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13/03/2024 | FRANCE | N°23/00081

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 13 mars 2024, 23/00081


N° RG 23/00081 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JREA





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



DU 13 MARS 2024











DÉCISION CONCERNÉE :



Décision rendue par le juge de l'exécution de tribunal judiciaire d'Evreux en date du 17 octobre 2023





DEMANDERESSE :



SA LE LOGEMENT FAMILIAL DE L'EURE

[Adresse 2]

[Localité 1]



représentée par Me Delphine ABRY-LEMAITRE de la SCP HUBE

RT - ABRY LEMAITRE, avocat au barreau de l'Eure







DÉFENDERESSE :



Madame [E] [U]

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par Me Pauline COSSE de la SCP BARON COSSE ANDRE, avocat au barreau de l'Eure







D...

N° RG 23/00081 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JREA

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 13 MARS 2024

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le juge de l'exécution de tribunal judiciaire d'Evreux en date du 17 octobre 2023

DEMANDERESSE :

SA LE LOGEMENT FAMILIAL DE L'EURE

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Delphine ABRY-LEMAITRE de la SCP HUBERT - ABRY LEMAITRE, avocat au barreau de l'Eure

DÉFENDERESSE :

Madame [E] [U]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Pauline COSSE de la SCP BARON COSSE ANDRE, avocat au barreau de l'Eure

DÉBATS  :

En salle des référés, à l'audience publique du 28 février 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 mars 2024, devant Mme WITTRANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Mme CHEVALIER, greffier,

DÉCISION :

Contradictoire

Prononcée publiquement le 13 mars 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****

Par jugement du 27 janvier 2021, le juge compétent du tribunal judiciaire d'Evreux a suspendu les effets de la clause résolutoire contenu dans le bail consenti à Mme [E] [U] par la Sa Le logement familial de l'Eure, l'a condamnée à payer la somme de 7 038,83 euros au titre de l'arriéré à la bailleresse et accordé des délais de paiement avec déchéance du terme en cas de non-paiement du loyer courant ou de l'arriéré.

Par acte du 5 juin 2023, la Sa Le logement familial de l'Eure a fait pratiquer une saisie-attribution entre les mains de la Caisse d'épargne Normandie sur le compte de Mme [E] [U]. La saisie-attribution a été dénoncée à Mme [U] le 12 juin 2023. Cette dernière a saisi le juge de l'exécution pour la voir annuler et obtenir sa mainlevée

Par jugement réputé contradictoire du 17 octobre 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Evreux a :

- ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 5 juin 2023 par la Sa Le logement familial entre les mains de la Caisse d'épargne Normandie sur les comptes de Mme [E] [U],

- condamné la Sa Le logement familial de l'Eure à payer à Mme [E] [U] :

. la somme de 83,33 euros à titre de dommages et intérêts,

. la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sa Le logement familial aux dépens,

- rappelé que la décision était exécutoire de plein droit par provision.

Le juge a constaté que la saisie était intervenue durant la période pendant laquelle était en cours la suspension de l'exigibilité des créances depuis le 1er juillet 2021 pour une durée de deux ans, le juge des contentieux de la protection par décision du 22 juin 2021 ayant dit notamment que les mesures imposées par la Commission de surendettement le 13 novembre 2020 étaient définitives.

Par déclaration reçue au greffe le 9 novembre 2023, la Sa Le logement familial de l'Eure a formé appel de la décision.

Par assignation en référé délivrée le 20 décembre 2023 puis par conclusions notifiées le 22 février 2024, elle sollicite de la juridiction, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile puis de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution relatif au sursis à exécution, de l'article 521 du code de procédure civile, de :

- débouter Mme [U] de toutes ses demandes,

- arrêter l'exécution provisoire du jugement entrepris,

- l'autoriser le cas échéant, à consigner les fonds suffisants pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Eure,

- condamner Mme [U] à lui payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [U] aux dépens.

Elle rappelle essentiellement au titre des moyens sérieux de réformation de la décision du juge de l'exécution que la Commission de surendettement avait expressément prévu la caducité des mesures prises le 13 novembre 2020 'quinze jours après une mise en demeure, adressée par le créancier par lettre recommandée avec accusé de réception, restée infructueuse d'avoir à exécuter les obligations prévues par les mesures' ; qu'une mise en demeure a été adressée à Mme [U]

le 21 avril 2022 avec demande de paiement de la somme de 1 375,97 euros correspondant à une dette nouvelle, non comprise dans le plan et par la suspension d'exigibilité des créances ; que le plan est devenu caduc pour défaut de respect de ses obligations ; que la décision du juge de l'exécution devrait dès lors être infirmée.

Elle souligne que Mme [U] ne conteste pas la constitution postérieurement d'une dette nouvelle qu'elle reconnaît ne pas avoir payé ; que la caducité du plan est acquise quelle que soit la date de la mise en demeure, y compris après la date du terme ; que la saisie-attribution avait été fructueuse car Mme [U] venait de percevoir un héritage ; que l'exécution de la mainlevée de la mesure est de nature à compromettre le recouvrement de sa créance.

Elle rétorque à Mme [U] qui sollicite la radiation de l'affaire du rôle de la cour que l'article 524 du code de procédure civile n'est pas applicable aux décisions du juge de l'exécution et offre de consigner les fonds suffisants pour garantir sa créance.

Par conclusions notifiées le 27 février 2024, soutenues à l'audience, Mme [U] demande à la juridiction, au visa de l'article 524 du code de procédure civile, de :

- débouter la Sa Le logement familial de l'Eure de ses demandes,

- ordonner la radiation de l'affaire enregistrée devant la chambre de la proximité de notre cour sous le n°23/03708,

- condamner la Sa Le logement familial de l'Eure au paiement de la somme de

2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sa Le logement familial de l'Eure aux dépens.

Elle fait valoir que la Sa Le logement familial de l'Eure est de mauvaise foi lorsqu'elle indique ne pas avoir pu comparaître à l'audience du juge de l'exécution alors qu'elle l'avait déjà sollicitée préalablement sans obtenir de réponse ; qu'elle maintient sa proposition de paiement échelonné durant deux ans avec un premier versement de 1 000 euros.

Elle précise que des doutes affectent la remise de la lettre recommandée portant mise en demeure du 21 avril 2022 qu'elle n'a pas reçue ; que la somme due alors s'élevait à 1 375,97 euros et ne pouvait correspondre à des charges courantes s'agissant de sommes dues sur 10 mois ; qu'il n'existe en réalité aucun moyen sérieux de réformation ; que les conséquences supportées par le bailleur social ne sont pas un critère de la décision à intervenir.

Elle demande la radiation de l'affaire du rôle de la cour, aucune somme ne lui ayant été restituée ou versée en exécution de la décision critiquée. Elle s'oppose à la demande de consignation des fonds.

MOTIFS

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entrepris

L'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution dispose qu'en cas d'appel, un sursis à l'exécution des décisions prises par le juge de l'exécution peut être demandé au premier président de la cour d'appel. Jusqu'au jour du prononcé de l'ordonnance par le premier président, la demande de sursis à exécution suspend les poursuites si la décision attaquée n'a pas remis en cause leur continuation ;

elle proroge les effets attachés à la saisie et aux mesures conservatoires si la décision attaquée a ordonné la mainlevée de la mesure. Le sursis à exécution n'est accordé que s'il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour.

Selon l'article L. 733-16 du code de la consommation, les créanciers auxquels les mesures imposées par la commission en application des articles L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7 ou celles prises par le juge en application de l'article L. 733-13 sont opposables ne peuvent exercer des procédures d'exécution à l'encontre des biens du débiteur pendant la durée d'exécution de ces mesures.

Toutefois, par l'effet d'une inexécution, le plan devient de plein droit caduc en application d'une clause de caducité, le créancier recouvre son droit de poursuite individuel à la suite d'une mise en demeure infructueuse, fut-elle délivrée au débiteur après le terme du plan.

En l'espèce, Mme [U] a bénéficié :

- en premier lieu, de la suspension des effets de la clause résolutoire du bail d'habitation par jugement du juge des contentieux de la protection d'Evreux le 27 janvier 2021, la dette locative s'élevant à la somme de 7 038,83 euros arrêtée au 7 décembre 2020 avec échelonnement du paiement des sommes dues,

- en second lieu, d'une décision de recevabilité de sa demande de plan de surendettement du 20 août 2020, la dette déclarée s'élevant alors à 5 624,35 euros,

- puis de mesures proposées imposées par décision du 13 novembre 2020 et arrêtées par décision du 7 juillet 2021 comprenant avec un moratoire pour la dette de la Sa Le logement familial de l'Eure à hauteur de 6 104,26 euros durant 24 mois à compter du 31 août 2021,

chacun de ses documents rappelant l'obligation faite à la locataire, de payer le loyer courant, les charges selon le jugement prononcé.

Par jugement du 22 juin 2021, le juge chargé des contentieux de la protection a constaté le désistement de la Sa Le logement familal de sa contestation relative au moratoire accordé à Mme [U], dispensée de tout paiement pendant deux ans.

Par lettre recommandée du 21 avril 2022, la bailleresse a adressé à Mme [U] une mise en demeure d'avoir à payer la somme de 1 375,97 euros correspondant à la dette non comprise dans le plan sous peine de voir le plan accordé anéanti avec annonce de la poursuite de procédure judiciaire.

Le pli a été présenté mais 'non réclamé'. La notification a pu prendre effet le 7 mai 2022.

Pour contester la validité de cette mise en demeure, Mme [U] verse aux débats une attestation et des quittances de M. [S] précisant qu'elle louait un appartement à [Localité 4] du 24 août 2021 au 30 novembre 2023. Elle ne justifie pas avoir avisé le créancier de son changement d'adresse, la mise en demeure adressée à la dernière adresse connue étant valable de principe. En outre, elle verse un contrat de travail du 8 janvier au 23 février 2024 portant l'adresse du Val d'Hazey, lieu de vie en début de procédure de surendettement qui ne correspond pas à l'adresse qu'elle donne, située à [Localité 4], depuis 2022.

Le décompte de la créance de la Sa Le logement familial de l'Eure fait apparaître un montant supérieur à la somme visée dans le plan de surendettement soit

7 985,72 euros.

La juridiction du fond examinera les conditions contestées de la caducité alléguée mais en l'état, la Sa Le logement familial de l'Eure justifie de moyens sérieux de réformation du jugement lui permettant de bénéficier d'un sursis à exécution.

Sa demande subsidiaire relative à la consignation des fonds et la demande de radiation de Mme [U] sont dès lors sans objet.

Sur les frais de procédure

La décision est prise dans l'intérêt exclusif de la Sa Le logement familial de l'Eure avant toute décision de la cour sur les mérites de la saisie-attribution. Elle gardera à sa charge les dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, alinéa 1er.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,

Ordonne le sursis à exécution du jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Evreux du 17 octobre 2023,

Dit en conséquence n'y avoir lieu à statuer sur la demande subsidiaire relative à la consignation des fonds par la Sa Le logement familial de l'Eure et sur la demande de radiation de Mme [U],

Déboute les parties de leur demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Sa Le logement familial de l'Eure aux dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 23/00081
Date de la décision : 13/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-13;23.00081 ?
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