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10/04/2024 | FRANCE | N°24/00019

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 10 avril 2024, 24/00019


N° RG 24/00019 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JTHT





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



DU 10 AVRIL 2024











DÉCISION CONCERNÉE :



Décision rendue par le tribunal de commerce de Rouen en date du 18 décembre 2023







DEMANDERESSE :



SAS CONFORBAIE

Zone Industrielle

[Localité 3]



représentée par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de

DIEPPE











DÉFENDERESSE :



SAS MOOVSIT

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me David-Alexis MENNESSON, avocat au barreau de ROUEN













DÉBATS  :



En salle des référés, à l'audience publique du ...

N° RG 24/00019 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JTHT

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 10 AVRIL 2024

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le tribunal de commerce de Rouen en date du 18 décembre 2023

DEMANDERESSE :

SAS CONFORBAIE

Zone Industrielle

[Localité 3]

représentée par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE

DÉFENDERESSE :

SAS MOOVSIT

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me David-Alexis MENNESSON, avocat au barreau de ROUEN

DÉBATS  :

En salle des référés, à l'audience publique du 27 mars 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 avril 2024, devant Mme WITTRANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Mme CHEVALIER, greffier,

DÉCISION :

Contradictoire

Prononcée publiquement le 10 avril 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****

La Sas Conforbaie, fabricant de menuiseries PVC, a signé avec la Sas Moovsit, agence de communication, six contrats pour un montant de 110 550 euros pour une période de 12 mois. Cependant, elle n'a versé qu'une somme de 8 171,40 euros sur les premières factures d'un montant total de 22 559,40 euros. Par acte introductif d'instance du 2 février 2023, la Sas Moovsit a fait assigner sa cocontractante en paiement.

Par jugement du 18 décembre 2023, le tribunal de commerce de Rouen, a :

- condamné la Sas Conforbaie à régler à la Sas Moovsit la somme de 22 559 euros à parfaire des intérêts ultérieurs au taux contractuel, soit le taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points ;

- condamné la Sas Conforbaie à l'exécution forcée des devis n°BDC 2021.11-991, BDC 2021.10-994, BDC 2021.11-990, BDC 202202-00070, BDC 202203-00088 et BDC 202204-00146 dans un délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement ;

- débouté la Sas Moovsit de sa demande d'astreinte de 500 euros par jour de retard ;

- débouté la Sas Conforbaie de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné la Sas Conforbaie à payer à la Sas Moovsit la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens dont frais de greffe liquidés à la somme de 70,91 euros.

Par déclaration reçue au greffe le 26 janvier 2024, la Sas Conforbaie a formé appel de la décision.

Par assignation délivrée le 4 mars 2024 à la Sas Moovsit, la Sas Conforbaie demande au premier président de la cour d'appel de Rouen, au visa de l'article 514 du code de procédure civile, d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire et de statuer ce que de droit quant aux dépens.

Après avoir rappelé les termes de l'article 1217 du code civil, elle fait valoir qu'après plusieurs mois, elle n'a constaté aucune évolution positive qu'il s'agisse de ses revenus comme de sa notoriété dans son activité ; qu'elle n'a pu que constater les coûts engendrés par la prestation ; que les courriels de satisfaction du service commercial produits ne correspondent qu'au début de la relation établie et sont inopérants. Elle ajoute que les comptes rendus dus n'ont pas été remis et qu'ainsi, la Sas Moovsit n'a pas exécuté ses obligations contractuelles.

Elle soutient encore qu'elle n'est pas une professionnelle au sens du code de la consommation, qualité qui s'apprécie au cas par cas en fonction du contrat concerné et de la spécialité professionnelle de la personne et peut invoquer l'existence de clauses abusives au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation. En conséquence, la sas Moovsit ne peut soutenir valablement que la Sas Conforbaie n'a pas respecté ses obligations au visa de l'article 10 des conditions générales et réclamer la résiliation du contrat ainsi que le paiement de la somme de

102 628,60 euros.

La Sas Conforbaie discute de l'existence d'une clause pénale déguisée, l'absence de préjudice subi par la Sas Moovsit, de l'engagement irrévocable puisque les sommes totales du contrat sont exigées au visa de l'article 10 des conditions générales, du délai trop court de contestation des factures au visa de l'article 16 des conditions générales. Elle décrit ainsi des conditions d'exécution du contrat défavorables justifiant une réformation du jugement entrepris.

Au titre des conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire, elle fait valoir qu'elle est en plan de continuation, présente une santé financière fragile et que le paiement du montant des condamnations la mettrait en péril au point de provoquer l'ouverture d'une procédure collective.

Par conclusions reçues au greffe et notifiées le 21 mars 2024, la Sas Moovsit demande à Mme la première présidente de débouter la Sas Conforbaie de toutes ses demandes et de la condamner à lui régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Elle reprend le détail de sa créance et l'état des impayés du 7 décembre 2022 au 11 mai 2022. Elle conteste les allégations quant à l'absence de résultat lié à l'implantation du site de la société et aux prestations informatiques : elle fait état de l'existence d'une obligation de moyens quant au succès financier de ses prestations, de la succession de contrats entre décembre 2021 et mars 2022, des courriels de satisfaction. Elle ajoute que des comptes-rendus ont été transmis à la cliente et que les livrables ont bien été remis à la Sas Conforbaie.

Elle relève que la Sas Conforbaie a agi dans le cadre de son activité commerciale et ne peut prétendre être non-professionnelle au sens du code de la consommation. Elle rejette toute notion de déséquilibre significatif entre les parties.

En reprenant les disponibilités financières telles qu'elles apparaissent dans les pièces adverses soit 125 474 euros, elle constate que la Sas Conforbaie peut payer la créance et ne serait pas en péril de sorte que les conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire invoquée ne sont pas démontrées.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 27 mars 2023.

MOTIFS

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conditions sont cumulatives.

La recevabilité de la demande n'est pas discutée, la Sas Conforbaie ayant sollicité en première instance que l'exécution provisoire de la décision soit écartée.

S'agissant des conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire du jugement critiqué, il convient de relever que :

- la Sas Conforbaie a bénéficié d'un jugement arrêtant un plan de redressement par jugement du tribunal de commerce de Dieppe du 26 décembre 2017 pour une durée de huit ans soit jusqu'en décembre 2025 ;

- la Sas Conforbaie n'a pas signé une seule convention litigieuse mais sic contrats émis les 3 décembre 2021, 24 mars 2022, 3 avril 2022, 27 mai 2022 ;

- elle a reçu en conséquence des factures sur une période comprise entre décembre 2021 et mars 2022.

Le montant total de ses engagements s'élevait à la somme de 110 500 euros.

Les engagements n'ont dès lors pas été pris envers la créancière alors que le plan de continuation était récent et de façon précipitée au regard de l'étalement tant des contrats que des factures et supposaient de la part de la direction de l'entreprise la capacité d'honorer les paiements sur l'année d'exécution du contrat.

Elle ne produit pas ses comptes de résultat de l'année 2021 de sorte que la comparaison avec l'activité de l'année 2022 n'est pas possible mais il y a lieu de relever que :

- son chiffre d'affaires en 2022 était plus favorable qu'en 2023 (4 119 188 euros en 2023 contre 4 367 879 euros) ;

- ses charges étaient plus importantes en 2022 (4 625 315 euros) qu'en 2023 (4 140 173)

- ses pertes plus limitées cependant en 2023 (20 985 euros contre 247 436 euros en 2022).

Le résultat net de l'entreprise bien que négatif ne signifie pas pour une incapacité de la société à supporter le paiement, éventuellement échelonné de la dette, puisque le bilan fait apparaître en 2023 des disponibilités au titre des valeurs mobilières de 137 295 euros contre 125 474 euros en 2022.

Alors que la Sas Conforbaie devait s'assurer en 2022 du paiement des engagements qu'elle avaient successivement souscrits, elle ne démontre pas que l'exécution en 2024 du jugement exécutoire par provision à la hauteur de ces obligations emporterait des conséquences manifestement excessives au regard de ses résultats comptables et de ses disponibilités.

Elle verse enfin un commandement de payer délivré à la demande de l'Urssaf de Normandie le 25 janvier 2024 à hauteur de 115 623,68 euros qui ne vient pas au soutien de ses intérêts puisqu'au contraire, elle interroge sur le fonctionnement de la société qui malgré les disponibilités évoquées s'est abstenue à la lecture de ce document, elle se serait abstenue de payer en totalité des cotisations patronales depuis le dernier trimestre 2022 jusqu'à l'été 2023. La démarche est volontaire compte tenu des contraintes antérieurement délivrées. La société ne communique aucune pièce sur les diligences qu'elle a entreprises afin de traiter le contentieux avec l'Urssaf.

En conséquence, la première condition n'étant pas remplie au titre des conséquences manifestement abusives, la demande d'arrêt de l'exécution provisoire sera rejetée.

Sur les frais de procédure

La Sas Conforbaie supportera les dépens de l'instance et sera condamnée à payer à la Sas Moovsit la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,

Rejette la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formée par la Sas Conforbaie,

Condamne la Sas Conforbaie à payer à la Sas Moovsit la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Sas Conforbaie aux dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 24/00019
Date de la décision : 10/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-10;24.00019 ?
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