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05/07/2023 | FRANCE | N°23/00035

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 05 juillet 2023, 23/00035


N° RG 23/00035 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLXU





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



DU 5 JUILLET 2023











DÉCISION CONCERNÉE :



Décision rendue par le tribunal judiciaire de Rouen en date du 21 novembre 2022





DEMANDEURS :



Monsieur [V] [I]

[Adresse 5]

[Localité 4]



représenté par Me Edouard POIROT-BOURDAIN de la SELARL HMP AVOCATS, avocat au barreau de Rouenr>




Madame [E] [W] épouse [I]

[Adresse 5]

[Localité 4]



représentée par Me Edouard POIROT-BOURDAIN de la SELARL HMP AVOCATS, avocat au barreau de Rouen







DÉFENDERESSE :



Madame [L] [Z]

[Adresse 1]

[Loca...

N° RG 23/00035 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLXU

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 5 JUILLET 2023

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le tribunal judiciaire de Rouen en date du 21 novembre 2022

DEMANDEURS :

Monsieur [V] [I]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représenté par Me Edouard POIROT-BOURDAIN de la SELARL HMP AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

Madame [E] [W] épouse [I]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Edouard POIROT-BOURDAIN de la SELARL HMP AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

DÉFENDERESSE :

Madame [L] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Fabrice LEGLOAHEC de la SELARL D'AVOCATS LEGLOAHEC LEGIGAN, avocat au barreau de Rouen

DÉBATS  :

En salle des référés, à l'audience publique du 14 juin 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 juillet 2023, devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier,

DÉCISION :

Contradictoire

Prononcée publiquement le 5 juillet 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****

Mme [L] [Z] est propriétaire d'une maison d'habitation sise [Adresse 1] à [Localité 7]. M. [V] [I] et Mme [E] [W], son épouse, sont propriétaires d'une parcelle sises [Adresse 5] qui jouxte la propriété de Mme [Z].

Par actes d'huissier du 29 juillet 2020, elle a fait assigner ses voisins afin d'obtenir différentes condamnations.

Par jugement contradictoire du 21 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Rouen a :

- ordonné à M. et Mme [I] d'arracher les trois sycomores leur appartenant situés entre les points A et B ainsi que tous les arbustes ne respectant pas les dispositions du code civil situés entre les points A et F, sous astreinte d'un montant de 15 euros par jour de retard courant passé un délai de un mois de la signification du présent jugement, durant soixante jours ;

- ordonné à M. et Mme [I] de démolir, à leurs frais, la clôture située entre les points E et F, sous astreinte d'un montant de 15 euros par jour de retard courant passé un délai de un mois de la signification du présent jugement, durant soixante jours ;

- ordonné à M. et Mme [I] d'élaguer à une hauteur de 2 mètres du peuplier (bouleau) situé en limite de propriété entre les points E et F, sous astreinte d'un montant de 15 euros par jour de retard courant passé un délai de un mois de la signification du présent jugement, durant soixante jours ;

- homologué le rapport d'expertise de M. [Y] [K], géomètre-expert ;

- ordonné le bornage de la propriété de Mme [L] [Z], parcelle cadastrée BV [Cadastre 3] sur la commune de [Localité 7] (76), avec la propriété de

M. et Mme [I] cadastrée BC [Cadastre 2] qui lui est contiguë selon les points A et F tels que définis au rapport d'expertise de M. [Y] [K], notamment en son plan en annexe 3 ;

- désigné M. [Y] [K] pour procéder à l'implantation des bornes et dresser le document d'arpentage ;

- ordonné, à la requête de la partie la plus diligente, la publication du présent jugement à la conservation des hypothèques de [Localité 6], jugement auquel seront annexés le rapport d'expertise et le document d'arpentage ;

- condamné M. et Mme [I] à payer à Mme [L] [Z] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

- condamné M. et Mme [I] à payer à Mme [L] [Z] la somme de 4 809,20 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toute demande plus ample et contraire

- dit n'y avoir lieu à suspension de l'exécution provisoire

- dit que les dépens, qui comprendront notamment les frais de la procédure de référé, de bornage, d'expertise et d'arpentage, ainsi que les frais de la présente procédure au fond, seront supportés par M. et Mme [I].

Par déclaration reçue au greffe le 10 janvier 2023, M. et Mme [I] ont formé appel de la décision.

Par assignation en référé délivrée le 17 mai 2023, ils demandent à la juridiction, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile, d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entrepris et de condamner Mme [Z] aux dépens.

Ils précisent qu'ils n'entendent pas maintenir leur appel en ce qui concerne les dispositions du jugement ayant ordonné le bornage et désigné M. [K] pour poser les bornes mais sollicitent l'infirmation du jugement pour le surplus ; que la demande de réformation du jugement porte sur la disposition qui a écarté l'exception de prescription trentenaire qu'ils invoquaient au titre des arbres et de la clôture.

S'agissant des plantations, il existe trois arbres, des érables sycomores, en limite de propriété, placés à moins de deux mètres de la limite et dont la hauteur excède deux mètres ; il faut pour l'acquisition de la prescription que l'implantation et la hauteur de plus de deux mètres soient établis depuis plus de trente ans. Ils soutiennent que le carottage pratiqué par un professionnel, le 6 février 2023, permet d'établir que ces arbres ont environ 46 ans et sont donc présents depuis un temps couvrant le délai de prescription. Cette évaluation est complétée par des attestations. Le moyen soulevé est dès lors sérieux.

S'agissant de la clôture, son sort est stable depuis cinquante ans comme le démontre le bornage, même s'il ne conteste pas l'existence d'un léger empiétement sur la propriété de Mme [Z].

Ils font valoir que l'arrachage des arbres et la destruction de la clôture emporterait des conséquences manifestement excessives voire irréversibles pour les érables.

Par conclusions notifiées le 7 juin 2023 soutenues à l'audience, Mme [L] [Z] demande à la juridiction, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile, de :

- débouter M. et Mme [I] de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

- condamner in solidum M. et Mme [I] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- débouter M. et Mme [I] de leurs demandes plus amples et contraires.

Elle soutient que les conditions d'arrêt de l'exécution provisoire ne sont pas remplies :

- à titre liminaire, l'action entreprise n'a pas d'intérêt puisque l'astreinte ne court qu'aux termes des 60 jours fixés par le tribunal et qu'elle ne dispose pas des moyens lui permettant l'exécution à ses frais avancés de la décision ;

- elle se réfère au rapport de l'expert judiciaire ayant procédé aux mesures de sa propriété pour fixer la limite séparative et mettre en évidence à la fois l'empiétement de la clôture et les conditions de l'implantation non conforme des arbres.

Elle développe amplement le débat au fond sur les limites séparatives des fonds pour contester l'existence d'arbres désormais protégés par la prescription et obtenir la destruction de la clôture localisée sur son terrain. Il est renvoyé sur ces développements aux conclusions notifiées.

Elle fait valoir que M. et Mme [I] n'ont pas fait d'observation sur l'exécution provisoire en première instance et que dès lors, les conséquences manifestement excessives encourues devant être démontrées par les demandeurs sont exclusivement celles qui se sont révélées postérieurement à la décision critiquée.

En l'absence de circonstances nouvelles, M. et Mme [I] seront déboutés.

Elle défend enfin sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive : elle rappelle les délais de procédure, les négociations intervenues dans le cadre de l'exécution du jugement quant aux délais de paiement recherchés pour souligner la mauvaise foi des demandeurs qui l'ont contrainte à engager des frais pour faire face à la présente procédure.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 14 juin 2023.

MOTIFS

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire

Selon l'article 514-3 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Bien que sollicitant le débouté de la demande et non son irrecevabilité, Mme [Z] rappelle expressément, à juste titre, la disposition de l'alinéa 2 de ce texte exigeant de la part des demandeurs la démonstration de faits postérieurs à la décision critiquée constituant un risque de conséquences manifestement excessives puisqu'aucune observation n'a été formulée par M. et Mme [I] en première instance. Ce dernier point n'est pas contesté et est confirmé par la lecture du jugement entrepris en cause d'appel. L'analyse du texte a été soumise contradictoirement aux parties.

En l'espèce, dès l'assignation délivrée à la demande de Mme [Z] le 29 juillet 2020, les termes du débat et les conséquences attendues du jugement étaient déterminés. M. et Mme [I] ne justifient pas de faits révélés après le prononcé de la décision.

Les obligations de faire imposées à M. et Mme [I] dans le dispositif du jugement ne sont pas convertibles en autorisation pour la créancière de se substituer aux débiteurs pour effectuer ou faire effectuer les travaux d'arrachage et élagage des arbres, de démolition de la clôture litigieuse.

L'astreinte prononcée n'a couru que durant 60 jours après la signification du jugement, le 9 décembre 2022, de sorte que le retard dans l'exécution de la décision est sans incidence financière immédiate.

L'absence d'actions conduites par M. et Mme [I] ne leur fait encourir aucun risque immédiat en raison de l'exécution provisoire du jugement dans l'attente de la décision de la cour.

Faute de preuve de conséquences manifestations postérieures, et pour appliquer l'exacte qualification au moyen et prétention soulevés, leur demande est irrecevable.

Sur la demande pour procédure abusive

Selon l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de

10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Si M. et Mme [I] ont insuffisamment rapporté les éléments utiles aux débats, leur mauvaise foi n'est pas caractérisée. Mme [Z] n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct de celui qui relève des frais de procédure ci-dessous examinés. Elle sera déboutée de cette prétention à des dommages et intérêts.

Sur les frais de procédure

M. et Mme [I] succombent à l'instance et en supporteront solidairement les dépens.

Ils seront condamnés solidairement à payer à Mme [Z] la somme de

2 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,

Déclare irrecevable la demande de M. [V] [I] et Mme [E] [W], son épouse, en arrêt partiel de l'exécution provisoire du jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Rouen le 21 novembre 2022,

Condamne solidairement M. [V] [I] et Mme [E] [W], son épouse, à payer à Mme [L] [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties pour le surplus des demandes,

Condamne solidairement M. [V] [I] et Mme [E] [W], son épouse, aux dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 23/00035
Date de la décision : 05/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-05;23.00035 ?
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