contre décharge.

En cas de retard dans la livraison, le constructeur devra au maître de l'ouvrage une indemnité égale à 1/3000ème du prix convenu fixé au contrat par jour de retard.'

Il est constant, d'une part, qu'aucune somme n'a été réclamée à M. et Mme [W] à la signature du contrat, ni à l'obtention du permis de construire et d'autre part, que le chantier a été ouvert le 9 novembre 2017.

À partir de cette date, il est établi, par les lettres et décomptes dressés par la société Dple et non contestés par les appelants, que celle-ci a adressé à M. et Mme [W] les appels de fonds suivants :

- situation de travaux n°1 du 13 novembre 2017 réclamant 25 % du prix du marché correspondant aux stades contractuels signature du contrat, obtention du permis de construire et ouverture du chantier, soit 40 200 euros Ttc.

Cette somme a été réglée le 13 décembre 2017 après relance par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 décembre 2017.

Les époux [W] soutiennent que cet appel de fonds ne leur a été notifié que le 8 décembre 2017, de sorte qu'ils ont respecté le délai contractuel de quinze jours.

Toutefois, il convient de relever que cette affirmation procède d'une confusion entre la date de l'appel de fonds et la date à laquelle ils ont accusé réception de la mise en demeure adressée par le constructeur, après constat que le délai de quinze jours n'avait pas été respecté. Aussi, le retard dans le paiement n'est pas valablement contesté.

- situation de travaux n°2 du 11 juin 2018 réclamant 15 % du prix du marché pour 'achèvement de la maçonnerie avant charpente', soit 25 039 euros.

Malgré plusieurs relances par lettre recommandée avec accusé de réception et lettre simple, cette somme n'a été réglée que le 20 février 2019.

Pour expliquer ce retard de paiement, M. et Mme [W] invoquent le fait que les travaux effectivement réalisés n'étaient pas à l'état d'avancement revendiqué et qu'en outre, ils étaient atteints de graves malfaçons, de sorte qu'ils étaient bien fondés à les refuser.

Pour établir cette critique, ils versent aux débats un rapport d'expertise amiable dressé le 3 septembre 2019 qui relate que le 26 juillet 2018 de nombreuses non-conformités affectant les travaux en cours ont été relevées.

Or, d'une part, il ressort de la lecture de ce document que l'expert amiable n'a opéré aucun constat personnel le 26 juillet 2018, puisqu'il s'est rendu sur site uniquement le 5 septembre 2018, les éléments de juillet 2018 qu'il évoque résultant uniquement des photographies qui auraient été prises par M. et Mme [W] et sur lesquelles il a apporté une analyse. Cette façon de procéder n'a aucune valeur technique sérieuse ni a fortiori probatoire.

D'autre part, quand bien même ces constatations auraient été confirmées lors d'une réunion d'expertise amiable en présence d'un représentant de la société Dple le 5 septembre 2018, ainsi que l'a justement rappelé le premier juge, cette expertise amiable non corroborée par d'autres éléments objectifs n'a aucune valeur probante.

Enfin, et en tout état de cause, il y a lieu de faire observer que les éléments contenus dans cette expertise ne rapportent ni la preuve d'un retard dans l'exécution des travaux, puisqu'il est au contraire constaté que la maçonnerie est à l'état d'achèvement avant pose de la charpente, ni la preuve de l'existence de malfaçons qui n'auraient été résolues ou levées que le 20 février 2019, date du règlement.

Aussi, ce retard de paiement est fautif et imputable aux seuls M. et Mme [W].

- situation de travaux n°3 du 9 juillet 2018 réclamant 20 % du prix du marché augmenté à la somme de 163 097 euros selon avenant du 5 octobre 2017, pour 'mise hors d'eau', soit 32 619 euros.

Malgré plusieurs relances par lettre recommandée avec accusé de réception et lettre simple, cette somme n'a été réglée que le 1er avril 2019.

M. et Mme [W] faisant valoir une argumentation identique à celle invoquée pour la situation de travaux n°2, à l'instar des motifs adoptés précédemment, il y a lieu de considérer que leurs moyens de défense sont inopérants.

- situation de travaux n°4 du 30 novembre 2018 réclamant 15 % du prix du marché fixé à 163 097 euros pour 'achèvement des cloisons et mise hors d'air', soit

26 100 euros.

Malgré plusieurs relances par lettre recommandée avec accusé de réception et lettre simple, cette somme n'a été réglée que le 29 avril 2019.

Comme pour l'appel de fond n°1, M. et Mme [W] confondent notification de la situation de travaux et notification de la mise en demeure d'avoir à respecter le délai de quinze jours contractuellement fixé pour procéder au paiement de l'appel de fond. Il s'en suit qu'ils ne peuvent valablement soutenir n'avoir reçu cet appel de fond que le 21 avril 2019 et avoir parfaitement respecté leurs obligations en procédant au paiement le 29 avril 2019. Le retard de paiement est donc incontestable.

- situation de travaux n°5 du 8 juillet 2019 réclamant 20 % du prix du marché fixé à 165 277 euros pour prendre en compte l'avenant du 29 août 2018, pour 'achèvement des travaux d'équipement', soit la somme de 33 055 euros.

M. et Mme [W] ont procédé, le 29 juillet 2019, au paiement de la somme de

13 828,59 euros se pensant bien fondés à opérer une compensation avec les pénalités de retard qu'ils estimaient dues par le constructeur pour non respect du délai de livraison, soit la somme de 19 226,41 euros correspondant à 349 jours de retard.

Sur le délai contractuel de construction, il était fixé par les conditions particulières du contrat conclu le 4 novembre 2016, à neuf mois. Toutefois, par avenant du même jour, il a été allongé et fixé à 12 mois à compter de la déclaration d'ouverture de chantier. C'est en vain que les époux [W] soutiennent qu'ils se seraient valablement rétractés de leur accord donné à cet avenant par courrier du 25 juillet 2019 au motif qu'en l'absence de notification régulière par lettre recommandée avec accusé de réception, le délai de rétractation n'avait pas commencé à courir. En effet, l'instrumentum matérialisant cet avenant est daté manuscritement et signé par les époux [W] ce qui est suffisant pour établir qu'il leur a été notifié et qu'il l'ont accepté le 4 novembre 2016.

Le délai contractuel de construction de la maison d'habitation était donc de 12 mois et non 9 mois comme avancé par les appelants.

L'ouverture de chantier étant datée au 9 novembre 2017, la réception de l'ouvrage aurait dû intervenir au plus tard le 9 novembre 2018. Or, il est constant que M. et Mme [W] ont procédé à cette réception seulement le 24 juillet 2019, soit avec

257 jours de retard .

Toutefois, eu égard aux motifs adoptés précédemment, c'est à juste titre que la société Dple fait valoir que ce retard ne trouve pas sa cause dans un manquement de sa part, mais dans les retards de paiement des appels de fonds fautifs de M. et Mme [W], qui, pour les situations 1 à 4, cumulent un nombre de 473 jours de retard, soit 15 mois et 16 jours.

À ce titre, l'absence de notification officielle de l'interruption du chantier importe peu, cette condition n'étant pas exigée par l'article 3-5 des conditions générales contractuelles sus-rappelées.

Dans la mesure où ce retard non seulement ouvre le droit au constructeur d'interrompre le chantier mais lui permet également de se prévaloir de ce retard pour proroger le délai de livraison, conformément aux dispositions contractuelles sus-visées de l'article 2-6 des conditions générales, il y a lieu de considérer que la réception de l'ouvrage n'est pas tardive, puisque en application de ces 473 jours de retard de paiement imputables à M. et Mme [W], la société Dple avait jusqu'au 25 février 2020 pour achever l'immeuble.

C'est donc à tort que M. et Mme [W] se sont crus autorisés à imputer sur le paiement de cette situation de travaux la somme de 19 226,41 euros. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- situation de travaux n°6 du 10 juillet 2019 réclamant les 5 % dû à la réception de l'ouvrage, soit la somme de 8 234 euros.

Cette somme a été consignée au titre de l'exécution de l'ordonnance de référé du 17 juin 2020, la société Dple n'ayant pas réclamé devant le juge du fond son paiement.

Enfin, s'agissant de la demande en paiement des intérêts de retard dus en vertu de l'article 3-5 des conditions générales sus-rappelées, en l'absence de critiques sur le calcul opéré, qui au demeurant, à l'examen de la pièce n°31 de la société Dple, apparaît parfaitement conforme aux prévisions contractuelles, et au vu des motifs adoptés précédemment rendant inopérants les moyens de défense de M. et Mme [W], il convient également de confirmer la condamnation prononcée par le premier juge sur ce point.

Sur les demandes reconventionnelles en paiement de M. et Mme [W] à l'égard de la Sas Dple

- Sur les pénalités de retard

M. et Mme [W] soutiennent qu'alors qu'il était contractuellement convenu qu'ils puissent vivre dans leur maison d'habitation au plus tard le 9 août 2018, soit 9 mois après l'ouverture du chantier, ils n'ont pu y emménager que le 1er janvier 2020, soit avec un retard de 510 jours, précisant que si l'ouvrage a été réceptionné le 24 juillet 2019, il n'était pas habitable, de sorte que les pénalités de retard ont continué à courir.

Il convient de rappeler les dispositions de l'article 2-6 des conditions générales du contrat sus-citées qui sont conformes aux règles du code de la construction et de l'habitation.

Aux termes de cet article, 'les travaux commenceront dans le délai fixé aux conditions particulières à compter de la réalisation des conditions suspensives et formalités définies à l'article précédent.

La durée de construction à compter du commencement des travaux sera celle fixée aux conditions particulières.

Le délai de construction et la date de fin du délai contractuel de construction seront prorogés:

- de la durée des interruptions de chantier imputables au maître de l'ouvrage, notamment celles provoquées par des retards de paiement,

- en cas de modifications demandées par le maître de l'ouvrage, notamment par voie d'avenants ou imposées par l'administration,

- de la durée des travaux dont le maître de l'ouvrage s'est réservé l'exécution ainsi que des retards apportés dans leur exécution,

- de la durée des interruptions pour cas de force majeure ou cas fortuits,

- de la durée des intempéries définies à l'article L. 5424-8 du code du travail pendant lesquelles le travail est arrêté, signalées par lettre recommandée avec accusé de réception au maître de l'ouvrage ou par lettre remise en main propre contre décharge.

En cas de retard dans la livraison, le constructeur devra au maître de l'ouvrage une indemnité égale à 1/3000ème du prix convenu fixé au contrat par jour de retard.'

C'est à juste titre que M. et Mme [W] font observer que la réception intervenue le 24 juillet 2019 n'est pas assimilable à la livraison et qu'il en résulte notamment que les pénalités de retard qui ont pour objet de sanctionner le non-respect par le constructeur de la date contractuellement fixée pour la livraison peuvent être dues jusqu'à la levée des seules réserves qui interdisent la prise de possession des lieux par le maître de l'ouvrage.

Toutefois, il résulte des motifs adoptés précédemment que le délai d'achèvement a été valablement prorogé, du fait des retards de paiement injustifiés de M. et Mme [W], jusqu'au 25 février 2020. Dès lors, quand bien même il conviendrait de retenir cette date du 1er janvier 2020 alléguée par les appelants, force est de constater qu'aucun retard ne peut être constaté.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Mme [W] de cette prétention.

- Sur les irrégularités de prix

M. et Mme [W] réclament, à ce titre, le paiement d'une somme totale de

28 726,04 euros dans le dispositif de leurs conclusions et décomposent leurs prétentions dans le corps de leurs écritures comme suit :

- 13 830 euros au titre des revêtements muraux et de sol,

- 1 500 euros au titre de la sous-toiture,

- 4 000,25 euros au titre du remboursement des branchements réseaux,

- 25 749,04 euros au titre du remboursement du coût des travaux extérieurs,

- 797 euros au titre de l'avenant n°5 irrégulier quant à la facturation des équipements électriques,

- 2 180 euros au titre de l'avenant n°6 irrégulier.

Ils présentent également des critiques sur le coût de l'enlèvement des terres et la consommation de fluides pendant les travaux mais ne formulent aucune demande chiffrée à ce titre, de sorte qu'il n'y pas lieu de statuer, la cour n'étant pas saisie de prétentions au sens des articles 4 et 5 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable au litige, le contrat visé à l'article L. 231-1 doit comporter notamment les énonciations suivantes :

c) La consistance et les caractéristiques techniques du bâtiment à construire comportant :

- tous les travaux d'adaptation au sol, notamment, le cas échéant, ceux rendus nécessaires par l'étude géotechnique mentionnée aux articles L. 112-22 et L. 112-23 du présent code, dont une copie est annexée au contrat ;

- les raccordements aux réseaux divers ;

- tous les travaux d'équipement intérieur ou extérieur indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble ;

d) Le coût du bâtiment à construire, égal à la somme du prix convenu et, s'il y a lieu, du coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution en précisant :

- d'une part, le prix convenu qui est forfaitaire et définitif, sous réserve, s'il y a lieu, de sa révision dans les conditions et limites convenues conformément à l'article

L. 231-11, et qui comporte la rémunération de tout ce qui est à la charge du constructeur, y compris le coût de la garantie de livraison ;

- d'autre part, le coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution, ceux-ci étant décrits et chiffrés par le constructeur et faisant l'objet, de la part du maître de l'ouvrage, d'une clause manuscrite spécifique et paraphée par laquelle il en accepte le coût et la charge.

L'article R 231-4 du même code précise que :

I.-Est aussi annexée au contrat visé à l'article L. 231-2 une notice descriptive conforme à un modèle type agréé par arrêté du ministre chargé de la construction et de l'habitation indiquant les caractéristiques techniques tant de l'immeuble lui-même que des travaux d'équipement intérieur ou extérieur qui sont indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble.

II.-Cette notice fait la distinction prévue à l'article L. 231-2 (d) entre ces éléments selon que ceux-ci sont ou non compris dans le prix convenu. Elle indique le coût de ceux desdits éléments dont le coût n'est pas compris dans le prix.

La notice mentionne les raccordements de l'immeuble à l'égout et aux distributions assurées par les services publics, notamment aux distributions d'eau, de gaz, d'électricité ou de chauffage, en distinguant ceux qui sont inclus dans le prix et, s'il y a lieu, ceux dont le coût reste à la charge du maître de l'ouvrage.

La notice doit porter, de la main du maître de l'ouvrage, une mention signée par laquelle celui-ci précise et accepte le coût des travaux à sa charge qui ne sont pas compris dans le prix convenu.

Il résulte de l'application combinée de ces dispositions que tous les travaux prévus par le contrat de construction doivent être chiffrés, même si le maître de l'ouvrage s'en réserve l'exécution et même s'ils ne sont pas indispensables à l'implantation de la maison ou à son utilisation.

Le maître de l'ouvrage peut demander, à titre de réparation, que le coût des travaux prévus au contrat non chiffrés et le coût supplémentaire de ceux chiffrés de manière non réaliste soient mis à la charge du constructeur.

En l'espèce, il convient de relever que les conditions particulières du contrat stipulent que le coût Ttc de la construction est fixé à 171 800 euros, le coût des travaux à la charge du maître de l'ouvrage s'élevant à 11 000 euros et précisent que ces travaux sont décrits et chiffrés dans la notice annexée au présent contrat qui comporte une mention manuscrite et signé du maître de l'ouvrage pour en accepter le coût et la charge.

Sur les revêtements muraux et de sol, l'annexe au contrat de construction de maison individuelle, en sa page 13, contient une information sur les travaux non compris dans le prix convenu rédigée en ces termes :

'Travaux réservés acceptés sans conditions :

Revêtement intérieurs concernant les sols, murs et plafonds (peinture, papiers peint et textiles muraux, faïences, carrelage, moquette etc...) à l'exclusion de la fourniture et pose de 'carrelages scellés' sur dalle chauffante.

Travaux réservés tolérés sous conditions:

conformément à l'annexe 1 du référentiel technique de la marque NF 294 en vigueur, le constructeur peut éventuellement tolérer d'autres travaux à l'exclusion de tous travaux participant à la solidité et à la stabilité de la maison. Ces travaux nécessitent la mise en oeuvre d'action spécifiques développées dans le Référentiel technique de la norme NF Habitat.'

La mention manuscrite exigée par les dispositions du code de la construction et de l'habitation sus-visée portée en page 35 de la notice descriptive contient la même information, M. [W] ou Mme [W] ayant reconnu 'que les travaux non compris dans le prix convenu et qui s'élèvent à la somme de 11 000 euros restent à ma charge. J'ai bien noté qu'il me fallait ajouter à ce montant les coûts des branchements concessionnaires, des revêtements de sols/murs/peinture non compris dans le prix convenu'.

Au vu de ces éléments, il établi de manière certaine que les parties avaient convenu que ces travaux de revêtement sols/muraux/peinture étaient exclus du champs contractuel, les indications données en page 30 de la notice descriptive utilisées par M. et Mme [W] n'étant pas contradictoires puisqu'il apparaît clairement qu'il s'agit de travaux optionnels inclus dans le prix convenu à la charge du construction si et seulement les maîtres de l'ouvrage ont retenu cette option, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

En revanche, c'est à juste titre que les appelants rappellent que la notice type visée par les dispositions réglementaires contient une rubrique qui visent ces travaux.

Aussi, quand bien même il s'agit de travaux exclus du champ contractuel, s'agissant d'éléments indispensables à l'utilisation de l'immeuble d'habitation, ils doivent être chiffrés.

En l'espèce, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [W], cette obligation a été respectée par le constructeur, puisqu'en page 30 de la notice descriptive, il est indiqué le montant chiffré du coût de ces travaux de revêtement sols/muraux/peinture.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que les prescriptions légales étaient respectées et a rejeté la demande

de M. et Mme [W] à ce titre.

Le raisonnement est analogue pour la sous-toiture et les branchements et raccordements aux réseaux.

En effet, la notice descriptive en sa page 32, confirmée par la mention manuscrite sus-citée, établit qu'il s'agit d'éléments qui sont exclus du champ contractuel. Toutefois, eu égard à leur caractère d'éléments indispensables à l'utilisation de l'immeuble, cette même notice précise expressément à la fois le coût des raccordements réseaux privés extérieurs qui demeurent à la charge des clients et qui sont inclus dans le contrat, mais aussi l'évaluation du coût des travaux de raccordement des réseaux du domaine public qui sont exclus du champ contractuel.

Quant à la sous-toiture qui n'est aucunement un élément d'habitabilité indispensable, la notice descriptive prévoit expressément et clairement qu'il s'agit d'un élément optionnel qui n'a pas été choisi par les maîtres de l'ouvrage. En tout état de cause, il convient de relever qu'à titre informatif, un coût de l'ordre de 2 200 euros est précisé, ce qui est, au demeurant, bien supérieur au coût de 1 500 euros qui a été facturé à

M. et Mme [W] au titre de l'avenant pour travaux supplémentaires du 5 octobre 2017 qu'ils ont sollicité et accepté, de sorte qu'ils ont été parfaitement informés.

Concernant l'avenant n°5 du 5 octobre 2017, celui-ci facture, 'à la demande du client', les travaux supplémentaires suivants : fourniture et pose de 2 prises TV chambre 3 et 4, fourniture et pose d'une prise extérieure, allumage extérieur avec point lumineux, 3 points lumineux extérieurs, fourniture et pose d'un lave main, fourniture et pose d'une sous-toiture. Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [W], il ne s'agit aucunement de travaux indispensables à l'habitabilité de l'immeuble, de sorte qu'ils n'avaient pas à être prévus par le constructeur dans le contrat initial.

Quant à l'avenant n°6, c'est en vain que M. et Mme [W] entendent se prévaloir de l'absence de notification régulière de ce document leur ouvrant la possibilité de se rétracter valablement, ainsi qu'ils ont tenté de le faire dans leur courrier du 25 juillet 2019. En effet, ce document porte leur mention manuscrite aux termes de laquelle ils ont donné leur accord le 1er septembre 2018 avec leur signature. Ces éléments valent notification régulière du document à ladite date, de sorte que leur rétractation dix mois plus tard, après la réception de l'ouvrage est inopérante.

Enfin, sur les aménagements extérieurs, il est incontestable, ainsi que l'a retenu le premier juge, que les plans dressés pour l'établissement du permis de construire ont une valeur contractuelle, puisqu'il s'agit d'un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans.

Or, ces plans matérialisent la présence de plantations, d'une clôture, la création d'un chemin d'accès pour voiture et des places de stationnement.

Aussi, même s'il ne s'agit pas d'éléments indispensables à l'implantation de la maison ou à son utilisation, à partir du moment où ils sont entrés dans le champ contractuel, tous ces travaux prévus par le contrat de construction auraient être chiffrés, peu important, par ailleurs, que ces plans mentionnent expressément en gras et en rouge que demeurent à la charge des clients : l'évacuation des terres et déssouchage, les branchements et raccordements aux différents réseaux, le traitement des eaux pluviales, la création de l'accès, les clôtures et plantations.

M. et Mme [W] sollicitent à ce titre que la société Dple prenne à sa charge les frais qu'ils ont exposés pour la création du chemin, soit 2 500 euros et ceux exposés pour l'édification de la clôture, soit 3 093,44 euros, étant précisé que la somme totale visée dans les écritures de 23 963,69 euros n'est aucunement explicitée.

En l'absence de productions de factures, ni d'aucun autre élément de preuve permettant d'établir qu'ils ont engagés les frais qu'ils réclament à ce titre, il convient, par arrêt confirmatif, de rejeter leur demande.

- Sur les réserves

Aux termes de l'article 1792-6 du code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception. Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné.

En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant. L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement. La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage.

L'article L. 231-8 du code de la construction et de l'habitation dispose que le maître de l'ouvrage peut, par lettre recommandée avec accusé de réception dans les huit jours qui suivent la remise des clefs consécutive à la réception, dénoncer les vices apparents qu'il n'avait pas signalés lors de la réception afin qu'il y soit remédié dans le cadre de l'exécution du contrat. La disposition prévue à l'alinéa précédent ne s'applique pas quand le maître de l'ouvrage se fait assister, lors de la réception, par un professionnel habilité en application de la loi n°77-2 du 3 janvier 1977 précitée ou des articles L. 111-23 et suivants ou par tout autre professionnel de la construction titulaire d'un contrat d'assurance couvrant les responsabilités pour ce type de mission.

Compte tenu du caractère non contradictoire des réserves émises dans les conditions de l'article L. 231-8 sus-visé, il revient au maître de l'ouvrage de rapporter la preuve de leur existence. En revanche, la charge de la preuve de la levée des réserves pèse sur le constructeur.

En l'espèce, M. et Mme [W] versent aux débat un procès-verbal de réception de l'ouvrage qu'ils ont établi unilatéralement le 24 juillet 2019. Aux termes de ce document, M. et Mme [W] ont fait les réserves suivantes :

- fissure sur l'avant au niveau du crépi de la chambre parentale,

- couvertines non conforme au plan,

- absence de rembardes de sécurité sur toit terrasse accessible,

- aucun raccordement de la pompe à chaleur,

- non raccordement en eau et électricité,

- une poignée cassé dans la chambre parentale sur la baie vitrée,

- traces indéterminées sur le placo sur chambre arrière du rez-de-chaussée,

- absence de la dalle sur plot du toit accessible.

Certes, ce document n'est pas signé par la société Dple. Toutefois, il est constant que c'est le constructeur qui a organisé cette réception, de sorte qu'il y était nécessairement valablement convoqué.

Or, ce critère est suffisant pour valider le caractère contradictoire de la réception, et ce d'autant qu'en l'espèce, il est établi par les mentions du constat d'huissier de justice dressé concomitamment à la demande de M. et Mme [W] que M. [C], conducteur de travaux de la société Dple, était présent mais qu'il a refusé de signer le procès-verbal de réserves.

De surcroît, il convient de prendre en considération le caractère atténué de l'exigence de contradictoire dans le cadre des contrats de construction de maison individuelle, au regard des dispositions de l'article L. 231-8 sus-visées qui permettent à l'acquéreur de formuler des réserves de manière unilatérale par lettre recommandée avec accusé de réception.

Enfin, si le constat d'huissier mentionne des éléments qui ne sont pas contenus dans le procès verbal de réception, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les tenir pour réserves faites par M. et Mme [W], en revanche, les photographies présentes à ce constat pour illustrer celles qu'ils ont décidé de retenir sont un élément supplémentaire de preuve.

C'est donc à tort que le premier juge a considéré que la preuve des réserves mentionnées dans ce document n'était pas rapportée et que ces réserves étaient inopposables au constructeur faute de contradictoire.

Par courriers recommandés déposés pour l'un le 30 juillet 2019 réceptionné le 31 juillet 2019 par la société Dple et pour l'autre le 1er août 2019 réceptionné le 2 août 2019 par la société Dple, M. et Mme [W], conformément à l'application de l'article L. 231-8 du code de la construction et de l'habitation sus-cité, avec l'aide de leur expert amiable intervenu sur site le 25 juillet 2019, ont signalé 80 réserves supplémentaires.

Ils reconnaissent que la plupart de ces réserves ont été levées à l'exception des réserves suivantes qu'il convient d'examiner.

Sur les couvertines, M. et Mme [W] reprochent à l'ouvrage de présenter des couvertines en tôle de couleur gris anthracite à la place de couvertines en aluminium de couleur noire sur l'ensemble de la maison.

Il n'y a pas lieu de retenir ce désordre, puisqu'aucune stipulation contractuelle ne précise cet élément, seule la couleur de la toiture et des menuiseries extérieures est indiquée dans les conditions particulières de la notice descriptive. Au demeurant,

M. et Mme [W] ne précisent aucunement sur quel élément contractuel ils fondent cette demande.

Le raisonnement est identique pour les réserves n°67 et 68 concernant l'absence de volet, de garde-corps et de verre sécurité concernant la fenêtre de la cage d'escalier et de la salle de bain, faute pour M. et Mme [W] d'établir que ces éléments étaient des prestations incluses dans le contrat de construction.

Sur le 'dysfonctionnement de la pompe à chaleur', M. et Mme [W] reprochent à cet équipement d'avoir un boîtier de commande situé dans le séjour par erreur (affichage d'un message 'error') et sur la pompe à chaleur, la manomètre indique une pression de 1 bar au lieu de 2/2, 5 bars pour un fonctionnement normal.

Il convient de relever que même si cette critique était avérée, ce qui n'est pas établi, elle ne correspond, en tout état de cause, pas aux réserves de réception, qui mentionnaient uniquement une absence de raccordement de la pompe à chaleur. Il ne s'agit donc pas d'un désordre réservé à la réception relevant de la garantie du constructeur invoquée par les appelants.

De même, c'est en vain que M. et Mme [W] allèguent, au titre des désordres réservés, l'absence d'équipement dans les Wc du rez-de-chaussée qui ont hors d'état de fonctionnement, l'absence d'équipement raccordé dans la salle de bains de la chambre parentale située au rez-de-chaussée qui est hors d'état de fonctionnement et l'absence d'équipement de la salle de bain située à l'étage qui est hors d'état de fonctionnement.

En effet, il convient de relever que cette demande est fondée uniquement sur le courrier de réserves du 1er août 2019 qui vise pour sa réserve n°88 uniquement la mention suivante : 'SANITAIRE : absence' et alors qu'un huissier a dressé un constat le 24 juillet 2019 lors de la réunion organisée pour la réception de l'ouvrage, sur un constat d'huissier dressé quatre mois plus tard, le 21 novembre 2019. Au vu de ces éléments, la preuve n'est pas sérieusement rapportée que les réserves alléguées aujourd'hui correspondent à cette mention générique beaucoup trop vague 'SANITAIRE : Absence'. La demande à ce titre est infondée.

En revanche, sur l'absence de dalle sur plot au niveau du toit-terrasse et de l'absence de garde-corps, il ressort de la notice descriptive que M. et Mme [W] ont expressément signalé, dans les conditions particulières, qu'ils optaient pour une toiture terrasse accessible au dessus de la chambre n°2.

Or, la notice prévoit, pour cet élément optionnel, que sont notamment compris dans le prix convenu : la protection de l'étanchéité par dalles en gravillons lavés sur plots et la sécurité par gardes corps avec montants et lises en alu blanc et remplissage vitré.

La société Dple ne justifiant pas de la levée de cette réserve, cette demande est bien fondée.

Il en est de même pour la microfissure à reprendre sur la façade avant en allège de la fenêtre de la salle de bain côté droit, du porche en béton non enduit et non terminé, de la poignée de la baie vitrée de la pièce principale donnant côté pignon cassée, qui sont des réserves valablement dénoncées et établies par constat d'huissier pour lesquelles le constructeur est défaillant à rapporter la preuve qu'elles ont été levées.

En conséquence, par arrêt infirmatif, la société Dple sera condamnée à réaliser les travaux nécessaires à la reprise des réserves suivantes :

- absence de dalle sur plot au niveau du toit-terrasse et absence de garde-corps,

- microfissures à reprendre sur la façade avant en allège de la fenêtre de la salle de bain, côté droit,

- porche en béton non enduit et non terminé,

- poignée de la baie vitrée de la pièce principale donnant côté pignon cassée.

- Sur les dommages et intérêts

M. et Mme [W] sollicitent, en réparation de leur préjudice matériel et moral les sommes suivantes :

- 1 460 euros Ttc au titre des frais d'honoraires de l'expert amiable qu'ils ont dû mandater compte tenu des nombreux désordres affectant leur ouvrage en cours de construction,

- 1 125,28 euros Ttc au titre des frais d'huissier qui a constaté à plusieurs reprises la persistance des réserves affectant leur maison,

- 114, 53 euros Ttc au titre des frais de serrurier pour changer le barillet en raison du chantage aux clés du constructeur,

- 15 130 euros au titre des loyers engagés entre le mois d'août 2018, date de livraison contractuellement prévue et le 1er janvier 2020, date de leur emménagement dans leur maison,

- 5 000 euros chacun au titre du préjudice moral.

Il résulte des motifs adoptés précédemment qu'aucun faute ayant un lien de causalité avec les postes de préjudice alléguées par M. et Mme [W] n'est établie, étant précisé sur le refus de remise de clés qu'il ressort du constat d'huissier dressé le 24 juillet 2019 qu'il est consécutif au refus injustifié de M. et Mme [W] de payer, dans son intégralité, la situation de travaux n°5.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté ces demandes.

Sur la garantie de la Cgec et les demandes indemnitaires de M. et Mme [W] à son égard

L'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable au litige, dispose que

I.-La garantie de livraison prévue au k de l'article L. 231-2 couvre le maître de l'ouvrage, à compter de la date d'ouverture du chantier, contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat, à prix et délais convenus.

En cas de défaillance du constructeur, le garant prend à sa charge :

a) Le coût des dépassements du prix convenu dès lors qu'ils sont nécessaires à l'achèvement de la construction, la garantie apportée à ce titre pouvant être assortie d'une franchise n'excédant pas 5 % du prix convenu ;

b) Les conséquences du fait du constructeur ayant abouti à un paiement anticipé ou à un supplément de prix ;

c) Les pénalités forfaitaires prévues au contrat en cas de retard de livraison excédant trente jours, le montant et le seuil minimum de ces pénalités étant fixés par décret.

La garantie est constituée par une caution solidaire donnée par un établissement de crédit, une société de financement ou une entreprise d'assurance agréés à cet effet.

II.-Dans le cas où le garant constate que le délai de livraison n'est pas respecté ou que les travaux nécessaires à la levée des réserves formulées à la réception ne sont pas réalisés, il met en demeure sans délai le constructeur soit de livrer l'immeuble, soit d'exécuter les travaux. Le garant est tenu à la même obligation lorsqu'il est informé par le maître de l'ouvrage des faits susindiqués.

Quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse, le garant procède à l'exécution de ses obligations dans les conditions prévues au paragraphe III du présent article.

Au cas où, en cours d'exécution des travaux, le constructeur fait l'objet des procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire prévues par le code de commerce, le garant peut mettre en demeure l'administrateur de se prononcer sur l'exécution du contrat conformément à l'article L. 621-28 dudit code. A défaut de réponse dans le délai d'un mois et sans que ce délai puisse être prorogé pour quelque raison que ce soit, le garant procède à l'exécution de ses obligations. Il y procède également dans le cas où, malgré sa réponse positive, l'administrateur ne poursuit pas l'exécution du contrat dans les quinze jours qui suivent sa réponse.

III.-Dans les cas prévus au paragraphe II ci-dessus et faute pour le constructeur ou l'administrateur de procéder à l'achèvement de la construction, le garant doit désigner sous sa responsabilité la personne qui terminera les travaux.

Toutefois, et à condition que l'immeuble ait atteint le stade du hors d'eau, le garant peut proposer au maître de l'ouvrage de conclure lui-même des marchés de travaux avec des entreprises qui se chargeront de l'achèvement. Si le maître de l'ouvrage l'accepte, le garant verse directement aux entreprises les sommes dont il est redevable au titre du paragraphe I du présent article.

En cas de défaillance du constructeur, le garant est en droit d'exiger de percevoir directement les sommes correspondant aux travaux qu'il effectue ou fait effectuer dans les conditions prévues au e de l'article L. 231-2.

IV.-La garantie cesse lorsque la réception des travaux a été constatée par écrit et, le cas échéant, à l'expiration du délai de huit jours prévu à l'article L. 231-8 pour dénoncer les vices apparents ou, si des réserves ont été formulées, lorsque celles-ci ont été levées.

Conformément à l'application de cette disposition, la Cegc doit sa garantie au titre des réserves non levées. Le jugement sera infirmé en ce sens.

En revanche, bien que le garant puisse engager sa responsabilité délictuelle personnelle en cas de faute dans l'exécution de la garantie de livraison, il convient de relever qu'en l'espèce, M. et Mme [W] sont défaillants à rapporter l'existence d'une faute ayant un lien de causalité avec les préjudices matériels et moral qu'ils invoquent. En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté leurs demandes à ce titre.

Enfin, il convient de préciser qu'aucune condamnation en paiement n'étant prononcée contre la Cegc, il n'y a pas lieu de statuer sur ses demandes subsidiaires.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dispositions de première instance relatives aux dépens et frais irrépétibles seront infirmées.

Compte tenu des termes de la décision, il sera fait masse des dépens, M. [F] [W] et Mme [H] [X], son épouse, d'une part et la Sas Dple d'autre part, seront condamnés in solidum aux dépens, la répartition dans leur rapport entre eux étant de 70 % à la charge des appelants et de 30 % à la charge de l'intimée.

Les demandes formées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront écartées.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :

- débouté M. et Mme [W] de leur demande tendant à obtenir la condamnation la société Dple à réaliser les travaux nécessaires à la reprise des réserves suivantes :

. absence de dalle sur plot au niveau du toit-terrasse et absence de garde-corps,

. microfissures à reprendre sur la façade avant en allège de la fenêtre de la salle de bain, côté droit,

. porche en béton non enduit et non terminé,

. poignée de la baie vitrée de la pièce principale donnant côté pignon cassée ;

- débouté M. et Mme [W] de leur demande tendant à mobiliser la garantie de la Compagnie européenne de garanties et cautions pour la levée de ces réserves ;

- condamné solidairement M. et Mme [W] à payer à la société Dple la somme de

2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement M. et Mme [W] à payer à la Cegc la somme de

5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la Sas Dple à réaliser les travaux nécessaires à la reprise des réserves suivantes portant sur la maison d'habitation de M. [F] [W] et Mme [H] [X], son épouse située [Adresse 1] à [Localité 6] :

. absence de dalle sur plot au niveau du toit-terrasse et absence de garde-corps,

. microfissures à reprendre sur la façade avant en allège de la fenêtre de la salle de bain, côté droit,

. porche en béton non enduit et non terminé,

. poignée de la baie vitrée de la pièce principale donnant côté pignon cassée,

Dit que la Compagnie européenne de garanties et cautions doit sa garantie de livraison jusqu'à la levée de ces réserves,

Dit n'y avoir lieu de statuer sur les demandes subsidiaires de la Compagnie européenne de garanties et cautions,

Déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Fait masse des dépens et condamne in solidum M. [F] [W] et Mme [H] [X], son épouse d'une part, et la Sas Dple d'autre part, aux dépens, la répartition dans leur rapport entre eux étant de 70 % à la charge des appelants et de 30 % à la charge de l'intimée.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 22/02472
Date de la décision : 17/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-17;22.02472 ?
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